jeudi 25 février 2010
Un autre salarié de Disneyland a, le même jour, fait une tentative de suicide sur le lieu de travail, tentative sans relation avec la précédente et qui a été arrêtée à temps ! Le seul lien entre les deux est la politique systématique de la direction consistant à "mettre la pression" sur les travailleurs !
Après la vague de suicides, le gouvernement avait prétendu agir mais c’était du vent et le stress des salariés est de plus en plus important en cette période de crise. Loin de gêner l’offensive patronale et gouvernementale contre les travailleurs, cette ambiance de suicides pèse sur le climat social et aide les patrons ....
On peut lire dans la presse :
Sa vie était devenue un cauchemar. Embauché en 2004 par Eurodisney, Rabii Hourourou, cuisinier au restaurant Blue Lagoon, à Disneyland Paris, s’est suicidé à la gare d’Esbly dimanche, dix jours après son retour au travail dans un restaurant du parc d’attractions. En arrêt maladie depuis huit mois pour « état dépressif à la suite d’un problème au travail (harcèlement) »*, ce Marocain de 30 ans était toujours sous traitement lourd — un cocktail d’anxiolytiques et d’antidépresseurs — quand il a repris son poste à mi-temps thérapeutique voilà quelques jours.
Dimanche, après être rentré de son travail, Rabii Hourourou est ressorti de chez lui, à Esbly, pour se rendre à la gare SNCF voisine. Déterminé, il a attendu qu’un train arrive pour poser sa tête sur un rail.
Reste à cerner les raisons exactes de son geste. Au parquet de Meaux, on évoque des problèmes conjugaux. « Il n’y a rien de tout ça. C’est faux. C’est n’importe quoi », assurait hier soir sa veuve, jointe par téléphone. Plusieurs collègues ayant travaillé avec le défunt n’hésitent pas à pointer du doigt un supérieur du jeune homme qui l’aurait « cassé » lors d’une évaluation. Toujours est-il que Rabii Hourourou, qui attendait en vain depuis deux ans d’être promu chef de partie (NDLR : l’équivalent d’agent de maîtrise), ne supportait plus de travailler dans l’entreprise. En dépression lourde, il a même dû être hospitalisé en psychiatrie à Lagny-sur-Marne.
Après avoir demandé à la CFDT de négocier son licenciement, il s’est finalement rapproché du syndicat Force ouvrière et a déposé une plainte aux prud’hommes pour harcèlement moral. Le 15 juin dernier, l’employé a également déposé plainte pour le même motif au commissariat de police de Meaux contre deux de ses supérieurs (voir notre encadré).
Dans quelle mesure ces démêlés avec sa hiérarchie ont-ils pesé sur son acte ? Difficile à dire. Touhami Hadi, du syndicat indépendant du personnel (SIP), avait à l’époque géré son dossier pour la CFDT. Il évoque une « fragilité aux causes multiples, personnelles et professionnelles. » « C’est vrai qu’il était amer, qu’il trouvait que les choses n’étaient pas allées assez vite pour lui », confie ce dernier. En revanche, FO Disney, qui avait repris le dossier, n’y va pas par quatre chemins. Sur son blog, le syndicat accuse ouvertement le directeur de la restauration du parc de « faute inexcusable et de non-assistance à personne en danger »…
« Il s’est senti manipulé, trahi », confie pour sa part un collègue, qui a préféré garder l’anonymat. Comme d’autres personnes ayant travaillé avec le disparu, cet employé à Disneyland Paris ne comprend pas qu’« on ait laissé Rabii reprendre un poste stressant », alors qu’il était encore sous traitement. Un avis du reste partagé par Touhami Hadi, pour qui « Rabii n’aurait pas dû reprendre le travail ».
Contactée, la direction n’a pas souhaité commenter officiellement le drame. Tout en rappelant son attention particulière aux conditions de travail de ses 14500 salariés.
*Selon la mention manuscrite du médecin sur l’arrêt de travail du salarié du 6 mars 2009.
Pour Guy-Bruno M’Boe, délégué syndical FO, "c’est inadmissible", "il a eu des conditions de travail humiliantes", "on lui a fait des promesses qui n’ont pas été tenues" et "il n’a pas supporté son transfert récent dans les cuisines d’un café du parc", regrette-t-il. Ce salarié, passé d’un poste de commis de cuisine à celui de demi-chef de partie, a "déposé une plainte aux prud’hommes en juin pour harcélement moral, doublée d’une autre plainte au commissariat de Meaux", a affirmé M. M’Boe. Ce délégué syndical dit "ne pas comprendre comment Eurodisney a pu cautionner le retour au travail de ce salarié" qui "arrivait à peine à parler", ajoutant que ce jeune homme avait dû être "hospitalisé en psychiatrie durant trois ou quatre mois pour dépression lourde".
Cette réponse diffusée à l’ensemble des salariés n’a convaincu personne !
Disney est responsable, par sa politique systématique de pression sur les salariés, de ce suicide !!!!
Citons un article de 2009 :
La direction d’Eurodisney réalise une enquête sur les risques psychosociaux, depuis deux ans, auprès des 14 000 salariés des parcs, hôtels et boutiques. A la maintenance, elle diffuse un questionnaire, qu’elle dit anonyme, censé déceler les problèmes de stress des salariés.
" Pas d’inquiétude, le questionnaire est anonyme ", affirme la direction. Tellement anonyme qu’il y a un "ambassadeur " pour 10 à 20 travailleurs, ainsi qu’un bilan par service.
Certaines offres d’emploi, publiées dans la presse d’entreprise, préviennent d’emblée les postulants : Disney recrute des salariés "résistant au stress ".
La délation, une pratique devenue règles.
Encore une fois, la boite essaye de faire faire le sale boulot aux salariés ; dans le code de bonne conduite de 2007, Disney appelle les salariés à dénoncer des collègues qui auraient " des pratiques, au sein de la société, contraires à une norme ou à une réglementation applicable ". Bien sûr dans le cas de l’enquête, la direction ne parle pas ouvertement de délation mais l’objectif est le même : dresser une " cartographie " des salariés sous pression.
Le CHSCT (comité d’hygiène de sécurité et des conditions de travail est composé de représentants de la direction et des syndicats) se plaint d’avoir été doublé et écarté de cette enquête sur le stress par la direction. C’est sûr, le patron innove et ne fait pas confiance aux syndicats pour mesurer le climat social. L’ampleur de la grève de Septembre 2006 aurait-elle surpris la direction et les syndicats ?
Interview d’un salarié de la maintenance Eurodisney :
A qui s’adresse ce questionnaire et qui le fait remplir ? Certains salariés ont reçu une lettre de la direction leur annonçant leur nomination au titre d’ "ambassadeur". Ils sont chargés de faire remplir un questionnaire sur les risques psycho-sociaux aux collègues de leur propre service et parfois d’un ou deux autres.
Comment se déroule l’enquête ? Tes collègues acceptent-ils d’y participer ? Certains ambassadeurs ont refusé leur nouvelle fonction ne souhaitant ni devenir "les psy de service", ni participer aux soirées de la direction même s’ils y mangent des "Rochers Ferrero" (faire un smiley rigolo). Ils se demandent aussi pourquoi on ne leur a pas demander leur avis avant d’être "volontairement désignés". D’autres vont participer à l’enquête malgré tout.
"Violence physique", Violence verbale", "difficultés à faire face à la charge de travail". Drôles de questions pour juger des risques psychosociaux ... Ces questions pièges du questionnaire gênent certains collègues qui savent que l’enquête n’est pas anonyme. L’ambassadeur de mon service refuse de "faire la police" et souhaite se servir du questionnaire pour critiquer les mauvais rapports entre la hiérarchie et les collègues.
Quelles sont les conditions de travail sur le parc et plus particulièrement à la maintenance ? Se sont elles durcies ces derniers mois ? Dans le secteur de la maintenance de Disney, on vit en ce moment le retour de bâton de la grève pour les 200 euros de l’année dernière. L’ancienne direction a laissé la place à une nouvelle plus agressive. La nouvelle prévoit de réorganiser tout le secteur maintenance. Ce projet de restructuration s’accompagne d’une augmentation de la charge de travail, sans embauche supplémentaire, ce qui induit la multiplication des heures sups et le développement de la polyvalence ; des collègues se retrouvent à réaliser des tâches pour lesquelles ils ne sont pas formés. Les plannings sont modifiés et les apprentis surchargés de travail. La flexibilité a augmenté, suite à un accord de renégociation des 35h, signé en Juin 2006 par certains syndicats, CGT en tête. Pendant la grève de l’année dernière, de nouveaux liens de solidarité se sont tissés entre les salariés. La direction essaie donc de les casser en désorganisant les équipes.
Cette enquête ressemble fort à celle réalisée dans d’autres entreprises comme Renault, IBM ou France Telecom. Les suicides dans ces entreprises ont ils préoccupé les salariés ? Les collègues ont beaucoup discuté des suicides à Renault et des pressions subies au travail. A Disney, comme à Renault, tout est très hiérarchisé ; pour 60-80 personnes, il y a trois à quatre niveaux de hiérarchie. La boite pratique aussi les entretiens individuels avec notation et objectifs pour l’année suivante.
Pour le patron de Disney, les CastMembers peuvent mourir, mais ils doivent le faire en silence et personne n’a le droit d’en parler
Des salariés du parc Disneyland viennent de faire une tentative de suicide en liaison avec les difficultés qu’ils rencontrent du fait de leur travail. Ce n’est pas la direction mais un article du Parisien du 24 février qui nous en informé. On apprend ainsi qu’il y a eu un mort le 3 février, un autre suicide qui a failli avoir lieu le 20, et un suicide mortel le 21. Tout cela pour le seul mois de février 2010. Et, loin de se considérer comme responsable, le patron affirme qu’il ne faut pas en parler….
En effet, la direction de Disneyland s’est adressée aux salariés dans un « Management Flash » qui prétend que, dans ces suicides, tout ce qu’elle a fait est parfaitement normal et elle affirme que la seule chose condamnable est « l’exploitation faite d’une situation individuelle particulière et dramatique ». Le « Management Flash » de la direction affirme également que « les mesures nécessaire ont été prises dans l’entreprise pour informer ses collègues » et qu’il n’est donc pas question que quelqu’un d’autre que la direction les en informe !!!
La seule réponse de la direction aux faits rapportés par le Parisien consiste à dire que « les accusations sont graves et portent atteinte à l’image de tous. » Elle prétend défendre l’image de Disney. Si on lève le voile sur l’arrière du décor, sur la manière scandaleuse dont on traite les salariés, le « monde magique de Disney » risque d’être un peu glauque… Ce qui nuit à l’image de Disney, ce n’est pas un article de journal mais les pratiques de la direction à l’égard des salariés : exercer des pressions inadmissibles contre les salariés, gouverner par des méthodes systématiques de stress, de menaces, d’engueulades, etc…
Ces suicides ne sont pas un effet du hasard. L’un des suicidés avait porté plainte au commissariat de police, avait plusieurs fois dénoncé ses conditions de travail, sans aucun effet. Ce n’est pas un hasard, si dans l’énoncé des formulaires d’embauche, Disney écrit « résistant au stress ». Et la pression n’est pas seulement celle du travail en lui-même, c’est la manière dont elle briffe ses TeamLeaders, et leur impose de traiter durement le personnel.
Disneyland n’est pas la seule entreprise dans laquelle le stress causé par la politique patronale a eu des effets dramatiques. On a tous vu à la télé les patrons de France Telecom ou Renault s’expliquer là-dessus. Mais ce qui est différent à Disney, c’est qu’il est interdit d’en parler.
Il n’y a pas que les suicidés ; il y a aussi tous ceux qui vivent dans le stress et tombent malades, voient leur vie personnelle attaquée voire détruite….
Il ne suffit pas que Disney affirme que ses pensées vont à la famille. Nous pensons nous aussi aux familles pour exiger la vérité, pour exiger aussi que ces morts soient considérés en accident du travail, que des enquêtes aient lieu, que des mesures soient prises pour que nous ne soyons pas tous menacés un jour ou l’autre dans notre santé et dans notre vie.
Le 27 février 2010
Voix des Travailleurs