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Luttes ouvrières dans le textile au Maroc

mardi 14 juillet 2009

par Ali Fkir, 29/5/2009

Top Clothing Company, est une entreprise de textile. Le nombre d’ouvriers et d’ouvrières (majorité) varie entre 100 et 150 selon le niveau de l’activité.
Pour "alléger ses charges", ce patron utilise une technique très simple : il dissout (juridiquement et sans verser d’indemnités) l’entreprise, crée une nouvelle. Seule la dénomination change : en général il garde le même personnel tout en remettant à zéro le "compteur" de l’ancienneté et en diminuant les salaires. Pour lui c’est une nouvelle entreprise qui embauche pour la première fois. Donc l’activité continue avec la même main d’oeuvre, avec moins de charges. Généralement il paie au dessous de SMIG, et triche dans la déclaration à la CNSS.
En un record de temps, il passe de ZAKITEX à KITEX, puis à Top Clothing Company, et puis il passe à MARBLE-STEEL. Mais cette fois -ci il licencie tout le monde, car les victimes ont décidé de s’organiser au sein de l’UMT pour faire face à cette stratégie maléfique de changement de dénomination. Pour la famille Kabbaj, il n’est pas question d’avoir "chez elle" des syndicalistes. Rappelons que cette famille est "propriétaire" d’autres entreprises.

Les ouvriers et les ouvrières en sit-in permanent devant l’usine attendent que les pouvoirs publics "compétents" interviennent pour imposer l’application du code de travail. Le patron de Top Clothing, comme tant d’autres(patrons) se situe au dessus de la loi : la loi n’est là que pour réprimer les travailleurs et les travailleuses. Les autorités concernées par les conflit sociaux sont complices des pratiques illégales des patrons.
La crise ? mon oeil ! pour les patrons, tout est permis pour se faire plus d’argent. Comment ?
Prenons l’exemple suivant :
Un patron paie (avant "la crise") l’ouvrier 3000 dh le mois. Aujourd’hui, sous prétexte des difficultés, le patron licencie l’ancien ouvrier (sans indemnité aucune) et embauche 2 avec un salaire de 1500 dh chacun (au dessous du SMIG)
Donc avec la même somme d’argent il double sa capacité de production (en force de travail).
Supposons qu’il employait 600 ouvrier-es avec un salaire mensuel moyen de 3 000dh, avant la crise la masse salariale mensuelle était de 1 800 000dh.
En pleine "crise", les 600 ouvier-es (généralement, fraîchement embauché-es), vont être rémunéré-es en moyen à 1500dh, la masse salariale mensuelle passe alors à 900 000dh. Le patron économise : 1 800 000 -900 000= 900 000dh
Bien sûr qu’il y a d’autres petits paramètres, mais cet exemple donne une idée sur ce qui se passe dans le monde du travail au Maroc. Et l’Etat dans tout ça ? l’Etat conseille aux partis politiques, aux syndicats et aux salarié-es d’accepter ces pratiques afin de "conserver les postes de travail".
C’est connu, au Maroc toutes les crises, tous les fléaux constituent des aubaines à des individus (couches ou classes sociales) pour se faire plus d’argent, pour agrandir leurs domaines (cas de sécheresse), pour sucer d’avantage le sang des travailleurs... C’est la loi de la jungle, la loi du plus fort, c’est la logique de la société de classes ! C’est l’essence du capitalisme qui ne peut se développer qu’en suçant le sang des ouvriers et des ouvrières, qu’en appauvrissant la majorité du peuple !

Lutte ouvrière dans le textile au Maroc en 2008

Dans la zone industrielle de Salé, ville dortoir de la capitale marocaine Rabat, des ouvrières du textile mène un combat courageux pour leur emploi et leurs droits.

1er aout 2008

La zone industrielle de Salé compte quelques dizaines d’usines de textile comptant quelques milliers de travailleurs, surtout des femmes. L’une de ces usines, Samira Amis, est occupée par ses 250 travailleurs depuis début juillet. Dans une autre usine, Little Jean, deux femmes syndicalistes ont été licenciées le 5 juillet dernier. Les deux usines appartiennent au même patron, Abdelwahed El-Drissi, un membre de l’USFP, le Parti socialiste marocain.
Nous avons rencontré deux ouvrières que nous appellerons Aicha et Khadija, des pseudonymes, car elles craignent des représailles si nous citons leur vrais noms.

Khadija (de l’usine Samira Amis, comptant 250 ouvriers et ouvrières) : « En mai dernier, le patron a pratiquement fermé l’usine faute de commandes. En juin, nous avons occupé l’usine. Le bureau syndical avait appris du client que le patron refusait de nouvelles commandes. Les comités de vigilance du syndicat UMT (Union marocaine du travail, principale centrale syndicale) ont surpris des camions avec des matières premières se diriger vers une 3ème usine du patron. Au bout de 3 jours d’occupation, le patron fait soudainement état d’une nouvelle commande. Un accord est conclu pour la reprise du travail. Le patron s’engage à nous payer en octobre 2008 50% du salaire de juin et 70% de celui de mai. Mais par la suite, il s’avère que la commande se limite à une semaine de travail. Depuis début juillet, nous organisons un sit-in à l’intérieur de l’usine. »

Tous les travailleurs de Samira Amice sont syndiqués. Une chose pas du tout évidente. Car au Maroc, beaucoup de patrons du textile ferment leur usine et la délocalisent (le plus souvent ailleurs au Maroc) dès que les travailleurs se syndiquent.

Que cherche le patron ? Khadija : « Son but est de renvoyer les ‘anciens’ et de les remplacer par des jeunes, sans ancienneté et acquis. D’autres patrons font pareil. Ainsi la société allemande BULTEL, située à quelques pas de là, s’est débarrassée de ses anciens et recrute maintenant des filles de 16 à 20 ans qu’elle paie 400 dirhams (40 €), loin en dessous du salaire minimum légal (environ 1800 DH). »

Aicha travaille dans l’autre usine, Little Jean. La situation y a toujours été plus difficile, car seulement 2/3 des 150 travailleurs y sont syndiqués. Le patron n’y verse pas les cotisations sociales à l’Etat qu’il retient pourtant sur les salaires ni sa propre part qu’il doit légalement verser. La direction de l’usine gère mal l’usine et se comporte de manière arbitraire envers les travailleuses. Plusieurs ont été licenciées sans raisons. Dont deux membres du syndicat. Le but est d’effrayer les ouvrières et de liquider le syndicat.

Le travail dans le textile est difficile. Les travailleuses y bossent 44h par semaine pour un salaire de moins de 2000 DH (moins de 200€ par mois). Mais à beaucoup d’endroits, ce salaire minimum n’est même pas respecté. A Samira Amice et Little Jean, les travailleurs ont droit à 21 jours de congés par an. Mais c’est le patron qui fixe les dates. Et les travailleurs sont mis au courant parfois seulement 15 jours à l’avance. Et parfois ils sont rappelés pendant leurs congés.

Lorsque nous visitons le zoning en compagnie du responsable syndical local Abderrazzak El Drissi de l’UMT, nous remarquons que le patron a enlevé les plaques avec le nom des usines. Prépare-t-il la fermeture ou la délocalisation ? Mais Aicha et Khadija, deux jeunes femmes, ne l’entendent pas de cette oreille et sont bien décidées à poursuivre courageusement le combat, avec leur syndicat.

Maroc : incendie dans une usine de matelas - des patrons assassins !

Au moins soixante travailleurs ont péri, en majorité des femmes, et dix-sept autres ont été grièvement blessés dans l’incendie d’une usine de matelas située dans un quartier de Casablanca, samedi 26 avril. Et plus les informations sur les circonstances de ce drame sont connues, plus elles suscitent l’horreur et l’indignation.

Les ouvriers ont été piégés à l’intérieur de l’usine, dont les portes étaient verrouillées et les fenêtres munies de grilles : « Le propriétaire enfermait les employés à l’intérieur de l’usine pour, soi-disant, éviter le détournement de matières premières », a affirmé le commandant régional de la protection civile. Les rescapés, sur la centaine de travailleurs présents, n’ont pu quitter le bâtiment qu’en sautant par une fenêtre du deuxième étage après en avoir défoncé la grille, ou grâce à des habitants du quartier qui ont réussi à percer une issue dans un mur.

Cette infamie est venue s’ajouter à l’absence totale de sécurité, première cause du drame, pour multiplier le nombre de victimes. Alors que l’usine utilisait des matières hautement inflammables, elle était construite dans un immeuble de quatre étages, sans issue de secours, les extincteurs étaient vides, les outils de secours de base inexistants et les installations électriques pas entretenues - c’est d’ailleurs un court-circuit au rez-de-chaussé e qui a déclenché l’incendie. Le propriétaire et le gérant (qui n’est autre que son fils !) ont délibérément choisi, par appât du gain, de prendre le risque de tuer leurs employés. Des ouvriers ont témoigné par ailleurs que le salaire versé se situait entre 20 et 30 euros par semaine, qu’ils travaillaient plus que le temps réglementaire et que, sur les 200 personnes employées à l’usine Rozamor Ameublement, 30 seulement étaient déclarées à la Caisse nationale de Sécurité sociale.

Les deux hommes ont été mis en examen, mais s’ils sont effectivement des criminels, ils ne sont malheureusement pas les seuls. Dans nombre d’usines, les conditions de sécurité ne sont pas respectées (un incendie dans une usine textile de la banlieue de Casablanca a fait trois victimes le lendemain), et les autorités laissent faire. La construction d’usines dangereuses au milieu de zones d’habitation, sans bouches d’incendie (la plus proche en état de marche se trouvait à 600 mètres), l’absence de normes de sécurité dans les zones industrielles sont à mettre sur le compte des autorités locales ou nationales. « Qui a donné l’autorisation de construire quatre étages dans cette zone suburbaine alors que l’usine devait être horizontale dans sa construction ? », s’interroge le syndicat UMT (Union marocaine du travail). « A-t-on jamais contrôlé les conditions de travail inhumaines à l’intérieur de cette fabrique ? Autant de questions qui exigent des réponses d’autant plus que le sort des victimes est toujours incertain. La question qui se pose est de savoir si le patron avait ou non souscrit des assurances pour ses salariés. Et pour les ouvriers qui ont été sauvés, c’est le chômage qui les hante déjà », ajoute-t-il dans un communiqué.

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