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« Naissance du fascisme, l’Italie de 1918 à 1922 » par A. Rossi Pietro Tresso (Blasco)

samedi 6 septembre 2008, par Robert Paris

« Naissance du fascisme, l’Italie de 1918 à 1922 » par A. Rossi
Pietro Tresso (Blasco)
L’auteur de ce livre, A. Rossi, se propose « d’expliquer, c’est-à-dire reconstituer avec la plus grande approximation possible, le drame social qui aboutit, le 29 octobre 1922, à l’avènement du fascisme italien au pouvoir.
Pour y parvenir, A. Rossi [Angelo Tasca] commence son étude en prenant l’Italie au moment où l’ultimatum de l’Autriche à la Serbie traversa l’Europe comme un éclair en la précipitant dans l’effroyable carnage impérialiste de 1914-1918. A ce moment l’Italie se trouvait en pleine crise politique et sociale. A peine sortie de la guerre de Libye, elle était traversée par une agitation profonde, dont le moment culminant fut la « semaine rouge » d’Ancône, qualifiée par Rossi de « révolte anarchiste », mais qui fut, en réalité, une explosion grandiose du grave mécontentement qui étreignait depuis des années les masses travailleuses de la Péninsule, à cause surtout de la corruption des classes dirigeantes italiennes et de leur impuissance à résoudre les problèmes posés par l’histoire. La « semaine rouge », pendant laquelle le prolétariat de la province d’Ancône et des Romagnes laissa plus de cent de ses fils sur le pavé, fut le tocsin indiquant que l’Italie était vraiment imprégnée de Révolution.
Mussolini, alors directeur de l’organe central du Parti Socialiste Italien l’Avanti !, exalte dans des articles enflammés le mouvement, tandis que les chefs réformistes du parti et de la C.G.T. le désavouent et le dénigrent.
Puis, c’est la guerre mondiale. Mussolini est d’accord, ainsi que tout le Parti Socialiste, farouchement « neutraliste ». Il dénonce les vrais buts impérialistes de la guerre ; il se moque de la « farce sentimentale » échafaudée autour de la « Belgique martyre », et il invite le prolétariat à ne pas tomber dans le filet que lui tendent les compères réactionnaires et démocratiques pour l’entraîner dans le massacre pour leurs louches intérêts de classe. Mais à l’improviste, illuminé par les sacs d’or qui, par Marcel Cachin, lui sont envoyés par l’Ambassade de France, il retourne sa veste, passe dans le camp des « interventionnistes », fonde le Popolo d’Italia, constitue les « Faisceaux d’Action révolutionnaires » et se lance dans une campagne effrénée qui réussit, par l’action de rue, à entraîner l’Italie dans le conflit.
C’est dans ces « Faisceaux d’action révolutionnaires » qu’on doit situer l’origine du mouvement qui, avec des transformations successives, deviendra le fascisme sous le joug duquel les travailleurs plient encore aujourd’hui.
La guerre n’a résolu aucun des problèmes devant lesquels se trouvait déjà quatre ans auparavant l’Italie. Elle les a tous aggravés, en y ajoutant d’autres encore plus graves et plus épineux. Faisant partie du Bloc des États vainqueurs, l’Italie s’est trouvée, en réalité, dans la situation d’un État presque vaincu. Dans le partage du butin impérialiste, le brigand italien s’est vu en quelque sorte spolié par ses compagnons de route, les brigands de l’impérialisme anglo-franco-américain. Au mécontentement des masses travailleuses qui savaient avoir fait la guerre pour le compte de leurs exploiteurs, et dont aucune des promesses qui leur avaient été faites pour les maintenir au front n’avaient été tenues, s’ajoute donc le mécontentement des « responsables » du carnage qui, eux aussi, s’aperçoivent qu’ils ont été les dupes du « roi de Prusse ». La tension politique en Italie devient énorme. C’est un formidable volcan dont la lave jaillit par toutes les fissures de la société italienne. Toutes les classes sont en ébullition. Les ouvriers et les salariés agricoles se lancent, au cours des années 1919-1920, dans des grèves presque à jet continu, poussés à cela non seulement par un état d’esprit qui voulait « changer le monde », suivant l’exemple de leurs frères russes qui, en 1917, avaient conquis le pouvoir, mais aussi par la nécessité de défendre leurs conditions immédiates d’existence, empirant dans le marasme général et par la montée du coût de la vie.
Les « victoires » les entraînent ; les échecs les trempent. Les étapes de cette agitation débordante, profonde et spontanée, sont données : par le refus de départ des troupes envoyées en Albanie, refus qui marque tout le degré de désagrégation de l’armée italienne et l’état d’esprit révolutionnaire qui régnait parmi les troupes ; par le vaste mouvement contre la cherté de la vie, mouvement qui embrasa en quelques jours l’Italie du Nord au Sud, et au cours duquel des rabais jusqu’à 50 % furent imposés sur tous les prix pratiqués à la vente. La puissance de ce mouvement fut telle que presque partout les commerçants se présentèrent aux Bourses du Travail et aux sections syndicales pour leur confier les clefs de leur négoce. Les soldats fraternisaient avec les foules en les aidant dans leur action contre les « spéculateurs » et en leur offrant des armes. Vient ensuite la grève d’Avril 1920, à Turin. Grève provoquée par le patronat sous prétexte d’introduire « l’heure légale », mais en réalité pour tenter d’en finir avec les « Conseils d’Usine » qui, surtout dans cette ville, avaient pris un sérieux développement. Et enfin on a les occupations d’usines au mois de septembre 1920, occupation qui ne se limita pas aux danses et aux jeux de belote comme en France en 1936, mais constitua une remarquable tentative de mettre effectivement la main sur l’appareil de production.
De leur côté, les salariés agricoles marchaient sans hésitation sur le même chemin tracé par leurs frères, les ouvriers des villes. Dans toutes les provinces d’Italie ils réussirent à imposer des contrats de travail et complétèrent leur mouvement revendicatif des grèves par des tentatives et aussi par d’effectives occupations des terres. Les couches moyennes suivaient, surtout au commencement, avec sympathie l’irréfrénable mouvement.
De l’autre côté de la barricade, mais avec des caractères complexes qui auraient pu, dans une grande mesure, être utilisés, même directement par le prolétariat, on a eu le mouvement des « Légionnaires fiumains » (« Legionari fiumani ») dont le chef était Annunzio et dont l’exploit principal fut l’occupation de la petite ville-frontière de Fiume pour l’incorporer à l’Italie. Et on a eu la naissance et le développement... du fascisme.
Il nous est impossible de résumer ici toutes les vicissitudes à travers lesquelles le mouvement fasciste a réussi à s’affermir jusqu’à s’emparer du pouvoir. Le livre de Rossi étaye avec une abondance remarquable les diverses phases de cette montée rapide ; foudroyante. Mais, à notre avis, il passe toujours à côté ou nie carrément les véritables problèmes. De toute évidence A. Rossi, à travers la description, parfois saisissante, du débordement fasciste et de l’incapacité, du « nullisme » politique des partis prolétariens, vise à justifier et à exalter la politique de « Front Populaire » qui a triomphé en France en 1936. Du livre de Rossi il se dégage nettement que c’est une politique de Front Populaire qui aurait préservé l’Italie du fascisme.
Le dilemme devant lequel se trouvait - et se trouve l’Italie - : socialisme ou fascisme, non seulement est nié par Rossi, mais est caractérisé comme « perfide ». Pourtant, « perfide » ou non, c’est bien ce dilemme que l’histoire pose devant nos yeux et - comme le démontre le développement de la lutte dans tous les pays du monde - pas seulement en Italie. Rossi a raison lorsqu’il affirme que le mouvement ouvrier a été vaincu en Italie, non par le fascisme, mais par l’inaptitude, par la décomposition intérieure, par l’inexpérience des partis qui devaient le conduire à la victoire. C’est un fait que le fascisme, s’est frayé la voie non sur la base de la destruction directe des organisations prolétariennes (et cela malgré l’appui et la collaboration active qu’il a obtenue de la part de tous les gouvernements « démocratiques » qui se sont succédés en Italie depuis la fin de la guerre jusqu’à Octobre 1922) mais sur celle du piétinement sur place, de l’impasse dans laquelle, à un certain moment le mouvement ouvrir s’est trouvé cloué. Mais les recettes que Rossi indique comme susceptibles d’éviter la catastrophe si elles avaient été employées, nous paraissent plutôt des cataplasmes inutilisables et en tout cas, absolument inaptes à sauver les masses travailleuses d’Italie de l’esclavage fasciste.
Pour Rossi, le véritable problème à résoudre en Italie était celui de l’intégration des larges masses populaires et avant tout du prolétariat, dans l’État. Il fallait créer l’État populaire italien. Concrètement, cela veut dire qu’à l’État bourgeois, menacé de dislocation sous les vagues opposées des forces de la société italienne, il fallait donner une base de masse pour le sauver et pour empêcher en même temps que cette base lui soit fournie par les forces hostiles au prolétariat.
Rappelons d’abord que cette idée n’a rien d’original, même sur le terrain italien. On peut affirmer que depuis 1900, elle a inspiré toute la politique du plus grand corrupteur de la vie politique italienne : Giolitti. Elle a inspiré aussi la politique des réformistes. C’est cette politique qui fit faillite déjà dans le climat relativement tranquille de l’avant-guerre, car l’intégration des masses populaires dans l’État (bourgeois) ne pouvait signifier pour, celles-ci, surtout en Italie, que la renonciation passive à toute amélioration et à tout progrès réel. Elle ne pouvait signifier aussi que la mort de toute conscience de classe du prolétariat italien, dont les divers tronçons n’auraient servi que (le suppôt de la politique des divers groupements industriels et agraires de la Péninsule. Les « Eccidi proletari » (les massacres des prolétaires) qui ensanglantèrent, avec une fréquence tristement fameuse, la vie politique italienne dans les 14 années qui précédèrent la guerre mondiale, ont démontré que cette intégration (intégration volontaire et de collaboration, bien entendu : l’intégration par la force, le fascisme l’a effectuée) n’était qu’un rêve. D’autant plus chimérique devait -elle paraître - et était-elle - dans la situation d’après guerre, lorsque toutes les masses étaient lancées en avant vers de nouvelles conquêtes politiques et sociales, et lorsque, pour pouvoir continuer d’exister, les classes exploiteuses avaient besoin de les chasser en arrière. Intégrer les masses dans l’État, après la guerre, aurait signifié non leur permettre, ainsi que le pense Rossi, d’utiliser les leviers de celui-ci pour consolider et étendre leurs conquêtes, mais aurait signifié briser leurs forces et les soumettre spontanément (au moyen des mitrailleuses social-démocrates) à l’exploitation renforcée des capitalistes et des agrariens.
Mais est-ce qu’au moins cela aurait épargné à l’Italie la domination fasciste ? Répondre par un oui ou par un non à cette question, cela a l’air un peu hors du temps... Les événements ont résolu le problème à leur façon. Toutefois il faut considérer ceci : nous avons déjà des expériences similaires à celles préconisées par Rossi : entre autres, en Autriche et en Allemagne, et plus récemment en France et en Espagne. Dans les deux premiers cas le fascisme a vaincu presque sans combattre. La résistance opposée par les ouvriers viennois en 1934 va à l’encontre des moyens préconisés par Rossi. L’intégration des masses dans l’État opérée en Autriche et en Allemagne par la collaboration de la social-démocratie au gouvernement a servi uniquement à arrêter la marche de la révolution, comme premier pas, pour lui tordre définitivement le cou.
En France, le passage de Blum au gouvernement n’a modifié en rien l’attitude de l’État en faveur de la classe ouvrière. Il a seulement réussi à faire avaler à celle-ci une politique d’ensemble qu’aucun gouvernement non de « Front Populaire » n’aurait été capable - dans les rapports de force donnés - de lui imposer. Sitôt que Blum esquissa un geste de résistance (si l’on peut dire...) il a été mis à la porte gentiment. En Espagne, le coup d’arrêt contre Franco a été donné par les masses insurgées contre la tentative fasciste et contre... l’État « républicain ». Celui-ci, non seulement dans tous ses rouages, mais jusque dans les membres de son gouvernement, ou passe ouvertement à Franco, ou était prêt à la capitulation. Dans la mesure où les masses de l’Espagne « républicaine » ont été « intégrées » dans l’État bourgeois depuis juillet 1936, la guerre civile contre le fascisme a été transformée toujours plus en une guerre entre clans liés aux impérialistes rivaux. Les buts spécifiques du prolétariat et des larges masses dans la lutte contre le fascisme sont chaque jour plus mis à l’écart, et à leur place on introduit des buts bourgeois-impérialistes. De sorte que les masses voient toujours moins clairement pourquoi elles versent leur sang ; ce qui se traduit par une aide considérable à Franco. Les vrais défaitistes de la lutte antifasciste sont encore une fois ceux qui, au service de la bourgeoisie nationale et de l’impérialisme étranger, enlèvent aux masses les raisons essentielles de leur dévouement et de leur résistance jusqu’à la mort.
Ces quelques exemples nous autorisent à affirmer que l’intégration des masses italiennes dans l’État (en admettant qu’elle fut possible) n’aurait pas évité le fascisme. Peut-être lui aurait-elle frayé un autre chemin pour arriver au but. Il faut souligner en outre que le fascisme n’est pas seulement un moyen pour garantir à la bourgeoisie l’exploitation « pacifique » des masses à l’intérieur du pays. C’est surtout un moyen pour développer sa puissance extérieure. Exploitation « pacifique » à l’intérieur et puissance extérieure sont les conditions nécessaires sans lesquelles toute bourgeoisie nationale est vouée à la décadence et à la mort. La question se pose donc : ou les masses « intégrées » se présentent volontairement, spontanément, à la politique d’auto-esclavage et de pillage impérialiste, ou elles sont vite « désintégrées » et écrasées sans ménagement. C’est-à-dire qu’elles sont « intégrées » dans l’État à la manière fasciste. Il n’y avait pas d’autres alternatives possibles en Italie pour ceux qui, comme Rossi, se basent sur le maintien du capitalisme et de son État.
De cette position initiale découle aussi la position de Rossi sur tous les autres problèmes soulevés dans son livre. Nous sommes obligés d’aller vite.
Toute la critique de Rossi contre la social-démocratie italienne se réduit à ceci : elle devait entrer dans le Gouvernement. Pourquoi faire ? Pour empêcher que la place... soit occupée par d’autres ! Seulement, il ne suffit pas d’occuper la place, il faut aussi, entre autres, décider qui paye la casse de la guerre. Est-ce la bourgeoisie ? Mais alors il ne reste plus d’autres ressources que de l’exproprier et de l’abattre. Mais Rossi sait très bien que ce n’est pas pour cela que la collaboration socialiste était sollicitée. Du reste, cela aurait été la seule collaboration à laquelle les « socialistes » à la Turati se seraient résolument refusés de toutes leurs forces. Est-ce donc le prolétariat et les masses travailleuses ? Sans doute... Mais alors il faudra les mâter, car déjà elles ne peuvent et ne veulent plus vivre dans leur situation présente. Le dilemme « perfide » se représente toujours. Les « socialistes » qui étaient foncièrement hostiles à toute révolution en Italie ont certainement commis un crime en se refusant à la collaboration gouvernementale. Il aurait été mille fois mieux qu’ils jouent leur rôle ouvertement (et dans ce cas, même indirectement, la classe ouvrière pouvait en tirer des avantages) que de se réduire à poignarder la révolution dans les coulisses. Car le « nullisme » maximaliste et l’inexpérience, plus tard, des jeunes cadres communistes ne peuvent nullement « justifier » ou atténuer la trahison des autres.
Du reste, envisagée ainsi que le fait Rossi, la collaboration des socialistes au gouvernement n’aurait que réduit ceux-ci au rôle de simples pantins aux mains de leurs « alliés ». Rossi, en effet, pose la question en ces termes sur le terrain de la force dans le pays, le prolétariat et les masses travailleuses ne peuvent être que battues. Il faut donc entrer au gouvernement pour utiliser les forces de l’État. Mais si cela est vrai, alors ceux qui entrent dans le gouvernement doivent le faire en acceptant les conditions imposées par l’adversaire (l’adversaire des masses travailleuses). Et celui-ci n’est pas assez bête pour offrir à celui qui se trouve à sa merci les armes pour se faire abattre ; d’ailleurs tous ceux qui ont offert la « collaboration » aux socialistes (Nitti, Giolitti, etc..) leur ont tenu ce simple langage : ou vous entrez dans le gouvernement et nous aidez à étrangler le mouvement ouvrier, ou nous serons forcés de le faire avec la Garde royale et avec les bandes fascistes. Toute la stratégie de Rossi consiste dans l’acceptation de cette collaboration.
C’est pourquoi il n’a que du mépris pour ces pauvres socialistes bolonais qui, devant les menaces fascistes protégées ouvertement et ostensiblement par le gouvernement qui offrait aux socialistes de collaborer, décident de se défendre eux-mêmes. Il fallait, selon lui, demander à l’État de défendre ses propres institutions. Et après ? Si l’État considère que pour défendre ses institutions il faut y pousser les socialistes élus par les masses ? Si, pour y arriver, il arme les fascistes, les encadre d’officiers de l’armée et les pousse à l’attaque protégés par les forces de la police ? Les prophètes désarmés sont voués à la défaite ; mais celui qui se met sous la protection des armes de l’adversaire qui veut l’abattre n’a pas de meilleures chances d’y échapper. Rossi critique à juste titre Mateotti lorsque celui-ci invite les paysans de Polisine à ne pas résister par les armes aux fascistes. Mais il critique parce que, selon lui, la non-résistance à la base devait avoir comme complément une action encore plus énergique à Rome. Mais quelle action énergique pouvaient-ils mener à Rome ceux qui y arrivaient des provinces en quémandeurs, la queue et les oreilles déchirées par les morsures des loups fascistes que Rome protégeait et armait ? N’est-il pas évident qu’ils ne pouvaient qu’être l’objet de la politesse ironique des concierges des ministères ? N’est-il pas évident que pour peser à Rome il fallait être en condition de détruire les nids fascistes que la capitale organisait dans les provinces ? Et dans ce cas, où aller trouver la « collaboration » ?
Rossi discute dans son livre aussi le problème des Soviets, des Communes et des Bourses du Travail. Au lieu de poursuivre de fantomatiques Soviets étrangers à l’expérience italienne, il fallait, selon Rossi, s’appuyer sur les Bourses du Travail et sur les Communes. Ces deux organismes auraient pu substituer avantageusement les Soviets. Substituer pour quoi faire ? Pour entrer dans une combinaison ministérielle la corde au cou ? Sans doute, pour faire cela les Soviets sont inutiles. Mais l’expérience italienne a démontré, elle aussi, que le Soviet n’est nullement un organisme spécifiquement russe. Dans les usines, au cours des grèves, pendant les manifestations contre la cherté de la vie, en mille et mille occasions, les ouvriers, les masses, ont spontanément donné vie à des organismes qui les réunissaient et les dirigeaient en dehors et au-delà des limites des Bourses du Travail (sans parler des communes, institutions de l’État bourgeois).
Le fait que les dirigeants du Parti Socialiste Italien (les Bombacci, les Gennari et autres abrutis de cette espèce), au lieu de s’appuyer sur l’expérience des masses, voulaient créer des « soviets » tels qu’ils les concevaient dans leur pauvre cerveau, n’enlève rien au fait que ces organismes étaient trouvés, au moins dans leur forme embryonnaire, spontanément par les masses chaque fois qu’elles en avaient besoin. Cela déplaisait beaucoup aux mandarins réformistes et à leurs avocats mais cela était un fait.
En dépit des idées de son auteur, nous recommandons particulièrement aux jeunes la lecture du livre de Rossi. Ils pourront y apprendre beaucoup de choses. Avant tout l’incapacité, la carence, la trahison des dirigeants des partis prolétariens italiens face au fascisme leur enseigneront (il faut l’espérer) à trouver d’autres chemins pour vaincre ce terrible ennemi. Et ensuite ils verront par quels moyens le fascisme italien, dirigé par Mussolini, est parvenu au pouvoir. Ils verront avant tout que le fascisme s’est présenté du premier moment comme une organisation de combat, une organisation armée. Il a su exploiter à fond les moyens légaux et les moyens illégaux pour atteindre son but. Il a utilisé largement les forces de l’État pour protéger son action, mais il s’est préoccupé à chaque instant d’avoir une force armée à lui, ne dépendant que de lui. Et pas seulement une force armée, mais aussi une police, des moyens de communication et de liaison : en somme tout ce que doit avoir une organisation, un parti qui veut réellement conquérir le pouvoir. Du livre de Rossi il se dégage des leçons de stratégie et de tactique politique de la plus haute importance pour les jeunes qui, rompant avec le socialisme à la Blum et avec le stalinisme, se rangent sous le drapeau de la Quatrième Internationale pour vaincre là où les autres ont perdu, failli et trahi.

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