Accueil > 16- EDITORIAUX DE LA VOIX DES TRAVAILLEURS > Quelles élections peuvent changer la vie des exploités ? Celles qu’ils (...)

Quelles élections peuvent changer la vie des exploités ? Celles qu’ils organiseront eux-mêmes !

lundi 7 août 2023, par Alex, Waraa

Quelles élections peuvent changer la vie des exploités ? Celles qu’ils organiseront eux-mêmes !

Les élections à venir, professionnelles et européennes, et la stratégie du boycott

Des élections approchent ! pensent avec le sourire tous les bureaucrates syndicaux ou politiciens de gauche ou de l’extrême-gauche pseudo-révolutionnaire. C’est leur principale activité de l’année, à laquelle toutes les autres (comme le récent mouvement des retraites) sont subordonnées.

Que peuvent faire les travailleurs conscients dans de telles élections ? Tout d’abord souligner leur nature : ce sont des institutions du pouvoir bourgeois que les travailleurs sont invités à avoir l’illusion de faire fonctionner. Or l’objectif des travailleurs s’ils veulent s’émanciper est de mettre en place leur propre pouvoir et leurs propres institutions, celles d’un Etat ouvrier, au final la dictature du prolétariat comme étape vers la suppression de l’Etat tout court en même temps que des classes sociales. Le premier pas sera la destruction par les travailleurs en armes de l’Etat bourgeois et de toutes ses institutions, du Parlement aux armées et polices, mais également de tous les "comités" censés faire fonctionner la démocratie dans les entreprises.

De ce point de vue, la stratégie des travailleurs est d’aller vers un boycott complet de ces institutions de l’Etat bourgeois, donc à la non-participation à toutes ces élections. Cela, aucun parti ni syndicat parlant au nom des travailleurs ne le dit qu’il soit ouvertement réformiste (PC, LFI, PS, EELV, CGT, SUD etc) ou soi-disant révolutionnaire (LO, NPA, RP etc).

Par conséquent, les révolutionnaires et travailleurs conscients n’ont de fait aucune raison de voter pour aucun de ces partis ou syndicats, mais plutôt d’appeler au boycott actif de toutes ces élections et institutions.

La tactique de la participation

Des "révolutionnaires" de LO ou du NPA invoquent Trotsky, Lénine ou R. Luxemburg pour justifier leurs participation aux élections. Certes ces révolutionnaires y participèrent, mais ils subordonnaient cette participation à la proclamation permanente haut et fort que l’objectif final était la destruction future de ces institutions bourgeoises et la mise en place de la dictature du prolétariat, point que des groupuscules comme LO, NPA et RP ne défendent jamais dans leurs interventions devant les travailleurs.

La participation aux élections (politiques ou professionnelles) de ces groupuscules est donc dans la lignée de Millerand, le père du réformisme moderne, et pas celle des marxistes révolutionnaires. Lénine et Trotsky, qui n’excluaient pas la participation aux élections, mais appelèrent dans certains cas à les boycotter, selon, le contexte politique. Boycotter une élection n’est jamais envisagé par ces groupes d’extrême-gauche.

Mais surtout dès qu’une occasion se présente, les révolutionnaires proposent la mise en place d’embryons de pouvoir ouvrier, comme des comités de grèves. L’extrême-gauche n’a absolument pas eu ce genre de politique pendant le récent mouvement des retraites. Ces groupes comme LO, NPA et RP ne boycottent donc jamais les élections bourgeoises, mais boycottent toujours (en ne les proposant pas) les élections ouvrières de délégués d’Assemblées générales souveraines se coordonnant à tous les niveaux pour aboutir à des coordinations régionales et nationales, contre les bureaucraties syndicales.

La formule rituelle : ce n’est par les élections mais par la lutte que les travailleurs changeront la société est un moyen pour cette extrême-gauche opportuniste de s’attribuer un brevet de révolutionnaire, mais cette formule est très superficielle.

C’est seulement le caractère bourgeois des élections qui ont lieu qui les empêchent d’être un moyen de changer la société. Mais c’est la même chose pour une lutte, aussi radicale soit-elle : une grève ouvrière armée insurrectionnelle ne changera rien, si elle est dirigée par la bourgeoisie, pas plus que des élections. C’est ce que les ouvriers comprirent lors de la révolution de 1830, où les ouvriers triomphèrent ... au profit de la bourgeoisie.

Organiser l’élection de la direction d’une grève, alors qu’une intersyndicale s’auto-proclame direction "naturelle" du mouvement, c’est une lutte de classe parmi les plus difficiles à l’heure actuelle, et ce sont les néo-staliniens militants de LO, RP, NPA, POI ou autres, cadres moyens du syndicalisme qui jouent le rôle qu’avaient autrefois les staliniens : s’opposer à toute auto-organisation d’un mouvement.

Les révolutionnaires syndiqués en période de marche à la guerre

Certes tout ouvrier militant peut se retrouver secrétaire d’un syndicat, délégué central nommé par la bureaucratie syndicale et c’est dans certains cas une possibilité à ne pas manquer, car laisser la place aux réformistes serait parfois un crime, revenant à leur faire un cadeau.

Mais n’oublions pas que la plupart de ces postes, en particulier ceux de délégués syndicaux, sont justement des "cadeaux" faits par le patronat mais destinés exclusivement aux réformistes. Axer systématiquement la politique d’une organisation qui se veut révolutionnaire sur la conquête et la conservation à tout prix de tels postes est un suicide. C’est la voie principale par laquelle les organisations d’extrême-gauche en France, comme LO et le NPA deviennent de plus en plus ouvertement réactionnaires.

Nous allons trop loin ? Deux événements récents sont là pour le confirmer. Le 16 juin dernier, sur un chantier des JO-2024 dont le patron est la gauche politique qui dirige la ville de Paris (PS-EELV et PC, avec LFI comme opposition de Sa Majesté) la négligence des normes de sécurité a causé la mort d’Amara Dioumassy, ouvrier malien de l’entreprise FAYAT. C’est seulement grâce à l’action d’un délégué CGT, sans le soutien de sa Fédération, avec l’aide d’autres militants CGT que ce meurtre patronal n’est pas tombé immédiatement dans l’oubli. Le silence assourdissant de la CGT est sans doute dû à l’implication des partis de gauche. Milles liens (dont souvent la double appartenance) unissent la CGT à ces partis, qui sont de véritables organisations patronales au travers des investissements publics dont une grosse partie est le fait des collectivités territoriales. Les directions syndicales sont des cadres supérieurs du patronat. Dénoncer haut et fort cette collusion, cette Union sacrée des syndicats avec le patronat est une ligne à ne pas franchir. Par peur de perdre ses niches dans ces bureaucraties, l’extrême-gauche électoraliste s’est tue sur cette mort dans le BTP, la mort Amara Dioumassy !

Amara n’était pas français, comme la plupart de ses camarades de travail, qui n’ont pas le droit de vote aux élections politiques. Aucune des organisations d’extrême gauche ne met en avant comme porte-parole un tel ouvrier ou ouvrière étranger. LO et le NPA ont pour porte-parole des Nathalie, Jean-Pierre, Monique, Arlette, Philippe, Olivier, Pauline . Lors des récentes émeutes où le gouvernement dénonçait "l’anti-France", mettre en avant un ouvrier non-français se déclarant solidaire des protestations contre les crimes policiers aurait rendu manifeste le véritable caractère d’opposition entre la bourgeoisie et le prolétariat qu’avaient ces émeutes ! Mettre en avant des délégués syndicaux pour peser dans ces émeutes n’a pas été le choix des organisations syndicales.

Le second événement majeur récent concerne ces mêmes ouvriers venus d’Afrique. Les manifestations contre l’impérialisme français (et non contre la France, comme on veut nous le faire croire) ont abouti à une reculade, une déroute de l’armée française au Burkina-Fasso, au Mali puis au Niger.

Cette défaite de l’impérialisme français en Afrique est une victoire pour les travailleurs de France, car premièrement "Troupes françaises hors d’Afrique !" est bien ce à quoi l’on assiste. Deuxièmement parce que certains d’entre eux, surtout africains, y ont participé au travers de manifestations organisées par les pan-africanistes à Paris, manifestations boycottées par l’extrême gauche et les syndicats. Car ils sont dans l’Union sacrée !

Aucune manifestation, déclaration publique de la CGT concernant ces événements au Niger, qui sont donc classés comme les récentes émeutes urbaines : des troubles qu’ont doit "laisser passer", que la police et l’armée française doivent réprimer, les syndicats n’étant pas concernés, et assurant discrètement mais fermement leur soutien indéfectibles à la police et l’armée française.

Imitant la CGT, une organisation d’extrême gauche comme LO ne salue pas du tout la défaite de l’impérialisme français, ne voyant qu’un coup d’Etat quasi réactionnaire au Niger :

L’impérialisme français s’inquiète d’un changement de régime hors de son contrôle, faisant suite aux coups d’États au Mali et au Burkina Faso ayant abouti au départ des troupes françaises qui sont vomies par les populations sahéliennes.

Et les révolutionnaires de France ? Nathalie Arthaud ne vomit-elle pas également l’Armée française ? Le premier pas de toute conscience révolutionnaire pour un travailleur n’est-il pas de "vomir" l’armée de son pays après avoir compris qu’elle n’est qu’une bande d’homme armés au service de la bourgeoisie ? Et pourquoi employer un terme seulement physiologique comme "vomir" ? Les populations africaines ne vomissent pas seulement l’armée française : elles ont réussi ce que nous n’avons pas pu faire : l’expulser de leur pays.

En 1905, à la veille de la Révolution contre le Tsar, Lénine voyait dans la défaite de l’armée russe à port Arthur un événement pas seulement militaire, mais favorable aux travailleurs dans la lutte des classes :
 :

La cause de la liberté russe et de la lutte du prolétariat russe (et internationnal) pour se socialisme dépend dans une très large mesure des défaites militaires de l’autocratie. Cette cause a été sensiblement servie par une débâcle qui inspire la tereur à tous les défenseurs de l’ordre en Europe. Le prolétariat révolutionnaire doit poursuivre contre la guerre une agitation inlassable, sans oublier jamais que les guerres sont inévitables tant que durera une domination de classe en général (...) Ce ,’est pas le peuple russe, c’est l’autocratie ruse qui a subi une honteuse défaite. La défait de l’autocratie russe a servi le peuple russe

La défaite de l’impérialisme français et se son armée ont servi le peuple de France ! Telle serait la traduction de cette phrase de Lénine, qu’aucun parti prétendument révolutionnaire n’a prononcée haut et fort. C’est pourtant un slogan pour un programme révolutionnaire avant, pendant et après des élections, politiques ou syndicales.

Lénine n’avait aucune sympathie pour la bourgeoisie japonaise qui avait infligé cette défaite au Tsar, mais cela ne l’empêchait pas de se déclarer en faveur de la défaite de son impérialisme, l’ennemi principal des exploités de l’Empire russe étant dans leur propre pays. Le fait que ce soient l’armée du Niger et ses alliés Russe qui aient infligé une défaite à l’armée française n’est pas une raison valable pour rester indifférent à ces événement comme le font LO, le NPA et les autres soi-disant révolutionnaires des syndicats. Mais dénoncer l’Union sacrée pourrait faire perdre à ces "révolutionnaires" leurs postes dans les bureaucraties syndicales, leur vaudrait des poursuites judiciaires, alors qu’ils sont légalistes à tout prix.

Le 3 juillet dernier, la CGT, par sé fédération "CGT intérieur" publiait un communiqué digne de l’extrême droite, oubliant de mentionner l’assassinat de Nahel par la police :

La France fait actuellement face à des mouvements séditieux touchant plus particulièrement les banlieues populaires, mais toutefois plus axés sur la satisfaction d’un besoin consumériste que sur l’expression de revendications sociales ou judiciaires. Ces mouvements se caractérisent par une particulière violence, visant notamment, au-delà des symboles -même éloignés de la République- les policiers et les gendarmes.

(...) Nous apportons tout notre soutien à nos collègues policiers, gendarmes, policiers municipaux,
sapeurs-pompiers qui sont depuis trop longtemps sur-utilisés et qui risquent de le rester dans la perspective de la coupe du monde de rugby et des jeux olympiques.

Soutien patriotique de l’armée et la police française par les confédérations syndicales, voilà ce que cautionnent des révolutionnaires qui pour conserver leurs postes ne le dénoncent pas, entrant eux-mêmes de ce fait das l’Union sacrée.

C’est l’union à l’échelle internationale de centaines de milliers de travailleurs de différents pays, fait bien plus important que le nombre de manifestants lors d’une procession syndicale concernant les salaires, qui est en jeu lors d’événements tels ceux du Niger, ou la mort d’un travailleur malien en France.

Les syndicats, en repoussant toute intervention en politique étrangère, divisent les travailleurs, les privent des contingents internationaux actuellement les plus combattifs.

L’extrême-gauche pseudo-révolutionnaire

Alors qu’aux élections politiques des groupuscules d’extrême-gauche affirment la nécessité de présenter des candidatures "indépendantes" de révolutionnaires, d’anti-capitalistes, voire communistes, ces mêmes groupuscules restent silencieux lors des élections professionnelles. Car ils se présentent aux élections professionnelles sur les mêmes listes que ceux qu’ils dénoncent "sans compromis" aux élections politiques.

Ces organisations rivalisent actuellement de flatterie à l’égard des directions syndicales.

A une certaine époque c’était les staliniens qui dénonçaient les "trotskistes", c’est le groupe Union Communiste Libertaire qui s’assigne cette tâche (assimilant le groupe Révolution Permanente, à tort, au trotskisme) concernant le dernier mouvement des retraites :

oui, la grève générale était bien une nécessité pour faire reculer le gouvernement. Le gros problème est de fonder toute sa propagande sur une exagération délibérée de la conflictualité sociale réelle.

Non, l’intersyndicale n’a pas eu l’occasion de freiner une explosion populaire imminente. Pour reconduire une grève au terme des premières 24 heures, il faut une AG de grévistes massive et déterminée à aller plus loin. Or les AG sont toujours restées maigrelettes. Donc pas de reconduction possible. La tentative la plus sérieuse de reconduction, à partir du 7 mars, a été impulsée justement par les «  directions syndicales  » CGT et Solidaires… mais la base n’a pas suivi  ; ça n’a pas pris.

(...) Oui, il faut populariser l’idée de grève générale, de sa nécessité pour stopper voire pour renverser le pouvoir. Mais pas en faisant croire qu’on y parviendra mieux avec une « direction syndicale » trotskiste...
(...) Contrairement à ce qu’écrivent les trotskistes, la crise du syndicalisme n’est pas une crise de direction, c’est une crise de sa base. On manque de militantes et de militants pour partir à la reconquête des déserts syndicaux, développer la syndicalisation dans les secteurs féminisés et revivifier les structures interprofessionnelles, particulièrement au niveau local.

La base n’a pas suivi ! Les directions syndicales seraient d’après l’UCL plus radicales que cette base ! Bien que l’UCL s’assigne pour tâche de combattre le trotskisme, son analyse rejoint celle du groupuscule LO qui se dit trotskiste. Dans sa brochure Guerre, inflation, crise climatique...RENVERSER LE
CAPITALISME !
servant de support aux activités militantes de l’été, LO dénonce dans les mêmes termes que l’UCL une base dont le refus de suivre les appels de l’intersyndicale confinerait à la lâcheté :

Lors du mouvement contre la réforme des retraites, des millions de travailleurs ont
pu mesurer qu’ils constituent une seule classe sociale, avec les mêmes difficultés, les mêmes revendications. Ils ont découvert leur force collective à travers les immenses manifestations.
Mais cette force collective n’a pas été déployée jusqu’au bout. Les travailleurs sont montés sur le ring en calculant et en économisant leurs forces, se privant ainsi des moyens de mettre KO leur adversaire.

Des groupuscules comme l’UCL ou LO qui se disent révolutionnaires, mais réduisent l’activité de leurs militants à celle des grands partis et syndicats réformistes, ont besoin de convaincre leurs militants que la classe ouvrière n’a aucune conscience politique, est passive voire réactionnaire. Le mépris de la classe ouvrière est une des premières qualités d’un bureaucrate syndical qui veut monter dans l’appareil. Le danger est de faire passer ce mépris pour le fait d’être une "avant-garde".

Conclusion

Non seulement les révolutionnaires n’avons rien contre l’élection de délégués par les salariés dans les entreprises capitalistes, mais nous estimons cette élection comme un élément très important du réseau d’organisation des travailleurs par eux-mêmes,, y compris dans les villes et quartiers ouvriers. Par contre, il est fondamental que ce soient les travailleurs eux-mêmes qui contrôlent ces élus, qui déterminent leurs rôles, attributions et fonctions, qui leur attribuent tel ou tel pouvoir de d’action et de décision et qui vérifient eux-mêmes que ceux-ci ont bien été réalisés. Cela nécessite bien sûr que les travailleurs soient organisés en conseils, en comités, en assemblées ayant pouvoir collectif de décision. Si la seule classe organisée est celle des patrons, les délégués ne sont plus contrôlés que par la classe ennemie.

Tout le problème provient donc de ce que l’on attribue comme qualité aux syndicats et d’abord à leur direction. Qui les paie ? Essentiellement, les patrons et l’Etat capitaliste ! Qui décide des modes d’élection des délégués ? Les patrons et l’Etat capitaliste ! Qui contrôle comment ils utilisent leur mandat ? Les patrons et l’Etat capitaliste ! Qui décide des fonctions des délégués ? Les patrons et l’Etat capitaliste ! Comment apprécier le rôle des syndicats au sein de la lutte des classes ? Au fait que tous les appareils syndicaux sans exception sont opposés à la formation de conseils de travailleurs, de comités de salariés et d’assemblées ouvrières ayant pouvoir de décision !

Mais oui, les élections peuvent changer la vie ! Les élections des délégués des conseils de travailleurs !

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article6773

Joignez-vous à la structuration mondiale des comités de base du peuple travailleur !!!

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article6206

Militons pour la constitution et la structuration mondiale des comités de travailleurs

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article6987

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article7210

Les rôles des comités de travailleurs et du parti révolutionnaire dans la révolution ne s’opposent pas

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article3683

Envoyé avec la messagerie sécurisée Proton Mail.

Messages

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.