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Cerveau et dialectique

3 avril 2014, 08:18, par RP

Jean-Pierre Changeux dans « L’homme neuronal » : « Singer (1979) a suivi la propagation des impulsions électriques du nerf optique au cortex visuel via le thalamus (...) Si, au moment où elles passent, on stimule la formation réticulée, la traversée des signaux jusqu’au cortex est facilitée de manière spectaculaire (...) L’amplitude de la réponse électrique au niveau du cortex augmente. Cette augmentation correspond à la levée d’une inhibition intrinsèque qui, lors du repos, met le régime du canal au niveau le plus bas. L’acétylcholine sert de neurotransmetteur. Elle inhibe une inhibition, donc, elle active. Le noyau de la formation réticulée qui la contient agit comme régulateur du canal visuel. »

Pourquoi l’inhibition du vivant serait-elle une négation dialectique, plutôt que celle de l’ancienne logique formelle ? La négation dialectique ne supprime pas la contradiction, mais masque momentanément son existence. Dans la négation formelle, à l’inverse, les contraires se suppriment immédiatement et définitivement. Si, dans la génétique, l’inhibition semble dialectique puisque les contraires se combinent, qu’en est-il du suicide cellulaire, l’apoptose, qui provoque la mort de la cellule ? Le mécanisme d’apoptose n’est pas celui de la mort brutale et définitive. C’est un combat permanent au sein de la cellule entre molécules, protéines et gènes de la vie et de la mort, se combattant et s’inhibant mutuellement, gagnant ou perdant des zones, s’appuyant pour cela sur des messages des autres cellules. Tant que la cellule est dite vivante, elle n’est pas exclusivement vivante ou exclusivement morte, répondant à la logique du « oui ou non exclusifs ». Elle répond plutôt à la dialectique qui suppose le « oui et non ». En effet, la cellule vivante est un processus dynamique de combat intérieur permanent entre les gènes et les protéines de vie et les gènes et les protéines de mort. C’est cet équilibre sur le fil du rasoir que l’absence des messages extérieurs, molécules-signaux des autres cellules indispensables à la survie, peut facilement déstabiliser, menant à l’apoptose. La cellule vivante est sans cesse entre la vie et la mort. Elle est « la vie et la mort » et pas « la vie ou la mort ». Comme la matière est sans cesse entre la matière et le vide et pas « la matière ou le vide » (ou exclusif). Une espèce vivante est sans cesse entre la conservation de l’espèce et sa transformation, toujours sur le fil et déstabilisable en cas de changement brutal des conditions extérieures. On peut bel et bien parler de dialectique du vivant, comme de dialectique de la matière. Dans « Le vivant », le biologiste François Dagognet affirme : « On n’en finirait pas, d’examiner les paradoxes ou les propriétés antinomiques qui conviennent au corps, énigme majeure. »

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