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Histoire de la Chine 1911-1949

jeudi 19 mars 2009, par Robert Paris

1921-1927 : La direction de l’IC provoque l’échec de la 2
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révolution chinoise en
soumettant le parti ouvrier à la bourgeoisie nationale

1. Au 19e siècle, la Chine est confrontée d’une part aux révoltes paysannes et d’autre part à l’immixtion de
pays plus avancés, déjà capitalistes. L’économie est archaïque et la dynastie Qing d’origine mandchoue,
malgré ses tentatives, se révèle incapable de faire face à la pression de l’étranger, au premier chef la
Grande-Bretagne, mais aussi Russie, Portugal, Japon, France, Allemagne… Lors des « guerres de l’opium »
dénoncées par Marx et par Engels, l’Angleterre, d’abord seule (1843-1842), puis associée à la France (1858-
1860), impose l’ouverture unilatérale au commerce international. En 1894-1895, le Japon mène une guerre
victorieuse contre la Chine qui lui permet de prendre pied en Mandchourie, de conquérir la Corée et
Formose (Taiwan). En 1900, un mouvement xénophobe et technophobe parti des campagnes, la « révolte
des boxeurs », est abandonné par l’empire et écrasé par l’intervention conjointe de tous les bandits
impérialistes. Les « traités inégaux » ratifient l’ouverture aux marchandises étrangères, la tutelle étrangère
sur des « concessions » à Shanghai, Canton, etc. et la colonisation ouverte de Macao, de Hong-Kong, de
l’Indochine, de Taiwan, de la Birmanie.

2. En 1911, éclate la première révolution chinoise, saluée par Lénine. Un soulèvement renverse la dynastie
discréditée et impotente. La bourgeoisie émergente en prend la tête à Shanghai et dans le Yangzi. La
présidence de la République est remise à Sun Ihsien, le fondateur d’un parti nationaliste, la Ligue jurée
(Guomindang). Mais il échoue à fonder une République unie. Le dépeçage de la Chine se poursuit : outre
les concessions et les colonies, les provinces sont livrées aux « seigneurs de guerre » issus de l’état-major de
l’armée impériale et liées à telle ou telle puissance étrangère. La théocratie bouddhiste du Tibet en profite
pour prendre son indépendance.

3. Sous l’impact de la révolution russe, un groupe d’avant-garde autour de Chen Duxiu crée en 1921 un parti
communiste, section de l’Internationale communiste. Le PCC s’implante dans la classe ouvrière et
commence à diriger des grèves, participe souvent à la direction des syndicats ouvriers naissants. Le Parti
communiste chinois se tient alors dans le cadre des thèses de l’Internationale communiste : indépendance
du parti ouvrier et alliance avec le mouvement national révolutionnaire, pour prendre la tête des masses
opprimées et en particulier des paysans.

4. Mais la révolution russe reste isolée. Lénine mort et Trotsky écarté, les bureaucrates de l’URSS menés par
Staline entendent désormais profiter tranquillement des privilèges que leur confère l’administration du
pays. Les partis communistes sont subordonnés partout après 1923 à la recherche d’alliances par l’URSS.
Dans cette perspective, Zinoviev, Staline et Boukharine obligent le Parti communiste chinois à rejoindre le
Guomindang, l’expression politique de la bourgeoisie chinoise émergente. Selon l’IC en voie de
stalinisation, un « bloc des quatre classes » nationales doit regrouper la classe ouvrière, la paysannerie, la
petite-bourgeoisie urbaine et la bourgeoisie. L’incarnation de cette alliance de classes est censée être le
Guomindang.

5. À partir de 1922, les grèves se multiplient dans les grandes villes. Elles se heurtent aux autorités
britanniques et japonaises, car la plupart des usines appartiennent à des capitalistes étrangers. Les
étudiants se jettent dans la lutte anti-impérialiste. Les paysans sont prêts à saisir les terres des grands
propriétaires et usuriers. Tous les traits d’une situation révolutionnaire se réunissent, avec le prolétariat en
fer de lance de la lutte anti-impérialiste et l’apparition de soviets.

6. Les capitalistes chinois et les propriétaires fonciers s’inquiètent de cette effervescence des exploités des
villes et des campagnes. Le général Jiang Jieshi, le principal chef militaire du Guomindang, mène le 20
mars 1926 un coup d’État à Canton qui lui permet de prendre la tête du Guomindang. Sa première mesure
est d’interdire toute propagande communiste. Chen et la direction du PCC veulent rompre avec le
Guomindang. Pourtant, au même moment, le Guomindang est admis sur proposition de Staline et de
Boukharine comme membre de l’Internationale communiste. Sur consigne de l’IC, le Parti communiste
freine les masses ouvrières et paysannes et réaffirme se confiance au Guomindang. À l’approche de l’armée
nationaliste, les ouvriers de Shanghai s’insurgent en février 1927. Au prix de durs affrontements, ils se
rendent maîtres de la ville. L’armée nationaliste bourgeoise, sous la conduite de Jiang Jieshi, se retourne
contre le prolétariat sans méfiance le 12 avril 1927. Au moins 5 000 travailleurs sont assassinés avec la
complicité du grand banditisme (les triades) de Shanghai et des puissances impérialistes.

7. La terreur blanche règne. La panique que la défaite de sa stratégie soulève conduit Staline à minimiser la
défaite. Puis il déclare, à contretemps, la Chine mûre pour la révolution et déclenche, pour se couvrir, des
soulèvements dans les campagnes (la « Moisson d’automne ») et une insurrection minoritaire dans l’autre
métropole du pays (la « Commune de Canton »), qui aboutissent à de nouveaux massacres de plusieurs
milliers de travailleurs. Les militants du PCC qui remettent en cause la ligne de l’IC, dont Chen Duxiu et
Peng Shuzhi, ont exclus pour « trotskysme ». En effet, pour l’Opposition de gauche de l’IC et la 4
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Internationale, « l’étapisme » et du « front uni(que) anti-impérialiste » sont caducs. La révolution en Chine
et dans les autres pays dominés doit être permanente : dirigée par le prolétariat, arrachant la jeunesse et la
paysannerie à la domination de la bourgeoisie nationale, sa victoire ne saurait s’arrêter aux tâches
démocratiques.

1927-1949 : le PCC, parti stalinien à base paysanne, continue à tendre la main à la
bourgeoisie

8. Mao Zedong, un dirigeant du PCC qui a participé avec zèle au Guomindang et qui a participé à la « Moisson
d’automne », cherche refuge dans les campagnes en créant une « Armée de libération du peuple ». Le PCC
suit les tournants de la bureaucratie du Kremlin. En 1929, ses troupes, dont celle de Mao, se lancent
prématurément à l’assaut de grandes villes, dans le cadre de la « 3
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période », gauchiste, de l’IC. En 1936,
quand un général du Guomindang mécontent arrête Jiang Jieshi, Mao le fait libérer, dans le cadre du
tournant de l’IC vers les « fronts populaires ». En 1937, quand le Japon envahit la Chine, le PCC propose de
nouveau le « front unique anti-impérialiste » à la bourgeoisie nationale et à son Guomindang. Le PCC, par
conséquent, freine le mouvement paysan, ce qui facilite la conquête japonaise qui démontre sa barbarie à
Nankin. Malgré les concessions du PCC, le Guomindang est plus soucieux de lutter contre lui que contre
l’envahisseur. L’APL, qui protège les paysans et qui s’oppose plus résolument que le Guomindang au Japon,
élargit progressivement son soutien populaire et sa base géographique au détriment du Guomindang.

9. Les armées de guérilla et le Parti communiste chinois sont, durant toute cette période, des organisations
staliniennes particulières, passablement différentes des partis « communistes » d’Europe ou d’Amérique.
La base du PCC n’est pas ouvrière, mais paysanne. Sa hiérarchie politico-militaire fonctionne déjà comme
un appareil d’Etat dans les territoires qu’ils contrôlent. Dans les « zones rouges », Mao et sa clique vont
purger régulièrement l’APL et le PCC de leurs adversaires en recourant aux calomnies, mais aussi aux
arrestations, tortures, simulacres de procès et exécutions que permet la détention d’un pouvoir politique.
C’est le cas en particulier à Futian en 1930 et à Yan’an en 1942. En 1938, Mao s’assure le contrôle du PCC
avec l’approbation du Kremlin et jouit dès lors d’un véritable culte dans les territoires contrôlés par l’APL,
un trait typique du stalinisme.

10. Après la défaite du Japon, en 1946, Jiang Jieshi se retourne ouvertement contre le PCC, avec l’aide des
Etats-Unis. Pour résister aux armées nationalistes, pour avoir le soutien des paysans pauvres, le PCC et
l’APL sont contraints de s’en prendre dans une certaine mesure aux propriétaires fonciers. Bien que le
partage des terres qu’ils décident soit très partiel, les paysans pauvres se reconnaissent dans l’APL, drapée
de l’autorité de la révolution russe et de la victoire de l’URSS dans la guerre. Entre 1946 et 1948, l’armée de
libération du PCC est rejointe par 1,6 millions de recrues. En 1949, l’État contrôlé par Jiang Jieshi
s’effondre. Malgré la réticence de Staline, les armées paysannes à direction stalinienne s’emparent une par
une des grandes villes, tout en appelant les ouvriers et les employés à continuer le travail. En 1949, Mao
proclame la République populaire de Chine. Jiang se réfugie à Formose (Taiwan). Mao sort pour la
première fois de Chine, pour se rendre à Moscou.

11. Le soulèvement de la Garde nationale et la proclamation de la Commue de Paris en 1871, l’insurrection
organisée par le Parti bolchevik et la remise du pouvoir aux soviets en 1917 suffisaient à fonder un Etat
ouvrier, alors qu’il n’y avait pas encore expropriation du capital, sans parler d’un plan pour l’économie.
Mais l’avancée de l’Armée de l’URSS en Europe centrale en 1944-45, la prise du pouvoir en 1944 par Tito en
Yougoslavie et par Hoxha en Albanie, la prise du pouvoir par Mao en 1949, la prise du pouvoir par Castro
en 1959, ne permettaient pas de conclure à la fondation d’un Etat ouvrier, car il ne s’agissait pas de
directions prolétariennes et internationalistes. Dans un premier temps, Mao tente de préserver l’alliance
avec la bourgeoisie, en installant un gouvernement de coalition, en limitant les nationalisations et en
réprimant les militants révolutionnaires, en particulier ceux du Parti communiste révolutionnaire (section
chinoise de la 4
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Internationale).

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