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Qu’est-ce qu’un attracteur étrange ?

lundi 6 octobre 2008, par Faber Sperber, Robert Paris

Attracteur de Lorenz

Attracteur de Hénon

L’attracteur étrange : cette courbe n’est pas celle du mouvement mais représente les états du système et elle montre que dans des cas où on aurait l’impression du désordre, il y a cependant un certain type d’ordre, des lois, d’où l’expression "chaos déterministe".

Un attracteur signifie que la dynamique a tendance à être attirée par lui. Par exemple, le fleuve est un attracteur du bassin fluvial.

Etrange signifie que la forme de cet attracteur n’est pas une courbe ni une surface et n’est même pas continue mais reconstituée point par point de manière discontinue par la dynamique qui, bien qu’apparemment désordonnée, reconstitue ce type spécial d’ordre. C’est un ordre de type chaos déterminsite car il obéit à la sensibilité aux conditions initiales (un petit changement entraîne des possibilités de changements considérables par la suite). Il y a donc à la fois attraction et mélange.

La notion d’attracteur étrange élargit considérablement le domaine de connaissance puisqu’elle permet d’étudier des phénomènes apparemment désordonnés et qui subissent cependant des contraintes tout à fait déterministes, parviennent à un certain type d’ordre dynamique qui n’est pas fondé sur une autre stabilité que celle d’une structure globale. dans le monde réle, ce type de système est courante : du nuage à l’économie et du rythme biologique à la dynamique d’une ville.

Attracteur de Lorentz du climat

attracteur étrange

La notion d’attracteur étrange signifie que la nature produit des horloges qui ne sont pas périodiques. Loin de l’équilibre, les systèmes dynamiques dissipatifs sont capables de produire des horloges, c’est-à-dire des rythmes, qui ne sont pas strictement périodiques. L’attracteur étrange signifie que le retour ne provient pas d’un passage à l’équilibre.

attracteur d’un comportement à deux périodes

Chaos dans les mouvements des fluides, le film

Ilya Prigogine et Isabelle Stengers dans « Entre le temps et l’éternité » :

« Dans le passé, (…) tous les systèmes soumis à un attracteur semblaient devoir « se ressembler ». Aujourd’hui, la notion d’attracteur symbolise au contraire la diversité qualitative des systèmes dissipatifs.
La notion d’état attracteur renvoie en effet à celle de système dissipatif, producteur d’entropie. Un pendule idéal, sans frottement, n’a pas d’état attracteur, mais poursuit indéfiniment son mouvement d’oscillation. En revanche, le mouvement d’un pendule réel s’amortit progressivement. Dans le cas du pendule simple, l’existence de l’attracteur que constitue son état d’équilibre (au sens mécanique) permet de caractériser tout mouvement pendulaire réel en toute généralité, sans avoir besoin de le connaître dans sa particularité. Quelles que soient la vitesse et la position initiale du pendule, nous savons en effet comment nous pourrons le décrire si nous attendons assez longtemps : il finira par se trouver au repos dans sa position d’équilibre. De même, l’existence de l’attracteur que constitue l’état d’équilibre thermodynamique permet d’affirmer qu’une population de milliards de milliards de particules dans une enceinte isolée évoluera vers un état dont la description ne dépend plus que d’un petit nombre de paramètres observables, tels que température et pression.
Pour nous représenter l’attracteur, introduisons un espace dans lequel cet attracteur est plongé. Cet espace possèdera autant de dimensions qu’il faut de variables pour décrire l’évolution temporelle du système. Les états d’équilibre des systèmes dissipatifs correspondent par définition à des attracteurs ponctuels, représentés par un point de cet espace. C’est également le cas pour les systèmes proches de l’équilibre thermodynamique et soumis au théorème de production d’entropie minimum. Dans tous les cas, quelle que soit la préparation initiale du système, l’évolution de celui-ci sous des conditions aux limites données – pourra être représenté par une trajectoire menant du point représentant l’état initial vers le point attracteur. Celui-ci domine donc la totalité de l’espace. Tous les systèmes représentés par les mêmes variables indépendantes aux mêmes conditions aux limites « reviennent au même », connaissent le même destin.
La découverte loin de l’équilibre des comportements cohérents, telle l’ « horloge chimique », avec sa période temporelle bien déterminée, implique un premier élargissement de la notion d’attracteur. Ici, il ne s’agit plus d’un point mais d’une ligne. Cette fois, quelle que soit la situation initiale, le système évolue vers un « cycle limite ».
Un système caractérisé par un cycle limite reste un système prévisible, que l’on peut décrire de manière simple. (…)
Jusqu’à ces dernières années, on croyait que les seuls attracteurs possibles correspondaient à des variétés continues, telles que lignes, surfaces et volumes. Mais la découverte des « attracteurs étranges » a ouvert des nouvelles. Les attracteurs étranges ne sont pas caractérisés par des dimensions entières, comme une ligne ou une surface, mais par des dimensions fractionnaires. Ce sont ce que, depuis Mandelbrot, on appelle des variétés fractales. (…)
Jusqu’à il y a peu, l’existence d’un attracteur avait été synonyme de stabilité et de reproductibilité : retour au « même » malgré les perturbations, quelles que soient les particularités initiales. Aux nouveaux types d’attracteurs correspondent des comportements « sensibles aux conditions initiales » qui font perdre son sens à la notion de « même ». Dans toute région, aussi petite soit-elle, occupée par l’attracteur fractal, passent autant de trajectoires que l’on veut, et chacune de ces trajectoires connaît un destin différent des autres. En conséquence, des situations initiales aussi voisines que l’on veut peuvent engendrer des évolutions divergentes. La moindre différence, la moindre perturbation, loin d’être rendue insignifiante par l’existence de l’attracteur, a donc des conséquences considérables. (…)
Nous arrivons ici à la définition du comportement « chaotique », qui est un comportement typique des systèmes caractérisés par un attracteur étrange. Un comportement est chaotique si des trajectoires issues de points, aussi voisins que l’on veut dans l’espace des phases, s’éloignent les unes des autres au cours du temps de manière exponentielle ; la distance entre deux points quelconques appartenant à de telles trajectoires croit proportionnellement à une fonction exponentielle de l’inverse du temps de Lyapounov.
Le temps de Lyapounov permet de définir une véritable « échelle de temps ».

Ilya Prigogine et Isabelle Stengers dans « La nouvelle alliance » :

« Une notion cruciale est la notion d’attracteur. Les exemples d’attracteurs sont innombrables et bien connus de la physique. Le pendule, qui s’immobilise progressivement, rejoint son état attracteur. Le liquide chaud dont la température rejoint progressivement celle de l’environnement gagne son état attracteur. (…) Nous avons vu que, près de l’équilibre, l’état stationnaire correspond (….) à un état attracteur essentiellement analogue à l’état d’équilibre. Mais, loin de l’équilibre, d’autres types d’attracteurs peuvent apparaître, et notamment le « cycle limite », correspondant à un comportement temporel périodique adopté de manière spontanée par le système. (…) Depuis, de nouveaux types d’attracteurs ont été découverts qui enrichissent la dialectique du régulier et de l’aléatoire. (…) Ces attracteurs ne correspondent pas à un point, comme l’état d’équilibre, ou à une ligne, comme le cycle limite, mais à un ensemble dense de points, un ensemble assez dense pour que l’on puisse trouver de ces points dans toute région, aussi petite soit-elle. Il s’agit d’un ensemble auquel peut être attribué une dimension « fractale ». Les attracteurs de ce type impliquent, de la part du système qu’ils caractérisent, un comportement de type chaotique. Attracteur et stabilité cessent ici d’aller de pair. David Ruelle a caractérisé ces « attracteurs étranges », qu’on a également appelés « attracteurs fractals », par leur très grande sensibilité aux conditions initiales. Ce qui signifie que l’état attracteur ne se caractérise plus du tout par son insensibilité à de petites variations de ses paramètres. Toute petite variation est susceptible d’entraîner des effets sans mesure, de déporter le système d’un état à un autre très différent. (…) L’opposition entre déterminisme et aléatoire est battue en brèche. (…) C’est désormais autour des thèmes de la stabilité et de l’instabilité que s’organisent nos descriptions du monde, et non autour de l’opposition entre hasard et nécessité. »

ATTRACTEUR DE LORENZ DU CLIMAT

Yakov G. Sinaï explique l’attracteur étrange du climat ou attracteur de Lorenz dans « L’aléatoire du non-aléatoire », article de l’ouvrage collectif « Chaos et déterminisme » :
« Ces attracteurs étranges se manifestent dans de nombreux problèmes de la physique, de l’hydrodynamique, de la biologie, de la chimie, etc. (…) En 1963, le météorologue américain E. N. Lorenz a publié un travail dans lequel il obtenait un système de trois équations différentielles ordinaires, nommé ultérieurement système de Lorenz, qu’il étudiait à l’aide d’un ordinateur. (…) On peut considérer que c’est là le système le plus simple d’équations différentielles non linéaires. Lorenz a déduit ce système d’équations à partir du problème bien connu de la convection d’un gaz ou d’un liquide placé entre deux plaques horizontales et chauffé par le bas (convection de Bénard-Rayleigh). (…) Le modèle de Lorenz fournit un exemple typique d’attracteur étrange. (…) La trajectoire effectue des tours à droite, puis quelques tours à gauche, puis, de nouveau, quelques tours à droite et ainsi de suite de manière irrégulière. (…) Sur l’attracteur lui-même, le mouvement a un caractère instable (…) en feuillets séparés, avec une topologie lacunaire, (…) ce qui a amené à appeler cette structure topologique peu ordinaire « attracteur étrange », selon la définition donnée dans le célèbre article de D. Ruelle et F. Takens « Sur la nature de la turbulence » en 1971. »

« On sera frappé de la complexité de cette figure, que je ne cherche même pas à tracer. Rien n’est plus propre à nous donner une idée de la complexité du problème des trois corps, et, en général, de tous les problèmes de la dynamique où il n’y a pas d’intégrale uniforme… »

Henri Poincaré
Dans « Méthodes nouvelles de la mécanique céleste »

Animation représentant un troisième corps en mouvement...

La loi des trois corps

Quinodoz :

La notion d’attracteur a été développée à partir des systèmes dynamiques afin de fournir une représentation de l’évolution du système en fonction du temps. Dans les systèmes dynamiques possédant peu de degrés de liberté, il est possible de fournir une représentation graphique qui serve de base pour décrire tout phénomène dépendant du temps. Mais lorsque le nombre de degrés de liberté est élevé, une représentation graphique n’est plus possible et l’on fait appel à des moyens de représentation plus globaux comme la dimension de l’attracteur et l’entropie métrique, dont on trouvera la description ailleurs (M. Dubois et coll., 1987). Jusqu’en 1963 on ne connaissait que trois types d’attracteurs : le point fixe, le cycle limite et le tore. Dans un système élémentaire, l’attracteur est représenté par un point fixe : l’exemple en est le pendule simple qui oscille en spirale en perdant de l’énergie et qui finit pas s’arrêter sur un point final appelé « point fixe ». Ce point constitue un attracteur ponctuel.

D’autres systèmes ne s’immobilisent jamais et leur évolution est cyclique et périodique, comme le pendule d’une horloge dont les oscillations sont entretenues. Dans ce cas, l’ensemble des trajectoires ne débute pas au centre de coordonnées (point fixe) mais tendent vers un cycle, et cet attracteur est appelé cycle limite . Ce dernier s’inscrit dans ce qu’on appelle l’espace des phases, c’est-à-dire dans cet espace abstrait où l’état du système peut être représenté sous forme géométrique en fonction des coordonnées du système étudié. L’intérêt de l’espace des phases pour les dynamiciens est justement « lié au fait qu’il doit contenir toute l’information sur la dynamique du système étudié » (M. Dubois et coll., 1987, p. 196). Il existe une troisième forme d’attracteur simple, l’attracteur torique, dont la surface est en forme de chambre à air et qui représente les mouvements résultant de deux oscillations indépendantes dont les trajectoires s’enroulent autour d’un tore .

D’autres systèmes plus complexes ont plusieurs attracteurs différents et leurs trajectoires sont attirées par l’un ou par l’autre des attracteurs, et l’on appelle « bassin d’attraction » d’un attracteur l’ensemble des points de l’espace des phases qui évolue vers l’attracteur considéré. En d’autres termes, on peut dire que les attracteurs attirent à eux toutes les trajectoires dynamiques engendrées à partir des diverses conditions de lancement possibles, « si bien qu’au bout d’un temps plus ou moins long, toutes ces trajectoires se retrouvent sur l’attracteur », comme l’ont souligné M. Dubois et coll. (1987, p. 193). Pour ces auteurs, le lit d’un fleuve peut être considéré comme l’équivalent d’un attracteur « pour tous les ruissellements, du plus petit au plus grand, qui prennent naissance dans son propre bassin » (ibid., p.193).

Les trois formes d’attracteurs dont nous venons de parler constituent des systèmes qu’on dit « prédictibles » car, bien que leurs mouvements soient complexes, ils sont néanmoins prévisibles à long terme. C’est sur de telles bases que l’on peut prédire longtemps à l’avance les heures des marées ou les éclipses dont la venue dépend pourtant de plusieurs mouvements périodiques.

Les attracteurs étranges

Dans les systèmes plus complexes dont l’évolution est « imprédictible », comme par exemple le chemin suivi par deux feuilles mortes tombant d’un même point de départ, les trajectoires vont se séparer pour devenir totalement dissemblables. Cette caractéristique d’amplification des écarts entre trajectoires de l’espace des phases a été nommée sensibilité aux conditions initiales. Lorsque cette propriété existe, le système correspondant est considéré comme chaotique.

Le tracé représentant l’évolution d’un système chaotique dans l’espace des phases en fonction du temps se comporte de manière « étrange » par rapport aux attracteurs des systèmes simples comme nous l’avons vu plus haut, c’est pourquoi D. Ruelle l’a nommé « attracteur étrange », ajoutant qu’il considérait sa propre expression comme « psychanalytiquement suggestive » (G. Pragier et S. Faure-Pragier, 1990, p. 1443).

Comme l’expliquent M. Dubois, P. Atten et P. Bergé (1987), le caractère étrange d’un tel attracteur vient du fait que « sa structure doit refléter deux tendances apparemment antagonistes : l’attraction des trajectoires vers l’attracteur et leur divergence sur ce dernier. L’attraction est liée au caractère dissipatif de tout système réel : sous l’effet des forces de frottement, les trajectoires tendent à venir se rejoindre sur l’attracteur. La divergence vient, quant à elle, de la sensibilité aux conditions initiales. La cohabitation de l’attraction et de la divergence apporte une contrainte d’autant plus forte que les trajectoires doivent être décrites continûment (puisqu’elles représentent une dynamique à tout moment), dans un espace confiné (puisque les valeurs des variables, vitesse, angles, etc. du système sont nécessairement limitées) et enfin qu’elles ne peuvent se couper (déterminisme) » (p. 196).

La divergence exponentielle des deux trajectoires reste cependant un phénomène local, et comme les attracteurs ont des dimensions finies, il est impossible que les deux trajectoires divergent de manière infinie, de sorte que l’attracteur doit se replier sur lui-même à un moment ou à un autre. En d’autres termes l’attracteur étrange est le résultat de trois opérations simultanées - contraction, étirement et repliement - qui vont donner naissance à une structure caractéristique en forme de fer à cheval qui va être à son tour aplatie, étirée et repliée. L’attracteur est ainsi fabriqué d’une manière analogue à celle utilisée par le boulanger pour mélanger sa pâte, de sorte qu’il présente une structure feuilletée, « la trajectoire s’emboîtant à l’intérieur d’elle-même à des échelles de plus en plus petites, puisqu’elle ne repasse jamais au même endroit. On retrouve là le concept d’autosimilarité d’un objet fractal » (ibid. p. 198)].

Ainsi, les trajectoires d’un attracteur étrange possèdent également les caractéristiques d’un objet fractal, c’est-à-dire d’un objet qui présente une structuration qui reste du même type quelle que soit l’échelle à laquelle on la regarde. Ce caractère fractal est donc une propriété générale des attracteurs étranges. Il résulte de ce qui précède que, dans un espace ayant au moins trois dimension (ou davantage), un système dynamique non-linéaire peut devenir chaotique. Comme le résument M. Dubois, et coll. « la propriété de sensibilité initiale est donc génératrice de chaos, chaos dont la signature est la présence d’un attracteur étrange dans l’espace des phases. C’est cette signature qui permet d’authentifier un comportement chaotique et de la caractériser quantitativement » (ibid. p. 197).

Multiples applications des attracteurs étranges

Je rappelle que c’est en 1963, en cherchant à comprendre pourquoi il est impossible de faire des prévisions météorologiques à long terme, que E. Lorenz a découvert qu’un modèle relativement simple de la circulation atmosphérique qu’il avait élaboré produisait des effets inattendus, largement divergents, à cause de la sensibilité du système aux conditions initiales. Cette caractéristique était nouvelle, car dans les attracteurs dont nous avons parlé en premier, qui sont non chaotiques, les erreurs ont des conséquences limitées et leur comportement reste prévisible. Par contre, dans les systèmes dynamiques, la sensibilité aux conditions initiales a pour effet que de faibles variations au départ se répercutent sur tout l’attracteur, et il devient impossible de prévoir quoi que ce soit, car il n’existe aucun lien proportionnel de cause à effet (J. Crutchfield et coll., 1987, p. 35).

Depuis ces travaux, on a cherché à trouver des attracteurs étranges dans de nombreux systèmes complexes, comme dans l’écoulement des fluides, dans le laser ou dans le fonctionnement cardiaque, etc. Mais ils ne se rencontrent pas si facilement : « les trouver ressemble plutôt à la cueillette des champignons : il faut savoir où et comment les chercher ! » (M. Dubois et coll., 1987, p. 197). Tant qu’on travaille avec trois variables, il est relativement aisé de « visualiser » le comportement chaotique et d’étudier directement la structure géométrique associée à ce type de comportement. Mais lorsque la dimension de l’espace des phases excède trois, on ne peut plus recourir à des représentations graphiques et l’on doit faire appel à des informations comme la dimension de l’attracteur.

La dimension de l’attracteur va permettre de fournir le nombre minimum de variables nécessaires pour obtenir une description simplifiée mais suffisante du fonctionnement d’un système. Un nombre de variables entre six et sept suffit en général pour le modéliser. « Le problème sera alors de bien analyser le fonctionnement du système physique, d’identifier les mécanismes principaux, les oscillateurs, et d’effectuer des approximations judicieuses. Autrement dit, trouver une dimension assez faible pour nous amener à examiner avec un oeil nouveau le désordre apparent, pour y découvrir les structures organisées sous-jacentes, leurs interactions et leur évolution. Confronté à un phénomène chaotique, il est donc essentiel de déterminer la dimension de l’attracteur étrange qui le caractérise » (ibid., p. 200).

Attracteur et dynamique chaotique

Extraits du texte cité juste au dessus :

Lorsque le système évolue vers un état final d’équilibre, représenté par un point
particulier de l’espace de phases, la trajectoire s’enroule autour de ce point. Le point
d’équilibre étant le même pour toutes les trajectoires issues de points de départ non
trop éloignés, ce point constitue un attracteur. Il peut cependant y avoir plusieurs
attracteurs, et l’ensemble des points de départ aboutissant à chaque attracteur constitue son bassin d’attraction.
Les trajectoires peuvent d’autre part s’enrouler autour d’autre chose qu’un point,
par exemple une courbe ou une surface fermées (cercle ou ellipse dans les cas à deux
variables les plus simples ; tore ou hyper-tore s’il y a plus de deux variables). On a
alors un attracteur cyclique, ce qui signifie que, quel que soit le point de départ
situé dans le bassin d’attraction, la trajectoire finit par rejoindre une figure fermée,
dite cycle limite, parcourue indéfiniment lorsqu’elle est atteinte. Les coordonnées
alors sont périodiques, revenant indéfiniment sur les mêmes valeurs (si le point de
départ est intérieur à l’attracteur cyclique, alors la trajectoire se déroule au lieu de
s’enrouler autour de ce dernier, et le résultat est le même). Enfin, on peut observer
des attracteurs chaotiques.
Deux bassins d’attraction contigus sont séparés par une ligne formée de points au
niveau desquels la trajectoire n’est pas déterminée, et qu’on appelle la ligne de
catastrophes. Cette ligne (parfois fractale) est
un « fil du rasoir » dans le voisinage duquel de petites fluctuations (par exemple
aléatoires) peuvent entraîner le système soit vers un des attracteurs, soit vers l’autre.
Lorsque l’espace d’états est de dimension supérieure ou égale à 3, la représentation des trajectoires est difficile et on a recours, pour les caractériser, aux sections de
Poincaré. On coupe l’ensemble des trajectoires par un plan, et chaque fois qu’une
trajectoire traverse ce plan, elle y marque un point. La suite temporelle de points
obtenus marque le comportement du système.
Ainsi, si la suite temporelle de points converge vers un point d’accumulation,
c’est que la coupe passe par l’attracteur ponctuel, qui est ce point. Si
l’attracteur est cyclique, le plan intersecte le cycle limite en deux points d’accumulation.

1. « Catastrophe » ne doit pas être entendue au sens de « désastre » ... même en écologie ! Il s’agit
(au sens de la théorie des catastrophes de René Thom) du basculement
qualitatif du système en direction d’un nouvel attracteur – changement brusque (et souvent
imprévu) de sa dynamique.

Oscillateurs chaotiques

"Dès 1985, Walter Freeman et ses collègues, de l’Université de Berkeley, se sont intéressés au processus de reconnaissance d’odeurs dans le bulbe olfactif du lapin. En se fondant sur leurs observations, ils ont proposé un mécanisme où la dynamique des signaux observés est chaotique et où la reconnaissance d’une odeur particulière se matérialise par un changement drastique de dynamique que l’on nomme bifurcation : on passe d’un attracteur étrange à un attracteur d’un autre type spécifique de l’odeur reconnue. dans ce modèle, on associe à chaque odeur un attracteur et c’est l’identification de cet attracteur qui permet la reconnaissance de l’odeur."

Hughes Berry et Bruno Cessac dans "Du chaos dans les neurones"

Bifurcations du type Feigenbaum

Autosimilarité

Portfolio

Messages

  • En fait j’ai lu la brève consacrée à la notion de l’attracteur étrange:selon moi l’attaction d’un corps est la vitesse conditionnée de ce corps suspendu à un atittude.mais nous pourons pas tenter de dire que la puissance de l’attracteur s’explique par la distance et le poids de l’objet où du corps suspendu ? ensuite deux objets de poids égal suspendu tomberont-ils au même moment ?merci à la prohaine.....s de beko

    • cher lecteur,

      le cas du pendule n’est qu’un exemple particulièrement simple dans lequel on étudie l’attracteur. En effet, le pendule aurait tendance à revenir vers la verticale. On considère alors la courbe des états du pendule et non le mouvement lui-même. C’est l’attracteur puisque le pendule va non seulement repasser sans cesse par la verticale mais va autant de fois repasser par toutes les positions intermédiaires s’il n’y a pas de frottement. On ne parlera d’attracteur étrange qui se le pendule (ou tout mouvement du même type) est freiné et en même temps entretenu (c’est-à-dire reçoit de l’énergie).

      Il se passe alors des choses très particulières qui nous éloignent considérablement du pendule simple.

      la suite est imprédictible

      la non-linéarité a des conséquences inattendues

      etc...

    • deux corps de même masse à la même altitude tombent au même moment que s’ils ont la même forme aérodynamique.

    • Oui, s’il y a la résistance de l’air mais dans le vide, ils tombent au même moment quelle que soit leur forme.

  • Je ne m’attendais pas à un site de communication aussi engagé en
    cherchant à vous joindre suite à votre article du 06/10/2008 dans
    "matière et évolution".

    Au risque de vous décevoir, je ne suis ni collectiviste ni
    anti-colonialiste. Je reste néanmoins très respectueux de votre
    influence humaniste ; il appartient selon moi à tout humain d’oser, aussi
    intelligemment qu’il le peut, "prédire" notre avenir à tous.
    Babylone est pour moi l’image d’une brillante Citée de nos précurseurs
    qui, bien malheureusement, ont confondu l’appât(du gain) avec la balance
    économique (fractale) ; et si j’osais, le sens de vivre avec comment en
    abuser.
    Les évènements actuels en Tunisie ne me donne pas tort, même s’il ne
    donne pas raison non plus.

    Je n’attends pas du mouvement "communard" qui vous anime, la béat
    satisfaction de résoudre mes soucis particuliers. "Ne demandez pas ce
    que que la collectivité peut faire pour vous, demandez-vous ce que vous
    pouvez faire pour la collectivité" stipulait en substance JFK, futur
    président de l’Etat capitaliste par excellence.

    Il serait facile de tabler sur mes faiblesses pour me réduire. D’autres
    ont essayé, et des plus "tordus", mais il n’y a aucun avantage !

    Aussi insensé que ce message puisse vous paraître, pair et sujet de mon
    Ordre auquel j’ai prêté serment il y a bien longtemps tout en persévérant
    à m’y réferrer avec la plus haute déférence, je sollicite votre regard
    bienveillant sur un sujet général auquel la politique ne peut se
    soustraire sans y sembler compromise sauf si l’on en reste à ces certains
    "bons" procédés : Communisme et Capitalisme avec un grand "C" ne sont pas
    l’avenir de l’Homme- de tout évidence - et le proche avenir nous en
    apportera la preuve, s’il en était besoin.

    Prenant en compte votre expérience ainsi que celle des gens qui vous
    entoure, et foncièrement calme vis à vis de ces pulsions humaines qui
    nous poussent tant à la fusion qu’à la destruction, qu’est-ce que votre
    conception structurante peut apporter à la finalité du doute qui afflige
    note société surannée et néanmoins rebelle ?

    Bien respectueusement vôtre

    • Vous n’attribuez aucun avenir au capitalisme et au communisme.

      Rien d’étonnant si on nomme communisme ce qu’a été l’Etat russe stalinien et post-stalinien... ou des régimes dits communistes qui n’ont même pas connu précédemment de prise de pouvoir par les travailleurs.

      Mais, si nous ne prétendons pas vous convaincre nécessairement de l’avenir du communisme, nous tenons à repréciser ce qu’était le communisme pour Karl Marx et ce qu’il est pour nous.

      Pour Marx

      Pour nous

      Bien cordialement

      Robert Paris

    • Au Dr Lambert.
      BAF. On a dû vous dire que c’est aussi par l’étude de la nature que vous progresserez. Les attracteurs étranges observables dans la nature sont donc à prendre en compte dans votre quête de connaissance de vous-même, des autres et des lois de l’Histoire. Étudiez donc, notamment, la physique quantique et la physique des turbulences pour comprendre l’œuvre que nous avons entreprise.
      l’Orateur.

  • bonjour et merci pour ces éclairages
    est-il possible d’envisager l’élection présidentielle comme un système chaotique ou un ensemble de systèmes chaotiques ?
    quelle place donner ici aux attracteurs étranges, peut-on les identifier ?
    Y a-t-il des études faites dans ce domaine ?

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