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L’énigme du réel

lundi 21 novembre 2016, par Robert Paris

Heinrich Heine :

« Oh ! expliquez-moi l’énigme, L’antique et douloureuse énigme, Sur laquelle tant de têtes se sont penchées : Têtes à calottes de hiéroglyphes, Têtes en turban et barrettes noires, Têtes coiffées de perruques et mille autres Pauvres fronts humains baignés de sueur. Dites-moi, la vie humaine a-t-elle un sens ? D’où vient l’homme ? Où va-t-il ? Qui habite là-haut dans les étoiles d’or ? »

L’énigme du réel

Avertissement : nous parlons ici énigme, mystère, mondes inconnus mais il ne s’agit ni d’un article d’ésotérisme, ni d’une profession de foi mystique, ni d’un quelconque dogme religieux. Nous parlons de science du monde réel… Il est question d’y montrer que c’est la démarche scientifique qui se nourrit du mystérieux, de l’inexpliqué et pas seulement de l’expliqué, du non encore raisonné et pas seulement du déjà compris. L’énigme n’est pas ici une insuffisance de l’homme mais un symtôme que l’on touche aux points fondamentaux, aux nœuds de la compréhension des enchaînements du fonctionnement du monde matériel réel… Pourquoi parler de monde réel si nous ne croyons pas au monde des dieux, au monde des esprits, au monde des sorciers, au monde des diables, au monde immatériel ? Eh bien, il est vrai que ce monde des idées n’existe pas et cependant l’homme appréhende le monde par ses sens mais aussi au travers de ses idées et il convient de ne pas cesser de confronter ces idées au monde réel… Il y a énigme à partir du moment où des phénomènes réels, bien définis, bien reconnus, que chacun peut observer, sont en contradiction avec ce que la raison imaginerait. Car il y a aussi énigme à chaque fois que le réel lui-même est intrinséquement contradictoire et il s’agit de bien distinguer les deux, les limites de la compréhension humaine et les limites de la réalité du monde…

On a l’habitude de présenter la science, contrairement à la théologie, à la métaphysique, au mysticisme, comme une résolution accomplie de toutes les énigmes présentes et même à venir et une manière assurée de fonder le monde sur sa base matérielle. Mais le matérialisme suppose-t-il que l’on supprime la question quand on a obtenu une première réponse du réel ? Cela ne sera pas le cas en tout cas dans le texte qui suit…. La réponse scientifique, selon nous, loin d’effacer la question à la manière des questions posées aux hommes politiques tel que les présente Coluche, ne signifie pas que l’on ne comprenne plus la question !!! Au contraire, une véritable question scientifique, qui n’est pas un faux paradoxe, ne va faire que s’approfondir au fur et à mesure des découvertes et des raisonnements.

Il y a bien sûr tout un courant mystico-magique qui agite les énigmes du monde pour affirmer l’existence d’un autre monde que le monde réel mais il n’est pas nécessaire d’imaginer l’existence de deux mondes ni de plusieurs pour que le monde réel soit énigmatique. Einstein, nullement porté vers le magique, affirmait : « La plus belle chose dont on puisse faire l’expérience, c’est le mystère. » Ce qui rend le monde mystérieux, c’est que l’intelligence humaine n’a jamais fini de l’explorer, de l’expérimenter, de raisonner dessus, de tenter d’appréhender rationnellement son fonctionnement. Ce caractère inachevé de la compréhension humaine du monde ne signifie pas que le monde soit irrationnel mais que sa rationalité soit difficilement appréhendable par la conception humaine du rationnel.

Qu’y a-t-il d’énigmatique dans la réalité qui nous entoure ? L’énigme sous-entend différentes sortes de situations où se trouve l’homme en face du monde : des cas où sa psychologie est perturbée par le réel, des cas où ses raisonnements atteignent des limites, des cas où ses connaissances sont trop lacunaires ou ses capacités encore trop insuffisantes. Cela ne signifie pas que le monde se dérobe définitivement à la démarche de la science ni que cette dernière ait des défauts tellement importants qu’il faille chercher des voies autres que la science pour comprendre le monde.

L’énigme ne nous sort nullement de la démarche scientifique. Elle peut parfaitement en être une étape indispensable.

Le fait de considérer la science non comme un domaine fermé du savoir mais comme un domaine ouvert de relations, dialectiques et contradictoires, entre rationnalité et réalité, ne laisse pas spécialement place à l’irrationnel. Comme l’expose Michel Cazenave dans « Dictionnaire de l’ignorance » :

« Il est bon de temps en temps d’inverser la démarche et, pour ne pas céder au vertige du triomphe, de se demander en quelque sorte quelles peuvent être les choses que nous ignorons encore… S’interroger sur les choses que nous ne savons pas suppose évidemment que nous savons ne pas les savoir. Autrement dit, l’ignorance en ce point ne saurait être un quelconque abîme, une « région noire » de la connaissance où tout discours s’évanouirait : l’ignorance que nous visons est au contraire raisonnée ; elle est la constatation qui vient signer une démarche rigoureuse du savoir organisé, construit et rationnel, elle est un appel, pour ne pas dire une contrainte à poursuivre l’enquête scientifique… On l’aura compris, je l’espère, que cette volonté ici affichée de procéder, contrairement à la coutume, selon une démarche négative, ne vient d’aucune manière induire un quelconque soupçon quant à la validité de la science, ni introduire à un quelconque relativisme où la science n’aurait plus rien à voir avec quelque chose qui soit de l’ordre de la vérité – ou pour ne pas faire d’hypothèse métaphysique, de l’ordre minimum d’un rapport existant à du réel qui résiste et ne laisse pas dire n’importe quoi. »

Le questionnement ne s’oppose pas du tout à la démarche rationnelle à l’égard du réel, elle y est au cotnraire indispensable, même si elle nécessite de déstabiliser parfois des opinions solidement établies et que l’on croyait parfaitement établies rationnellement. Elle ne mène pas au retour au pouvoir de l’irrationnel qui a repris des couleurs, non pas grâce à des échecs des sciences mais à ceux de la société capitaliste et à la méfiance généralisée dans toutes les autorités, même les autorités scientifiques qui font partie du même monde capitaliste.

Que le monde reste une énigme, qu’il le reste même toujours, ne signifie nullement que notre démarche de connaissance serait fausse, inutile, trompeuse, mensongère ou insignifiante. Elle veut dire que nous n’accédons pas directement à la vérité sur le monde sans passer par les erreurs. Celles-ci sont indispensables car c’est en heurtant les parois du labyrinthe que nous progressons et parfois nous avons exploré une impasse et nous recommençons à cheminer en palpant les parois vers d’autres parties du labyrinthe. Il n’y a pas moyen d’avancer sans cheminer en essayant diverses voies, en s’assurant que celles-ci se poursuivent et nous permettent d’avancer. Ceux qui affirment avoir une vérité toute faite et éternelle comme ceux qui affirment que tout est faux ou ne sert à rien nous plongent dans le noir profond.

La connaissance scientifique n’est pas concevable sans une dialectique. On ne peut ni s’en tenir aux faits ni s’en passer. On ne peut se contenter de la rationalité humaine ni s’en passer. Et pourtant les deux se heurtent sans cesse, se contredisent, se composent puis s’opposent. Et cela sans fin. Sans arrêt de nouveaux raisonnements bouleversent l’ancien édifice et sans cesse aussi de nouvelles expériences bouleversent elles aussi l’ancien édifice. Aucune science ne peut se passer de cette dialectique qui oppose et se compose à la fois du rationnel et du réel. Et le réel, ce que l’expérience nous apprend, est lui-même composé en grande partie de rationnel (l’expérience doit être pensée). Et le rationnel, ce que l’homme construit comme concepts, comme raisonnements, comme lois, est lui-même composé d’expériences (d’où on tire les abstractions convenables et où on les vérifie).

Mais, si les deux se composent, ils ne s’en opposent pas moins sans cesse et, périodiquement, ils se remettent en cause mutuellement, amènent un bouleversement complet de la pensée scientifique.

Mais l’existence de remises en questions périodiques ne signifie pas que la dmarche générale de la science soit à récuser, à dénoncer, à abandonner. Au contraire. C’est la démarche d’une vérité toute faite, une fois pour toutes qui doit être abandonnée.

Nombre d’auteurs ont remarqué que la connaissance et l’ignorance sont très loin d’être deux domaines séparés par une frontière nette, bien définie, et qu’au contraire l’ignorance est sise au sein de la connaissance et inversement dans des fractales à toutes les échelles.

Toutes ces remarques ne limitent pas nos capacités, elles visent seulement à comprendre le mécanisme de notre compréhension. Elles ne mènent ni à un relativisme général, ni à un idéalisme, ni à un dualisme corps/esprit.

Il n’y pas de domaine des sciences où l’on n’ait pas atteint de tels progrès de compréhension que l’on ne remettra pas en question sans les agglomérer à nos nouvelles manières de voir. Même des transformations radicales à venir ne pourront qu’expliquer les découvertes anciennement réalisées. Bien des changements peuvent affecter toutes les sciences mais aucun d’entre eux ne rendra complètement absurde les thèses actuellement défendues.

Il est nécessaire de le préciser devant les affirmations anti-scientifiques qui circulent un peu partout, sous prétexte de parasciences, de mysticismes, de conceptions métaphysiques et miraculeuses diverses.

Même si la matière, la vie, le cosmos demeurent de grandes énigmes, ce que nous en savons devra nécessairement s’intégrer à ce que nous découvrirons par la suite.

Quelle est l’énigme centrale de la vie ? Il y a en fait plusieurs niveaux de celle-ci. Enigme de l’apparition de la cellule, énigme de la formation d’un être vivant à partir d’une multitude de cellules vivantes, énigme de l’évolution des dynasties cellulaires, énigme de Comment la matière inerte a pu produire la matière vivante ? Comme chacun sait, toutes les familles diverses de cellules qui ont des fonctionnement, des formes et des particularités aussi différentes qu’une cellule nerveuse et un globule rouge sont toutes le produit de filiations parties de la même cellule-mère, l’œuf fécondé originel, et c’est la première énigme du vivant. Comment a pu se produire cette diversification alors que la multiplication des cellules fonctionne sur la base d’un processus dans lequel une cellule donne deux cellules ayant exactement le même ADN sauf erreur de reproduction.

Michel Cazenave écrit, en introduction à son « Dictionnaire de l’ignorance » :

« Il est d’usage constant, lorsqu’on rédige un livre de sciences, d’exposer ce qu’on sait dans une discipline donnée, d’en marquer les tenants et les aboutissants, d’en souligner les conséquences et de montrer à la fin les problèmes qui se posent. (…) Pourtant, il est bon de temps en temps d’inverser la démarche et, pour ne pas céder au vertige du triomphe, de se demander en quelque sorte quelles peuvent être les choses que nous ignorons encore. (…) Nous n’avons aucune idée de ce qui se passe en cosmologie avant le temps de Planck, à 10 puissance moins 43 seconde après l’hypothétique « big bang » originel. (…) Notre ignorance actuelle, on s’en aperçoit facilement, est la conséquence d’un savoir immense, c’est une igorance scientifiquement et rationnellement construite. (…) On aura compris, je l’espère, que cette volonté ici affichée de procéder, contrairement à la coutume, selon une « démarche négative », ne vient d’aucune manière induire un quelconque soupçon quant à la validité de la science, ni introduire à un quelconque relativisime où la science n’aurait plus rien à voir avec quelque chose qui soit de l’ordre de la vérité – ou, pour ne pas faire d’hypothèse métaphysique, de l’ordre minimum d’un rapport existant à des du réel qui résiste et ne laisse pas dire n’importe quoi. »

John Maddox affirme ainsi dans « Ce qu’il reste à découvrir », un ouvrage de sciences tourné vers l’avenir :

« Tous les êtres vivants sont des aberrations au sens où ils ne se confortent pas à la seconde loi de la thermodynamique telle qu’elle s’applique aux systèmes isolés. (...) Pour des raisons pratiques autant que philosophiques, il nous faut mieux comprendre le rapport entre la production d’énergie solaire et la complexité de la biosphère terrestre. (...) Depuis des années Ilya Prigogine cherche un cadre philosophique susceptible de recevoir ces questions. »

« Les constituants de la matière tangible ne représentent pas des données arbitraires de notre vie : leurs propriétés résultent de la structure globale de l’univers, et de la façon dont il a vu le jour. »

« Le vitalisme selon lequel les êtres vivants possèdent une qualité intrinsèque qui les distingue des objets inanimés, est mort. »
« Les principes sous-jacents à la vie sont universels. C’est l’un des grands acquis intellectuels de ces dernières décennies. »

« Le rythme échevelé des découvertes, ces dernières années, a intellectuellement coupé le souffle (des savants), et il leur manque de comprendre véritablement ce dont ils parlent. (...) L’attention ne peut que se tourner vers les fondements conceptuels. »

« Le trait distinctif d’une cellule différenciée, c’est que seuls quelques gènes sur l’ensemble sont actifs. »

Fin des citations de Maddox

« Moi, Asimov », Isaac Asimov :

« La connaissance scientifique possède en quelque sorte des propriétés fractales : nous aurons beau accroître notre savoir, le reste - si infime soit-il - sera toujours aussi infiniment complexe que l’ensemble de départ. »

Marceau Felden dans « La physique et l’énigme du réel » :

« Le fait que l’homme soit parvenu à modéliser rationnellement l’univers et à le doter d’une histoire, donc à lui donner le statut d’objet physique c’est-à-dire à le banaliser, est ontologiquement l’un des résultats scientifiques aux conséquences les plus importantes. En effet, par ses implications philosophico-religieuses, une telle démarche rompt un tabou ancestral et permanent, allant ainsi à l’encontre de toutes les traditions. C’est pouquoi elle est, ou reste iconoclaste pour nombre de nos contemporains, au même titre que, par exemple, les travaux de Darwin et de ses successeurs. Pourtant, comme le montrent les développements scientifiques les plus récents, cette nouvelle perception de l’univers représente une avancée conceptuelle d’une ampleur sans précédent, dont on est loin d’avoir apprécié toutes les conséquences. A ce titre, la relativité s’inscrit dans l’ordre général du mouvement de l’évolution de la pensée et de la connaissance rationnelles. »

Einstein :

« Tout ce que nous connaissons de la réalité vient de l’expérience et aboutit à elle. Des propositions purement logiques sont totalement vides au regard de la réalité. De là résulte que nos conceptions du réel physique ne peuvent jamais être définitives. »

Einstein dans son introduction au paradoxe EPR (1935) :

« Dans toute réflexion un peu sérieuse concernant une théorie physique, il importe de prendre en compte la distinction entre la réalité objective, laquelle est indépendante de toute théorie, et les concepts physiques avec lesquels la théorie opère. Ces concepts sont faits pour correspondre à la réalité objective et c’est à l’aide de ces concepts que nous nous représentons cette réalité. »

Einstein en 1955 à propos de la physique quantique :

« J’avoue ne pouvoir attacher qu’une importance transitoire à une telle interprétation. Je crois toujours en la possibilité d’un modèle de réalité, c’est-à-dire en une théorie qui représenterait les choses elles-mêmes et non seulement la probabilité de leur intervention. »

« Entre le temps et l’éternité » d’Ilya Prigogine et Isabelle Stengers :

« L’histoire de la physique ne se réduit pas à celle du développement de formalismes et d’expérimentation, mais est inséparable de ce que l’on appelle usuellement des jugements « idéologiques ».

Grégoire Nicolis dans « L’énigme de l’émergence » :

« On appelle « émergence » une combinaison préexistante d’éléments préexistants produisant quelque chose de totalement inattendu. Un exemple classique de ce type de phénomène est celui de l’eau, dont les caractéristiques les plus remarquables sont totalement imprévisibles au vu de celles de ses deux composants, l’hydrogène et l’oxygène ; pourtant la combinaison des deux ingrédients donne naissance à quelque chose d’entièrement neuf. » expose le paléoanthropologue Ian Tattersall qui réfléchit à l’émergence du langage, car la sélection adaptive ne lui semble pas une bonne explication de son apparition : « l’apparition de la pensée symbolique ne semble nullement être le résultat d’une tendance opérant sur la longue durée, comme la sélection darwinienne l’exige. L’autre hypothèse est donc elle-ci : (...) cette innovation relève probablement de ce que l’on appelle l’émergence. » « Des phénomènes d’émergence se produisent dans toute une gamme de systèmes à l’échelle du laboratoire, depuis la mécanique des fluides jusqu’à la cinétique chimique, l’optique, l’électronique ou la science des matériaux. »

W. Heisenberg, dans « La Partie et le Tout » :

« Ce soir-là, ce fut peut-être aux environs de minuit que je me rappelai brusquement ma discussion avec Einstein, et que je me souvins de sa phrase : "Seule la théorie décide de ce que l’on peut observer." Je réalisai immédiatement que c’est dans cette remarque qu’il fallait chercher la clef de l’énigme qui nous avait tant préoccupés. J’entrepris alors une promenade nocturne à travers le Fälledpark pour réfléchir à la portée de la phrase d’Einstein. Nous avions toujours dit : on peut observer la trajectoire d’un électron dans la chambre de Wilson. Mais peut-être n’était-ce pas tout à fait cela que l’on observait réellement. Peut-être ne pouvait-on apercevoir qu’une suite discontinue de positions imparfaitement précisées de l’électron. Effectivement, ce que l’on voit dans la chambre, ce sont simplement des gouttelettes d’eau dont chacune est certainement beaucoup plus étendue qu’un électron. La question correcte devait donc être posée ainsi : Peut-on représenter, dans le cadre de la mécanique quantique, une situation où un électron se trouve à peu près - c’est-à-dire à une certaine imprécision près - en une position donnée, et possède à peu près - c’est-à-dire à nouveau à une certaine imprécision près - une vitesse donnée ? Et peut-on rendre ces imprécisions suffisamment faibles pour qu’il n’y ait pas de contradiction avec l’expérience ? Un bref calcul que j’effectuai au retour vers l’Institut confirma qu’une telle situation pouvait être représentée mathématiquement, et que les imprécisions sont liées par les relations qui ont été appelées plus tard "relations d’incertitude de la mécanique quantique". »

Marx, Manuscrits de 1844 :

« Le communisme, abolition positive de la propriété privée (elle-même aliénation humaine de soi) et par conséquent appropriation réelle de l’essence humaine par l’homme et pour l’homme ; donc retour total de l’homme pour soi en tant qu’homme social, c’est-à-dire humain, retour conscient et qui s’est opéré en conservant toute la richesse du développement antérieur. Ce communisme en tant que naturalisme achevé = humanisme, en tant qu’humanisme achevé = naturalisme ; il est la vraie solution de l’antagonisme entre l’homme et la nature, entre l’homme et l’homme, la vraie solution de la lutte entre existence et essence, entre objectivation et affirmation de soi, entre liberté et nécessité, entre individu et genre. Il est l’énigme résolue de l’histoire et il se connaît comme cette solution… L’essence humaine de la nature n’est là que pour l’homme social ; car c’est seulement dans la société que la nature est pour lui comme lien avec l’homme, comme existence de lui-même pour l’autre et de l’autre pour lui, ainsi que comme élément vital de la réalité humaine ; ce n’est que là qu’elle est pour lui le fondement de sa propre existence humaine. Ce West que là que son existence naturelle est pour lui son existence humaine et que la nature est devenue pour lui l’homme. Donc, la société est l’achèvement de l’unité essentielle de l’homme avec la nature, la vraie résurrection de la nature, le naturalisme accompli de l’homme et l’humanisme accompli de la nature. »

Einstein dans « La géométrie et l’expérience » :

« Parmi toutes les sciences, les mathématiques jouissent d’un prestige particulier qui tient à une raison unique : leurs propositions ont un caractère de certitude absolue et incontestable, alors que celles de toutes les autres sciences sont discutables jusqu’à un certain point et risquent toujours d’être réfutées par la découverte de faits nouveaux. Le chercheur d’une autre discipline n’aurait pas lieu pour autant d’envier le mathématicien si les propositions de ce dernier ne portaient que sur de purs produits de notre imagination et non sur des objets réels. Il n’est pas étonnant en effet que l’on parvienne à des conclusions logiques concordantes, une fois que l’on s’est mis d’accord sur les propositions fondamentales (axiomes) ainsi que sur les méthodes à suivre pour déduire de ces propositions fondamentales d’autres propositions ; mais le prestiges de mathématiques tient, par ailleurs, au fait que ce sont également elles qui confèrent aux sciences exactes de la nature un certain degré de certitude, que celles-ci ne pourraient atteindre autrement. Ici surgit une énigme qui, de tout temps, a fortement troublé les chercheurs. Comment est-il possible que les mathématiques, qui sont issues de la pensée humaine indépendamment de toute expérience, s’appliquent si parfaitement aux objets de la réalité ? La raison humaine ne peut-elle donc, sans l’aide de l’expérience, par sa seule activité pensante, découvrir les propriétés des choses réelles ? Il me semble qu’à cela on ne peut répondre qu’une seule chose : pour autant que les propositions mathématiques se rapportent à la réalité, elles ne sont pas certaines, et, pour autant qu’elles sont certaines, elles ne se rapportent pas à la réalité. »

Socrate :

« En vérité, Mélitus, tu dis là des choses incroyables, et auxquelles toi-même, à ce qu’il me semble, tu ne crois pas. Pour moi, Athéniens, il me paraît que Mélitus est un impertinent, qui n’a intenté cette accusation que pour m’insulter, et par une audace de jeune homme ; il est venu ici pour me tenter, en proposant une énigme, et disant en lui-même : Voyons si Socrate, cet homme qui, passe pour si sage, reconnaîtra que je me moque, et que je dis des choses qui se contredisent, ou si je le tromperai, lui et tous les auditeurs. En effet, il paraît entièrement se contredire dans, son accusation ; c’est comme s’il disait : Socrate est coupable en ce qu’il ne reconnaît pas de dieux, et en ce qu’il reconnaît des dieux ; vraiment c’est là se moquer. Suivez-moi, je vous en prie, Athéniens, et examinez avec moi en quoi je pense qu’il se contredit. Réponds, Mélitus ; et vous, juges, comme je vous en ai conjurés au commencement, souffrez que je parle ici à ma manière ordinaire. Dis, Mélitus ; y a-t-il quelqu’un dans le monde qui croie qu’il y ait des choses humaines, et qui ne croie pas qu’il y ait des hommes ? »

Laurent Sacco, « La physique des châteaux de sable : une énigme résolue ! » :

« Des énigmes se trouvent encore dans la vie de tous les jours à l’heure où l’homme se prépare à sonder la physique de l’Esprit et de la création de l’Univers. Un groupe de chercheurs allemands et français vient de répondre à l’une d’entre elles : pourquoi du sable mouillé permet-il de construire des châteaux de sable. »

Marceau Felden dans "La physique et l’énigme du réel" :

« Le paradigme fondamental de la physique classique est le suivant : partant d’un minimum de concepts définis constructivement et supposés correspondre à des éléments de réalité, elle a pour objectif de tenter d’établir une représentation cohérente et compréhensible des phénomènes physique observables à l’échelle humaine. (...) Rappelons que, pour la physique classique, les éléments de réalité et les phénomènes physiques observables qui leur correspondent sont des données primitives intuitives, naturelles et universelles, comme le sont les concepts de base fondant la géométrie d’Euclide. Bien qu’étant implicite, semblai tellement aller de soi qu’il n’a pas été discuté jusqu’à la découverte des géométries non euclidiennes. Mais ses limites sont rapidement apparues dans le microcosme et c’est la physique quantique qui, en posant le problème, a conduit à sa profonde remise en question. »

Robert Laughlin, « Un univers différent » :

« Dans le cas de la température, quantité qui n’a jamais eu de définition réductionniste (une seule molécule, un seul atome, une seule particule ou un trop petit nombre d’entre eux ne définit aucune température), cette conclusion est facile à comprendre et à accepter. (…) Mais, pour la charge de l’électron, c’est une autre affaire. Nous avons pris l’habitude de la penser comme un élément de base, un « cube de construction » de la nature, qui n’exigerait aucun contexte collectif pour avoir un sens. Les expériences en question réfutent cette affirmation, assurément. Elles révèlent que la charge de l’électron n’a de sens qu’au sein d’un contexte collectif : soit le vide de l’espace qui modifie cette charge de la même façon qu’il modifie les longueurs d’onde des atomes, soit une matière dont les propres effets préviennent ceux du vide. Ce rôle préventif de la matière signifie nécessairement que les principes organisationnels à l’œuvre sont les mêmes dans son cas et dans celui du vide, sinon les effets tiendraient du miracle. L’énigme de la charge de l’électron, en fait, n’est pas unique. TOUTES les constantes fondamentales exigent un contexte environnemental pour faire sens. Dans la pratique, la distinction entre quantités réductionnistes et quantités « émergentistes » en physique n’existe pas. (…) La loi physique universelle est l’iceberg dont la constante physique est la pointe émergée. (…) Comme pour les mesures universelles exactes nous avons tendance à distinguer lois d’origine microscopique et lois d’origine collective, tout en les qualifiant de « fondamentales » dans les deux cas. Et, comme pour les constantes, la différence entre ces deux catégories s’évanouit lorsqu’on regarde les expériences de près. Au fil des ans, tandis que s’allongeaient la liste des succès des lois de Newton, on a commencé à en faire un usage spéculatif. (…) Exemple : la théorie cinétique des gaz postule que le gaz est composé d’atomes qui obéissent aux lois de Newton, avec des forces répulsives à faible portée qui les amènent à se caramboler les uns les autres comme des boules de billard. Elle calcule alors que ces atomes mythiques ont une forte tendance à être enchevêtrés par leurs collisions dans des dispositions aléatoires. (…) Mais ce raisonnement a un vice évident : le comportement qui sert à mettre à l’épreuve l’hypothèse est peut-être un phénomène collectif universel. Si c’est le cas, la mesure est fondamentalement insensible aux suppositions microscopiques, telle l’existence des atomes, et ne peut donc absolument pas les vérifier. (…) Les lois de Newton, en fait, sont fausses à l’échelle des atomes. Au début du vingtième siècle, on a découvert que les atomes, les molécules et les particules subatomiques sont décrits par les lois de la mécanique quantique – règles si différentes de celles de Newton que les scientifiques ont dû faire de gros efforts pour trouver les mots susceptibles de les formuler convenablement. (…) Donc il s’avère que les légendaires lois de Newton sont émergentes. Elles n’ont rien de fondamental, mais résultent de l’agrégation de la matière quantique en fluides et en solides macroscopiques – un phénomène organisationnel collectif. »

La science est en questions

Sciences : des mondes qui restent à découvrir

Pourquoi penser la science est révolutionnaire

L’étonnement, premier pas de la démarche scientifique

L’erreur, fondement de… la vérité scientifique

La dialectique de l’expérience et de la théorie

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La Physique et l’énigme du réel

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L’énigme quantique den bandes dessinées

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L’énigme de l’intelligence humaine

L’énigme des paradoxes

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Messages

  • Einstein dans « Comment je vois le monde » :

    « La plus belle chose dont nous pouvons faire l’expérience est que le monde est mystérieux. Cette émotion fondamentale est la source de l’art et et de la science véritables. Celui qui qui ne le sait pas, qui n’est pas capable de s’interroger et de ressentir de l’étonnement, est aussi bien que s’il était mort. Ses yeux sont clos. »

    Einstein, « The World As I See It » :

    “The faitest thing we can experience is the mysterious. It is the fundamental emotion which stands at the cradle of true art and true science. He who knows it not and can no longer wonder, no longer feel amazement, is as good as dead, a snuffed-out candle.”

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