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On ne nait pas homme, on le devient…

lundi 15 janvier 2024, par Robert Paris

On ne nait pas homme (au point de vue du sexe, par opposition à femme), on le devient…

Ce texte ne discute pas de la séparation entre homme et animal, ni de « la théorie du genre » qui concerne les personnes d’âge mur sexuellement parlant, ni de leur sexualité, ni de l’homosexualité. Nous ne parlons ici que de l’émergence du sexe au stade fœtal de l’être humain.

Simone de Beauvoir a écrit qu’ « on ne nait pas femme, on le devient » mais ce n’était pas à propos du fœtus ni de la naissance physiologique mais de la naissance sociale de la femme ! Cependant, cette phrase inversée devient « on ne nait pas homme (sexe), on le devient », et ce pourrait bien être la vérité scientifique parce qu’à la base (le fœtus commençant à se développer dans le ventre de la mère) nous sommes tous… des femmes.

Bien des gens ont l’image inverse selon laquelle on naitrait tous garçons et qu’ensuite certains d’entre eux auraient une déviation vers une fille. Ancien Testament et Bible catholique n’ont-t-il pas affirmé que la femme est « tirée d’une côte de l’homme » ? Ce conte biblique patriarcal sous-entend que la femme est venue après l’homme dans la « création ».

Il semble bien que dans la formation physiologique d’un être humain non mythique, ce soit même l’inverse qui soit vrai : on nait femme et on devient, éventuellement, homme ensuite. Et cela n’a rien d’exeptionnel parmi les animaux, c’est la règle.

Jacques Ruffié écrit ainsi dans « le déterminisme du sexe » (chapitre de « Le sexe et la mort ») : « Chez les mamiffères, il y a un sexe dominant, normal, vers lequel se dirige tout fœtus : le sexe féminin. Pour qu’un mammifère s’oriente vers la masculinisation, deux groupes d’hormones secrétées par les testicules et reconnues par les récepteurs cellulaires corespondants sont nécessaires : l’un supprime les canaux de Müller et l’autre, représentée par les hormones masculinisantes, détermine l’apparition des caractères mâles. Chez les oiseaux, c’est le contraire du cas des mammifères (le testicule doit lutter pour imposer la masculinisation) : c’est l’ovaire des oiseaux qui doit imposer la féminisation. »

Léo Grasset écrit dans « Le coup de la girafe » : « Rappelons-nous que toutes les personnes sont des femmes lorsqu’elles sont de jeunes embryons : le sexe femmelle est le sexe « de base » à partit duquel le sexe masculin va se différencier. Les premières décharges hormonales masculines n’apparaissent qu’à la huitième semaine. Dit autrement, les hommes devront fabriquer leurs organes de mâles à partir de ce qui est déjà disponible « sur place », et qui est déjà un peu féminin. Les tétons sont déjà produits dès la sixième semaine, il va falloir faire avec. Chaque attribut mâle est un attribut en plus, durement acquis à grandes salves des testostérones et de rafales d’androgènes. Si quelque chose de féminin reste, mais qu’il ne gène pas et qu’il ne défavorise pas son porteur, il restera en place. »

La plupart des gens pensent que, dès le départ, on nait « garçon » ou on nait « fille » et que c’est irréversible car inscrit dans les gènes et c’est faux. En effet, c’est un être au potentiel à la fois homme et femme qui apparaît dans le ventre de la femme : le fœtus. Cependant, ce nouvel être humain paraît être plutôt un être féminin à potentialités masculines que le contraire. En tout cas, il ne suffit pas de dire que « c’est génétique », ce qui signifierait que tout est dans la 23ème paire de chromosomes, soit XX soit XY comme on le lit dans bien des articles des média. Le mécanisme de mise en place de la sexualité n’est pas terminé par le choix XX ou XY. Il faut encore que le gène SRY intervienne ou pas, ce qui rend possible (mais plus rare) d’avoir une femme XY et un homme XX.

En tout cas, on n’est ni définitivement ni « femme » ni « homme » avant la cinquième semaine de la grossesse. Or, les gènes, on les a déjà et ils sont définitivement inscrits et immuables.

Une des erreurs de cette conception purement génétique des sexes est qu’elle oppose diamétralement les deux (ou XX ou XY exclusivement) alors que les deux sexes s’opposent dialectiquement et d’abord ils se composent dans le fœtus puis se dissocient de manière contradictoire. Il peut donc y avoir divergence entre le sexe génétique et le sexe anatomique. La sexualité est donc une fonction contradictoire et non un attribut directement relié à une dichotomie génétique. Fondamentalement, vers la 8e semaine de gestation, ce sont les chromosomes sexuels qui déclenchent la différenciation et qui, en quelque sorte, décident si c’est la voie féminine ou masculine qui doit être prise.

Il peut y avoir des sexualités moins clairement définies que d’autres. Il peut y avoir des êtres vivants qui sont partiellement d’un sexe et partiellement d’un autre ou d’une sexualité faible, atténuée. Ce ne sont pas des êtres malformés. Ce sont des êtres tout à fait normaux.

Lire ici :

https://www.matierevolution.fr/spip.php?article4130

Comment est-il possible que des chromosomes masculins puissent ne pas donner des hommes et des chromosomes féminins ne pas donner des femmes ? Eh bien, les gènes contenus dans ces chromosomes peuvent tout à fait avoir été inhibés !

Et les gènes ne sont que l’un des trois paliers de la construction de la sexualité chez le fœtus. Ces trois paliers sont le palier chromosomique, le palier hormonal et le palier organique. Les trois sont déterminants et pas un seul.

Au départ, le fœtus est au stade dit « sexuellement indifférencié ». C’est durant l’embryogenèse que la sexualité de l’individu va être déterminée. Ensuite, la potentialité masculine du fœtus sera activée ou pas en fonction de la quantité des androgènes que reçoit l’embryon dans le ventre de la mère. Et encore, ce n’est pas tout : c’est bien plus compliqué que cela, la sexualité dépend de nombreux mécanismes complexes dont certains sont encore en train d’être découverts

In utero, la testostérone agit directement sur le développement des organes génitaux dans le sens d’une différenciation masculine, de même qu’elle semble agir sur le cerveau pour induire l’identité masculine, et ce de manière proportionnelle au taux circulant dans le sang fœtal. D’autres hormones mâles peuvent agir dans le sens d’un développement masculin : les androgènes surrénaliens.

Mais, à la base, nous sommes tous des… femmes ! Eh oui ! On nait femme et parfois on devient homme. Et c’est ce qui expliquerait certains attributs féminins qui se retrouvent dans le corps des hommes comme les tétons qui n’ont pourtant aucune utilité pour un homme.

Lors des premières semaines, seul le chromosome X, féminin, s’exprime, quelque soit le sexe de l’embryon. On parle alors de développement indifférencié, ou asexué.

L’embryon est physiologiquement indifférencié jusqu’à la septième semaine de grossesse. À partir de la huitième semaine, commence la différenciation des gonades et des organes génitaux internes puis des organes externes au cours du troisième mois de vie fœtale.

Le chromosome féminin lance alors la conception des seins. Au bout de six semaines, si un second chromosome X s’exprime, c’est une fille, si c’est le chromosome Y qui entre en jeu, c’est un garçon. Celui-ci commande l’apparition des organes masculins, gère l’arrivée de la testostérone et bloque la formation - déjà avancée - des seins. Voici pourquoi les hommes sont dotés de mamelles.

Mais ces tétons masculins ont-ils conservé un caractère féminin, c’est-à-dire une capacité à sortir du lait ? Eh bien oui ! Interrogé par Science&Vie, Thierry Lodé, spécialiste de la sexualité chez les humains et les animaux, remarque cependant que “si les hommes étaient obligés de nourrir leur enfant par ce moyen, ils pourraient développer l’activité galactophore. En témoigne la production d’une petite quantité de lait en cas de stress ou de manipulation chez certains hommes." C’est donc bel et bien un attribut féminin qui a été conservé chez l’homme parce qu’à la base nous sommes tous des… femmes !

Les premières semaines du foetus, seul s’exprime le chromosome X, le chromosome féminin, y compris chez les garçons. Pendant six semaines, le développement est asexué, ou plutôt indifférencié. Tout change à la sixième semaine de vie fœtale. Si c’est une fille, un second chromosome X va entrer en jeu et induire la formation des organes féminins (vulve, utérus, ovaires) et générer la production d’hormones féminines comme l’œstrogène et la progestérone. Si c’est un garçon, c’est le chromosome Y qui déboule. Il va commander la formation des organes mâles (pénis et testicules), baignés par l’arrivée de l’hormone masculine, la testostérone. Mais entre-temps, le petit embryon unisexe avait déjà lancé la fabrication des tétons. Il est trop tard pour revenir en arrière. Chez le garçon ils ne bougeront plus, restant à l’état de mamelles rudimentaires, pour ainsi dire fossilisées.

Chez les embryons de sexe féminin, la transformation des gonades indifférenciées en ovaires a lieu entre 8 et 10 semaines de développement embryonnaire. C’est la différenciation ovarienne. Les follicules ne se formeront qu’après la naissance. Les ovaires produisent des œstrogènes. C’est cette hormone qui va maintenir les canaux de Müller, et les amener à se transformer peu à peu en oviductes. Les canaux de Wolff, eux, dégénèrent par l’absence de testostérone et la différenciation est favorisée par le gène DAX1, qui inhibe les caractères masculins. Les canaux de Müller se modifient pour former, dans leur partie supérieure, les trompes de Fallope, dans les segments moyens, deux cornes utérines qui se souderont en un utérus unique au 4e mois de l’embryon. Dans le segment inférieur, les deux canaux fusionnent pour constituer le canal utéro-vaginal et le renflement postérieur, le tubercule de Müller, constitue le col de l’utérus alors que la cavité du vagin se forme. Chez le fœtus féminin, les orifices génital et urinaire sont distincts. Les organes génitaux externes féminins se forment au cours du 3e mois de la vie fœtale.

À la naissance, la structure de la glande mammaire est inachevée et comporte une ramification de canaux galactophores primordiaux. L’arrêt du fonctionnement placentaire s’accompagne d’une suppression des œstrogènes maternels qui provoque de manière transitoire, dans les deux sexes, un état congestif des seins et une sécrétion lactée. À ce stade, les glandes mammaires n’évoluent plus chez le garçon. Chez la fille, elles restent au repos jusqu’à la puberté, où leur évolution amène le développement des seins.

Jacques Ruffié écrit dans « le déterminisme du sexe » (chapitre de « Le sexe et la mort ») : « L’intervention des chromosomes dans la sexualité, encore mal connue, est trsè précoce. Les premières cellules destinées à devenir sexuelles naisssent de l’épithélium coelonique de l’embryon et migrent de là dans un « coin » de l’organisme où elles donnent des glandes sexuelles ou gonades. C’est au moment précis où ces glandes se différencient qu’elles évoluent vers la lignée mâle ou la lignée femelle. Cette différenciation est sous le contrôle du patrimoine héréditaire. Chez l’homme, et sans doute chez tous les mammifères, le chromosome Y doit renfermer un ou plusieurs gènes qui assurent la synthèse d’une molécule signal. Celle-ci agit comme un déclencheur du « programme mâle » qui sera en grande partie assuré par la mise en action de gènes portés par les autosomes (lesquels, en l’absence de Y, demeureraient muets mais n’en existeraient pas moins). Ces gènes autosomiques ne sont pas à proprement parler sexuels, car ils ne fixent pas la nature du sexe, mais ils participent à sa réalisation en obéissant aux ordres venus de Y. Ils provoquent l’apparition de tous les caractères sexuels mâles tant primitifs (nature histologique des gonades qui seront soit femelles : ovules, soit mâles : testicules), que primaires (organes génitaux proprement dits) ou secondaires (traits phénotypiques caractéristiques d’un sexe, mais qui n’interviennent pas nécessairement de façon directe dans la copulation)…. La sexualité implique une « couverture hormonale » complexe, dont le mécanisme, que l’on pensait naguère assez simple, est encore mal élucidé… L’intervention hormonale se situe à deux niveaux : celui des gonades qui, outre leur rôle de fabricants de cellules sexuelles, sont aussi de véritables glandes endocrines, celui de l’hypophyse antérieure et des parties voisines du cerveau qui contrôlent, pour ainsi dire, l’activité hortmonale des gonades. Le rôle des hormones dans la différenciation paraît incontestable…. Les hormones sexuelles féminines sont les oestrogènes et la progestérone. La principale hormone sexuelle masculine est la testostérone. Chimiquement, elle présente une structure très proche des hormones femelles et dérive comme elles du cholestérol. Elle est présente chez la femme mais en quantité beaucoup plus faible que chez l’homme. En fait, la testostérone est un précurseur, une préhormone. L’hormone proprement dite est la dihydrotestostérone. La régulation des hormones sexuelles, mâles comme femelles, est sous la commande d’hormones anté-hypophysaires, dites hormones gonadothropes qui sont les mêmes pour les deux sexes… L’ensemble du cycle ovarien féminin dépend d’un mécanisme neuro-hormonal mettant en jeu au moins deux types de circuits complexes, l’un freinant, l’autre accélarant l’acitvité de synthèse des gonades-trophines et des hormones sexuelles… On sait maintenant qu’il existe, au moins au niveau de l’hypothalamus, des structures qui commandent les conduites sexuelles homo et hétérotypiques… L’action hormonale s’exerce durant le développement intra-utérin. C’est à ce moment que la gonade s’oriente vers un sexe soit mâle (testicule), soit femelle (ovaire) selon l’équipement génétique du sujet. A son tour, la gonade, qui joue aussi le rôle de glande endocrine, va fixer par voie hormonale les structures hypothalamiques vers le sexe correspondant… Dans le début de la vie embryologique, les vertébrés (et même les invertébrés) sont doués d’une double potentialité sexuelle : masculite et féminine. Aussi suffira-t-il de peu de chose pour entraîner une déviation : chaque individu passant, à un moment ou à un autre, par un stade physiologique, ou plus tard mental, bisexué. »

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