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L’idée du non-linéaire

mercredi 25 juin 2008, par Robert Paris, Tiekoura Levi Hamed

La turbulence et les phénomènes non-linéaires

Site en anglais sur l’application de la dynamique non-linéaire en cardiologie

Phase-locking ou interaction entre rythmes auto-organisés

Qu’est-ce que la non-linéarité ?

Est non-linéaire un phénomène dans lequel la réaction est disproportionnée à l’action. Votre ami supporte vos sarcasmes, jusqu’au moment où il vous flanque un coup de poing. La loi semble dire que la réaction est proportionnée à l’action. Mais parfois l’action est retardée, freinée ou bloquée. Quand elle va passer un seuil, il y aura brutalement déblocage et la réaction peut être disproportionnée. Elle peut passer un cap de hiérarchie de structures.

Exemples de non-linéarités :

le soliton, également appelé "l’équation KdV". Il s’agit d’une onde solitaire qui, telle une ride à la surface de l’eau, peut voyager longtemps avant de se dégrader. Ce mascaret qui se forme notamment sur la Gironde en France (qu’on appelle bore sur la Severn en Angleterre, pororoca sur les affluents de l’Amazone au Brésil ou le Dragon Noir ou Argenté sur la Qiantang en Chine) se forme tant dans les cours d’eau à haut débit qu’en plein océan lorsque le rapport de la longueur d’onde sur la profondeur d’eau est approprié. C’est un effet qui se manifeste surtout durant les grandes marées. Nous pouvons également citer l’exemple des raz-de-marée ou des tsunamis. La description de ce type de phénomène est complexe car l’évolution d’ondes sinusoïdales de fréquences différentes crée des harmoniques, dont la crête résultante est complexe mathématiquement parlant. Mais celle-ci est temporaire car les perturbations du courant et d’autres facteurs finissent par la briser. Il doit donc exister une rétroaction sur les ondes sinusoïdales successives. Il s’agit de phénomènes non linéaires, où, passé un seuil critique les ondes sont en interactions les unes avec les autres.

Werner Heisenberg dans « Physique et philosophie » :

« L’équation définitive du mouvement de la matière sera probablement une équation ondulatoire non linéaire et quantifiée (…) »

Louis de Broglie, dans « Nouvelles perspectives en Microphysique »

« En 1927, je la considérais (l’onde pilote, dite « onde de Broglie ») comme une solution avec singularité des équations linéaires admises par la Mécanique ondulatoire pour l’onde Phi (onde dite « de probabilité de présence » par la physique quantique). Diverses considérations, et en particulier le rapprochement avec la théorie de la Relativité générale, m’ont fait penser que la véritable équation de propagation de l’onde de Broglie pourrait être non-linéaire comme celles que l’on rencontre dans la théorie de la gravitation d’Einstein, équation non-linéaire qui admettrait comme forme approximative l’équation linéaire de la Mécanique ondulatoire quand les valeurs de l’onde de Broglie seraient assez faibles. (…) Malheureusement ce changement de point de vue ne facilite pas la résolution des problèmes mathématiques qui se posent car, si l’étude des solutions à singularités des équations linéaires est souvent difficile, celle des solutions des équations non-linéaires est plus difficile encore. (…) Einstein a beaucoup insisté sur une propriété importante des équations non-linéaires. Si les équations d’un certain champ sont linéaires, on peut toujours trouver une solution à singularités de ces équations telle que la singularité ait un mouvement prescrit à l’avance. On pourra d’ailleurs ajouter à la solution à singularité une solution continue et cette adjonction n’aura aucune influence sur le mouvement de la singularité. Il n’en est plus du tout de même si les équations du champ sont non linéaires car on ne peut plus alors obtenir une solution en ajoutant plusieurs solutions : la non-linéarité crée une sorte de solidarité entre des solutions qui auraient été indépendantes si l’approximation linéaire avait été valable partout. Cette non linéarité explique que la singularité et l’onde de Broglie ne soient pas indépendantes comme elles le seraient s’il y avait linéarité et qu’elles restent en phase. (…) De plus, la non-linéarité, peu sensible dans le corps du train d’ondes, peut réapparaître sur leurs bords où les groupes de dérivées de l’onde de Broglie pourrait prendre de grandes valeurs ; il y a là aussi une circonstance qui peut s’opposer à l’étalement des trains d’ondes. Il apparaît donc qu’une théorie non linéaire des ondes de Broglie pourrait permettre d’obtenir des « groupes d’ondes sans étalement » représentant par exemple un corpuscule qui se déplacerait d’un mouvement rectiligne et uniforme sans perdre son onde (…) Nous avons vu que dans la théorie des ondes de Broglie, comme dans l’interprétation relativiste de la gravitation, la non-linéarité des équations de base doit jouer un rôle essentiel et seul pouvoir expliquer la solidarité de l’onde et du corpuscule. Nous sommes actuellement arrivés à l’image suivante. Un train d’ondes de Broglie, constituant un corpuscule au sens large du mot, serait une sorte d’unité étendue et organisée, un peu analogue à une « cellule » dans l’acception biologique du terme. Il comprendrait en effet essentiellement les trois parties suivantes : 1° une sorte de noyau, la région singulière, le corpuscule au sens étroit du mot, siège de phénomènes essentiellement non linéaires ; 2° une région environnante étendue, siège d’un phénomène sensiblement linéaire ; 3° une enveloppe constituant les bords des trains d’ondes où la non-linéarité jouerait peut-être à nouveau un rôle important. Or, ce me semble être l’intervention des phénomènes non linéaires qui donnerait à cette « cellule » son unité, sa solidarité et sa permanence.
S’il est vrai que la non-linéarité soit la véritable clef de la Microphysique corpusculaire, on comprend aisément pourquoi la Physique quantique actuelle n’est pas parvenue à écrire le dualisme onde-corpuscule et a dû se contenter d’une description uniquement statistique et probabiliste des phénomènes de l’échelle atomique. Prenant a priori pour base des équations linéaires et ne sortant pas du domaine de l’analyse linéaire, la théorie actuelle fait disparaître les accidents locaux dus à la non-linéarité (tels que les régions singulières et éventuellement les bords abrupts de trains d’ondes), elle efface ainsi les structures corpusculaires et, incapable de saisir la véritable relation entre onde et corpuscule, elle ne peut plus aboutir qu’à des images continues à caractère statistique. (…) L’onde continue (…) ne comportant aucune région singulière (…) ne décrit pas vraiment la réalité physique. »

John Barrow dans « La grande théorie » :

« Les problèmes linéaires sont faciles. Ce sont des problèmes dans lesquels la somme ou la différence de deux solutions est aussi solution. (..) Les phénomènes linéaires se prêtent à une modélisation mathématique très précise. Le résultat d’une opération linéaire varie continûment et de manière douce en fonction de tout changement des données initiales. Dans le cas des problèmes non-linéaires, au contraire, les erreurs s’amplifient si rapidement qu’une incertitude infinitésimale dans l’état présent d’un système rend vaine toute prédiction de son état au delà d’un court laps de temps. (..) Les professeurs exhibent les solutions des équations linéaires et les manuels donnent la préséance à l ‘étude des phénomènes linéaires car ce sont les seuls exemples qui puissent être résolus facilement. (..) En revanche l’équation non linéaire la plus simple que l’on puisse imaginer exhibe un comportement d’une profondeur et d’une subtilité insoupçonnée qui, en pratique, est complètement imprédictible. »

Karl Newell et Peter Molenaar dans « Applications de la dynamique non-linéaire aux modèles de développement » :

« La vision scientifique de l’essentiel de notre siècle concernant la croissance physique de l’enfant a consisté à dire que l’enfant grandit lentement de manière continue de façon journalière en l’absence d’attaque extérieure ou de maladie. (..) Des mesures prises de façon journalière ou hebdomadaire démontrent que la croissance des dimensions du corps ont lieu par bonds rapides, par marches d’escaliers, mode que de nombreuses expériences ont désormais confirmé. » la démonstration y est clairement établie : la croissance a lieu par sauts séparés d’intervalles de temps aléatoire. C’est une constatation qui ne concerne pas seulement l’homme mais toute croissance vivante. Elle se produit rapidement et ponctue des phases de stabilité beaucoup plus longue que les phases de croissance. Là encore, phénomène rapide et lent sont imbriqués et rétroactifs. Ils fondent un état sensible aux conditions extérieures et capable de sauter d’un état à un autre. »

Stephen Jay Gould dans « Un hérisson dans la tempête » :

« La découverte par Watson et Crick de la double hélice de l’ADN a été une incontestable révolution mais la conception linéaire qui en résulte selon laquelle l’ADN produit l’ARN qui produit les protéines dans une relation à sens unique a été détrônée par une nouvelle révolution de la génétique dans laquelle le génome n’est pas un ensemble inerte de perles enfilées à la suite les unes des autres. Le génome est au contraire fluide et mobile. Il ne cesse de se modifier qualitativement et quantitativement et comprend un grand nombre de systèmes hiérarchisés de régulation et de contrôle. »

Représentation de l’interaction de trois corps qui interagissent liée à la théorie non-linéaire de la gravitation des trois corps par Poincaré

« On sera frappé de la complexité de cette figure, que je ne cherche même pas à tracer. Rien n’est plus propre à nous donner une idée de la complexité du problème des trois corps, et, en général, de tous les problèmes de la dynamique où il n’y a pas d’intégrale uniforme… »

Henri Poincaré
Dans « Méthodes nouvelles de la mécanique céleste »

diagramme de Feigenbaum passant du linéaire au chaos par quelques bifurcations

Le physicien Per Bak dans « Quand la nature s’organise » :
« La thèse de Feigenbaum était qu’à proximité de la transition vers le chaos, la dynamique devait être identique pour tous les systèmes passant à travers une séquence infinie de bifurcations avec doublement de période. Bien que la théorie de Feigenbaum reposât sur un modèle très grossièrement simplifié, elle fut magnifiquement confirmée par un grand nombre d’expériences sur des systèmes complexes (liquide soumis à des rouleaux convectifs tournants, oscillateur ou pendule poussé à un rythme régulier, ….). »

SITE : Matière et Révolution

Contribution au débat sur la philosophie dialectique
du mode de formation et de transformation
de la matière, de la vie, de l’homme et de la société

www.matierevolution.fr

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Recherches actuelles sur la non-linéarité

L’oscillateur Van der Pol


« Un système dynamique non linéaire oscillant sur trois fréquences incommensurables peut devenir instable et avoir un comportement chaotique. »

D. Ruelle et F. Takens, étude sur la turbulence, 1971

Qu’est-ce que le non-linéaire ?

La linéarité est une propriété de proportionnalité des causes et des effets : doublez la cause et vous doublez l’effet. Deux fois plus de molécules d’eau suppose le double de poids. Cela semble simple et les sciences ont fait de nombreux progrès en se fondant seulement sur le linéaire. Mais si elles n’ont pas été au delà c’est que les équations différentielles non-linéaires ne peuvent être résolues simplement. En fait, l’univers n’est pas linéaire et les phénomènes ne font que ressembler parfois un peu à la linéarité. ils n’y sont jamais identiques. Même les molécules ne se contentent pas de s’additionner et d’additionner leurs effets. En grand nombre, elle passent à un nouvel état qui est collectif et n’est pas la somme des états. Un nuage n’est pas une simple somme de molécules. Sinon, l’eau du nuage tomberait immédiatement au sol. Les molécules d’eau produisent des interactions qui ont un effet collectif. Elles forment une structure collective : le nuage. Le non-linéaire a une propriété étonnante : la capacité de produire des structures émergentes.

Pourquoi une communauté du Non-Linéaire ?

"....la physique ne nous donne pas seulement l’occasion de résoudre des problèmes ; elle nous aide à en trouver les moyens, et cela de deux manières. Elle nous fait pressentir la solution ; elle nous suggère des raisonnements."

POINCARÉ, Valeur sc., 1905, p.152.

Comme il est souvent le cas dans les autres disciplines, l’évolution de la science du non-linéaire a procédé par paliers, avec des aller-retours entre développement des méthodes et techniques mathématiques et application à des phénomènes réels. Mais plus que d’autres peut-être, cette science dépend très étroitement des mathématiques appliquées. Au XIXème siècle, il s’agissait pour les mathématiciens de résoudre des équations différentielles non-linéaires, l’exemple-type étant fourni par la mécanique céleste. Cependant, dès la moitié du siècle, les problèmes non-linéaires s’étudiaient au cas par cas sans concept général, comme par exemple pour les ondes non-linéaires (Stokes 1847, Riemann 1858).
Avec H. Poincaré qui établit les bases unificatrices pour l’étude des problèmes de la mécanique non-linéaire[1,2], et Liapounov qui pose le problème général de la stabilité [3], les outils mathématiques nouveaux apparaissent. Suit une période de sommeil relatif.

En même temps, dans notre enseignement, l’idée dominante en cours au début du XX ème siècle, malgré Stokes, Riemann, Poincaré et autres, est : "Les problèmes de la Physique mathématique dépendent en général d’équations aux dérivées partielles d’ordre supérieur au premier, mais linéaires par rapport à la fonction inconnue et à ses dérivées." (Jordan : Cours d’Analyse de l’Ecole Polytechnique 1908-1909, page 244).

Dans les années 1927-1938, l’école russe surtout (Mandelstam-Andronov) commence à appliquer ces méthodes à des modèles en relation avec des problèmes pratiques en mécanique des vibrations de structures, en électricité (oscillateurs), et en optique (diffraction). Par ailleurs, d’autres écoles se développent et les applications sont même étendues en science du vivant (rythmes cardiaques : Van der pol et Van der Mark 1928 [4] ; dynamique des populations : Volterra 1931 [5]).

Dans certains pays ces méthodes sont introduites dans l’enseignement et par exemple, dans son "Introduction to Non-Linear Mechanics ", un cours sur des applications pour les ingénieurs de la marine, N. Minorsky note en 1944 :

" This report aims to bring to the attention of technical personnel, both of the Navy and of other agencies engaged in the war effort, certain new developments in applied mathematical methods. These new methods have come to be called "Non-Linear Mechanics"..... Practically all differential equations of Mechanics and Physics are non-linear...". En d’autres termes, la Physique (représentation du monde réel) est d’abord non-linéaire.

Il apparait donc déjà que la solution à certains problèmes concrets passe par l’étude complète des modèles non-linéaires : "...Thus, it became necessary to attack the non-linear problems directly instead of evading them by dropping the non-linear terms.."

Dans les années 1960-80 les outils mathématiques sont encore développés ("systèmes dynamiques") et les applications deviennent très nombreuses en hydrodynamique, optique, mécanique, matière condensée, métallurgie et même en sociologie, économie etc... L’école fran\c caise de mécanique non-linéaire qui avait été une des plus actives dans les années 30 (Denjoy, ...) réapparaît et la communauté est actuellement une des plus nombreuses au monde (signalons que c’est sans doute l’article de Ruelle-Takens de 1972 qui a relancé l’intérêt des physiciens).

Actuellement, le message de Minorsky est toujours d’actualité et pourtant les méthodes et concepts de la Physique non-linéaire diffusent lentement dans pratiquement tous les domaines. La physique non-linéaire est à la fois un domaine fondamental de la science et un thème unificateur largement interdisciplinaire. Elle doit faire partie du bagage de tout étudiant en physique, mathématique, mécanique, chimie, au même titre que le calcul différentiel, la cinématique du point, ou la mécanique quantique. La mission de l’Université qui est de préparer les étudiants à l’évolution de la science, doit inclure l’enseignement des méthodes non-linéaires.

Or, ces méthodes sont appliquées depuis longtemps. En 1985 la NASA utilise les propriétés de sensibilité aux conditions initiales du "problème à trois corps" pour re-diriger avec très peu d’énergie une sonde (ISEE-3/ICE) vers une comète. Très récemment (juin 1999) le CNET a porté le débit d’informations dans une fibre optique à 1012 bits/s en utilisant des solitons pour support.

Il est alors surprenant que notre Université, peut-être encore sous l’effet des affirmations péremptoires de Jordan (1908), et cinquante ans après Minorsky, tarde à introduire les bases de cet enseignement.
Comme pour d’autres disciplines, la multiplication des domaines d’application favorise la dispersion et le cloisonnement. Aussi il est nécessaire d’opérer à certain moment un rassemblement des thèmes pour permettre une progression des études théoriques ou des méthodes expérimentales, par la comparaison et l’échange.

C’est un des objectifs des "Rencontres du Non-linéaire". Leur succès montre qu’il existe en France aussi, une communauté très active et nombreuse en Physique non-linéaire. Le caractère interdisciplinaire des rencontres doit permettre un échange des idées mais aussi des personnes. L’accent est mis sur la participation aux exposés, des doctorants en fin de thèse et ces rencontres annuelles devraient favoriser la migration des jeunes chercheurs vers des équipes ou des thèmes différents. Certains pourraient aussi, par ce biais, découvrir les aspects industriels nouveaux et des voies professionnelles différentes dans lesquelles s’engager.

Afin de faciliter la transmission des informations et l’organisation de la communauté du non-linéaire, un serveur destiné à la Physique Non-Linéaire est en place (http://pnl.lps.u-psud.fr/pnl/). Il est recommandé de l’utiliser et de lui fournir des informations à diffuser, dans l’intérêt de tous.

Nous tenons à remercier J. Oesterlé, Directeur de l’IHP, et E. Guyon Directeur de l’ENS pour leur aide à l’organisation de ces Rencontres.
P. Collet, P. Coullet, P. Glorieux, Y. Pomeau, R. Ribotta, J-C. Saut, B. Schmitt
[1] "Sur les courbes définies par une équation différentielle" H. Poincaré, Oeuvres, Gauthier-Villars, Paris, Vol. 1, (1928).
[2] "Les méthodes nouvelles de la mécanique céleste" H. Poincaré, Gauthier-Villars, Paris, Vol. 1, (1892).
[3] "Problème général de la stabilité du mouvement" M.A. Liapounoff, Annales de la Faculté des sciences de Toulouse, Paris Vol. 9, 1907.
[4] "Leçons sur la théorie mathématique de la lutte pour la vie" , V. Volterra, Gauthier-Villars, Paris, (1931).
[5] "Le battement de coeur considéré comme oscillation de relaxation" , B. Van der Pol et Van der Mark, Onde Electrique, Paris, p. 365 (1928).

Bernard Sapoval dans « Universalités et fractales :

« Certaines questions relèvent de phénomènes non-linéaires dont nous verrons qu’ils mettent en jeu les limites essentielles de la prévisibilité. Prenons un exemple, celui du réchauffement de l’atmosphère par l’effet de serre. Ce que l’on sait avec certitude, c’est que l’effet de serre, en lui-même, existe, et dire que cet effet de serre ne peut pas exister est contraire à la science constituée. En revanche, dire comment, quand, et même répondre à la simple question de savoir quelle est la mesure qui prouve ou prouvera le réchauffement de l’atmosphère reste une question totalement ouverte pour les spécialistes. Le chaos déterministe entraîne que certains phénomènes connus ont un comportement à long terme impossible à prédire. »

Atome : rétroaction de la matière/lumière et du vide (de la microphysique à l’astrophysique)

* 01- Les contradictions des quanta

* 02- La matière, émergence de structure au sein du vide

* 03- Matière et lumière dans le vide

* 04- Le vide, … pas si vide

* 05- Le vide destructeur/constructeur de la matière

* 06- La matière/lumière/vide : dialectique du positif et du négatif

* 07- La construction de l’espace-temps par la matière/lumière

* 08- Lumière et matière, des lois issues du vide

* 09- Matière noire, énergie noire : le chaînon manquant ?

* 10- Les bulles de vide et la matière

* 11- Où en est l’unification quantique/relativité

* 12- La symétrie brisée

* 13- Qu’est-ce que la rupture spontanée de symétrie ?

* 14- De l’astrophysique à la microphysique, ou la rétroaction d’échelle

* 15- Qu’est-ce que la gravitation ?

* 16- Big Bang ou pas Big Bang ?

* 17- Qu’est-ce que la relativité d’Einstein ?

* 18- Qu’est-ce que l’atome ?

* 19- Qu’est-ce que l’antimatière ?

* 20- Qu’est-ce que le vide ?

* 21- Qu’est-ce que le spin d’une particule ?

* 22- Qu’est-ce que l’irréversibilité ?

* 23- Qu’est-ce que la dualité onde-corpuscule

* 26- Le quanta ou la mort programmée du continu en physique

* 25- Lumière quantique

* 26- La discontinuité de la lumière

* 27- Qu’est-ce que la vitesse de la lumière c et est-elle indépassable ?

* 28- Les discontinuités révolutionnaires de la matière

* 30- Qu’est-ce qu’un système dynamique ?

* 31- Qu’est-ce qu’une transition de phase ?

* 32- Quelques notions de physique moderne

* 33- Qu’est-ce que le temps ?

* 34- Henri Poincaré et le temps

* 35- La physique de l’état granulaire

* 36- Aujourd’hui, qu’est-ce que la matière ?

* 37- Qu’est-ce que la rupture de symétrie (ou brisure spontanée de symétrie) ?

* 38- Des structures émergentes au lieu d’objets fixes

* 39- Conclusions provisoires sur la structure de la matière

* 40- L’idée du non-linéaire

MOTS CLEFS :

dialectique
discontinuitéfractales -
physique quantiquerelativité
chaos déterministeatome
système dynamiquestructures dissipativespercolationirréversibilité
non-linéaritéquanta
émergence
inhibition
boucle de rétroactionrupture de symétrie - turbulencemouvement brownien
le temps -
contradictions
crise
transition de phasecriticalité - attracteur étrangerésonancepsychanalyse -
auto-organisationvide - révolution permanente - Zénon d’Elée - Antiquité -
Blanqui -
Lénine -
TrotskyRosa Luxemburg
Prigogine -
Barta -
Gould - marxisme - Marx - la révolution - l’anarchisme - le stalinisme - Socrate - socialisme - religion

SITE :
MATIERE ET REVOLUTION

www.matierevolution.fr

P L A N
D U
S I T E

Chacun sait que la physique a découvert que la matière, comme la lumière, est constituée de « grains » appelés particules. La matière serait appelée fermions, c’est-à-dire particules obéissant à la règle de Fermi qui empêche les particules de même état de s’agglomérer du fait du « principe de Pauli ». Les fermions sont de deux types : leptons (comme l’électron) ou quarks (constituant des neutrons et des protons). La lumière – expression employée ici pour regrouper toutes les particules dites d’interaction - serait formée de bosons, c’est-à-dire de particules qui obéissent à la règle de Bose qui concerne des particules qui ont tendance à s’agglomérer dans un état commun.

L’ensemble a semblé dans un premier temps fonctionner comme un jeu de construction : on additionne les particules pour former des ensemble plus importants comme l’atome, les molécules et les macromolécules. On additionne les neutrons et les protons pour former le noyau des atomes et on rajoute les électrons pour former l’entourage atomique qui permet à l’atome d’être globalement neutre électriquement.

Cette logique additive n’est pas entièrement fausse mais elle a atteint ses limites d’explication et depuis longtemps maintenant elle est abandonnée par les physiciens pour expliquer le fonctionnement de la matière/lumière. La première raison provient du fait que cette image additive supposait que les particules soient des objets statiques, individuels, existant en permanence ou au moins sur de longues durées. A chaque particule individuelle était attribuée une masse qui était considérée comme attachée à la chose matérielle. La physique actuelle est très différente. L’individualité de la particule n’est plus admise. La masse est une propriété qui se déplace et saute d’un point à un autre, sans être fixée à un objet. L’objet lui-même n’est plus une image reconnue. En fait, la matière ne s’explique plus par la fixité mais, au contraire, par une dynamique extraordinairement agitée : celle du vide qui n’est plus synonyme d’absence. Le fondement du caractère apparemment conservatif de la structure globalement conservée qu’est la matière est l’agitation permanente du vide !

On a donc longtemps eu une vision « additive » de la physique de la matière. Cela signifiait que les objets étaient des sommes de molécules, elles-mêmes considérées comme des sommes d’atomes, considérés comme la somme d’un noyau et d’électrons, le noyau étant une somme de protons et de neutrons et, enfin, proton et neutron étant des sommes de quarks. Mais cette vision a dû être profondément changée avec la physique quantique des champs selon laquelle le vide quantique est une apparition fugitive d’un nombre indéfini de particules qui n’existaient pas auparavant, le nombre total de particule n’étant pas un nombre fixe. L’énergie peut produire des particules. Les particules peuvent disparaître également. Enfin, la particule est « habillée », c’est-à-dire entourée d’un nuage de particules virtuelles d’interaction (photons, gluons, etc) pouvant se transformer en toutes les sortes de particules (et leurs antiparticules) ayant une durée de vie très courte, dites particules et antiparticules virtuelles. Le proton est entouré de gluons virtuels qui se polarisent en couples de quarks et antiquarks virtuels. L’électron est entouré d’un nuage de photons qui peuvent se matérialiser fugitivement en électrons et positons virtuels. Le nombre total de particules n’est donc pas une constante. Pas plus que le nombre de charges électriques.

La masse, elle aussi, est longtemps apparue comme additive. C’est ce que l’on constate à notre échelle. Par contre, à l’échelle de la matière atomique, il faut tenir compte des interactions qui ont, elles-mêmes, une masse. Dans l’atome, par exemple, il n’y a pas que le noyau et les électrons mais également l’énergie d’interaction qui les maintient ensemble. Il en va de même pour le noyau qui ne pourrait se maintenir stablement sans l’énergie qui maintient ensemble les nucléons. La masse ne s’avère d’ailleurs pas une propriété fixe d’une matière « solide », « compacte », « lourde ». C’est un phénomène. C’est une propriété et elle n’appartient pas en fixe à un objet individuel appelé la particule. La propriété peut migrer rapidement d’une particule virtuelle à une autre. Elle peut même disparaître dans un trou d’énergie négative ou par interaction avec l’antimatière.

Ce qui s’additionne, ce n’est ni la masse, ni l’énergie. On le voit en physique quantique au fait que des particules de masse qui s’entrechoquent peuvent disparaître en tant que telles pour donner de l’énergie et que l’énergie peut disparaître pour donner de la masse.

La relativité a, elle aussi, été contrainte, pour conserver provisoirement cette additivité, d’admettre que l’énergie faisait partie de la masse, le total masse au repos plus énergie se conservant. Cependant, ce point de vue lui-même ne convient que si on ne descend pas en dessous de certains seuils de temps. Sous ces seuils, il y a une incertitude sur l’énergie qui peut être considérable. Plus le temps considéré est court, plus il peut apparaître et disparaître d’énergie, moins l’énergie est simplement additive.

Le temps, lui-même, cesse du coup d’apparaître comme additif. On peut en effet croire que le temps long est une somme d’espaces de temps courts. Cela convient pour des dynamiques régulières, sans grandes discontinuités, ne tenant pas compte d’intervalles courts de temps, comme le mouvement des corps macroscopiques. Cela ne convient plus du tout en physique quantique. En passant à des temps courts, les lois changent, les objets ne sont plus les mêmes. Là où il n’y avait rien (le vide vu du point de vue macroscopique), apparaissent des myriades de plus en plus importantes de particules virtuelles. Le monde entier peut apparaître dans un temps suffisamment court, autrement appelé le temps du Big Bang, qu’il ne faut pas voir comme la création de l’univers mais comme le temps minimum et comme l’énergie maximum. Le temps du Big Bang n’est que le dernier seuil connu au-delà duquel parler de matière, même virtuelle, n’aie plus de sens.

En tout cas, la notion d’intervalles de temps longs constitués par une somme d’intervalles courts devient obsolète. Dans des temps courts, des grandes énergies peuvent apparaître et disparaître, ce qui n’est pas le cas dans des temps longs. Le temps change complètement d’image par rapport aux deux représentations que nous lui connaissons : le cycle et la ligne droite orientée. Le vide a montré que le temps fondamental est désordonné. Il est fondé sur des oscillations non linéaires de couples de particules polaires (par exemple électron et positon) qui est chaotique. Le temps ordonné est une émergence au sein d’ensemble d’un très grand nombre de particules durables et il est sans cesse en train de se créer et de s’autodétruire au sein du vide quantique.

La physique macroscopique a dû elle-même renoncer à la vision régulière, linéaire et additive. La mécanique des fluides a dû introduire la dynamique non-linéaire dans son étude de la turbulence, comme l’ont montré Ruelle et Takens, car elle n’est pas une somme d’un très grand nombre de fluctuations linéaires. Le domaine du chaos déterministe, plus généralement, a montré que la physique pouvant se passer du non-linéaire comme approximation n’est pas très vaste et ne concerne que des phénomènes n’agissant à plusieurs niveaux hiérarchiques de la matière, sur des systèmes pouvant apparaître pour isolés énergétiquement et subissant des évolutions lentes et sans passage de seuils. Autant dire que, fondamentalement, toute la physique est non-linéaire. Le « simple » pendule l’est !

Le chaos déterministe avec sa « sensibilité aux conditions initiales » a montré qu’un très grand nombre de situations permettent qu’une somme donne bien autre chose que le total des résultats bien plus ou … bien moins. C’est le fameux « effet papillon ».

Le dernier domaine clef de l’additivité restait celui des ondes. L’électromagnétisme, incluant la lumière, semblait lui avoir donné ses lettres de noblesse. Et pourtant ! La dualité quantique a mis fin à cette illusion. Toute onde est également et en même temps corpusculaire. Et si la physique quantique continue à parler d’ondes, il ne s’agit plus du tout de la même « chose » puisqu’il s’agit seulement d’une onde mathématique qui se propage non dans l’espace réel mais dans celui des phases et concerne une probabilité de présence. Et même là, l’additivité ne concerne pas des « objets ».

La réalité restera donc non additive. Elle n’est pas décrite par des « simples » opérations mathématiques, même si ces dernières gardent leur efficacité. Celle-ci n’est pas d’ordre descriptif. Elles se contentent de calculer des probabilités, ce qui est bien différent d’une description, au grand dam de physiciens comme Einstein. Cela ne veut pas dire que le monde réel n’existe pas et que n’existent que des probabilités. Cela signifie que la « description » mathématique en reste au calcul des probabilités. Ce n’est pas parce qu’on a seulement comme outil u marteau que le monde autour de nous n’est formé que de clous !!

Le quantitatif ne suffit pas parce que la matière (ou plutôt le vide structuré) existe à plusieurs échelles et que les changements ont donc un caractère qualitatif.

L’autre raison de souligner le caractère limité de l’additivité, c’est que les contraires ne s’additionnent pas comme deux nombres positifs et négatifs de même valeur absolue. Ils ne donnent pas le rien. Les contradictions ne s’annulent pas dans la nature. Ce sont au contraire elles qui produisent la dynamique du monde !

Citons sur ces points quelques auteurs :

« Qu’entre qualité et quantité il y ait passage conceptuel susceptible de reproduire des passages réels est chose si peu hypothétique qu’existe une discipline scientifique dont c’est tout l’objet, la physique des transitions de phase (…) Peut-on expliquer les discontinuités qui s’observent à l’échelle macroscopique par exemple dans la vaporisation d’un liquide à partir de sa structure microscopique ? Se produirait-il une « modification brutale » à la température de transition « dans les interactions entre atomes », dont le changement de phase serait le « reflet » ? La question, indique Roger Balian dans « Le temps macroscopique » dans « Le temps et sa flèche », a été définitivement tranchée : « Rien à l’échelle atomique ne distingue l’eau de sa vapeur ou de la glace ; leurs transformations mutuelles ne traduisent qu’un changement d’organisation de l’édifice global, contrôlé seulement par deux paramètres macroscopiques, la température et la pression. » (…) Le qualitativement nouveau vient à jour à partir de lui-même. »

Lucien Sève dans « Nature, science, dialectique : un chantier à rouvrir »

« Avec chaque niveau d’organisation, apparaissent des nouveautés, tant de propriétés que de logiques. (…) Une dialectique fait s’interpénétrer les contraires et s’engendrer la qualité et la quantité. »

François Jacob dans « La logique du vivant »

« On ne compte pas les électrons ou les photons comme on compte les objets que nous rencontrons autour de nous. »

Les physiciens Georges Lochak, Simon Diner et Daniel Farge dans « L’objet quantique ».

« Si un électron entre et sort d’une boite (une zone par exemple) (...), on ne peut pas dire que c’est le même électron qui entre et qui sort. (...) La masse est longtemps apparue comme une propriété fondamentale. N’est-il pas surprenant de la voir maintenant apparaître comme une propriété purement dynamique, liée aux propriétés du vide et à la façon dont elles affectent les particules qui s’y trouvent ? (...) Cette nouvelle conception de la masse est une révolution importante. Ce qui apparaissait comme une propriété intrinsèque et immuable se voit relégué au rang d’effet dynamique dépendant des interactions et, avant tout, de la structure du vide. »

Le physicien Maurice Jacob dans « Au cœur de la matière ».

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