lundi 27 novembre 2017, par
Edito
L’émission de CNN montrant l’esclavage des migrants, essentiellement des africains, a parcouru et révolté le monde. C’est au point que les leaders des bourgeoisies occidentales ont dû eux-mêmes se dire indignés, les hypocrites, eux qui ont sciemment mis en place les bandes armées qui vendent et esclavagisent ces migrants, eux qui ont sciemment détruit les Etats dans tout les Moyen-Orient, les uns après les autres de l’Afghanistan à l’Irak, du Yémen à la Libye en passant par la Syrie, eux qui ont, pour cela, armé des bandes de tueurs, ont laissé les peuples sous leur coupe, victimes de leurs violences et n’ont mené ensuite des guerres que pour mieux donner le pouvoir à ces bandes armées.
Tous les chefs d’Etat occidentaux, de Bush-Obama-Trump à Sarkozy-Hollande-Macron, en passant par Merkel ou May, ont mis la main à cette entreprise criminelle consistant à transformer toute la région orientale en vaste tuerie pour les peuples, rajoutant seulement les bombardements massifs des villes aux exactions de ces bandes armées.
Et ces mêmes chefs d’Etat prétendent maintenant être indignés par les nouvelles exactions révélées par les média alors qu’ils sont les principaux responsables de la situation, eux qui enferment volontairement les migrants en Libye, le faisaient même du temps du pouvoir de Kadhafi, soumettent ces migrants parqués dans des prisons à des violences innombrables et maintenant les transforment en chair humaine pour les esclavagistes.
Ce sont les gouvernants occidentaux qui ont choisi cette politique consistant à transformer toute la zone moyen-orientale révoltée lors des printemps arabes en vaste enfer pour les peuples. Ce sont eux qui ont choisi de développer le terrorisme tout en prétendant le combattre. Si le terrorisme s’est développé à l’échelle planétaire, ce n’est pas parce qu’ils sont désarmés devant lui mais parce qu’il fait partie de leur arsenal de combat contre les peuples dans une situation où le monde capitaliste est déstabilisé par sa propre crise systémique.
Quand ils ont déstabilisé des pays entiers, détruit leur état, démoli leur armée, ils ont aussi laissé trainer de grandes masses d’armes, les ont même livré eux-mêmes aux bandits armés, les finançant éventuellement directement ou indirectement. Cela leur a permis de transformer la planète en zone de guerre et de lancer la « guerre intérieure » dans les métropoles occidentales elles-mêmes au nom de la lutte antiterroriste.
Cette « guerre intérieure » s’est très vite révélée comme une lutte contre… les travailleurs, contre les grèves, contre les droits des salariés, contre la liberté des travailleurs, contre le droit de manifester, de critiquer, de protester, de contester, en somme une lutte pour transformer progressivement les exploités en… nouveaux esclaves, qui ne peuvent avoir aucun droit, aucune liberté, aucune garantie pour leur avenir…
En fait, le retour à l’esclavage a débuté dans les exploitations les pires des anciens pays pauvres, du goulag chinois aux maquiladoras d’Amérique latine, des grandes propriétés agricoles du Brésil aux salariés étrangers des émirats du pétrole, des ouvriers du textile asiatique aux travailleurs d’Afrique, mais il a commencé à s’étendre à l’ensemble du monde, que ce soit par les migrants qui subissent des conditions d’exploitation considérablement aggravées ou par la casse du droit du travail des pays les plus riches.
Non seulement le monde capitaliste occidental n’est pas réellement indigné de la mise en esclavage des migrants noirs en Libye, non seulement il ne fera rien pour les sauver puisque c’est lui qui les a jetés dans cet enfer dont il a construit et financé les prisons (quand ce n’est pas en Libye, c’est en Turquie ou ailleurs), mais il est en train de transformer la planète en vaste camp de prisonniers. Le sort réservé aux migrants nous menace tous, rappelons-nous de la fin des années trente ! Quand le grand capital connaît une crise qui menace de se transformer en révolution sociale, il est prêt à tout pour casser les prolétaires, car il estime que la menace révolutionnaire plane sur sa domination, sur sa sacro-sainte propriété des capitaux et des entreprises, et sur sa mainmise du pouvoir d’Etat.
C’est là qu’est la raison, bien au-delà de considérations économiques, de l’esclavagisation accrue sur toute la planète. C’est cela qui explique que personne ne s’indigne en Occident des millions d’esclaves du goulag chinois, dont la plupart des occidentaux ne connaissent même pas le nom : le Laogaï, tant les média et politiciens occidentaux ne veulent pas parler. Personne ne s’indigne du fait que les grands trusts occidentaux comme Total ou Bolloré, Lafarge ou Bouygues, exploitent eux-mêmes des esclaves de la Thaïlande à ceux d’Afrique, notamment dans les mines africaines. Comme celles des mines d’or du Mali ou celles de cobalt de République du Congo pour les batteries rechargeables de la voiture électrique, plus « durable » disent-ils !
Non, le grand capital et ses représentants politiques ne sont pas prêts de lutter contre l’esclavage dans le monde puisqu’ils comptent, au contraire, le généraliser, remettre en place le colonialisme et le fascisme pour faire face à un avenir où il attendent craintivement le prochain krach financier, sachant que les Etats n’auront plus les moyens de sauver banques et trusts et verront inévitablement leur domination mise en cause quand ils voleront méthodiquement toutes les économies des populations, détruiront les emplois en masse, casseront tous les droits sociaux, etc.
Oui, le grand capital est en train de casser ce qui rendait l’esclavage capitaliste plus stable, plus solide, plus accepté aussi des peuples, et il casse aussi ce qui permettait aux exploités de se défendre, d’améliorer un peu l’ordinaire, de sécuriser un peu l’avenir.
Au lieu de prendre conscience des enjeux de cette situation historiquement nouvelle, les réformistes politiques et syndicaux qui se proclament direction des masses travailleuses font la sourde oreille. Pas question pour eux de prendre en considération que le capitalisme se heurte à un mur infranchissable, qu’il ne va pas porter davantage la société humaine de l’avant, que les capitaux sont désormais beaucoup trop nombreux par rapport aux investissements productifs et qu’aucune réforme ne permettra au capitalisme de sortir de cette ornière, pas plus les travaux de Bâtiment que Macron fait développer partout dans le pays avec des aides et des incitations étatiques, pas plus le développement des achats d’armement dans le monde, pas davantage encore les aides aux trusts pharmaceutiques, même si le même Macron imposait à tous de se faire vacciner mille fois ou que Trump permettait aux trusts d’extraire du gaz de schiste sur toute la planète. Non, le grand capital a déjà dépassé sa capacité d’investissements productifs et n’est plus capable que de produire des titres pourris. C’est au point que les banques centrales ne cessent de racheter ces titres « nocifs » pour éviter le krach et qu’elles savent parfaitement que cela ne permettra que de retarder l’échéance mais pas de l’éviter.
Et dans l’intervalle, les dettes privées et publiques grandissent sans cesse, dépassent désormais trois fois celles de 2007 et montrent que l’effondrement sera gigantesque.
Tout cela n’empêche pas l’aveuglement volontaire des réformistes, comme Martinez, Mélenchon et autres, qui continuent d’affirmer qu’une « bonne politique nationale » nous sauverait. Tous prônent des aides supplémentaire à l’économie nationale qui reviennent encore à des aides aux capitalistes ! Tous veulent faire croire qu’il y aurait un intérêt national, des solutions nationales ! Tous prétendent que l’Etat capitaliste serait là pour servir le peuple alors qu’il ne sert et ne peut servir que le grand capital !
Pendant ce temps, le capitalisme nous entraîne à grands pas vers l’enfer… Les camps de migrants rappellent de plus en plus les camps de migrants des années trente, les camps de rétention, les camps de travail qui allaient devenir ensuite les camps de concentration puis les camps d’extermination… C’est cela que montre la situation libyenne mais aussi la situation des migrants dans toute l’Europe où les migrants sont lavés collectivement au jet d’eau en Italie, matraqués collectivement en Hongrie ou en Pologne, des jeunes mineurs migrants jetés dans la neige aux frontières de la France et de l’Italie par la gendarmerie, gazés et matraqués à Calais, enfermés dans les prisons anglaises, etc.
Ce ne sont pas seulement les migrants qui sont menacés de cette violence répressive aveugle qui se radicalise sans cesse, ce sont tous les peuples, ce sont les travailleurs et pas seulement ceux d’Orient, d’Afrique ou d’Asie mais du monde entier.
C’est la bourgeoisie mondiale qui a besoin de faire réapparaître les horreurs violentes de l’esclavage parce qu’elle craint pour l’avenir de son système d’exploitation fondé sur la propriété des moyens de production par une infime minorité de possesseurs du grand capital. C’est la grande bourgeoisie qui fait le choix de faire basculer la planète dans la violence des bandes armées esclavagistes et elle craint tellement la révolution sociale que l’effondrement économique ne manquera pas de produire qu’aucune sorte de violence ne lui paraît gênante ou révoltante, même si ses serviteurs du pouvoir à la Macron sont chargés de faire croire que cela les choque !
Et c’est donc la bourgeoisie qui domine le monde qui nous le rappelle : l’avenir va se jouer entre l’esclavage et la révolution sociale.