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Le pacifisme est-il une arme adéquate pour lutter contre la montée vers la troisième guerre mondiale impérialiste ?

11 septembre 2014, 21:09, par Robert Paris

Bien sûr, tout cela ne nous empêche pas de nous retrouver ici ou là aux côtés des pacifistes dans les rues, d’avoir de l’estime pour les plus honnêtes et les plus radicaux d’entre eux. Mais cette possibilité d’action commune contre le pouvoir bourgeois ne signifie pas que le pacifisme soit porteur d’avenir politique et social face à la catastrophe mondiale qui nous menace. Au contraire, le pacifisme est porteur d’une illusion fondamentale sur la possibilité, dans un avenir proche, de conserver le pouvoir des classes dirigeantes capitalistes sans en payer un prix mortel. Nous devons absolument combattre ce mensonge, quitte à nous fâcher avec nos amis pacifistes.

Parler de paix au sein de la société bourgeoise, c’est semer des illusions non seulement dans les moyens non-violents de transformer la société, par exemple par les élections, c’est semer des illusions dans le caractère de l’Etat, l’Etat des classes dirigeantes pourrait soi-disant choisir la non-violence, et semer des illusions sur les buts des classes dirigeantes, leurs buts économiques et sociaux pourraient être compatibles durablement avec une évolution graduelle et pacifique de la société.

Ceux qui parlent de « paix entre les peuples » évitent de parler des Etats mais évitent du coup de parler de la réalité des guerres. Celles-ci n’ont pas lieu entre des peuples qui décident eux-mêmes de la guerre. Ce n’est pas le peuple israélien qui est au pouvoir en Israël, pas plus qu’aucun peuple n’est réellement au pouvoir dans aucun Etat bourgeois et, dans la guerre comme dans la paix, ce n’est nullement en fonction des intérêts des peuples, des buts des peuples, de la conscience des peuples, que les classes dirigeantes décident de la guerre et de la paix, mais en fonction des nécessités de leur domination sociale.
Bien sûr, Lénine et les bolcheviks ont mis en avant l’objectif de la paix (avec la terre et le pain) comme objectif révolutionnaire et ils ont, eux aussi, parlé de paix entre les peuples du moment que les travailleurs ont eu le pouvoir. Mais, justement, toute la différence, c’est qu’ils ont relié les aspirations populaires (non seulement contre la guerre mais contre la misère, contre l’exploitation et contre l’oppression, notamment celle des nationalités) à la nécessité pour le peuple travailleur de renverser le pouvoir d’Etat bourgeois et d’exercer lui-même le pouvoir au travers des soviets, ainsi que de renverser le pouvoir des bourgeoisies impérialistes dans le monde. A partir de ce moment, il avait un sens au nom du peuple travailleur de Russie de proposer au peuple allemand de décider lui-même de fraterniser et d’arrêter ainsi la guerre impérialiste. Jamais Lénine n’a semé d’illusions sur la possibilité pour le pouvoir prolétarien de rester en relations pacifiques avec les pouvoirs bourgeois de la planète.

Par contre, en conservant le régime bourgeois, l’Etat bourgeois, les buts bourgeois, parler de paix dans le monde d’aujourd’hui, c’est un mirage dans un désert sans eau… C’est, au mieux, l’expression d’une aspiration légitime mais cela n’offre aucun moyen de savoir comment arriver à une oasis ou à un puit !

Nous sommes entrés dans une époque de crise grave du système de domination, donc à l’époque des révolutions et des contre-révolutions, une époque où les classes dirigeantes déclarent nécessairement la guerre aux peuples et aux travailleurs du monde et c’est une époque où doit être remis au goût du jour le programme révolutionnaire. Nous ne sommes pas particulièrement des adeptes de la violence en soi, du radicalisme pour le radicalisme. Notre problème n’est pas de pousser les travailleurs et les peuples à des ripostes violentes : les attaques des bourgeoisies et de leurs Etats s’en chargent. Notre problème est de pousser à la conscience de la situation mondiale. En particulier, est nécessaire la conscience que la montée de la violence dans le monde d’aujourd’hui n’est pas en soi le terrorisme, ni en soi le djihadisme, ni en soi la Russie ou le Moyen Orient, ni le monde musulman : c’est la crise économique du monde capitaliste qui est une crise fondamentale et non conjoncturelle et qui n’a d’autre issue que la fin du capitalisme et l’accession au pouvoir du peuple travailleur sur le monde. Il n’y a pas d’autre alternative et aucun moyen de ramener les classes dirigeantes à des sentiments et des actes plus pacifiques. Il n’y a aucune raison que les classes dirigeantes laissent venir une situation où elles vont être menacées par une montée révolutionnaire. Il n’y aurait rien de plus criminel que de faire croire que les classes dirigeantes vont se laisser faire. Non, elles préfèreront toutes les guerres, toutes les guerres civiles, tous les fascismes et toutes les dictatures, tous les génocides et massacres de masse plutôt que de risquer de perdre leur pouvoir sur le monde. La crise actuelle du capaitalisme n’est rien d’autre que l’incapacité des capitaux privés à continuer de s’investir avec suffisamment de profit dans le travail productif, source de plus-value et son incapacité à vivre dorénavant d’autre chose que des aides des banques centrales et des Etats. Les expédients dont usent tous les Etats pour faire durer la situation issue de la crise de 2007 ne sert qu’à détourner les peuples de la révolution sociale en semant les germes de la violence contre-révolutionnaire. La dérive violente du monde bourgeois n’est pas une politique d’un courant, d’un pays, d’une région, d’un parti mais une conséquence inévitable d’une crise systémique inévitable. Personne ne pourra empêcher les bourgeoisies et les Etats de semer de plus en plus la haine entre les peuples et il ne suffira pas de prêcher la paix au sein des opinions publiques pour contrer cette politique.

Il va y avoir, dans le monde entier, une violence considérablement aggravée dans les années qui viennent, non pas parce que les révolutionnaires en sont partisans, ni parce que les peuples ou les travailleurs seraient eux-mêmes violents mais parce que le système qui a longtemps dominé le monde est mort et doit être enterré, qu’il le veuille ou pas. Et il ne se laissera certainement pas faire et préfèrera n’importe quelle horreur plutôt que de laisser la place, même si son système est historiquement dépassé et n’est plus capable de fonctionner…

La principale impuissance des pacifistes est leur incapacité à voir quelle la vraie force capable d’en finir avec la source permanente de violence, le système d’exploitation capitaliste, qu’est le prolétariat et leur incapacité à faire le choix de développer dans ce prolétariat la conscience de ses tâches d’avenir, à savoir, au travers de ses luttes révolutionnaires, de se transformer lui-même de classe exploitée en classe dominante, développant une société fondée sur la propriété collective des moyens de production et se débarrassant du bureaucratisme d’Etat pour donner le pouvoir aux organisations de base des travailleurs, les conseils de salariés, de chômeurs, de jeunes, de femmes des entreprises et quartiers populaires.
Lutter contre la guerre, ce n’est pas faire en sorte que la bourgeoisie et ses forces de violence d’Etat deviennent des petits anges pacifiques, car un tel objectif est illusoire, c’est faire en sorte que le prolétariat et ses alliés soit suffisamment fort et organisé collectivement pour soustraire le plus rapidement possible les moyens de la violence aux classes dirigeantes.
Bien des courants politiques, y compris des groupes d’extrême gauche, dénoncent la guerre comme si elle était une décision de méchants dirigeants qu’il conviendrait de dénoncer personnellement et non comme une nécessité historique, de classe, dépassant tout à fait le niveau de ces chefs politiques des nations. La guerre ou la violence d’Etat (ou de forces paraétatiques comme les bandes armées, islamiques ou fascistes) n’est pas une politique malheureuse qui pourrait être évitée simplement si les chefs des classes dirigeantes en avaient conscience et faisaient les bons choix, ou si les peuples les y poussaient par une opinion publique défavorable aux guerres. Rappeler que les guerres, les fascismes, les dictatures, les guerres mondiales sont mauvaises, c’est remplacer la politique par de la morale et c’est rester impuissant devant les changements violents qui frappent la société humaine. Quand la société bourgeoise bascule dans la violence, ce n’est pas le fait d’un seul Hitler, d’un seul parti nazi, d’un seul pays, l’Allemagne, mais celui de l’ensemble du monde capitaliste, de toutes ses institutions, de tous ses partis, de toute la classe bourgeoise, un effet nécessaire au système tout entier. C’est un point fondamental pour tous ceux qui prétendent combattre la marche à la guerre.

Clamer « paix en Palestine », « paix en Ukraine », « paix en Irak » n’est pas une perspective réelle. Il n’y aura pas de paix désormais dans le monde capitaliste, non pas du fait de la violence des peuples mais à cause de l’impasse économique et sociale du système capitaliste mondial. De toutes les manières, que les travailleurs et les peuples s’inclinent ou se rebellent, les classes dirigeantes considèreront les prolétaires et les milieux populaires comme une menace mortelle car leur système est aux abois. Plus les travailleurs seront conscients que la lutte à mort est engagée, qu’ils le veuillent ou pas, et plus ils seront à même de se battre et de parer aux coups avant de les rendre.
Triomphe de la révolution ou triomphe de la contre-révolution, voilà l’alternative. Il n’y a pas de place pour la paix sauf celle des cimetières….

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