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Quelles lois, quelle constitution, quel Etat faut-il au peuple travailleur s’il décide d’en finir avec l’Etat de ses ennemis ?

mercredi 29 novembre 2023, par Karob, Robert Paris

Quelles lois, quelle constitution, quel Etat faut-il au peuple travailleur s’il décide d’en finir avec l’Etat de ses ennemis, les capitalistes ?

On se souvient que les Gilets jaunes, parmi leurs nombreuses références à la révolution française, avaient celle d’une assemblée constituante du peuple révolutionnaire qui renverse l’ancien Etat et fonde une nouvelle constitution. (https://www.radiofrance.fr/franceinter/avec-les-gilets-jaunes-la-revolution-francaise-toujours-aussi-presente-9966530)

Les gilets jaunes ont affirmé notamment vouloir écrire eux-mêmes une nouvelle constitution. (https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/gilets-jaunes/on-va-ecrire-notre-constitution-des-gilets-jaunes-reclament-un-nouveau-cadre-politique-et-plebiscitent-le-referendum-d-initiative-citoyenne_3104587.html)

Les Gilets jaunes ont dénoncé et menacé de renverser la monarchie présidentielle qui se cache sous le mot de république. (https://lvsl.fr/gilets-jaunes-la-veme-republique-dans-limpasse/)

Le RIC de Macron-Philippe : encore une fake new du pouvoir des milliardaires ! (https://www.matierevolution.fr/spip.php?article5190)

Nous écrivions alors en décembre 2018 :

Le prétendu projet de RIC de Macron-Philippe est, pour eux, un moyen de casser l’insurrection et de la ramener à la démocratie bourgeoise, dans laquelle les plus exploités et opprimés n’ont pas réellement la parole puisqu’ils n’ont pas le pouvoir, alors que, pour nous, c’est un moyen de discuter entre nous, gilets jaunes, de la perspective d’avenir : en finir avec l’Etat des milliardaires et donner le pouvoir au peuple travailleur !!!

Bien sûr, les gouvernants ne font que parler du RIC pour plus tard, quand ils auront débattu avec le pays, quand ils auront, eux, réformé la constitution et ne font que gagner du temps, que tenter de semer des illusions sur une réforme démocratique de l’Etat mais leur répression plus violente que jamais nous montre combien ils ont des intentions démocratiques !!!

La seule démocratie possible dans cette situation de crise, c’est la nôtre, celle des ronds-points, des comités de gilets jaunes !!!

Leur RIC est un plébiscite à leur politique éhontée et honnie !!!

Leur RIC est pour les riches !!!

Macron refuse un RIC sur l’ISF, un RIC sur le CICE, un RIC sur le remboursement des sommes données aux banques et aux trusts après la crise de 2007, un RIC contre l’Etat des milliardaires !!!

Leur RIC ne sera pas le nôtre : organisé dans nos assemblées de gilet jaunes, décidé par nous, rédigé par nous, voulu par nous !!!

Le journal bourgeois Le Figaro reconnait :

« Les « gilets jaunes » demandent : un RIC abrogatoire qui permettrait au peuple d’abroger une loi ; un RIC révocatoire, qui permettrait au peuple de « révoquer n’importe quel responsable politique, aussi bien le président, qu’un ministre, un député ou n’importe quel élu » ; un RIC législatif, qui permettrait au peuple de proposer un texte de loi ; un RIC constituant qui permettrait d’amender la Constitution (voire d’en changer).

Les « gilets jaunes » estiment que ces RIC sont le seul moyen pour le peuple de « reprendre sa souveraineté ». « Il n’y a rien à négocier en termes de mesures avec le gouvernement. Ce qui doit nous importer tous, c’est de reprendre le pouvoir. »

(https://www.lefigaro.fr/politique/2018/12/11/01002-20181211ARTFIG00284-le-referendum-d-initiative-citoyenne-une-solution-a-la-crise-des-gilets-jaunes.php)

Le rassemblement révolutionnaire du peuple travailleur gilet jaune fonde les prémices d’un nouveau pouvoir qui veut renverser l’ancien et non le réformer. (https://www.matierevolution.fr/spip.php?article7369)

Le mouvement social de France pourrait-il inaugurer une nouvelle « Constitution-1793 » ?

http://kidermesloub.over-blog.com/2023/01/le-mouvement-social-de-france-pourrait-il-inaugurer-une-nouvelle-constitution-1793.html

Bien entendu, Macron veut ne rien changer de fondamental à la constitution, permettant seulement des référendums démagogiques sur l’immigration. (https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/10/04/reforme-constitutionnelle-emmanuel-macron-pose-le-cadre-et-ses-limites_6192494_823448.html) Mélenchon, lui, nous dit vouloir une sixième république bourgeoise. (https://melenchon2022.fr/plans/6e-republique/) Le PS nous dit que son bonheur serait une constitution bourgeoise démocratique. (https://www.parti-socialiste.fr/refonder_la_democratie) Le PCF ambitionne lui aussi une république bourgeoise démocratique. (https://www.pcf.fr/osons_la_revolution_democratique)

Pour les « Insoumis » de Mélenchon, la constituante est un moyen de refonder la République bourgeoise mise en cause par… la politique de Macron (pas par la révolution en gilets jaunes…) !

https://lafranceinsoumise.fr/2018/12/04/gilets-jaunes-vers-une-assemblee-constituante/

Les autres groupes politiques font silence radio sur cette revendication centrale des Gilets jaunes : la fondation d’une constitution d’une France du peuple travailleur…

https://blogs.mediapart.fr/victoria-klotz/blog/240122/une-constituante-sinon-rien

Qu’était l’assemblée nationale constituante de 1789 : https://fr.wikipedia.org/wiki/Assembl%C3%A9e_nationale_constituante_(1789)

Daniel Guérin rappelle une leçon de la révolution française : « la dualité de pouvoirs est un fait révolutionnaire et non constitutionnel. La dualité de pouvoirs est, en son essence, un régime de crise sociale : marquant un extrême fractionnement de la nation, elle comporte, en potentiel ou bien ouvertement, la guerre civile. L’un des deux pouvoirs dut finalement s’effacer devant l’autre. » (https://www.matierevolution.org/spip.php?article5783)

Le peuple travailleur s’est auto-organisé de manière révolutionnaire en 1792 et cela a mené à la constitution de 1793 (https://www.matierevolution.fr/spip.php?article212).

Le peuple des esclaves et des exploités d’Haïti, révolté et ayant pris le pouvoir, a adopté une constitution en 1801. (https://www-marxists-org.translate.goog/history/haiti/1801/constitution.htm?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc)

Pour Karl Marx, la République démocratique n’est que la forme ultime de l’État de la société bourgeoise sous laquelle devra se livrer la bataille définitive entre les classes. (https://www.cairn.info/revue-cites-2014-3-page-19.htm)

Karl Marx :

« Avec l’Assemblée nationale législative (française de 1849), la République constitutionnelle apparaissait achevée, c’est-à-dire sous sa forme étatique républicaine où la domination de la classe bourgeoise est constituée…. »

Mais cela ne signifie pas que Karl Marx dénie tout rôle révolutionnaire au travail constituant :

« La démocratie est l’énigme résolue de toutes les Constitutions. Ici, la Constitution est incessamment ramenée à son fondement réel, à l’homme réel, au peuple réel ; elle est posée non seulement en soi, d’après son essence, mais d’après son existence, d’après la réalité, comme l’œuvre propre du peuple. La Constitution apparaît telle qu’elle est, un libre produit de l’homme. »

« La démocratie est l’essence de toute Constitution politique : l’homme socialisé considéré comme Constitution politique particulière... L’homme n’existe pas à cause de la loi, c’est la loi qui existe à cause de l’homme : c’est une existence humaine, tandis que dans les autres [formes politiques] l’homme est l’existence légale. Tel est le caractère fondamental de la démocratie. »

Karl Marx dans « Les luttes de classes en France » :

« Élaborer cette forme, faire une Constitution républicaine, voilà en quoi consista le « grand œuvre organique » de l’Assemblée nationale constituante. Débaptiser le calendrier chrétien pour en faire un calendrier républicain, remplacer saint Bartholomé par saint Robespierre ne change pas plus le temps ou le vent que cette Constitution ne modifiait ou ne devait modifier la société bourgeoise. Quand elle alla au delà d’un changement de costume, ce fut pour prendre acte de faits existants. C’est ainsi qu’elle enregistra solennellement le fait de la République, le fait du suffrage universel, le fait d’une seule assemblée nationale souveraine à la place des deux Chambres constitutionnelles à pouvoirs limités. C’est ainsi qu’elle enregistra et régularisa le fait de la dictature de Cavaignac en remplaçant la royauté héréditaire établie, irresponsable, par une royauté élective, ambulante, responsable, par une présidence de quatre années. C’est ainsi qu’elle alla jusqu’à ériger en loi constitutionnelle le fait des pouvoirs extraordinaires, dont l’Assemblée nationale avait par précaution prémuni son président, après les horreurs du 15 mai et du 25 juin, dans l’intérêt de sa propre sécurité. Le reste de la Constitution fut affaire de terminologie. On arracha aux rouages de l’ancienne monarchie les étiquettes royalistes et on y colla des étiquettes républicaines. Marrast, l’ancien rédacteur en chef du National, devenu désormais rédacteur en chef de la Constitution, s’acquitta, non sans talent, de cette tâche académique.

L’Assemblée constituante ressemblait à ce fonctionnaire chilien qui voulait consolider les rapports de la propriété foncière par la régularisation du cadastre au moment même où le tonnerre souterrain avait déjà annoncé l’éruption volcanique qui devait projeter au loin le sol même sous ses pieds. Tandis qu’en théorie, elle délimitait au compas les formes dans lesquelles s’exprimait républicainement la domination de la bourgeoisie, elle ne se maintenait en réalité que par l’abolition de toutes les formules, par la force sans phrase, par l’état de siège. Deux jours avant de commencer son œuvre constitutionnelle, elle proclama sa prolongation. Auparavant, on faisait et adoptait des Constitutions dès que le processus du bouleversement social était parvenu à un point de repos, dès que les rapports nouvellement formés entre les classes s’étaient affermis, dès que les fractions rivales de la classe au pouvoir avaient recours à un compromis qui leur permettait de continuer la lutte entre elles en même temps que d’en exclure la masse du peuple épuisée. Cette Constitution, par contre, ne sanctionnait aucune révolution sociale. Elle sanctionnait la victoire momentanée de l’ancienne société sur la révolution.

Dans le premier projet de Constitution, rédigé avant les journées de Juin, se trouvaient encore le « droit au travail » première formule maladroite où se résument les exigences révolutionnaires du prolétariat. On le transforma en droit à l’assistance, or, quel est l’État moderne qui ne nourrit pas d’une façon ou de l’autre ses indigents ! Le droit au travail est au sens bourgeois un contresens, un désir vain, pitoyable, mais derrière le droit au travail, il y a le pouvoir sur le capital, derrière le pouvoir sur le capital l’appropriation des moyens de production, leur subordination à la classe ouvrière associée, c’est-à-dire la suppression du salariat, du capital et de leurs rapports réciproques. Derrière le « droit au travail », il y avait l’insurrection de Juin. Cette Assemblée constituante qui, en fait, mettait le prolétariat révolutionnaire hors la loi, force lui était de rejeter par principe une formule de la Constitution, la loi des lois, de jeter son anathème sur le « droit au travail ». »

(http://www.matierevolution.fr/spip.php?article4563)

Karl Marx sur la constitution française de 1848 :

« La nouvelle Constitution n’était au fond que l’édition républicaine de la Charte constitutionnelle de 1830 [23]. Le système censitaire étroit de la monarchie de Juillet, qui excluait une grande partie de la bourgeoisie elle-même du pouvoir politique, était incompatible avec l’existence de la République bourgeoise. La révolution de Février avait immédiatement proclamé à la place de ce cens le suffrage universel direct. Les républicains bourgeois ne pouvaient pas faire que cet événement n’eût eu lieu. Ils durent se contenter d’y adjoindre la clause restrictive de l’obligation d’une résidence de six mois dans la circonscription électorale. On conserva l’ancienne organisation administrative, municipale, judiciaire, militaire, etc., et là où la Constitution la modifia, cette modification porta uniquement sur la table des matières et non sur le contenu, sur le mot et non sur la chose.

L’inévitable état-major des libertés de 1848 : liberté personnelle, liberté de la presse, de la parole, d’association, de réunion, d’enseignement, des cultes, etc., reçut un uniforme constitutionnel qui le rendait invulnérable. Chacune de ces libertés fut proclamée comme un droit absolu du citoyen français, mais avec cette réserve constante qu’elles étaient illimitées dans la mesure seulement où elles ne se heurtaient pas aux « droits égaux d’autrui et à la sûreté publique », ainsi qu’aux « lois » précisément chargées d’assurer cette harmonie. Par exemple : « Les citoyens ont le droit de s’associer, de s’assembler paisiblement et sans armes, de faire des pétitions et d’exprimer leurs opinions par la presse ou par tout autre moyen. La jouissance de ces droits n’a d’autres limites que les droits égaux d’autrui et la sûreté publique. » (Chap. II de la Constitution française, § 8.) - « L’enseignement est libre. La liberté de l’enseignement doit être exercée dans les conditions fixées par la loi et sous le contrôle suprême de l’État. » (L. c., § 9.) « Le domicile de tout citoyen est inviolable, sauf dans les conditions prévues par la loi. » (Chap. I°, § 3), etc., etc. La Constitution renvoie continuellement à de futures lois organiques destinées à préciser ces réserves et à réglementer la jouissance de ces libertés absolues de telle façon qu’elles ne se heurtent pas entre elles, ni ne mettent en danger la sûreté publique. Et, dans la suite, les lois organiques ont été conçues par les amis de l’ordre, et toutes ces libertés réglementées de telle façon que la bourgeoisie pût en jouir sans se heurter aux droits égaux des autres classes de la société. Dans tous les cas où ces lois organiques interdirent complètement ces libertés « aux autres classes » ou n’en permirent la jouissance que dans des conditions qui sont autant de pièges policiers, ce fut chaque fois uniquement dans l’intérêt de la « sûreté publique », autrement dit de la sûreté de la bourgeoisie, conformément aux prescriptions de la Constitution. C’est pourquoi, dans la suite, on put, des deux côtés, se prévaloir à bon droit de la Constitution, aussi bien les amis de l’ordre, qui supprimaient toutes ces libertés, que les démocrates, qui les réclamaient intégralement. Chaque paragraphe de la Constitution contient, en effet, sa propre antithèse, sa Chambre haute et sa Chambre basse : dans le texte la liberté, dans la marge la suppression de cette liberté. Par suite, tant que le mot de liberté fut respecté et que, seule, sa réalisation véritable fut interdite, par les voies légales s’entend, l’existence constitutionnelle de la liberté resta entière, intacte, bien que son existence réelle fût totalement anéantie.

Cette Constitution, si subtilement rendue inviolable, était cependant, comme Achille, vulnérable en un point, non pas au talon, mais à la tête, ou plutôt aux deux têtes dans lesquelles elle se perdait : l’Assemblée législative, d’un côté, le président, de l’autre. Que l’on feuillette la Constitution, et l’on se rendra compte que, seuls, les paragraphes où sont fixés les rapports du président avec l’Assemblée législative, sont absolus, positifs, sans contradiction possible, impossibles à tourner. Il s’agissait en effet, ici, pour les républicains bourgeois, de leur propre sûreté. Les paragraphes 45 à 70 de la Constitution sont rédigés de telle façon que, si l’Assemblée nationale peut écarter le président constitutionnellement, ce dernier ne peut se débarrasser de l’Assemblée nationale que par voie inconstitutionnelle, en supprimant la Constitution elle-même. Elle provoque ainsi, par conséquent, sa propre suppression violente. Elle ne sanctifie pas seulement, comme la Charte de 1830, la séparation des pouvoirs, elle l’élargit jusqu’à la contradiction la plus intolérable. Le jeu des poussoirs constitutionnels — c’est ainsi que Guizot appelait les querelles parlementaires entre pouvoir législatif et pouvoir exécutif — joue constamment « va banque » dans la Constitution de 1848. D’un côté, 750 représentants du peuple, élus au suffrage universel et rééligibles, constituant une Assemblée nationale irresponsable, indissoluble, indivisible, une Assemblée nationale jouissant d’une toute-puissance législative, décidant en dernière instance en matière de guerre, de paix et de traités de commerce, possédant seule le droit d’amnistie et, par son caractère permanent, occupant constamment le devant de la scène. De l’autre côté, le président, avec tous les attributs de la puissance royale, le droit de nommer et de révoquer ses ministres indépendamment de l’Assemblée nationale, ayant en main tous les moyens d’action du pouvoir exécutif, disposant de tous les emplois et disposant ainsi en France de l’existence de plus d’un million et demi d’hommes, car tel est le nombre de tous ceux qui dépendent des 50 000 fonctionnaires et des officiers de tous grades. Il a le commandement de toutes les forces armées du pays. Il jouit du privilège de gracier quelques criminels, de suspendre les gardes nationaux, de révoquer, d’accord avec le Conseil d’État, les conseillers généraux, cantonaux, municipaux, élus par les citoyens eux-mêmes. Il a l’initiative et la direction de toutes les négociations avec l’étranger. Tandis que l’Assemblée reste constamment sur la scène, exposée à la critique de l’opinion publique, il mène une vie cachée, aux Champs-Elysées, ayant sous les yeux et dans son cœur l’article 45 de la Constitution, qui lui crie tous les jours : « Frère, il faut mourir ! [24] Ton pouvoir cesse le second dimanche du joli mois de mai, dans la quatrième année de ton élection ! Alors, c’en sera fini de la splendeur ! Il n’y aura pas de seconde représentation, et si tu as des dettes, réfléchis à temps aux moyens de les payer sur les 600 000 francs que t’alloue la Constitution, à moins que tu ne préfères partir pour Clichy [25], le deuxième lundi du joli mois de mai ! » Si la Constitution donne au président le pouvoir effectif elle s’efforce du moins d’assurer à l’Assemblée nationale le pouvoir moral. Mais, outre qu’il est impossible de créer un pouvoir moral à l’aide d’articles de loi, la Constitution se détruit encore une fois elle-même en faisant élire le président au suffrage direct par tous les Français. Tandis que les suffrages de la France se dispersent sur les 750 membres de l’Assemblée nationale, ils se concentrent ici, par contre, sur un seul individu. Alors que chaque député ne représente que tel ou tel parti, telle ou telle ville, telle ou telle tête de pont, ou même la simple nécessité d’élire un sept-cent-cinquantième individu quelconque, opération dans laquelle on ne se montre pas plus difficile pour l’homme que pour la chose, il est, lui, l’élu de la nation, et son élection est l’atout que le peuple souverain joue une fois tous les quatre ans. L’Assemblée nationale élue est unie à la nation par un rapport métaphysique mais le président élu est uni à elle par un rapport personnel. L’Assemblée nationale représente bien dans ses différents membres les aspects multiples de l’esprit national, mais c’est dans le président que ce dernier s’incarne. Il a en face d’elle une sorte de droit divin. Il est, par la grâce du peuple.

Thétis, la déesse de la mer, avait prédit à Achille qu’il périrait dans la fleur de la jeunesse. La Constitution, qui avait son point vulnérable comme Achille, pressentait comme lui qu’elle mourrait d’une mort prématurée. Il suffisait aux républicains purs de la Constituante de jeter du ciel nébuleux de leur République idéale un regard sur le monde profane pour se rendre compte que l’arrogance des royalistes, des bonapartistes, des démocrates, des communistes et leur propre discrédit croissaient de jour en jour, à mesure qu’ils se rapprochaient davantage du couronnement de leur grand chef-d’œuvre législatif, sans que Thétis eût eu besoin pour cela de quitter la mer et de leur confier son secret. Ils essayèrent de tromper le destin au moyen d’une ruse constitutionnelle, à l’aide du paragraphe 111 de la Constitution, aux termes duquel toute proposition de révision de la Constitution ne peut être votée, après trois débats successifs, séparés par un intervalle d’un mois, que par une majorité d’au moins trois quarts des voix, à condition encore que 500 membres au moins de l’Assemblée nationale participent au vote. Ce n’était là de leur part qu’une tentative désespérée d’exercer encore, en tant que minorité parlementaire, à laquelle ils se voyaient prophétiquement déjà réduits, un pouvoir qu’ils voyaient s’échapper tous les jours davantage de leurs mains débiles, au moment même où ils disposaient de la majorité parlementaire et de tous les moyens d’action du pouvoir gouvernemental.

Enfin, dans un paragraphe mélodramatique, la Constitution se confiait elle-même « à la vigilance et au patriotisme du peuple français tout entier, comme de chaque Français en particulier », après avoir, dans un autre paragraphe, signalé les « vigilants » et les « patriotes » à l’attention délicate et criminelle du tribunal suprême qu’elle avait inventé elle-même, à savoir la Haute Cour.

Telle était la Constitution de 1848 qui fut renversée le 2 décembre 1851, non par une tête, mais par le simple contact d’un chapeau. Il est vrai que ce chapeau était le tricorne de Napoléon. »
(http://www.matierevolution.fr/spip.php?article347)

Karl Marx s’oppose à la conception hégélienne de la constitution et de l’Etat (https://www-marxists-org.translate.goog/archive/marx/works/1843/critique-hpr/ch02.htm?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc)

« Qu’est-ce qu’une Constitution ? » demande Ferdinand Lassalle.

« Mais existe-t-il donc quelque chose dans un pays – et avec cette question, c’est la pleine lumière qui commence à pénétrer progressivement – existe-t-il dans un pays quelque chose, une force agissante, déterminante, qui influe sur toutes les lois édictées I dans ce pays de telle sorte que, dans des limites données, elles soient nécessairement telles qu’elles sont et non différentes ? Mais évidemment, Messieurs, cela existe, et ce quelque chose n’est rien d’autre que les rapports de forces réels existant dans une société donnée.
Les rapports de forces réels qui existent dans chaque société sont cette force effective, agissante, qui conditionne toutes les lois et les dispositions juridiques de cette société, de telle sorte que pour l’essentiel elles ne peuvent guère être différentes de ce qu’elles sont…

Faire une Constitution écrite était la moindre des choses ; cela se fait quand il le faut en trois fois 24 heures ; c’était la dernière de toutes les choses à faire ; par elle, si elle venait prématurément, la plus minime des choses ne se trouvait accomplie.
Transformer effectivement dans les pays les rapports réels des forces, entamer le pouvoir exécutif, le faire de telle façon, le transformer tellement qu’il ne pût plus jamais, par lui-même, s’opposer à la volonté de la nation – c’était cela qu’il fallait faire alors, ce qui devait tout précéder, afin qu’une Constitution puisse être durable.
Cela n’arrivant pas à temps, on ne laissa même pas à l’Assemblée nationale le temps de faire une Constitution, on la chassa avec les instruments de ce pouvoir exécutif qui n’avaient pas été brisés. »

(https://www.marxists.org/francais/general/lassalle/constitution.htm)

Ferdinand Lassalle, Sur l’essence des constitutions (https://www-marxists-org.translate.goog/history/etol/newspape/fi/vol03/no01/lassalle.htm?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc)

La Commune de Paris de 1871 était un pouvoir du peuple travailleur (https://blog.juspoliticum.com/2021/05/24/les-150-ans-de-la-commune-de-paris-etude-constitutionnelle-dune-guerre-civile-par-annette-de-moura/) et a été constituée comme un Etat ouvrier, comme Marx le souligne dans « La guerre civile en France » (https://www.marxists.org/francais/ait/1871/05/km18710530c.htm)

Quelle constitution a été adoptée par les conseils de travailleurs de Russie (soviets) en 1918 ? (https://www-marxists-org.translate.goog/history/ussr/government/constitution/1918/article1.htm?_x_tr_sl=en&_x_tr_tl=fr&_x_tr_hl=fr&_x_tr_pto=sc)

La constitution de l’URSS pseudo socialiste et réellement stalinienne de 1938 (https://www.marxists.org/francais/trotsky/oeuvres/1936/04/lt19360416a.htm)

L’Etat n’a jamais été au-dessus des classes sociales et c’est, au contraire, l’instrument d’une classe pour en opprimer une autre. (https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/08/er1.htm#c1.1)

L’objectif final des opprimés et des exploités est nécessairement d’en finir définitivement avec l’Etat. (https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/08/er5.htm)

Il faut d’abord renverser violemment l’Etat des exploiteurs. (https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/08/er1.htm#c1.4)

Mais tant que les exploiteurs dominent dans le monde, un Etat reste nécessaire au peuple travailleur pour les combattre, c’est la dictature du prolétariat ou Etat ouvrier. (https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1920/10/vil19201020.htm)

La dictature du prolétariat est infiniment plus démocratique que la république bourgeoise. Elle n’est une dictature que contre l’infime minorité d’exploiteurs. (http://www.matierevolution.fr/spip.php?article155)

Lénine dans "De l’Etat" :

« Quelles que soient les formes revêtues par la république, fût-elle la plus démocratique, si c’est une république bourgeoise, si la propriété privée de la terre, des usines et des fabriques y subsiste, et si le capital privé y maintient toute la société dans l’esclavage salarié, autrement dit si l’on n’y réalise pas ce que proclament le programme de notre Parti et la Constitution soviétique, cet Etat est une machine qui permet aux uns d’opprimer les autres. Et cette machine, nous la remettrons aux mains de la classe qui doit renverser le pouvoir du capital. Nous rejetterons tous les vieux préjugés selon lesquels l’Etat, c’est l’égalité générale. Ce n’est qu’un leurre ; tant que l’exploitation subsiste, l’égalité est impossible. Le grand propriétaire foncier ne peut être l’égal de l’ouvrier, ni l’affamé du repu. Cet appareil qu’on appelait l’Etat, qui inspire aux hommes une superstitieuse vénération, ajoutant foi aux vieilles fables d’après lesquelles l’Etat, c’est le pouvoir du peuple entier, - le prolétariat le rejette et dit : c’est un mensonge bourgeois. Cette machine, nous l’avons enlevée aux capitalistes, nous nous en sommes emparés. Avec cette machine, ou avec ce gourdin, nous anéantirons toute exploitation ; et quand il ne restera plus sur la terre aucune possibilité d’exploiter autrui, qu’il ne restera plus ni propriétaires fonciers, ni propriétaires de fabriques, qu’il n’y aura plus de gavés d’un côté et d’affamés de l’autre, quand cela sera devenu impossible, alors seulement nous mettrons cette machine à la ferraille. Alors, il n’y aura plus d’Etat, plus d’exploitation. Tel est le point de vue de notre Parti communiste. »

L’Etat (en général), c’est quoi ?

Le rôle général de l’Etat est une question complètement cachée au grand public qui croit toujours que « normalement » l’Etat devrait servir le public, devrait défendre la justice fiscale, devrait défendre l’emploi, la santé, la sécurité des gens, les femmes, les pauvres, les chômeurs, etc.

La plupart croient que l’Etat défend le pays, défend le peuple, défend l’intérêt général, est là pour faire fonctionner des services publics et que, s’il ne le fait pas, c’est uniquement parce que des hommes politiques particulièrement corrompus et menteurs ont détourné son véritable rôle et l’on transformé en son inverse en la défense d’intérêts privés de la plus infime minorité, celle des grands capitalistes.

C’est pour cela qu’ils pensent que l’Etat devrait intervenir contre les licenciements patronaux, qu’ils pensent que l’Etat devrait intervenir contre les injustices sociales ou pour les limiter par une fiscalité contraignante du grand capital, qu’ils pensent que l’Etat devrait intervenir contre la crise économique qui les menace de chômage et de misère, qu’ils pensent que l’Etat met en place un secteur économique étatique dans le but de servir l’intérêt de la population, qu’ils pensent que les nationalisations sont là pour servir le peuple, qu’ils pensent que les aides économiques aux entreprises sont là pour servir l’emploi, que les efforts d’armement sont là pour protéger le peuple et lui éviter la guerre, qu’ils pensent que l’Etat fait la guerre pour les défendre, que l’appareil d’Etat démocratique est là pour combattre les risques fascistes, que l’Etat est mené par les élections, par l’opinion publique, par les choix des peuples eux-mêmes et que, si l’Etat prend la mauvaise voix, c’est surement parce que le peuple s’est aussi trompé, que si l’Etat démocratique est devenu dictatorial, c’est parce que le peuple, ou une partie de celui-ci, s’est entiché du dictateur, fasciste, c’est parce que le peuple l’est devenu en partie, etc, etc.

Or la compréhension de l’Etat nécessite tout d’abord d’aller complètement en sens inverse : l’Etat c’est essentiellement un appareil détaché de la société civile et qui n’est attaché qu’à une fraction infime de celle-ci, l’infime minorité des exploiteurs, qu’il s’agisse de maitres d’esclaves, de nobles exploitant des serfs, de bourgeois exploitant des travailleurs, de capitalistes impérialistes, opprimant des continents entiers…

L’Etat en lui-même n’a pas d’autre nature que celle de l’exploitation qui existe dans une société donnée à un moment donné. C’est ainsi qu’il y a des Etats esclavagistes, des Etats féodaux, des Etats bourgeois et des Etats capitalistes.

Certains ont prétendu que le débat sur la question de l’Etat porterait sur « moins d’Etat » (les libéraux) ou « plus d’Etat » (les étatistes), mais cela est faux : on a bien vu ces derniers temps que les libéraux ne dispensaient pas moins de milliers de milliards de dollars d’argent d’Etat aux capitalistes que les étatistes !

La prétention à distinguer des Etats démocratiques et d’autres dictatoriaux, qu’ils soient ou pas des dictatures militaires ou des régimes fasciste, ne résiste pas à l’étude de l’Histoire.

Un Etat dit démocratique se comporte en dictateur et fasciste dès lors qu’il intervient militairement dans un pays colonisé ou dans une guerre.

Et un Etat démocratique, à la faveur d’une crise sociale et politique, se change en Etat dictatorial sans même qu’il y ait de rupture dans la structure de l’Etat.

L’Etat est donc bel et bien la structure répressive indispensable pour détruire les possibilités de révolutions sociales menées par les exploités.

Compter sur l’Etat pour résoudre les problèmes de la société humaine, c’est se tromper gravement.

(https://www.matierevolution.org/spip.php?article7593)

Qu’est-ce que la démocratie ?

Le principe général de l’exercice de la démocratie se résume à la phrase d’Abraham Lincoln : le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. Toute la difficulté tient dans l’application de ce vaste programme. La force de ce système politique tient généralement par la vaste adhésion qu’il suscite dans la population, quel que soit le mode de fonctionnement choisi. Plus que la démocratie elle-même, c’est l’idée démocratique qui fédère les peuples, l’impression que nous sommes libres de nos choix, de nos actions, que nous nous dotons des dirigeants que nous méritons. L’imaginaire démocratique est tellement fort, tellement ancré en nous que lorsque l’essence d’un pouvoir se modifie, nous nous refusons à voir ce qui doit crever les yeux.

L’imaginaire démocratique tient pour une évidence que le système démocratique est l’émanation de la volonté commune et qu’à ce titre, il tend naturellement vers le bien-être du plus grand nombre, exactement de la même manière que l’imaginaire capitaliste est totalement à l’aise avec le concept de main invisible qui régule le marché de manière supranaturelle. L’essence de la démocratie, ce serait le progrès pour tous, l’égalité, la liberté, la fraternité, dans l’ordre de votre choix. Le hiatus, c’est que pour réaliser ce bel idéal, on s’empresse de mettre en place un système hiérarchique des pouvoirs qui contredit intrinsèquement ces nobles aspirations.

La démocratie contemporaine s’exprime principalement de manière indirecte : le peuple est appelé de temps à autre à désigner ses représentants dans la sphère politique, laquelle décide ensuite de manière autonome de la manière dont elle va conduire le pays. L’exercice du pouvoir est donc délégué à un groupe assez restreint de personnes, lesquelles sont censées représenter l’ensemble du peuple.
D’un autre côté, comment envisager l’expression directe de la démocratie à l’échelle d’un pays ou même d’une région ? Mais du coup, pourquoi ne pas l’envisager à l’échelle d’une commune ou d’un quartier, un peu à la manière des Suisses ?

L’action du peuple sur la marche des affaires du pays se résume donc à glisser un bulletin de vote dans l’urne de temps à autre et à considérer qu’ensuite, ce qui sortira du système sera forcément l’émanation de sa volonté. Mais la question même des modalités du choix n’est que très marginalement abordée : qui sont les candidats, d’où sortent-ils, qui représentent-ils réellement ? La démocratie contemporaine nous aurait affranchis de la lutte des classes, celles-ci se seraient effacées, diluées dans une sorte de consensus mou, tant et si bien qu’il devient extrêmement difficile d’obtenir la composition sociologique du parlement qui décide pourtant en notre nom à tous, parce que cela ne serait plus utile. Ou parce que cela serait trop révélateur au contraire de ce qui sous-tend l’accession au pouvoir ?

(https://www.matierevolution.fr/spip.php?article845)

En période de révolution, rien ne vaut la démocratie directe !

(https://www.matierevolution.fr/spip.php?article6535)

La seule démocratie possible, en période de crise aïgue de la domination capitaliste, est d’arracher à la bourgeoisie ses instruments de domination

(https://www.matierevolution.fr/spip.php?article6420)

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