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Ce que les singes nous apprennent sur la "nature humaine"....

jeudi 23 septembre 2010, par Robert Paris

Le singe, cet ... homme

Vous nous observez et... nous vous observons !

Et l’homme ressent immédiatement le besoin de s’accrocher à son "gros cerveau" pour marquer la différence... C’est l’homme qui nous a appelé "bêtes" : est-ce un signe d’une quelconque supériorité ?

Les singes sont pour nous l’objet d’une attention toute particulière du fait de leur ressemblance et de leur proximité...

Relativement récemment la thèse des scientifiques a bien changé : Nous ne sommes pas descendants des singes. Nous sommes des singes ! Nous faisons partie des trois espèces de chimpanzés (bonobo, chimpanzé et homme) et des cinq espèces de grands singes d’Afrique qui ont survécu à une élimination massive...

« L’homme est un singe ou, plus exactement, une espèce de singe qui s’appelle l’homme », note Pascal Picq dans "Le singe est-il le frère de l’homme ?", Le Pommier.

Giorgio Agamben, dans "Idée de la prose", Christian Bourgois, note :

« L’évolution de l’homme ne se serait pas faite à partir d’individus adultes, mais à partir des petits d’un primate qui [...] auraient acquis prématurément la capacité de se reproduire. Ce qui expliquerait ces particularités morphologiques de l’homme qui [...] ne correspondent pas à celles des anthropoïdes adultes, mais à celles de leurs fœtus. Autant de caractères transitoires chez les primates, mais qui en devenant définitifs chez l’homme, ont en quelque sorte réalisé, en chair et en os, le type de l’éternel enfant. »

Ou bien Jean-Didier Vincent dans "Celui qui parlait presque", Odile Jacob :

« Le petit enfant singe [...] vous ressemble : le front plat, les yeux émerveillés, le menton fuyant et la peau nue comme celle d’un baigneur.

— Vous voulez dire qu’à sa naissance le petit singe ressemble à l’homme adulte ?

— Nous appelons ce phénomène la néoténie : un nouveau-né capable de devenir adulte et d’acquérir la capacité de se reproduire sans s’être métamorphosé ou avoir atteint sa maturité complète.

— L’humanité naîtrait donc des suites d’un petit défaut génétique. Votre homme serait, non seulement un singe, mais un singe taré.

— Pourquoi pas ? Un freinage accidentel dans le développement du jeune singe et le voici à l’école, cent mille ans plus tard, dissimulant sa peau nue sous des pantalons tachés d’encre."

Stephen Jay Gould écrit dans « Le pouce du panda » :

« Le crâne de l’embryon humain diffère peu de celui des chimpanzés. Au cours de leur croissance, les formes deux espèces suivent le même chemin : diminution relative de la voûte crânienne, le cerveau se développant beaucoup plus lentement que le corps après la naissance et accroissement relatif continu de la mâchoire. Mais, alors qu les chimpanzés accentuent ces transformations et que les adultes présentent un aspect extérieur profondément différent de celui du nouveau-né, nous poursuivons notre croissance beaucoup plus lentement et n’allons jamais aussi loin qu’eux. C’est-à-dire qu’à l’état adulte nous conservons des caractéristiques de la jeunesse. (…) Le ralentissement sensible de notre développement a entraîné la néoténie. Les primates comparés aux autres mammifères ont un développement lent, mais nous avons accentué cette tendance plus qu’aucun autre mammifère. Nous avons une très longue période de gestation, une enfance qui se prolonge de façon remarquable et une longévité supérieure à celle de tous les autres mammifères. Les caractéristiques de la jeunesse éternelle nous ont rendu bien des services. L’accroissement de la taille de notre cerveau est, au moins en partie, dû au report de la rapide croissance prénatale à des âges plus tardifs. Chez tous les mammifères, le cerveau croît rapidement in utero, mais souvent fort peu après la naissance. Nous avons reporté cette phase fœtale dans la vie post-natale. Mais les changements dans le temps ont été tout aussi importants. Nous sommes au tout premier chef des animaux capables d’apprendre et notre enfance prolongée permet la transmission de la culture par l’éducation. »

Une affaire de famille

« Nous ne descendons pas des singes, puisque nous sommes des singes », écrit Desmond Morris, zoologiste britannique. Certes, l’homme n’est pas un chimpanzé, le bonobo n’est pas un humain et le chimpanzé n’est pas un bonobo, mais tous, sont des singes ! Entre l’homme et le singe, c’est une affaire de famille. « Les singes ont évolué en même temps que nous, rappelle Pascal Picq, paléoanthropologue français. Cela signifie que les chimpanzés et les bonobos sont nos frères et que les gorilles sont nos cousins ». Ils ont en effet un ancêtre commun dont ils se sont séparés il y a 5 à 7 millions d’années. L’homme fait partie de la famille des grands singes ou plus exactement des hominidés, au même titre que le gorille, le chimpanzé et le bonobo. L’homme partage des ressemblances, voire des similitudes comportementales et morphologiques avec les autres grands singes. Le chimpanzé et le bonobo ont notamment un patrimoine génétique commun à près de 99% avec l’homme.

Homme, proche du singe, l’idée dérange. Au Moyen-Age, le singe représentait d’ailleurs l’incarnation du diable. Il faut dire que l’homme a longtemps été considéré comme une exception au cœur du royaume des animaux. Les Grecs l’avaient même placé au sommet de la « scala naturae », une conception hiérarchique de la grande chaîne de la vie, acceptée par de très grands savants jusqu’à la grande révolution scientifique de Copernic et Darwin. Ce dernier met en parenté l’homme et le singe. A l’époque, une théorie qui met mal à l’aise. L’épouse de l’évêque de Manchester aurait d’ailleurs déclaré : « descendre du singe ?! Espérons que ce n’est pas vrai...Mais si ça l’est, prions pour que la chose ne s’ébruite pas ! »

Qui se cache derrière le miroir animal de l’homme ?

Étrangement, cela nous gêne toujours un peu d’observer les singes et de nous reconnaître en eux. Une relation fascinante qui « oscille entre répulsion et adoration » selon le primatologue Frans de Waal : « nous avons beaucoup de mal à accepter l’image de nous-mêmes que les singes nous renvoient, tel en miroir ». Il arrive que la raison nous invite à la moquerie devant l’observation des primates ; à en croire le comportement ni plus ni moins agacé de Santino face aux visiteurs, lui aussi n’est pas indifférent au regard de l’homme. On ne peut pas s’en cacher, la ressemblance est frappante ! Vidéos à l’appui, ce défilé de plaisanteries est à prendre très au sérieux ; le singe se bat comme un homme, aime la moto comme un homme, fume comme un homme et urine (presque) comme un homme... Selon Frans de Waal, cela ne fait aucun doute, « le singe (sommeille) en nous ». L’observation qu’il fait des primates, met en lumière de nombreux comportements que l’on attribue généralement à l’homme. Il défend la thèse que la psychologie humaine s’inscrit dans le prolongement de celle des animaux ; à travers l’étude du chimpanzé et du bonobo, il décrypte le comportement humain. Frans de Waal dépeint l’homme comme un singe bipolaire, à la fois agressif comme le chimpanzé et sensible comme le bonobo.

Les chimpanzés pratiquent la cueillette, construisent des outils, (une découverte faite par Jane Goodal en 1960 qui ébranle la définition même de l’être humain), partent en guerre contre des communautés voisines. Avides de pouvoir, ils mènent de véritables campagnes, quitte à s’allier stratégiquement avec des femelles influentes. Emmanuelle Grundmann confie une anecdote : Mike, un chimpanzé gringalet a réussi à prendre le pouvoir de sa communauté à force de cris et de bidons entrechoqués. Faire du bruit pour accéder au pouvoir serait donc une affaire de chimpanzé ?

Ces derniers appréhendent aussi la douleur. En Sierra Leone, ils se fabriquent des sortes de chaussons pour grimper aux kapokiers dont les troncs sont recouverts d’épines. Pharmaciens, ils consomment des plantes médicinales dont sont aussi adeptes les populations humaines voisines. En tout, les scientifiques ont observé une quarantaine de comportements et de traditions sociales, comme la poignée de main ou la danse de la pluie avant une averse. Les bonobos, découverts en 1929 par l’anatomiste Ernst Schwartz, se caractérisent par l’importance du sexe au sein de leur vie ; à tous conflits, à toutes formes de violence, se substitue le sexe, sorte de ciment social utilisé pour résoudre les problèmes. Hommes et femmes pourraient en témoigner : le sexe, une manière de résoudre un conflit...

Peut-on apprendre des hommes en étudiant le comportement des singes ? Selon Emmanuelle Grundmann, oui et de manière évidente. En matière d’éducation par exemple, les chercheurs observent que lorsque les enfants singes se bagarrent ou se disputent, les mères ont tendance à les laisser gérer seuls le conflit. L’objectif est de les rendre autonomes et de leur donner l’opportunité de se construire une personnalité. Une leçon de vie ? Pourquoi pas : observer les grands singes, nos frères, nos cousins, permet de redécouvrir des comportements et des gestes naturels.

La question homme/singe interroge en réalité l’essence même de notre propre identité. Une idée qui dérange car elle a ébranlé la construction du monde occidental, façonné sur les pensées cartésiennes et judéo-chrétiennes. Le monde oriental croit lui en la réincarnation de l’homme. Cette question apparaît donc beaucoup moins problématique dans la mesure où la culture orientale considère l’homme faisant partie de la Nature, au même plan que n’importe quelle espèce animale ou végétale. Quoi qu’il en soit, cette réflexion réveille des questions premières ; qui sommes-nous ? Comment nous situer dans un monde que nous partageons ? Comment se dessine notre destin alors que celui de nos semblables, si semblables en réalité, est en voie de disparition ? écrit Charlotte Duperray.

Le chimpanzé est un primate plein de ressources. On le croyait dépourvu de langage ? Il est capable d’apprendre la langue des signes. L’utilisation d’outils était le propre de l’homme ? Il manie parfaitement le bâton pour attraper les termites ou le principe du marteau et de l’enclume pour casser des noix. Il se reconnaît dans un miroir, possède une certaine « conscience » de soi. Les observations sur le terrain mènent les primatologues encore plus loin. Ils ont découvert que les groupes de singes possèdent des traditions ­ que certains appellent culture : un groupe utilise une technique de chasse ou d’épouillage et se la transmet de génération en génération. Sur le site de Goualougo au Congo, les chercheurs ont observé des chimpanzés utilisant deux outils pour la chasse aux termites, un bâton dur qui creuse un tunnel de 30 cm et une tige légère qui pénètre dans le sol et ramène les termites. C’est le seul endroit où cette technique a été constatée.

Franz de Waal, l’un des plus célèbres primatologues, a observé des capacités à résoudre les conflits : après un combat, un mâle dominé tend la main au mâle dominant, puis ils s’enlacent, s’embrassent et descendent au sol pour s’épouiller. Les échanges sociaux commencent juste à être compris, mais on a déjà observé qu’un chimpanzé partagera davantage sa nourriture avec un collègue qui l’a épouillé avant. Troublant...

« Le séquençage du génome nous montre que la divergence homme-chimpanzé ­ notre dernier ancêtre commun ­ est plus récente qu’on ne croit : 6-7 millions d’années, note Pascal Picq, paléoanthropologue. Il va falloir de nouveau réfléchir aux caractères dérivés des homininés (hommes et australopithèques) et des paninés (chimpanzés). Comment sommes-nous devenus humains mais aussi comment sont-ils devenus chimpanzés ? Les généticiens expliquent qu’on peut oublier les histoires de gène du langage, de la bipédie... ça se passe au-dessus des gènes, au niveau de la régulation. C’est dans la grammaire génétique que se joue l’évolution. »


QU’EST-CE QUI DISTINGUE L’HOMME DES GRANDS SINGES ?

UNE SEULE ESPÈCE D’HOMME ET PLUSIEURS DE SINGES ?

Non. Aujourd’hui, il y a une seule espèce d’homme mais cela n’a pas toujours été le cas. Trois espèces d’homme au moins ont même cohabité à certains moment au Moyen-Orient....

De nombreuses espèces d’homme ont disparu dans doute du fait des faibles capacités naturelles de l’homme à se défendre contre les bêtes féroces, à courir, monter aux arbres, attraper des proies...

Mais un très grand nombre de grands singes ont également disparu, notamment 90% des grands singes lors d’une extinction massive en Afrique.

EST-CE L’ORIGINE ET LE MODE DE DISSÉMINATION SUR LA PLANÈTE ?

Non, tous les grands singes sont nés en Afrique et les singes, et même les primates, y sont apparus et ont essaimé ensuite sur le globe...

EST-CE LA NÉOTÉNIE OU RETARDEMENT DE L’ÉVOLUTION DE L’INDIVIDU ?

Chez les singes, comme chez l’homme, plus la jeunesse est longue, plus l’intelligence est grande...

Comparativement aux autres primates, nous grandissons et nous nous développons à la vitesse de l’escargot. Pourtant, notre période de gestation ne dure que quelques jours de plus que celle du gorille ou du chimpanzé, et elle est très courte relativement à notre rythme de développement. Si le ralentissement de la gestation était aussi marqué que celui de notre développement, les bébés humains naîtraient selon les estimations, entre sept et huit mois ou même un an après les neuf mois effectivement passés in utero. Mais n’est-ce pas se laisser aller à une métaphore facile que de dire que les bébés humains sont encore des embryons ?

Chez les nouveau-nés humains, par exemple, les extrémités des os et les doigts ne sont pas ossifiées ; les centres d’ossification sont en général totalement inexistants dans les os des doigts. Ce niveau d’ossification correspond à la dix-huitième semaine du foetus chez le macaque. Quand les macaques naissent, à vingt-quatre semaines, les os des membres sont ossifiés dans des proportions que les bébés humains n’atteignent que plusieurs années après la naissance. De plus, notre cerveau poursuit sa croissance à un rythme rapide, foetal, après la naissance. Chez beaucoup de mammifères, le cerveau est, pour l’essentiel, complètement formé quand ils naissent. Chez les autres primates, le développement du cerveau continue au début de la croissance postnatale. A la naissance, le cerveau de l’enfant ne représente que le quart de sa taille définitive. Selon Passingham, « le cerveau de l’homme n’atteint la taille de celui du nouveau-né chez le chimpanzé que six mois après la naissance. Cela correspond exactement à la période à laquelle l’homme devrait naître, si sa gestation représentait une part aussi importante du développement et de l’espérance de vie que chez les singes ».

A. H. Schulz, anatomiste spécialisé dans les primates, conclut son étude comparative de la croissance des primates en ces termes : « Il est évident que l’ontogenèse de l’être humain n’est pas singulière en ce qui concerne la durée de la vie intra-utérine mais elle est très particulière si l’on se réfère au temps nécessaire à l’achèvement de la croissance et à l’apparition de la sénilité. » Mais pourquoi les bébés humains naissent-ils plus tôt qu’ils ne le devraient ? Pourquoi l’évolution a-t’elle allongé l’ensemble de notre développement dans des proportions aussi importantes, tout en limitant le temps de gestation, ce qui donne à notre bébé les caractéristiques d’un embryon ? Pourquoi la gestation n’a-t’elle pas été prolongée dans les mêmes proportions que le développement ? D’après Portmann, qui a une conception spiritualiste de l’évolution, cette naissance précoce serait fonction des nécessités intellectuelles. Il estime que les êtres humains doivent quitter l’obscurité rassurante du ventre de leur mère et accéder, toujours à l’état d’embryons, à l’environnement extra-utérin, riche en stimulations sensorielles.

EST-CE LA VIE SOCIALE ?

Non, les singes ont une grande vie sociale parfois très organisée. Les macaques du japon sont capables d’organiser des groupes allant jusqu’à mille individus...

L’implication sociale dans le groupe est tellement forte que, lorsqu’un individu est malade, comme ce fut par exemple le cas d’un petit gorille, on a meilleur temps de regarder les autres membres de la famille pour connaître son état de forme. Leur comportement, faute de paroles, trahit davantage la gravité de la situation que ce que l’on voit chez l’homme.

EST-CE LA CAPACITÉ D’ADAPTER LE MODE DE VIE ?

Les singes du Japon ont inventé de multiples pratiques dont celle-ci, adaptant leur mode de vie et construisant des moeurs nouvelles. Étonnamment, ce sont les jeunes qui ont fait passer ces nouveautés aux mères puis à toute la société. Ils ont ainsi inventé le lavage des légumes pour enlever la terre ...

Macaques du Japon au sauna.

De nombreuses énigmes entourent aujourd’hui encore les grands singes, comme le confie le primatologue Jörg Hess : « On suppose, par exemple, que les différentes populations d’orangs-outans ont développé leurs propres dialectes, ce qui pourrait aussi être le cas des autres grands singes. Depuis une dizaine d’années, on étudie également la grande variété de plantes médicinales qu’utilisent les chimpanzés pour se soigner, ce qui intéresse grandement le secteur pharmaceutique... » Pendant quelque quarante ans, le primatologue Jörg Hess a étudié la relation mère-enfant des trois espèces de singes anthropoïdes (chimpanzés, gorilles et orangs-outans), pensionnaires du zoo de Bâle, de la grossesse de la mère à la préadolescence du petit. Et il a constaté des similitudes troublantes avec les comportements humains. Des observations, « qui se vérifient également sur les sujets vivant en liberté ».

EST-CE DES DIFFÉRENCES GÉNÉTIQUES ?

La revue Nature a publié la première ébauche du séquençage du génome du chimpanzé. Sa comparaison avec le génome humain montre que les différences ne sont que de 1,23 %, c’est à dire à peine 10 fois plus nombreuses qu’entre deux êtres humains.

Ces différences sont localisées dans des zones bien précises du génome : les régions impliquées dans les fonctions de reproduction, d’immunité et d’odorat. Mais les divergences, vieilles de seulement 6 millions d’années, entre les deux génomes ne suffisent pas à expliquer les différences entre le chimpanzé et l’homme : l’expression et la régulation des gènes sont un facteur important qui différencierait les deux espèces.

Ces études permettront-elles de savoir ce qui fait le propre de l’homme et ce qui fait que le chimpanzé en est un ? Les séquençages attendus des génomes des autres grands singes éclairciront sans doute ces questions. Bonobo, orang-outang, chimpanzé sont tous nos cousins plus ou moins proches. Les bonobos partagent 95% de notre patrimoine ADN, les chimpanzés communs > 96%. Une nouvelle étude américaine sur les mutations confirme que le chimpanzé est plus proche de l’homme que des autres singes.

EST-CE LA STATION DEBOUT ?

“Scoop ! La découverte de notre ancêtre Ardi est venue confirmer ce que nombre de paléontologues pressentaient : le redressement des hominidés sur leurs deux jambes a précédé l’apparition des grands singes. Rendu public, cet automne, par la revue américaine Science, ce constat bouleverse la vision de nos origines. Et ouvre un chantier philosophique nouveau. Car si la station debout ne nous caractérise pas, pas plus que les outils ou la taille du cerveau, qu’est ce qui fait le propre de l’homme ?”.

C’est l’analyse du squelette de Ardi, individu féminin découvert en Ethiopie en 1992, qui a permis de confirmer l’hypothèse déjà formulée à l’analyse de Lucy, Orrorin ou Toumaï . Car non seulement Ardi s’est révélée beaucoup plus vieille qu’on ne le pensait (plus de 4,4 millions d’années), mais surtout, il est apparu que Ardi marchait sur 2 pattes et non sur 4 !

“Entendons nous bien, il y avait des singes avant l’homme – les grands primates existent depuis plus de 50 millions d’années. En revanche, les grands singes qui font partie de notre chaine évolutive – chimpanzés et bonobos – …sont en réalité des descendants lointains des premiers hommes…”

“L’homme n’est plus cet être exceptionnel qui s’arrache à l’animalité en se dressant sur ses pieds. Avec Ardi, l’humanité plonge plus profond dans le monde animal… Il nous faut inventer un nouveau mode d’explication sur la base d’un partage généralisé de traits et de compétences avec de nombreuses autres espèces. Et notre idée philosophique de l’homme se recentre, au delà de toute compétence technique, sur l’être de culture qui donne forme et sens à ses outils”.

Pour Tim White, découvreur d’Ardi : “c’est un nouveau chapitre du livre de l’évolution humaine qui s’ouvre”. Selon Owen Lovejoy, profeseur d’anthropologie qui avait aussi travaillé sur le cas Lucy, “A de nombreux égards, les humains sont plus primitifs que les chimpanzés”. Quant à Marc Groenen, spécialiste du paléolithique, il en appelle carrément à “un réexamen de notre humanité” ! C’est le récit de nos origines, trop beau pour être vrai, qui a définitivement éclaté.

En premier lieu, nous nous tenons debout parce que notre squelette nous le permet. Il ne suffit pas à un quadrupède de se redresser pour devenir bipède : toute l’architecture du squelette est modifiée.

Un squelette très spécialisé

Le trou occipital est l’orifice par lequel passe notamment la moelle épinière. De la position de ce trou dépend la position générale du corps. Chez les quadrupèdes, il est en arrière de la tête, dans le prolongement de la colonne vertébrale. Alors que chez le bipède, il se trouve au centre.

De plus, la colonne vertébrale du bipède forme un angle droit avec la base du crâne. Elle présente d’ailleurs une cambrure spécifique : on peut y déceler 4 courbures au lieu de 2. Cela permet de mieux amortir les chocs et les tensions dus à la marche sur 2 pieds.

De gauche à droite, les crânes de chimpanzé, autralopithèque, pithécanthrope et homo sapiens montrent des trous occipitaux de plus en plus centraux. Cette position serait une des clés de la capacité à se tenir debout.

Plus robuste, plus large et plus bas, le bassin permet de soutenir les viscères et le poids du tronc. Ce bassin adapté à la bipédie rend l’accouchement humain le plus compliqué de tous les mammifères.

Les bipèdes présentent également une réduction de la longueur des membres antérieurs par rapport aux membres postérieurs. De plus, le fémur comporte une crête qui maintient la rotule en l’empêchant de se déboîter sur le côté. Enfin, la forme générale du pied permet d’absorber les chocs dus à la bipédie et de donner une impulsion supplémentaire lors de la marche. Et le gros orteil est large et aligné avec les autres doigts de pied.

Bipèdes depuis au moins 6 millions d’années
Si nous connaissons les raisons anatomiques qui nous permettent de tenir debout, nous tâtonnons en ce qui concerne les origines de cette bipédie.

La station verticale a existé assez tôt. Orrorin Tugenensis, il y a 6 millions d’années, possédait un squelette adapté à la station verticale. Vers 3,5 millions d’années, des empreintes fossiles découvertes en Tanzanie montrent que les australopithèques se déplaçaient sur deux jambes.

Certains singes savent marcher et se tenir debout, ce qui accrédite l’hypothèse selon laquelle la bipédie n’est pas une "invention" humaine.

Les scientifiques ont d’abord pensé que le changement de milieu est à l’origine de cette évolution : les australopithèques seraient passés de la forêt à la savane. Ils se seraient redressés afin d’avoir un angle de vision supérieur, d’impressionner leurs adversaires, de transporter des outils ou des armes. Cette hypothèse est aujourd’hui invalidée.

Une autre hypothèse veut que la bipédie soit une acquisition ancienne. Car l’homme n’est pas le seul à l’utiliser. Les grands singes comme les chimpanzés ou les bonobos marchent souvent sur 2 jambes. La bipédie est donc une caractéristique commune à tous les hominidés, pas utilisée par tous à la même fréquence. Cette aptitude se serait amplifiée au cours du temps pour devenir l’unique moyen de locomotion chez les hommes modernes.

Un ancêtre commun déjà sur deux pattes ?

Enfin, une dernière hypothèse : nous avons un ancêtre dont la bipédie était le principal mode de locomotion. Cela signifie d’une part, que la lignée humaine n’a pas acquis ce mode de locomotion, et d’autre part, que les grands singes actuels sont devenus arboricoles.

Yvette Deloison, chercheur au CNRS, propose ainsi un ancêtre commun doté d’une attitude bipède redressée. De petite taille, il aurait vécu il y a 15 millions d’années. En effet, la main humaine n’a jamais pu être une patte car elle est beaucoup plus primitive que celle des grands singes. Ainsi un ancêtre bipède expliquerait que la main soit restée primitive et donc non spécialisée.

Quelle qu’en soit l’origine, tout le monde s’accorde sur le fait que la station debout, par ses conséquences anatomiques, a permis l’augmentation du volume cérébral. Selon Stephen Jay Gould "l’Homme s’est d’abord mis debout, puis il est devenu intelligent".

EST-CE LA PRODUCTION ET L’UTILISATION D’OUTILS ?

L’homme producteur d’outils

Des chercheurs de l’Institut Max Planck (Allemagne) et de l’université de Cambridge (Royaume-Uni) ont filmé l’utilisation la plus sophistiquée d’outils jamais observée chez des chimpanzés (Pan troglodytes). Le film a été présenté lors de l’assemblé annuelle de l’American Association for the Advancement of Science à Saint-Louis (Etats-Unis), dans le cadre d’une conférence de presse donnée par Andrew Whiten, professeur de psychologie évolutionnaire et développementale et de psychologie à l’université de Saint-Andrews.

Nouvelles preuves de l’utilisation d’outils par les chimpanzés

C’est au Sénégal, dans la région de Fongoli, que les équipes de Jil Pruetz et Paco Bertolani ont étudiés des chimpanzés à l’état sauvage. Ils ont pu observer un comportement spécifique à ces primates entre mars 2005 et juin 2006. Les résultats viennent seulement d’être publiés dans la revue Current Biology.

Construction et utilisation de l’arme

Les chimpanzés débarrassent une branche de ses feuilles, et mâchent une des extrémités pour en faire un bout plus ou moins pointu. Munis de cette « lance », ils cherchent des arbres possédant des excavations naturelles. Ils enfoncent l’outil d’un coup sec dans les trous pour dénicher des Galagos (petits lémuriens diurnes qui ’y reposent le jour).
De plus les chimpanzés ont été observés reniflant et léchant leur lance après l’avoir enfoncé dans les trous, cherchant probablement l’odeur du Galagos.

Une chasse « réservée » mais peu rentable

Sur les 22 fois ou ce comportement de chasse a été attesté devant les scientifiques, un chimpanzé a réussi une fois à attraper un Galagos qu’il a mangé immédiatement.

Les scientifiques ont noté que seuls les chimpanzés jeunes ou les femelles pratiquent cette chasse « à la lance ». Les mâles préfèrent des proies plus conséquentes.
Chez les chimpanzés ce sont souvent les femelles et les plus jeunes qui innovent avec un nouveau comportement, les vieux mâles semblent plus réfractaires au changement !

Un chimpanzé chasseur

Ce n’est pas la première fois que l’on découvre que nos cousins chimpanzés utilisent des outils :
 brindilles pour attraper des fourmis
 pierres pour casser des noix...

C’est par contre une vraie découverte que ces primates fabriquent et utilisent un « outil » pour chasser.

EST-CE L’ÉDUCATION DES PETITS ?

Dans le magnifique « Grands singes, mère et enfant », le primatologue Jörg Hess rend compte de quarante ans d’observations, menées au zoo de Bâle, sur la relation qui se noue entre mères et petits chez les trois espèces de grands singes. Un « lien émotionnel d’une extrême sensibilité » qui les rapproche des humains.

EST-CE LA CONSCIENCE DE SOI (reconnaissance dans un miroir) ?

Chercheur japonais, Atsushi Iriki, chef du Laboratory for Symbolic Cognitive Development au sein du RIKEN Brain Science Institute de Wako, Japon 3), travaille depuis déjà plusieurs années en vue de montrer que des macaques japonais (photo) peuvent acquérir spontanément des capacités cognitives complexes en étant entraînés à l’utilisation d’outils plus ou moins simples, par exemple un petit râteau pour attirer de la nourriture. Les grands singes, chimpanzés et orangs-outangs, sont réputés pour leur capacité à apprendre le langage des signes, à développer des consciences de soi limitées (se reconnaître dans un miroir), à faire montre de théorie de l’esprit en prêtant des intentions à des tiers, congénères ou humains. Mais ce n’est pas le cas du macaque, considéré comme « moins évolué ». On lui attribue l’intelligence d’un enfant de 2 ans alors que les chimpanzés auraient celle d’un enfant de 7 ans. Le macaque dans la nature n’imite pas et ne prête qu’une attention limitée à ses congénères.

Or Atsushi Iriki suppose que les cerveaux des macaques, comme ceux d’autres petits singes tels les marmosets (photo) avec lesquels il se propose maintenant d’expérimenter, disposent de tous les composants nécessaires à l’intelligence de type humain. Mais ces composants ne se sont pas assemblés en « système global », parce que, dans la vie sauvage, les macaques n’en avaient pas besoin. Si l’on place un de ces animaux dans un environnement humanisé très sélectif, il se montre par contre capable, en quelques semaines et non en quelques générations, de faire preuve de pré-capacités cognitives de haut niveau, telles la conscience de soi et le protolangage.

Nous ne décrirons pas ici les situations expérimentales ayant permis de doter les macaques du laboratoire de l’amorce de telles capacités. Leur objectif, comme indiqué ci-dessus, est d’entraîner l’animal à utiliser des outils afin de se procurer de la nourriture. Il ne s’agit pas cependant d’un simple dressage destiné à réaliser des performances pour lesquelles beaucoup d’animaux dits savants se montrent experts. Atsushi Iriki montre que le bras du singe prolongé par l’outil est très rapidement considéré par le sujet comme une prolongement de son corps, qu’il pourra utiliser à de nombreuses tâches non programmées à l’avance. Il l’aura ainsi intégré à la « conscience de soi » qu’il a de lui-même. Cette conscience commence par l’image du corps que, grâce à ses sens, le sujet acquiert de lui-même. Lorsque le sujet perçoit la vue de son bras prolongé d’un râteau, il acquiert une image plus sophistiquée de lui-même que celle résultant des simples perceptions cinoesthésiques (ou kinesthésiques) dont il dispose spontanément. Fait exceptionnel, l’image perçue au travers d’un miroir joue le même rôle.

Dès qu’il a acquis cette conscience renforcée de soi, autrement dit dès qu’il constate qu’il peut en agissant sur le bras armé de l’outil provoquer des modifications de l’environnement qui présentent pour lui des avantages, une pression de sélection s’exerce sur son cerveau pour renforcer les circuits neuronaux contribuant à ce que Atsushi Iriki appelle une « construction intentionnelle de niche », autrement dit une interaction dynamique en allers et retours entre le cerveau et le milieu. C’est cette interaction que nous nommons pour notre part, dans le cas des humains, un complexe anthropotechnique. Pour ce qui concerne les macaques évoqués ici, nous pourrions parler de l’amorce de mise en place d’un “complexe cercopithécoïdotechnique” ! La construction d’une conscience renforcée de soi conduit immédiatement, y compris en ce qui concerne les macaques japonais, à l’apparition d’une conscience de l’existence des autres. Le sujet leur prête des intentions, les imite et cherche à communiquer avec eux, en inventant des langages symboliques ad hoc si de tels langages n’existaient pas déjà.

Toutes ces hypothèses ne restent pas du domaine de la conjecture. Atsushi Iriki et son équipe ont vérifié par imagerie cérébrale que les macaques ainsi entraînés manifestaient une activité électrique nouvelle dans les neurones du cortex pariétal en charge de l’image de soi. Ces neurones conservent après quelques expériences les nouvelles capacités ainsi acquises. On peut supposer que cette situation pourrait favoriser la prise en charge par le génome des mutations provoquant les modifications à long terme des bases neurales intéressées. Après quelques générations, pourquoi pas, les macaques pourraient alors surpasser en intelligence non seulement les chimpanzés mais même un enfant de 9 ans. Ceci d’autant plus que d’autres expériences ont montré que soumis à des contraintes un peu voisines, à partir de l’utilisation d’outils, les cerveaux des macaques ont enregistré une expansion des cortex préfrontal et pariétal, important chez l’homme dans le contrôle des comportements sociaux complexes. Or ces cortex se sont développés rapidement durant les dernières dizaines de milliers d’années de l’évolution humaine, marqués par l’explosion des pratiques ouvrières.

EST-CE LA CAPACITÉ DU CERVEAU ?

Un autre point commun avec les grands singes d’Afrique :

Le cerveau de l’homme et de certains grands singes contient un neurone particulier que l’on ne retrouve pas ailleurs chez les mammifères. En plus d’être des primates, qu’ont en commun l’homme, le chimpanzé, le bonobo (chimpanzé nain), le gorille et l’orang­outang ? Leur cerveau contient un neurone spécial, appelé neurone en fuseau, qui ne se retrouve chez aucune autre espèce de mammifères. Selon les chercheurs américains qui ont fait cette découverte, cela souligne une fois de plus la parenté entre l’homme et les grands singes.

Ces neurones spéciaux se trouvent dans le cortex antérieur du cerveau, une région qui contrôle le coeur, la tension artérielle et la digestion. Elle sert aussi de siège à certaines opérations complexes, comme la capacité de communiquer en émettant des sons. Le chimpanzé est le singe dont la densité de neurones en fuseau ressemble le plus à celle de l’homme. Par contre, le bonobo est celui où leur disposition s’approche le plus de la nôtre.

EST-CE LE LANGAGE ?

Le langage ne serait-il pas une exclusivité de l’homme ?

Oui, notre communication passe par le langage articulé. Mais les singes et d’autres espèces ont leur propre forme de communication, que nous avons du mal à appréhender. A travers les mimiques, les sons et la gestuelle, ils ont un langage qui semble très élaboré.

Pourquoi dire que le langage articulé soit le seul valable ? Savez-vous qu’il y a chez les grands singes toutes les prémices du langage, sur le plan anatomique et cérébral : chez le bonobo et le chimpanzé, rien n’empêche l’émergence de la parole. Là encore, nous ne sommes pas face à un saut qualitatif entre l’homme et l’animal, mais bien face à un degré d’évolution.

Des spécialistes ont longtemps cru que, chez les chimpanzés, la structure du pharynx interdisait tout langage parlé…

Oui, ils parlaient de l’os hyoïde qui ne serait pas descendu chez le chimpanzé, contrairement à ce qui s’est passé chez l’homme. Mais aujourd’hui, un spécialiste du langage m’a affirmé que l’anatomie du chimpanzé ne semblait pas être le facteur limitant. Il faut chercher ailleurs et peut-être dans le cortex.

Là encore, il y a dans le cerveau du chimpanzé toutes les conditions du langage, avec des zones bien identifiées. Donc, le singe a tout pour parler et pourtant, il ne parle pas. D’où la piste génétique : il manquerait au singe un gène essentiel à l’émergence du langage. Et ce gène, le FoxP2, personne ne l’a découvert chez le singe. Cette théorie est récente, elle demande confirmation.

Enfin, il faut peut-être chercher du côté de l’environnement : chez l’homme, la parole est devenue nécessaire avec l’éloignement des individus. Tous les systèmes de communication, chimique ou gestuel, restent pertinents tant que le groupe est soudé. A partir du moment où les éléments du groupe se dispersent, il faut que la communication s’adapte. Les singes étant restés dans la forêt, ils n’ont jamais été confrontés à la nécessité d’un langage articulé.

Les gorilles ont leur propre langage des signes

Des scientifiques de l’université de St Andrews, ayant effectué l’une des plus vastes études jamais menée sur les grands singes, ont découvert que les gorilles possédaient un répertoire de 102 signaux différents, leur permettant de communiquer. Les chercheurs ont observé les mêmes gestes chez des gorilles qui n’avaient jamais été en contact les uns avec les autres. Mieux : ils se sont aperçus que chaque signe était effectué après une observation attentive de l’auditoire, ces signaux silencieux étant uniquement utilisés quand les autres singes peuvent les voir. Auteur principal de l’étude, le professeur Byrne explique : « Comme nous ne cessions d’ajouter de nouvelles populations à notre étude, nous avons constaté que la plupart des gestes qui avaient au début semblé spécifiques à un individu ou un site étaient finalement toujours retrouvés ailleurs. » L’équipe a conclu de ses observations que la gestuelle des gorilles n’était pas apprise mais acquise, faisant partie d’un répertoire naturel permettant aux gorilles de communiquer entre eux. « Le Dr Joanne Tanner et moi avons étudié une femelle gorille qui copiait des gestes humains et nous avons découvert que ces imitations étaient en fait des actions propres, qui ressemblaient aux actions humaines imitées mais n’étaient pas parfaitement identiques. Nous pensons que le fait que ces singes aient un vaste répertoire propre à leur espèce peut expliquer pourquoi ils imitent mal nos gestes : ils n’en apprennent pas de nouveaux, mais en « réutilisent » de leur propre répertoire » conclut le Pr. Byrne.

Le langage des chimpanzés

Pour communiquer entre eux, ils ululent, grognent, rugissent ou crient selon leur humeur. Ils semblent éprouver beaucoup de plaisir à entendre les sons qu’ils émettent. Les chimpanzés communiquent aussi par les expressions de la face, la posture, le toucher et les mouvements. Un jeune chimpanzé peut émettre au moins trente-deux sons différents et ses mimiques peuvent exprimer toute une gamme d’émotions.chimpanze_langage02 Les chimpanzés peuvent apprendre jusqu’à un certain point à utiliser un langage si des hommes le leur enseignent en laboratoire. Par exemple, ils sont capables de combiner de courtes suites de symboles arbitraires en les pointant sur un tableau pour exprimer des idées relativement simples. Ils peuvent être entraînés à utiliser certains gestes-mots de la langue des signes avec une forme de syntaxe rudimentaire, comme ce fut le cas avec la femelle chimpanzé Washoe, célèbre pour avoir ainsi appris à maitriser environ 250 mots qu’elle a en partie transmis à son enfant Loulis. Néanmoins, dans leur milieu naturel, les chimpanzés semblent ne pas utiliser de véritable langage pour communiquer.

C’est l’homme qui nous a appelés "bêtes" et ce n’est pas très intelligent de sa part....

Un dernier mot : on est en danger....

Sauver les grands singes !!!

BIBLIOGRAPHIE

UNE PENSÉE POUR DIAN FOSSEY, PRIMATOLOGUE ET AMIE DES SINGES DU RWANDA ASSASSINÉE PAR LES TUEURS DE SINGES LIES A LA DICTATURE GÉNOCIDAIRE AUSSI DES HUMAINS...

"Je veux être enterrée ici, dans le cimetière où reposent mes amis, les gorilles", avait déclaré Dian Fossey, peu avant son assassinat....

LES "SINGES" NE T’ONT PAS OUBLIÉE...

Portfolio

Messages

  • Relativement récemment la thèse des scientifiques a bien changé : Nous ne sommes pas descendants des singes. Nous sommes des singes ! Nous faisons partie des trois espèces de chimpanzés (bonobo, chimpanzé et homme) et des cinq espèces de grands singes d’Afrique qui ont survécu à une élimination massive...

    •  Au contraire, cet article met en avant la spécificité humaine qui fait que nous ne sommes pas des singes !
      Je pense au contraire que nous devrions voir là une hypothèse qui nous rappelle que c’est l’embryologie qui génère les nouvelles branches de l’évolution. Quelques rappels :
       évolution de l’oeuf dans le milieu marin : d’abords poisson ovipare, pondant en grands nombre des oeufs fécondés par le mâle qui lâche le sperme dans le milieu aquatique au dessus des oeufs. Puis, adaptation, certaines espèces protégeant leur progéniture des prédateurs dans leur bouche, et enfin fécondation in utéro et ponte vivipare que l’on retrouve chez les reptiles.
       Sortie des eaux, adaptation au milieu terrestre, l’oeuf est protégé par une coquille.
       Pour les mammifères, c’est la même chose :

      • trias moyen : apparition des mammifères ovipares, AVANT les premiers dinosaures qui ne feront leur apparition qu’au carmien, soit début du trias supérieur. Donc si on se réfère à la classe mammifère, l’homme apparait comme le dernier maillon d’une classe très ancienne.
      • Jurassique supérieur : apparition des mammifères marsupiaux. Comme l’homme le petit d’un marsupial naît prématurément et poursuit sa gestation dans la poche maternel. Mais alors que le nouveau né humain ressemble à un foetus singe, le marsupial naît plutôt à l’état d’embryon ! Prenons le cas du Kangourou, le petit naît au bout de 35 j et mesure 2 à 3 cm, il restera dans la poche plus de 230 jours(parfois 250), un deuxième bébé s’installe avant que le premier ait quitté la poche maternelle, et les femelles gèrent en commun la protection des petits, prenant parfois le petit d’une autre femelle : système de protection optimum des petits dans des conditions de vie extrême.
      • Les marsupiaux se sont étendues partout, mais seront détrônés par les mammifères placentaires qui apparaissent bien plus tard, au crétacé. Seul, en Australie, ils resteront dominants, leur mode de reproduction offrant la meilleure garantie dans des milieux d’extrême - sècheresse.
      • De la même manière qu’il y eut, et qu’il y a des reptiles vivipares et ovipares, il y eut des mammifères marsupiaux et placentaires ayant évolué en parallèle au cours de l’évolution(tigre marsupial), et les premiers disparurent au bénéfice des seconds quand le Panama apparut, mettant en contact le nord de l’Amérique, domaine des placentaires, avec le sud, domaine des marsupiaux. La gestation placentaire permet une meilleure nutrition et protection du foetus et donc un développement cérébral supérieur chez les placentaires, ce que l ’observation des adultes au phénotype proche, confirme.
      • En étudiant le placenta des placentaires, on constate trois sortes de placenta : celui des herbivores, mammifères inférieurs par simple accolement épithélial, celui des carnivores où l’implantation est invasive ( dans l’endomètre mais sans affecter les capilaires), celui des rongeurs, insectivores, primates(espèces réputées "intelligentes") où l’implantation affecte les capillaires et donc fournit une nutrition "optimum" pour une durée de gestation donnée.

      De ces observations, si l’on considère que l’homme naît à un stade foetal par rapport à des primates placentaires, on peut se demander si le genre "homo", est l’unique descendant d’une troisième sous classe des mammifères à laquelle appartenaient les australopithèques qui en se verticalisant ont du également modifier leur bassin, un bassin plus court mais plus large, permettant la naissance d’un bébé plus gros, d’où un temps de gestation le plus long chez les primates. Les capacités cognitives de l’homme l’on fait classer dans les primates. Mais par sa gestation il se rapproche de l’ours : chez l’ours brun, la gestation peut aller jusqu’à 8mois, les oursons naissent aveugles, chauves et édentés, et donc par cette immaturité, tout comme l’homme, il se trouve sur une "troisième" voie de gestation, entre la maturité complète des mammifères placentaires et celle de l’immaturité embryonnaire des marsupiaux. Une troisième voie comme l’évolution l’avait déjà précédemment fait entre l’oeuf vitellin du poisson dépendant du milieu marin et la viviparité, en créant les ovipares placentaire(ou oeuf à coque protectrice).
      On peut donc dire que nous sommes l’aboutissement de plantigrades, comme l’ours, ayant évolué en parallèle avec les primates parmi les mammifères supérieurs, tout comme des mammifères placentaires ont évolué en parallèle avec les mammifères marsupiaux avant de les dominer et éliminer. De même nos ancêtres australopithèques étaient plutôt des sortes d’ours(au régime alimentaire varié également), les hominines ont évolué en parallèle avec la lignée des primates et les ont dominés, et faillis exterminer les grands singes.

       La viviparité supprima la nécessité de pondre un grand nombre d’oeufs pour obtenir une progéniture, l’oeuf placentaire permit de s’émanciper du milieu aquatique, la reproduction marsupial la survie en milieu extrême, la reproduction placentaire vivipare une potentialisation de la gestation et l’apparition des mammifères supérieurs, la naissance de "prématurés", une adaptation précoce à l’environnement, une augmentation du temps d’apprentissage qui fit que l’homme, dernier de la lignée plantigrade, domina les primates.
      Et cette évolution continua avec l’accroissement de la longévité, l’âge plus tardif de la reproduction au profit de la durée de l’apprentissage, donc de l’apparition de la "civilisation". Notre évolution en parallèle des singes peut nous renseigner sur la diversité des comportements de nos ancêtres.

    • Tout d’abord merci de vos remarques très intéressantes.

      "Cet article met en avant la spécificité humaine qui fait que nous ne sommes pas des singes !" dites vous dans votre commentaire. Espérons que ce ne soit pas exactement le cas.

      Il est vrai que ce type de question ne peut recevoir une réponse par oui ou non mais par "oui et non".

      Le tiers exclus est ici indispensable.

      L’homme est un singe mais l’homme est un singe particulier.

      Le problème n’est pas en soi sa particularité car le bonobo est un singe particulier et le chimpanzé aussi.

      Le problème que se pose l’homme, au delà du défaut de l’homo-centrisme, c’est de comprendre d’où vient la particularité de son cerveau.

      Est-ce de son activité, est-ce de sa conformation physiologique (celle du corps ou celle du cerveau), est-ce de la biologie, est-ce de la "civilisation" ?

      En soulevant la question de la néoténie, nous ne prétendons pas que l’homme soit le seul singe néoténique ni le seul animal néoténique mais seulement que la néoténie soit une partie de l’explication.

    • Précisément, s’il y a néoténie, ce qui n’existe pas chez les singes, l’homme n’est pas un primate. Son pied fait de lui également un plantigrade comme l’ours, et son ancêtre australopithèque devait être un petit ours frugivore. L’embryologie est un élément important de classification, la classe des mammifères est déjà divisée en marsupiaux et placentaire, peut être faut-il y ajouter celle des "néoténiques".
      Les grands singes sont le fruit de l’évolution dans la forêt, l’homme celui de la savane.
      Quant-à la raison de l’évolution de son cerveau, on sait que différents homo on cohabiter au Kenya, homo-sapiens et néanderthalis en Europe. Si l’on compare les crânes de ces deux derniers à volume crânien peu différent, on constate un développement différent, brachycéphale pour homo-sapiens, dolichocéphale pour néanderthalis. Dans le premier cas celà favorisait le développement du lobe frontal, dans le second cas le lobe occipital. Le métissage associé à la sélection naturelle, a pu sélectionner des métis ayant acquis les capacités cognitives des deux, et ce à chaque étape de l’évolution homo où cohabitait une espèce récente et une ancienne pouvant se reproduire, de même que le partage des acquis culturels de ces homos nomades.

    • La néoténie est un phénomène biologique rare qui consiste en la conservation de traits juvéniles chez un être vivant adulte. Au cours du vingtième siècle, différents auteurs ont formulé l’hypothèse que l’homme, sous certains aspects, pourrait bien, lui aussi, être qualifié de néoténique. Exemple d’un caractère néoténique de l’homme : l’homme affiche à 1 an seulement 50 % de son volume cérébral final. Le cerveau de l’homme est paradoxal. A la naissance, c’est le plus petit (par rapport à la masse corporelle) de tous les primates : il représente 25 % de la taille finale chez le nourrisson, alors que celui du bébé macaque monte à 70 %. Et à l’âge adulte, c’est l’inverse : c’est lui le plus gros.

      La néoténie décrit, en biologie du développement, la conservation de caractéristiques juvéniles chez les adultes d’une espèce, ou le fait d’atteindre la maturité sexuelle par un organisme encore au stade larvaire. Ces phénomènes sont plutôt observés chez des amphibiens et des insectes, pour lesquels on parle de pédogenèse.

      L’exemple le plus connu est l’axolotl ; on a même parfois cru avoir affaire à deux espèces alors qu’il s’agissait de larves se reproduisant sans avoir atteint l’âge adulte.

      Par ailleurs, on distingue chez les animaux une tendance à la conservation de caractères juvéniles lors de la domestication. Par exemple, les chiens remuent la queue et aboient comme le font les louveteaux, mais conservent ce comportement toute leur vie alors que les loups l’abandonnent à l’âge adulte.

      La néoténie existe également dans la Lignée Verte, et particulièrement chez les plantes présentes en milieu très sec. Ainsi, à la moindre averse, les graines germent et fleurissent très rapidement, devenant susceptibles de reproduction sexuée avant même que l’appareil végétatif soit pleinement développé. Cette stratégie a été sélectionnée car elle garantit une reproduction même dans le cas où les plantes meurent avant la fin de leur développement. On retrouve également la néoténie chez Welwitschia, une Gnétale du désert de Namib.

      Cette idée a été appliquée à l’humain qui possède des caractéristiques communes avec de jeunes primates (Louis Bolk dans les années 1920-1930, puis plus récemment par Stephen Jay Gould). Selon cette approche, la boîte crânienne non soudée à la naissance, l’absence de pilosité du bébé ou la faiblesse de l’appareil musculaire sont des marques de néoténie. L’importance de la néoténie pour la biologie humaine a été étudiée par Desmond Morris (par exemple dans son très célèbre ouvrage : Le Singe nu), notamment pour expliquer la désirabilité des caractères juvéniles chez la femme.

  • Mais alors d’où vient la différence entre homme et singe ?

    • Il y a certes une discontinuité entre homme et singes.

      Elle semble bien due au cerveau mais pas seulement à sa taille.

      Ce serait une discontinuité entre les deux hémisphères cérébraux qui aurait produit le développement de deux caractéristiques humaines : le raisonnement logique d’un côté et l’imagination de l’autre, avec un combat dialectique permanent entre les deux. Voir sur ce thème le texte d’où vient l’intelligence humaine ?

    • Une histoire de gestation qui a ouvert la voie à un apprentissage précoce(voir message précédent). Un mode de reproduction que l’homme partage avec l’ours qui lui aussi a des oursons immatures, aveugle, chauve, édentés. Donc nous sommes embryologiquement parlant des plantigrades. Le développement de l’intelligence que nous partageons avec les primates supérieurs, nous le devons à une évolution parallèle.
      De la même manière qu’il y eut un tigre marsupial disparut, plus récemment disparu le loups marsupial de Tasmanie. La disparition des marsupiaux de l’Amérique du sud(hormis quelques niches) se produisit après l’apparition de Panama qui permit aux mammifères placentaires du nord d’aller au sud et de proliférer au dépends des marsupiaux, la gestation placentaire avantageant le développement cérébral, d’où l’apparition dans cette classe des mammifères supérieurs dont les primates.

  • Les chimpanzés pratiquent la cueillette, construisent des outils, (une découverte faite par Jane Goodal en 1960 qui ébranle la définition même de l’être humain), partent en guerre contre des communautés voisines. Avides de pouvoir, ils mènent de véritables campagnes, quitte à s’allier stratégiquement avec des femelles influentes. Emmanuelle Grundmann confie une anecdote : Mike, un chimpanzé gringalet a réussi à prendre le pouvoir de sa communauté à force de cris et de bidons entrechoqués. Faire du bruit pour accéder au pouvoir serait donc une affaire de chimpanzé ?

    Ces derniers appréhendent aussi la douleur. En Sierra Leone, ils se fabriquent des sortes de chaussons pour grimper aux kapokiers dont les troncs sont recouverts d’épines. Pharmaciens, ils consomment des plantes médicinales dont sont aussi adeptes les populations humaines voisines. En tout, les scientifiques ont observé une quarantaine de comportements et de traditions sociales, comme la poignée de main ou la danse de la pluie avant une averse.

    Les bonobos, découverts en 1929 par l’anatomiste Ernst Schwartz, se caractérisent par l’importance du sexe au sein de leur vie ; à tous conflits, à toutes formes de violence, se substitue le sexe, sorte de ciment social utilisé pour résoudre les problèmes. Hommes et femmes pourraient en témoigner : le sexe, une manière de résoudre un conflit...

    Education par les singes

    Peut-on apprendre des hommes en étudiant le comportement des singes ? Selon Emmanuelle Grundmann, oui et de manière évidente. En matière d’éducation par exemple, les chercheurs observent que lorsque les enfants singes se bagarrent ou se disputent, les mères ont tendance à les laisser gérer seuls le conflit. L’objectif est de les rendre autonomes et de leur donner l’opportunité de se construire une personnalité. Une leçon de vie ? Pourquoi pas : observer les grands singes, nos frères, nos cousins, permet de redécouvrir des comportements et des gestes naturels.

    La question homme/singe interroge en réalité l’essence même de notre propre identité. Une idée qui dérange car elle a ébranlé la construction du monde occidental, façonné sur les pensées carthésiennes et judéo-chrétiennes. Le monde oriental croit lui en la réincarnation de l’homme. Cette question aparaît donc beaucoup moins problématique dans la mesure où la culture orientale considère l’homme faisant partie de la Nature, au même plan que n’importe quelle espèce animale ou végétale.

  • "Nous grondons et relevons la lèvre supérieure au cours d’un accès de colère, pour découvrir des canines de combat qui n’existent plus."

    Le Pouce du Panda

    Stephen Jay Gould

  • Merci pour cette présentation particulièrement claire et actualisée du problème.

    Cette idée que les singes, en particulier les chimpanzés, sont très proches de l’homme n’est pas totalement nouvelle. Ce qui est nouveau, ce sont les arguments très précis que la science a pu apporter pour confirmer la thèse de la proximité de singes et de l’homme, qui permet de passer de la proximité à l’intégration de l’homme dans la catégorie singe.

    Cela a permis nombre de mauvaises blagues depuis le XIXe siècle pour disqualifier la thèse de la proximité du singe et de l’homme ou de la parenté singe-homme.

    Ce qui m’intéresse en particulier ici, c’est la question de la néoténie indiquée par Pascal Picq.

    Je souhaite transmettre ici un extrait d’un article écrit en 1936 et publié en 1938 indiquant cette néoténie (sans mentionner le concept) à fin de discussion des carences affectives et psychologiques propres à l’homme du fait d’un retard de développement à la naissance.

    Il s’agit d’un article écrit par le jeune Lacan, cet anti-freudien à l’époque disciple de Henri Wallon. L’article a paru dans l’encyclopédie française. Le nom de l’ouvrage en lui-même indique très clairement qu’il s’agit de transmettre une idéologie nationale officielle dans un contexte de tensions sociales, politiques, guerrière de montée du fascisme et des nationalismes qui l’accompagnent. L’article est intitulé « Les Complexes familiaux », voici l’extrait :

    « LE SEVRAGE : PREMATURATION SPECIFIQUE DE LA NAISSANCE

    Il faut remarquer que le retard de la dentition et de la marche, un retard corrélatif de la plupart des appareils et des fonctions, déterminent chez l’enfant une impuissance vitale totale qui dure au delà des deux premières années. Ce fait doit-il être tenu pour solidaire de ceux qui donnent au développement somatique ultérieur de l’homme son caractère d’exception par rapport aux animaux de sa classe : la durée de la période d’enfance et le retard de la puberté ? Quoi qu’il en soit, il ne faut pas hésiter à reconnaître au premier âge une déficience biologique positive, et à considérer l’homme comme un animal à naissance prématurée. »

    L’homme, à l’état de bébé, nait donc de manière prématurée. L’hypothèse est plus que formulée, mais assez peu explorée. Lacan, à ce stade, s’arrête à la discussion concernant l’homme.

    Mais, plus loin dans le texte, concernant le stade du miroir, il compare de nouveau, et là beaucoup plus clairement, le singe et l’homme.

    Cependant, il va alors établir, citant Bühler, une hiérarchie, classique depuis au moins Descartes, entre les différents animaux, le singe, animal supérieur, et l’homme qui le serait encore plus :

    « La perception de la forme du semblable en tant qu’unité mentale est liée chez l’être vivant à un niveau corrélatif d’intelligence et de sociabilité. L’imitation au signal la montre, réduite, chez l’animal de troupeau ; les structures échomimiques, échopraxiques en manifestent l’infinie richesse chez le Singe et chez l’homme. C’est le sens primaire de l’intérêt que l’un et l’autre manifestent à leur image spéculaire. Mais si leurs comportements à l’égard de cette image, sous la forme de tentatives d’appréhension manuelle, paraissent se ressembler, ces jeux ne dominent chez l’homme que pendant un moment, à la fin de la première année, âge dénommé par Bühler « âge du Chimpanzé » parce que l’homme y passe à un pareil niveau d’intelligence instrumentale.  »

    Ainsi, l’homme, à la fin de sa première année, atteindrait un « âge du Chimpanzé », âge où l’intelligence est instrumentale. Cela signifie que le chimpanzé aurait une intelligence différente de celle de l’homme, type d’intelligence que l’homme dépasserait ensuite dans le développement de l’enfance.

    Voilà ce qu’un célèbre « scientifique » grand-bourgeois et à renommée internationale universitaire pouvait défendre en 1936-38.

    Encore aujourd’hui, dans nombre de pratiques médicales, psychiatriques, Lacan est lu comme une référence. Nombre de médecins, psychiatres, psychanalystes, se forment aux écrits de Lacan.

    Cet article est plus rarement connu que d’autres écrits lacaniens, mais c’est sur un site revendiquant le courant idéologique lacanien qu’il est lisible :

    Le fichier word de l’article Les complexes familiaux

    Nombre d’auteurs faisant référence dans la psychanalyse aujourd’hui ont été formés par Lacan et ont transmis son idéologie. La psychanalyse est une science pertinente, intéressante, utile, passionnante, trop souvent attaquée sur de mauvais arguments.

    Il s’agit de faire la part des choses entre les courants et les arguments au sein de cette science, qui, comme toutes les sciences, reste en développement, et est traversée comme toutes les sciences, de combats idéologiques reflétant l’état de la société et de la lutte des classes.

    Ainsi, Lacan, au moins dans l’article cité, développe une vision réactionnaire concernant la soi-disant spécificité de l’homme. Les arguments de l’article de Robert Paris permettent de l’établir très clairement.

  • Trouver une proximité entre les grands singes et l’homme est une chose mais expliquer où se situe la différence, la discontinuité en est une autre ...

    • La clé des diverses discontinuités du vivant est à chercher dans l’inhibition. Elle permet non seulement des mécanismes de blocage libérant le système pour d’autres fonctionnements et ouvrant des possibilités nouvelles, mais aussi pour des activations du type inhibition de l’inhibition. On constate son importance au sein des mécanismes génétiques permettant l’inhibition des gènes et l’activation de la bibliothèque des gènes de manière sélective en fonction de la spécialisation des cellules, par exemple. On constate également l’importance des inhibitions en termes de gènes homéotiques et de rythmologie du développement.

      L’inhibition est donc en pleine activité en ce qui concerne la spéciation et notamment le passage des ancêtres de l’homme à sapiens.

      Lorsque nous nous comparons au singe, nous le constatons fortement. Nos instincts ne sont pas inexistants ni inactifs, mais ils sont inhibés. Et cela dès la prime enfance. Autant le jeune singe obéit de manière assez directe à ses instincts, autant le petit d’homme ne le fait pas. Le jeune singe veut manger quand il a faim, faire l’amour quand il en ressent la nécessité physique et ainsi de suite, il obéit aux effets de son fonctionnement physique et des sensations que produisent l’environnement. Le bébé d’homme fonctionne tout autrement. Il ne se contente pas de réagir par instinct, il y rajoute une volonté opposée. Il refuse souvent de manger, même s’il a faim. Il peut réclamer de continuer à manger même s’il a assouvi sa faim. Il peut refuser de dormir même s’il a sommeil et inversement… Et ces réactions peuvent se poursuivre avec l’être humain plus âgé.

      L’homme n’accepte pas directement les consignes de ses sens. Il peut choisir de bloquer ses besoins et en ressentir même un plaisir interne. Il désobéit aux lois physiologiques. Pourquoi peut-il être amené à le faire ? Parce qu’il en ressent le plaisir d’un nouvel espace de liberté. Il peut remettre en question des décisions qui lui seraient imposées. Il discute d’égal à égal avec sa nature. Il a le choix de faire ou de ne pas faire et la privation elle-même peut être source d’une impression forte qui lui donne des satisfactions.

      Cette faculté d’inhiber les besoins et sensations physiques, l’homme la possède dès la naissance. Il peut ensuite la cultiver à volonté mais elle est déjà présente dès la naissance. Ce n’est qu’ensuite que son caractère se développant, il peut consciemment se servir de ces capacités particulières qui lui permettent de ne pas dépendre directement et immédiatement de ses sensations.
      L’homme peut utiliser cette capacité d’inhibition des instincts et des sensations pour modifier ses possibilités. Les diverses évolutions culturelles et historiques des civilisations proviennent de l’inhibition, que ce soit celle du besoin alimentaire (par exemple par le jeûne), du besoin sexuel (ne pas suivre de période de rut et être capable d’interdire la satisfaction de toutes ses envies qui se présentent), inhibition des besoins immédiats dans l’enfance (agitation, jeu, découverte…) pour accepter de s’occuper d’éducation scolaire par exemple. La réflexion est inhibition des sentiments et besoins immédiats de sens comme la méditation est inhibition de toutes les sensations du monde extérieur.

      L’être humain, contrairement aux singes les plus proches de nous, n’a jamais de « simples » instincts. Il ne connaît pas de geste sans connotation particulière à l’homme. Tous ses actes sont marqués par une psychologie tout à fait particulière marquée par des interdits et blocages : alimentaires, sexuels, accompagnés de rites et d’incitations personnelles et sociales.

      Comme le rapport Gérard Pommier dans « Comment les neurosciences démontrent la psychanalyse » « Pour les animaux, la conscience se vectorialise simplement par la reconnaissance du passé et une intentionnalité future. En revanche, l’intentionnalité de l’homme est conditionnée par un refoulement préalable. (…) Contrairement à l’animal, dont l’activité innée ne laisse aucun doute sur son intentionnalité, l’homme méconnaît dès le début le sens de son action. Un acte aussi simple que se nourrir devrait correspondre à une intentionnalité sans détour. Eh bien non ! Certains nourrissons refusent de satisfaire ce besoin élémentaire (anorexie mentale du nourrisson) selon ce que la nourriture symbolise. En réalité, tous les enfants refusent de manger à un moment ou à un autre, et la discrimination du « bon » et du « mauvais » ne s’établit pas en fonction de l’utile, sur le fond d’une conscience primaire liée à la sensation. Ce que la nourriture représente pour la mère commande cette discrimination. Les conditions de l’alimentation ne sont pas innées chez l’être humain. Plus tard, et quel que soit son âge, il se conforme à un grand nombre de rituels, individuels et collectifs, pour se nourrir. Les goûts, la faim ou l’inappétence sont largement régis par l’inconscient. Ces conditions de la conscience de l’homme la différencient de celle de l’animal. Mais, préalablement à cette conscience, l’homme doit se dégager d’une contrainte préliminaire. Avant de refouler les associations liées aux perceptions, il faut qu’il existe quelqu’un qui, au poste de commande, soit capable de refouler. (…) En parlant, en pensant, nous refoulons notre passé de chose : nous oublions que nous sommes un corps. (…) Le sujet de la conscience est celui qui parle : il est extérieur à tout ce dont il est conscient. (…)

      Les animaux se souviennent de signes passés pour interpréter les signes actuels : ceux de leurs perceptions, ceux qui sont émis par leurs congénères, et les leurs. Ils comprennent ainsi le monde qui les entoure et anticipent leurs actions. Ils catégorisent leurs percepts grâce aux concepts de ces percepts. Ils reconnaissent les objets grâce à ces concepts, à propos desquels ils ont des pensées, si l’on entend par là une mémorisation de signes dénotatifs (un signe désigne une chose). Dans la mesure où de simples représentations de choses engendrent déjà des pensées, on peut dire qu’il existe une pensée sans langage. Les animaux forment de telles « pensées », y compris au bas de l’échelle de la création.
      Cependant, même en admettant qu’il les ait en commun avec les animaux, les représentations de choses de l’être humain diffèrent de sensations naturelles : elles sont déjà chargées d’un excès pulsionnel plus ou moins symbolisé. Les sensations sont endettées à l’égard de la pulsion, qui dépend elle-même de la demande de l’Autre, donc du langage. De sorte qu’il est difficile d’évoquer une pensée sans langage qui traduirait des sensations brutes. (…) L’humain n’existe pas hors de la culture. Parler d’une « nature » préalable, organique ou physiologique de l’homme contrevient à tous les critères scientifiques, car nul n’a jamais rencontré d’homme à l’extérieur de la civilisation. (…)
      Si une perception ne devient consciente que grâce à l’appui pris sur le lexique et sur la syntaxe, la conscience humaine paraît surencombrée, comparée à celle des autres animaux ! On mesure le retard énorme de l’homme, qui doit sans fin lutter contre son inconscient, alors que les animaux sont immédiatement conscients ! Mais ces atermoiements pris par l’homme pour se dégager de ses brouillards psychiques ont finalement engendré son avance. Ces délais l’ont obligé à poser des hypothèses, à expérimenter, à perdre du temps pour vérifier la réalité du réel, afin de s’assurer que ses fantasmes ne lui ont pas fourré une fois de plus la tête dans le sac. Ces détours portent finalement le nom de science, produite par la race humaine victorieuse de ses rêves, mais qui, sans ses rêves, n’aurait jamais remporté pareille victoire. »

    • la discontinuité se trouve dans l’augmentation de la gestation pour un cerveau bien développé, une continuité de développement post natal. Hors on sait que la stimulation de l’enfant dès les premiers mois de sa vie a une incidence majeure sur les capacités d’apprentissage à maturité. Par la suite la "civilisation" a augmenté cette durée d’apprentissage jusqu’à retarder l’âge de la reproduction.
       L’évolution a créé l’oeuf placentaire(avec une coquille protectrice, sans échanges avec un milieu aquatique externe comme l’oeuf de poisson) pour s’émanciper du milieu aquatique,
      -La gestation placentaire qui a évolué en durée et vascularisation et permit une évolution embryonnaire.(voir plus haut)
       L’évolution gestationelle, après avoir permis la protection de la progéniture de l’hostilité environnementale, a donc permis la transmission culturelle et donc la capacité donner à l’homme de modifier à son avantage son environnement d’où la prolifération actuelle.
      Mais n’oublions pas qu’à chaque cycle d’extinction, ce sont les espèces dominantes qui disparaissent...

  • "L’essence de l’homme n’est pas une abstraction inhérente à chaque individu. La vraie nature de l’homme est la totalité des rapports sociaux" (Marx)

  • Trouver une proximité entre les grands singes et l’homme est une chose mais expliquer où se situe la différence, la discontinuité en est une autre ...

    • Pouvions nous dire que "la vie est belle" sans ces singes magnifiques ?

    • « Le singe nu » de Desmond Morris

      « Il existe cent quatre-vingt-treize espèces vivantes de singes et de gorilles. Cent quatre-vingt-douze d’entre elles sont couvertes de poils. La seule exception est un singe nu qui s’est donné le nom d’Homo sapiens. Cette espèce à part, qui a brillamment réussi, passe une grande partie de son temps à étudier les plus nobles mobiles de son comportement et non moins de temps à en négliger (là, elle s’acharne) les mobiles fondamentaux. Le singe nu est fier d’avoir le plus gros cerveau, mais il s’efforce de dissimuler le fait qu’il a aussi e plus gros pénis, préférant attribuer cet honneur au puissant gorille. (…) Contrairement à ce qu’on imagine d’ordinaire, les grands singes terrestres possédaient déjà un grand cerveau développé. Ils vaient de bons yeux et des mains qui savaient empoigner. Puisque c’étaient des primates, ils avaient, bien entendu, un certain niveau d’organisation sociale. (….) Chez les primates supérieurs le sens de la vue domine nettement celui de l’odorat. Dans leur monde arboricole, bien voir est beaucoup plus important que bien sentir, et le museau a considérablement diminué de taille, ce qui donne aux yeux un bien meilleur champ de vision. Dans la recherche des la nourriture, les couleurs des fruits sont des indices précieux et, contrairement aux carnivores, les primates ont acquis une bonne vision des couleurs. Leurs yeux sont également mieux équipés pour repérer les détails statiques. Or, leur nourriture est statique et déceler d’infimes mouvements est moins important que reconnaître de subtiles différences de formes et de texture. L’ouïe est importante, mais beaucoup moins que pour les carnassiers qui chassent, et leurs oreilles extérieures sont plus petites et n’ont pas la mobilité de celles des carnivores. Le sens du goût est plus raffiné, le régime plus varié et plus riche en saveurs diverses. Il y a notamment une forte réaction positive aux denrées sucrées. (…) Le singe n’avait pas le genre d’équipement sensoriel nécessaire pour la vie au sol. Son odorat était trop faible et son ouïe pas assez fine. Son physique ne convenait absolument pas aux rudes épreuves d’endurance et aux sprints foudroyants. (…) Ce qui s’est produit est assez curieux. Le singe chasseur est devenu un singe infantile. Ce n’est pas la première fois qu’on voit l’évolution recourir à ce genre de subterfuge ; on l’a observé dans un certain nombre de cas très divers. Pour exprimer les choses très simplement, c’est un processus (appelé néoténie) grâce auquel certains caractères juvéniles ou infantiles persistent à l’état adulte. L’exemple le plus connu est celui de l’axolotl, une sorte de salamandre, qui peut demeurer un têtard toute sa vie et qui est capable de se reproduire dans cet état. On comprendra mieux la façon dont ce processus de néoténie aide le cerveau du primate à grandir et à se développer si l’on considère l’enfant à naître d’un singe caractéristique. Avant la naissance, le cerveau du fœtus de singe se développe rapidement. Quand l’animal vient au monde, son cerveau atteint déjà 70% de sa taille définitive, et sa croissance est achevée dans les six premiers mois de la vie. Même un jeune chimpanzé achève sa croissance cérébrale dans les douze mois qui suivent la naissance. Notre espèce, au contraire, possède à la naissance un cerveau qui n’a que 23% de sa taille adulte. Une rapide croissance se poursuit dans les six ans qui suivent la naissance, mais le développement ne s’achève que vers la vingt-troisième année. Donc, pour vous et moi, la croissance cérébrale se poursuit encore une dizaine d’années après la maturation sexuelle, mais pour le chimpanzé, elle s’achève six ou sept ans AVANT que l’animal ne devienne apte à la reproduction. Voilà qui explique très clairement ce que l’on entend quand on dit que nous sommes devenus des singes infantiles ; encore faut-il préciser cette notion. Nous (ou plutôt nos ancêtres les singes chasseurs) sommes devenus infantiles sur certains points, mais pas sur d’autres. Les taux respectifs de développement de nos diverses qualités se sont désynchronisés : alors que notre système de reproduction allait de l’avant, notre croissance cérébrale traînait. Il en allait ainsi dans divers autres domaines, certains aspects de notre développement se trouvant plus ou moins ralentis. Le cerveau ne fut pas la seule partie du corps affectée : l’attitude corporelle se trouva également influencée. Un mammifère, avant de venir au monde, a l’axe de la tête perpendiculaire au tronc. (…) Pour un animal vertical comme le singe chasseur, il est donc important de conserver l’angle fœtal. Là encore, il s’agit d’un exemple de néoténie, le caractère pré-natal persistant dans la vie post-natale et adulte. On peut expliquer ainsi de nombreux autres caractères physiques particuliers du singe chasseur. Le cou long et mince, le visage plat, la petitesse des dents et leur apparition tardive, l’absence de lourdes arcades sourcilières et la non-rotation du gros orteil. »

    • "L’essence de l’homme n’est pas une abstraction inhérente à chaque individu. La vraie nature de l’homme est la totalité des rapports sociaux" (Marx)

  • « Les primatologues de terrain comme Jane Goodall ou Biruté Galdikas ont tranché : « leurs » grands singes pensent (...) Les singes, en particulier les chimpanzés, développent des compétences qualifiées d’habiletés pour « pêcher » des termites à l’aide de bâtons ou casser des noix grâce à une pierre creusée d’une cupule, sur percuteur. (...) Une telle pratique suppose une représentation mentale et une conscience d’opérations complexes et intentionnelles. » - Revue « Pour la science », septembre 2000.

  • « Les primatologues de terrain comme Jane Goodall ou Biruté Galdikas ont tranché : « leurs » grands singes pensent (...) Les singes, en particulier les chimpanzés, développent des compétences qualifiées d’habiletés pour « pêcher » des termites à l’aide de bâtons ou casser des noix grâce à une pierre creusée d’une cupule, sur percuteur. (...) Une telle pratique suppose une représentation mentale et une conscience d’opérations complexes et intentionnelles. » - Revue « Pour la science », septembre 2000.

  • Quelle déchéance pour l’homme imbu de lui-même ! Il ne serait qu’un simple singe, lui qui se targue d’avoir été produit comme le plus haut rameau de la création divine...

    Et effectivement, si l’homme s’était inexorablement séparé du singe, aurait-il des points communs génétiques avec les différents grands singes tels que certains points communs ne sont pas des points communs de ces grands singes entre eux, par exemple l’orang-outan et le chimpanzé. Il est donc inévitable que les grands singes et l’homme-singe aient, au début de leur divergence, conservé des relations sexuelles entre eux. Il est également indispensable de supposer que ce sont ces relations sexuelles - ou l’absence de ces relations - qui ait décidé de la divergence et non une quelconque supériorité intellectuelle.

    Puis, au sein des hommes eux-mêmes, il semble que le discriminant n’ait toujours pas été l’intelligence. Les néandertaliens ont disparu mais leur intelligence ne semble pas du tout en cause. Il se pourrait que ce soit encore une fois la sexualité qui ait joué : les hommes néandertaliens ayant pu préférer la finesse des femmes sapiens-sapiens au point de les enlever et de leur faire préférentiellement des enfants...

    Quant à la divergence finale sur l’intellect, qu’il ne s’agit pas de nier, il semble bien qu’elle ait encore une fois une origine sexuelle. On remarque en effet la place particulière de la sexualité dans le cerveau humain. Le sexe prend un caractère très cortical et la sexualité est permanente chez l’homme, indépendamment de la procréation. Et même lintellect "pur" semble bien une sublimation de sexualité....

  • Diane Fossey passa sa vie a protéger les Gorilles dans les montagnes du Rwanda. Mais á part de rares exception son exemple n´a pas été suivi et nous assassinons encore sans soucis , sans remords sur terre, mer et dans les airs les animaux de la planète.

    Cette femme extraordinaire a dédié sa vie a protéger les gorilles des braconniers. Mondialement connue on pourrait croire que son exemple aurait été retenu. Il n’en est rien.

    L’homme continue de mériter le titre de Destructeur en Chef des espèces. Assassins par instinct nous continuons de tuer pour le plaisir et pour faire du chiffre d’affaires. Business oblige toujours bien sûr.

  • le point de vue de la mini conférence de LO à la fête a été de reprendre la vieille philosophie cartésienne de supériorité de l’homme sur le singe.

    moins caricaturalement que le point de vue de Descartes, car le point de vue est informé des recherches des années 70/80, voire plus récentes, mais globalement, le point de vue de l’argumentation proposée est de refuser au singe la capacité à la pensée conceptuelle humaine.

  • Pascal Picq écrit dans « L’humain à l’aube de l’humanité » :

    « Tous les critères qui fondent l’homme sont préservés, qu’on se rassure, mais ils sont plus ou moins partagés avec nos frères les grands singes, notamment les chimpanzés et les bonobos.

    La bipédie : caractère anatomique étonnant qui porte notre tête au dessus de nos instincts se retrouve chez les grands singes et surtout chez les bonobos, les plus arboricoles de tous, sans oublier la vingtaine d’espèces d’hominidés fossiles qui déambulent sur les multiples chemins de nos origines depuis plus de sept millions d’années.

    L’outil : les chimpanzés utilisent des outils et se transmettent des traditions ; bref ils possèdent des comportements culturels. Ça aussi, Darwin le savait, car des observations et des descriptions avaient été faites depuis 1844. Mais il a fallu attendre les années 1970 pour que des éthologues aillent en Afrique de l’Ouest et « redécouvrent » que des chimpanzés brisent des noix à l’aide de pierres ou de bouts de bois. Il fallut attendre aussi une grande synthèse de centaines de milliers d’heures d’observation à partir de sept populations de chimpanzés pour que l’on démontre, enfin, qu’ils ont des cultures. Sans surprise, on constate qu’il en est de même chez les orangs-outans, nos lointains et magnifiques cousins d’Asie.

    La guerre : hélas, les chimpanzés sont aussi enclins à agresser leurs voisins que les hommes….

    L’interdit sexuel : Chez tous les singes, l’un des deux sexes quitte le groupe natal au moment de l’adolescence pour se reproduire. Dans la très grande majorité des cas, chez les singes, les femelles restent ensemble alors que les mâles migrent. En fait, l’homme se révèle être le singe le plus incestueux.

    La vie sociale : les hommes, les chimpanzés et les bonobos vivent dans des sociétés de fusion-fission. Plus explicitement, les individus se séparent pour vaquer à leurs occupations et retrouvent le groupe pour nouer d’autres relations sociales. Ce qui nous semble si simple est loin d’être une évidence et requiert des codes sociaux très complexes. (…)

    Conscience de soi : leur comportement devant des miroirs comme, et surtout, leurs stratégies sociales impliquent qu’ils sont capables de se représenter les états mentaux des autres. Ils font donc preuve d’empathie et de sympathie, ce qui suggère aussi mensonges, réconciliations, etc… »

  • Dans "L’Expression des émotions chez l’homme et les animaux" publié en 1872, Darwin démontre clairement que les coordinations utilisées pour exprimer la surprise, la peur et la tristesse chez les grands singes sont les mêmes que pour l’homme. Il remarque que le comportement se rapprochant le plus du sourire et du ricanement est le comportement de défiance qui consiste à montrer ses canines. Il établit ainsi un lien phylogénétique entre le sourire, le ricanement et le comportement d’agression.

  • « Néanmoins la différence entre l’esprit de l’homme et celui des animaux supérieurs, aussi grande soit-elle, est certainement une différence de degré et non de nature. Nous avons vu que les sentiments et les intuitions, les diverses émotions et facultés, tels que l’amour, la mémoire, l’attention, la curiosité, l’imitation, la raison etc., dont l’homme se fait gloire, peuvent se trouver à l’état naissant, ou même parfois bien développé, chez les animaux inférieurs. »

    Darwin, La Filiation de l’homme et la sélection liée au sexe – 1871- Chap IV

  • L’Homme et les grandes singes sont proches, oui mais jusqu’à quel point ? Antoine Balzeau, et plusieurs de ses collaborateurs, se sont intéressés à la forme des cerveaux en quantifiant des asymétries nommées pétalias.

    « Au départ, nous avons interprété les capacités des Hommes un peu à l’envers. Pour utiliser les outils et parler, il faut être intelligent. Pour ce faire, il faut avoir un gros cerveau. Donc nous nous sommes d’abord dit que les australopithèques ne pouvaient pas faire d’outils, que c’était forcement propre au genre Homo. »

    D’autres erreurs similaires ont été commises concernant les capacités de langage. Seul Homo sapiens aurait été capable de parler. Il aurait été le seul à posséder un cerveau suffisamment grand.

    Plusieurs découvertes récentes ont montré que les australopithèques et les paranthropes fabriquaient des outils. Au final, la taille du cerveau n’a pas un lien direct avec ces capacités.

    « Nous montrons maintenant que tous les ancêtres de l’Homme possédaient des cerveaux asymétriques. Ils ont donc tous au moins un support anatomique dont on sait qu’il joue un rôle dans les capacités manuelles et dans les capacités de langage. Cela enlève cette idée très simplificatrice voulant que seul Homo sapiens ait été capable de parler et d’utiliser des outils. »

  • Bonjour,
    Merci pour cet article très exhaustif.
    Par contre, je n’ai pas trouvé la réponse à pourquoi les humains ont évolué si rapidement contrairement aux aux autres grands primates.
    Qu’est-ce qui différencie la manière d’apprendre d’un humain de celle d’un primate ?

  • « Des techniques archéologiques ont permis de mettre au jour en Côte d’Ivoire un site de cassage de noix de plus de quatre mille ans, avec marteau et enclume de pierre, mais les types de noix découverts, la taille des outils (grands et lourds) et l’écologie (forêt vierge) indiquent que les utilisateurs étaient des chimpanzés, pas des humains. L’analyse des fouilles suggère que, pendant des millénaires, des grands singes ont apporté des pierres résistantes comme le granite, prélevées dans des affleurements éloignés, pour écraser des noix très dures dans la forêt. Aujourd’hui, la même technologie est familière aux chimpanzés d’Afrique occidentale. »

    Frans de Waal dans « Le bonobo, dieu et nous »

  • Frans de Waal dans « Le bonobo, dieu et nous » :

    « Le premier scientifique qui a suggéré que les hommes descendaient des grands singes a été le naturaliste français Jean-Baptiste Lamarck en 1809. Selon sa théorie, les caractères acquis (l’allongement des pattes chez les échassiers, par exemple) peuvent se transmettre à la génération suivante. Bien avant que Darwin aborde le sujet, Lamarck a vu que l’humanité avait évolué à partir d’un primate quadrumane :

    « Effectivement, si une race quelconque de quadrumanes, surtout la plus perfectionnée d’entre elles, perdait, par la nécessité des circonstances, ou par quelque autre cause, l’habitude de grimper sur les arbres, et d’en empoigner les branches (…) et si les individus de cette race, pendant une suite de générations, étaient forcés de ne se servir de leurs pieds que pour marcher, et cessaient d’employer leurs mains comme des pieds, il n’est pas douteux (…) que ces quadrumanes ne fussent à la fin transformés en bimanes, et que les pouces de leurs pieds ne cessassent d’être écartés des doigts. »

    Lamarck a payé cher son audace. Il s’est fait tant d’ennemis qu’il est mort dans la misère et a eu droit à l’une des nécrologies les plus railleuses et méprisantes jamais lues devant l’Académie des sciences. »

  • Frans de Waal dans « Le bonobo, dieu et nous » :

    « En 2009, l’université de l’Etat du Kent a publié un communiqué de presse au titre choc : « L’homme ne descend pas du singe ». Pour comprendre cette assertion, il faut savoir que cette université a participé à la découverte d’un fossile vieux de 4,4 millions d’années, Aripithecus ramidus, dit « Ardi », en Ethiopie. Ardi est plus proche d’un million d’années des longs adieux entre humains et grands singes que les fossiles antérieurs. Elle ressemblait encore beaucoup aux seconds : son gros orteil opposable le montre bien. Elle était sûrement une grande grimpeuse, qui dormait dans les arbres comme le font encore chaque nuit les grands singes pour éviter les prédateurs… Le scientifique qui a travaillé sur Ardi, Owen Lovejoy, n’a pensé qu’aux chimpanzés dans ses comparaisons et il a conclu que le physique d’Ardi était trop différent pour dériver d’un ancêtre ressemblant à un chimpanzé. Mais pourquoi prendre un grand singe aujourd’hui vivant, quel qu’il soit comme point de départ ? Depuis la séparation, les grands singes qui nous entourent ont eu autant de temps pour se transformer que notre propre espèce. Beaucoup s’imaginent que ces espèces sont restées immuables pendant que la nôtre évoluait, mais les données génétiques suggèrent en fait que les singes ont changé plus que nous. Nous ne savons pas du tout à quoi ressemblait notre dernier ancêtre commun. La forêt vierge ne permet pas la fossilisation – tout pourrit et disparaît avant d’en arriver là – et nous n’avons donc aucun fossile des premiers grands singes. Cependant nous pouvons être certains que notre géniteur initial répondait à la définition courante du grand singe : un primate de grande taille, sans queue, à torse plat et à pieds préhensiles. Il reste donc parfaitement acceptable de dire que nous « descendons du singe » - mais d’aucun des grands singes qui existent aujourd’hui ».

    Aux remarques judicieuses de Frans de Waal, il convient d’ajouter que l’évolution se porte de fœtus à fœtus et même d’œuf fécondé à œuf fécondé et pas d’adulte à adulte et donc la comparaison ne peut se faire, à la rigueur, que d’enfant à enfant. Or nous ressemblons étrangement aux enfants singes !

  • « Si on fait le bilan de ce que l’on a observé depuis 30 ans chez les chimpanzés, on s’aperçoit que tout ce que l’on avait cru voir se manifester en termes d’adaptation uniquement chez les hommes c’est à dire la bipédie, l’outil, la chasse, le partage de la nourriture, la sexualité, les systèmes sociaux, le rire, la conscience, l’empathie, la sympathie, les chimpanzés le font aussi. Donc, soit ils ont tout acquis indépendamment, soit cela vient du dernier ancêtre commun, ce qui est plus plausible. Cela veut dire que déjà dans le monde des forêts, il y a 6 à 7 millions d’années, toutes ces caractéristiques que l’on a cru propres à l’homme existaient et font partie d’un bagage ancestral commun. »

    Pascal Picq. Entretien RFI 2001.

  • Pascal Picq : "L’animal n’est pas une machine. Les grands singes sont comme nous, ils souffrent, ils ont des sentiments, de l’empathie..."

  • Picq :

    « L’humain est bien une invention des hommes, qui repose sur notre héritage évolutif partagé, mais n’est pas une évidence pour autant. Homo sapiens n’est pas humain de fait. Il a inventé l’humain et il lui reste à devenir humain, ce qui sera fait lorsqu’il regardera le monde qui l’entoure avec humanité. »

  • « On sait très peu de choses sur ce qui nous distingue, génétiquement, du chimpanzé, note Swante Pääbo. Une seule certitude : les séquences (l’enchaînement des éléments constituant le message génétique) des ADN des deux espèces diffèrent seulement d’environ 1%. » A la fin des années 80, deux biologistes américains de renom, Mary-Claire King et Allan Wilson, étaient arrivés à cette conclusion par une technique très globale de comparaison génétique, l’« hybridation » d’ADN : plus deux filaments d’ADN se ressemblent, plus ils s’assemblent solidement in vitro. Résultat de leur manip : 98,5% de l’ADN humain et du singe acceptent un tel pacte d’union biologique. Troublant. Ainsi, « l’écart génétique entre l’homme et le chimpanzé est bien moins grand que celui qui sépare les deux espèces d’orang-outang », note le généticien de l’évolution Pierre Darlu (Inserm).

    « Vraisemblablement, les différences cruciales se trouvent dans de petits gènes dont la fonction est de réguler l’activité d’autres gènes, un peu comme un robinet, afin qu’il soit actif dans tel type de cellule plutôt que dans telle autre (cerveau, foie"), à tel moment de la vie (foetale, adulte"), estime Swante Pääbo. Trouver ces variations subtiles ne sera pas commode, mais heureusement, nous ne partons pas de zéro. » En effet, grâce à l’essor de l’étude de l’ADN humain, une grande partie de sa séquence est connue, disponible dans des bases de données internationales. Le génome du chimpanzé reste, en revanche, terra incognita. L’équipe de Swante Pääbo a commencé à l’explorer en cherchant les gènes qui participent au fonctionnement de l’organe du singe le plus distinct de celui de l’homme : le cerveau. « Nous allons regarder quels gènes sont actifs dans le cerveau du chimpanzé. C’est chose faisable en découvrant leur "traduction, en protéines, notamment. Nous comparerons ensuite ces données avec celles disponibles sur les gènes du cerveau humain et tenteront d’identifier les plus grandes différences génétiques dans cet organe, entre les deux espèces. » Elémentaire, et fastidieux.

  • Une chose est certaine et pose vraiment problème sans hybridation : le fait que l’homo ait des gènes communs avec les chimpanzés, des gènes communs avec l’orang outan, des gènes communs avec le gorille et que ces gènes communs ne soient pas communs pour ces singes, entre eux !!!

    Qu’y aurait-il d’étonnant ?

    Bonobos et chimpanzés se sont bien croisés ! lire ici

  • Nous cousins singes sont menacés de mort par l’homme...

    En cinquante ans, les sept espèces de grands singes vivant dans les forêts tropicales d’Afrique et d’Asie du sud-est ont vu leurs populations diminuer de 70 %, selon une étude publiée dans Science Advances, du fait principalement de la perte de leur habitat et du braconnage.

    Si rien n’est fait d’ici 2050 selon les primatologues, tous les grands singes à l’état sauvage de notre planète auront totalement disparu...

  • Des chercheurs allemands viennent de découvrir une tribu de capucins originaires du Panama utilisant des outils pour manger. L’espère animale viendrait donc d’entrer dans l’âge de pierre…

    Lire ici

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