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Trois hommes dans un bateau (sans parler du chien) de Jérome K. Jérome

dimanche 7 février 2021, par Robert Paris

Trois hommes dans un bateau (sans parler du chien) de Jérome K. Jérome

1889

Chaque société cultive sa forme de culture. Le drame, le roman, le théâtre ont leurs formes typiques et leurs personnages reconnus. L’autodérision en est généralement un des éléments. Elle diffère selon les régions et les pays. Trois hommes dans un bateau est le roman caractéristique de l’humour anglais.

Trois hommes dans un bateau (sans parler du chien) (titre original : Three Men in a Boat (To Say Nothing of the Dog)) est un roman comique de Jerome K. Jerome, publié en 1889. Il narre les aventures de George, Harris, Jérôme et Montmorency (le chien), entreprenant un voyage sur la Tamise.

Le livre est parsemé d’anecdotes comiques, mais aussi de réflexions philosophiques sur l’existence, les illusions que nous entretenons volontiers sur le monde et sur nous-mêmes, et la nécessité de ne pas trop charger de luxe la barque de sa vie.

Malgré les réticences des critiques littéraires qui reprochent à l’auteur un style considéré comme trop populaire, l’ouvrage connaît un grand succès ; pour satisfaire à la demande, des copies piratées seront même vendues aux États-Unis.

Bien que l’œuvre ait pour but de faire découvrir de façon plaisante l’histoire de la Tamise, ce sont les anecdotes comiques qui en font le succès et qui rendent le livre toujours populaire de nos jours.

Le livre commence avec une réunion des trois amis, au domicile de Jerome, qui, tout en bavardant et fumant la pipe se déclarent atteints de diverses maladies aussi graves que fumeuses. Cet épisode est prétexte pour l’auteur à de plaisantes variations et anecdotes personnelles sur l’hypocondrie.

Comme remède à leur taedium vitae, qu’ils attribuent à l’excès de travail, les trois amis décident d’un traitement de choc : une expédition de canotage sur la haute Tamise. Le départ est fixé le samedi suivant, toutefois George, pour des questions de travail, ne pourra rejoindre que le lendemain, à Weybridge. La préparation des bagages et des provisions la veille du départ est prétexte à une suite de gags visuels du style slapstick ; le volume à emporter risque de couler le canot, et pendant que les amis sortent leurs affaires, tous les garnements du coin raillent les « explorateurs » qui « partent à la recherche de Stanley ».

Le délire continue à la gare de Waterloo, dont la désorganisation était un sujet de plaisanteries récurrentes à l’époque Victorienne. L’auteur, qui fut employé temporaire des Chemins de fer, ne se prive pas d’en rajouter : il montre Harris et lui-même soudoyant le mécanicien de la locomotive pour les emmener à Kingston alors que son train est en principe la « Malle » d’Exeter (direction diamétralement opposée à Kingston sur Tamise).

Une fois le canot de louage pris en main, l’expédition peut commencer... et les digressions aussi : en effet, le projet initial de Jerome K Jerome était de faire un simple guide touristique à l’usage des vacanciers canotiers sur les anecdotes historiques liées aux lieux traversés (souvent chargés d’histoire, comme le palais d’Henri VIII à Hampton Court, avec son labyrinthe et les jardins où le roi folâtrait avec Ann Boleyn, l’île de la Grande Charte où Jean Sans Terre se vit rogner les ailes par ses barons ou encore l’Ile aux Singes, chargée de souvenirs liés aux abbayes locales).

L’auteur s’éloigna bien vite de cette ligne initiale, même s’il conte les anecdotes historiques sur un ton distancié d’ironie légère et bon enfant.

Le moindre événement est prétexte à des digressions amusantes et à des anecdotes prétendument vécues (et « à peine » exagérées) sur la nature perverse des fox-terriers, l’inexactitude des baromètres et des bulletins météo, la vanité des chanteurs qui ne connaissent pas les paroles de leurs chansons, la mauvaise volonté des bouilloires à bouillir quand on les regarde, les implications sociopathiques de l’apprentissage de la cornemuse ou encore l’agressivité olfactive des fromages. La narration de Jerome K. Jerome est un exemple caractéristique d’humour au second degré, dissimulé sous les apparences d’un récit factuel et candide.

Le voyage lui-même, avec ses incidents de canotage, les cafouillages homériques des trois amis, ou ceux, pires encore, d’autres canotiers, et les réminiscences d’autres cafouillages lors de virées précédentes sont prétextes à des tranches de vie comiques : l’attitude hostile d’une boîte de conserve quand on a oublié l’ouvre-boîte, les canotiers irresponsables remorqués par un cheval de trait au galop, la présomption catastrophique de l’auteur et d’un copain louant un canot à voile par vent plus que frais alors qu’ils sont totalement novices (mais se prennent pour Cook ou Nelson), l’attitude ambivalente des canotiers face aux chaloupes à vapeur (suivant qu’elles vous coupent la route avec un équipage de snobs ou qu’elles vous remorquent obligeamment), le désastre de l’Oncle Podger accrochant un tableau au mur, les charmantes auberges de campagne qui se révèlent totalement bondées, ou les hâbleries des pêcheurs à la ligne au sujet d’une truite géante accrochée au mur d’un pub (elle se révèle être un poisson factice en plâtre de Paris).

Ces saynètes (et bien d’autres) sont sous-tendues par une vision narquoise de la nature humaine.

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