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En opposition à la ligne CGT officielle des "JO 2024 exemplaires" de S. Binet et B. Thibault, un délégué CGT dénonce le silence autour de la mort d’Amara Dioumassy

samedi 27 janvier 2024

Bonjour Sophie , bonjour camarades,

Chouai Lyes, délégué CGT Central de la Sade.

Le 16 juin 2023, notre collègue Amara Dioumassy a perdu la vie, percuté par un camion de chantier qui faisait marche arrière sans bip de recul, sans homme trafic pour guider le chauffeur et sécuriser la manœuvre, sans marquage au sol de sens de la circulation, sans protection de délimitation pour les piétons et sans aucune marge de manœuvre

Le chantier du bassin d’Austerlitz a pour objectif de rendre la Seine baignable pour les épreuves des Jeux Olympiques 2024. Chantier dont la sade a la direction et l entreprise dont je suis salarié et syndicaliste .

Amara n’aura même pas bénéficié des services publics des hôpitaux de Paris. Il n’aura même pas fait retentir les sirènes des pompiers. En effet, Amara est mort au pied de l’Institut Médico Légal, et à l’arrivée des secours qui ont constaté son décès, Amara a été déposé sur un brancard pour être monté à pieds par l escalier qui le séparait de l’endroit de l’accident mortel. La mort d’Amara n’aura pas fait de bruit. C’est une mort modeste qui contraste avec les Jeux Olympiques grandioses pour lesquels il a perdu la vie.

Le silence qui accompagne les circonstances de ce malheur aurait pu servir les donneurs d’ordre et même la direction des multinationales qui sont en gestion de ce chantier.

Face à ce silence, nous ne pouvions que pousser un cri.

Médiapart et le journal Le Monde, auprès desquels j’ai fortement insisté, ont fini par faire des papiers pour rappeler les circonstances de l’accident mortel d’Amara et les graves manquements à la sécurité qui ont conduit à sa mort.

Nous nous sommes rendus chez la famille d’Amara avec mon camarade Fousseny Coulibaly, délégué syndical de la Sade IDF. Et lors de cette visite, une image habite encore ma mémoire : celle de l’une des filles d’Amara, à peine de 3 ans, qui à chaque fois que la porte de l’appartement s’entrouvrait, accourait pour voir si c’était son papa qui revenait du travail.

Entre nos sanglots, des discussions en langue soninké entre Fousseny et les frères et sœurs d’Amara. Je comprenais les échanges malgré que je ne parle pas la langue. Ils étaient démunis, et se posaient des questions sur ce malheur qui venait de les frapper.

A ce moment la Direction de l’entreprise d’Amara avait fait appeler un chef de chantier de l’entreprise et, jusqu’à aujourd’hui, ni la mairie de Paris, maître d’ouvrage, ni les entreprises du groupe Fayat ou Veolia, n’ont contacté la famille, ne serait-ce que pour leur faire parvenir leurs condoléances.

J’ai interpellé la directrice générale de Veolia lors de la réunion pléniere du comité de groupe européen du 28 juin 2023, 12 jours apres la mort d’ Amara, à travers une déclaration soutenue par tous les membres de ce comité , et finalisée par une minute de silence en mémoire d Amara que nous avons imposée.

Avec ces cris d’alerte via les media, repris en boucle sur les réseaux sociaux, ou par l’interpellation de la plus grande instance représentative du groupe Véolia- le comité de groupe européen- j’ai le fort pressentiment que nous n’avons encore rien fait pour rendre justice à Amara, du fait de toutes les preuves de non respect des obligations de sécurité, de négligences, et de manquements graves qui ont tué notre camarade.

Amara n’est qu’un mort parmi les 1 mort par jour dans la construction. Mais il est symbolique de toutes les victimes du travail qu’on cite dans la rubrique faits divers des journaux, alors que les responsables s’en sortent en toute impunité. Cessons la fait- divérisation.

Le patronat a la puissance financière pour essayer de nous faire taire. Nous, nous avons la détermination.

La détermination de pouvoir répondre un jour à la petite fille d’Amara qui attend toujours le retour du travail de son père et qui sera en droit de nous demander ce que nous avons fa- pour la mémoire de son papa.

A commencer par les suites judiciaires pour faire condamner les entreprises, signifier au chauffeur qu’il n’est pas responsable de ce drame, et obtenir que la famille soit dédommagée.

Nous préparons une marche blanche suivie d un sitting sur le lieu de la mort d’Amara. Nous ne manquerons pas de vous diffuser la date pour être nombreux à rendre un premier hommage à Amara, presque un an après sa mort.

Nous comptons sur le soutien de tous nos camarades de la CGT sur les moyens de la CGT pour nous aider à rendre justice à Amara, à sa famille, et pour donner l’exemple pour toutes les victimes d’accidents mortels dans la construction.

Montreuil, le 23 janvier 2024

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