dimanche 7 février 2010, par
LA VOIX DES TRAVAILLEURS
« Travailleurs de tous les pays unissez-vous »
Karl Marx
Des casques bleus ont tiré mardi des gaz lacrymogènes pour tenter de contrôler une foule de sinistrés lors d’une distribution de vivres à Port-au-Prince, deux semaines après le tremblement de terre qui a dévasté Haïti. /Photo prise le 26 janvier 2010
La révolte des Haïtiens, le film
Des centaines d’Haïtiens ont manifesté à Port-au-Prince lors de la venue Bill Clinton, nouveau gouverneur américain d’Haïti, et pour le conspuer parce qu’elles n’ont toujours reçu aucune tente ni moyen quelconque de dormir. Le gouvernement haïtien de Préval a annoncé officiellement que, pour le moment, il n’avait touché aucun centime de l’aide internationale pour Haïti ! Tous les peuples du monde sont sollicités actuellement par des campagnes massives pour faire croire que l’on aide ce "malheureux peuple victime de la nature et du sort"... Mais tel n’est nullement l’objectif de l’intervention internationale qui avait été planifiée avant le séisme. Elle visait à mettre Haïti sous tutelle internationale, sous occupation militaire et sous l’égide d’un gouvernorat dirigé par les USA.
Le séisme a seulement servi de prétexte pour couvrir cette opération de police... Les USA, le Canada, le Brésil, la France,... ont envahi Haïti militairement. Ce n’est ni les sauveteurs, ni les médecins, ni la nourriture qui débarquent massivement dans l’île ravagée, mais trente mille hommes en armes et notamment des marines et des paras, les fameux bérets noirs US. Ce n’était pas pour lutter contre de petits voleurs dans les magasins ou sécuriser les envois de nourriture !
On peut lire dans la presse : "Nelson Jobin, ministre brésilien de la Défense, de retour au Brésil, a évoqué « le risque d’émeutes ». Ce ne sont pas les pillages de Carrefour, qui motivent les inquiétudes du chef de la protection civile et l’envoi massif de renforts militaires en Haïti. C’est bien la perspective d’une insurrection générale, dans un pays désormais sans infrastructure étatique autre que celle que tentent de constituer les grandes nations et l’Onu, qui est redoutée." Mr Kouchner, quelques heures à peine après la catastrophe, a déclaré : « il faut préserver l’ordre, arrêter les pillages, garantir les propriétés » ! Interrogé sur la chaîne NBC, l’ambassadeur américain à Port-au-Prince, Kenneth Merten, a indiqué que “les soldats américains n’intervenaient que dans le cas où ni la police haïtienne, ni les casques bleus ne pouvaient assurer la sécurité”.
Ces grandes puissances ont vu avec le séisme une occasion d’en finir avec les risques révolutionnaires de l’île qui avait renversé Bébé Doc et ses macoutes. Elle s’était révoltée contre les coups d’état militaires, n’a pas accepté les troupes d’occupation onusiennes américaines et françaises, s’est révoltée contre la faim en 2008 et a mené une grève générale en 2009 pour une augmentation de 200 gourdes. Et, suite au séisme, elle a manifesté aux cris de « de la nourriture et de l’aide, pas des soldats ! » et organisé des émeutes, avec des barricades, et même une tentative insurrectionnelle en lançant le bruit d’un tsunami.
Les grandes puissances, réunies à Montréal, ont considéré que le plus important à reconstruire n’est ni des hôpitaux ni des logements, mais des prisons, des casernes, un pouvoir central, une police et une armée. Elles veulent réembaucher les militaires haïtiens, démissionnés en 1995, pourtant une armée de tortionnaires corrompus. Ainsi, l’armée haïtienne pourrait être la seule miraculée du séisme. En attendant, les USA, le Brésil ou la Canada fournissent l’armée d’occupation, l’Europe, qui tient à distinguer son petit rôle, propose de devenir la force de police....
C’est que le petit peuple d’Haïti n’est pas seulement une population très pauvre, mais aussi un prolétariat révolutionnaire craint des classes dirigeantes mondiales. Depuis la révolution de 1986, la population haïtienne a appris à se battre par ses propres moyens et à se méfier des forces de l’ordre et des classes dirigeantes. Ces dernières craignent par dessus tout le discrédit de l’Etat haïtien et l’absence de forces de répression qui rendrait irrépressible un mouvement populaire.
Le séisme a contribué à détruire l’Etat haïtien. Si les édifices du pouvoir ont été démolis, la confiance de la population dans cet Etat l’a également été, en voyant qu’il était complètement absent pour sauver les victimes et organiser les secours. Pour répondre à l’absence d’aide de l’Etat haïtien, les gens s’organisent par eux-mêmes en comités de quartiers. La population apprend à se passer d’un Etat bourgeois. Et les classes dirigeantes craignent que les opprimés d’Haïti deviennent ingouvernables. Cette crainte les amène à démolir les villes en poussant la population dans des camps de tentes à l’extérieur des villes et encadrés militairement. C’est un véritable chantage : on vous aide si vous acceptez l’occupation militaire !