Lutte des classes au Gabon
PETROLE
Une partie de la production pétrolière du Gabon était à l’arrêt et des stations service de Libreville et Port-Gentil se trouvaient en rupture de carburant mercredi, suite à une grève lancée par le principal syndicat des employés du secteur pétrolier.
L’Organisation nationale des employés du pétrole (Onep) a entamé une "grève générale et illimitée" le 1er décembre, protestant notamment contre des licenciements de personnels et l’emploi "abusif" de main-d’oeuvre étrangère par les sociétés pétrolières.
De sources concordantes, les deux majors Total et Shell, qui totalisent environ la moitié de la production gabonaise estimée à 230.000 barils par jour, ont vu leurs activités fortement perturbées ces derniers jours. La production de Total a ainsi chuté d’environ 50%, a indiqué à l’AFP une source proche du dossier. Durant le week-end, tous les sites offshores de la compagnie avaient été paralysés. "La production reprend progressivement", a assuré la même source.
A Shell Gabon, 80% de l’activité a été arrêtée, selon l’Onep. Une source au sein de la compagnie a confirmé qu’une "grande part" de la production nationale est stoppée, notamment à Gamba (sud-ouest) où se trouve également son terminal d’exportation.
Concernant l’approvisionnement du marché national en carburant, la Société gabonaise de raffinage (Sogara) de la capitale pétrolière Port-Gentil, unique raffinerie du pays, est totalement à l’arrêt depuis le 2 décembre, selon l’Onep.
"Les stations-services fonctionnent encore grâce aux stocks libérés au début de la grève, mais nous serons bientôt tous à pieds", avertit le secrétaire général de l’Onep, Paul Aimé Bagafou, qui précise toutefois que des négociations sont en cours avec le gouvernement.
A Libreville et Port-Gentil, de nombreuses stations-services sont en rupture de stock et de longues files d’attentes se forment devant les stations encore approvisionnées, qui rationnent la fourniture de carburant.
Le syndicat demande la réintégration de plusieurs dizaines de salariés licenciés par des sociétés pétrolières ainsi que le départ de leurs dirigeants étrangers, dont certains seraient "en situation irrégulière". Il réclame également la fin des prélèvements obligatoires par la Caisse nationale d’assurance maladie et de garantie sociale (Cnamgs), les salariés du pétrole bénéficiant d’assurances directement souscrites par leurs employeurs.
Les bras de fer entre l’Etat et l’Onep sont récurrents au Gabon, déjà touché par un mouvement similaire début 2013. En avril 2011, une grève de quatre jours avait laissé le pays au bord de la paralysie, et avait coûté, selon l’Onep, 60 milliards de FCFA (90 millions d’euros) à l’Etat gabonais.
L’Onep dit regrouper 4.000 des 5.000 travailleurs gabonais du pétrole, principale richesse du Gabon, 5e producteur en Afrique sub-saharienne. Officiellement, ses recettes assurent à l’Etat 60% de son budget.
Les grèves récentes, la dernière dans le secteur pétrolier, font vaciller le pouvoir autoritaire qui craint un scénario analogue à celui qui a fait tomber le dictateur du Burkina-Faso Blaise Compaoré. Ce lundi 1er décembre. L’ONEP (Organisation nationale des employés du pétrole) annonce le début d’une grève illimitée dans le secteur pétrolier, après l’échec des négociations traînant depuis plusieurs semaines portant avant tout sur la réintégration d’employés licenciés.
TOTAL règne en maître sur la 4 ème puissance pétrolière d’Afrique noire Ce micro-Etat d’1,5 million d’habitants reste la 4 ème puissance pétrolière d’Afrique sub-saharienne avec 250 000 barils de pétrole par jour.
Un secteur vital pour l’État gabonais, qui dépend à 60 % des revenus du pétrole.
Un marché toujours important pour le groupe français TOTAL, premier investisseur dégageant 50 000 barils par jour. TOTAL se partage le marché avec le britannique Shell, même si le chinois SINOPEC et le libyen Libya Oil et le français Perenco sont de plus en plus actifs au pays.
Un pays paralysé par une grève qui dure depuis une semaine La grève qui continue depuis une semaine a trouvé entre-temps le soutien de toute la fillière : des ouvriers de l’extraction jusqu’aux employés des stations-services, en passant par les salariés des raffineries. L’ONEP organise la grande majorité des 5 000 employés du secteur.
La mobilisation perturbe sérieusement l’économie du pays. La seule raffinerie du pays, qui transforme 21 000 barils/jour, à Sogara est complètement paralysée. Les champs pétroliers de Port-Gentil (2ème ville du pays) ne livrent plus de pétrole, l’aéroport local est à court de carburant.
Dans les villes, c’est la panique. Les queues se multiplient devant les stations-services, progressivement à sec, pour obtenir des stocks d’essence.
Le groupe français TOTAL dans la ligne de mire des grévistes Les majors ont publié des déclarations contradictoires. Shell a reconnu que la grève avait fait chuter sa production. Total a nié tout impact dans un premier temps, avant d’avouer que sa production était descendue à 10 000 barils par jour, soit le quart de la production usuelle.
Les revendications des grévistes sont multiples, elles sont au moins quatre, touchant à des questions politiques : (1) réintégration d’employés du secteur licenciés par les majors étrangères ; (2) suspension des déductions salariales imposées par ces compagnies ; (3) départ du manager de STSI Boccard, sous-traitant de Total ; (4) départ du directeur général de la Libya oil Gabon.
Ces exigences qui pointent les responsabilités des grands groupes étrangers, d’abord Total – qui opère aussi par l’entremise de leurs sous-traitants, comme Total avec STSI Boccard – ainsi que celle de l’Etat gabonais, complice du pillage organisé, actionnaire minoritaire de TOTAL-Gabon.
Même l’Etat gabonais a commencé à s’agacer des pratiques frauduleuses de Total. Il vient d’entamer un redressement fiscal à l’encontre de la filiale gabonaise du groupe français, soupçonné d’avoir un arriéré d’impôt de 565 millions d’€, soit 5 % du PIB du pays, 20 % du budget national.
Bientôt la fin de la dictature des Bongo ?
Depuis 1960, le Gabon est la base arrière de la France, à partir d’où part tous ses mauvais coups en Afrique, du Biafra au Congo. En 1967, la France y place un ancien agent de ses services secrets, Omar Bongo. Ce dernier va y installer un régime à parti unique, qui réprime férocement ses opposants. Il y est régulièrement réélu avec 99,5 % des voix. Il détourne des centaines de millions d’€, grâce à l’argent d’Elf puis Total.
A la mort d’Omar, c’est son fils Ali qui prend la succession en 2009. Tout changer pour que rien ne change. Ali truque les élections mais n’obtient que 41 % des voix au premier tour. Il suspend le deuxième tour et s’autoproclame président.
Un mois après la chute d’un autre ami de la France, le dictateur du Burkina-Faso Blaise Compaoré, en place depuis 27 ans, Ali Bongo a peur.
Il faut dire que le climat social est explosif au Gabon. Depuis un mois, des mouvements de grève ont été lancés dans les télécoms, la presse, la radio et la télévision, l’éducation nationale, les universités, les hôpitaux. Une grève générale avait touché toute la fonction publique fin octobre.
Partout les mêmes problèmes, des salaires et des primes non-payés, la colère face à la logique de privatisation et ses dégâts dans les services publics en faillite du pays.
Il y a de quoi être surpris de voir la très faible couverture de presse en France sur ce mouvement d’ampleur dans un pays francophone, impliquant notre fleuron économique. C’est par l’agence britannique Reuters que la nouvelle peut être connue en France. Un silence étonnant. Ou non.
Dénonçons la politique de rapine de Total en Afrique, dénonçons la Françafrique plus vivace que jamais : solidarité avec les travailleurs et le peuple gabonais qui veut en terminer avec cette dictature des Bongo qui dure depuis plus d’un demi-siècle !
TELEVISION
La grève qui paralysait Gabon Télévision et Radio Gabon depuis le 27 novembre dernier a pris fin ce lundi à la suite d’une rencontre entre le personnel et le ministre de la Communication, Denise Mekamne qui n’a pas apporté toutes les solutions souhaitées par les grévistes, selon Gabon Télévision.
Les grévistes ont accepté de suspendre le mouvement suite au paiement de la Prime d’incitation à la performance (PIP). C’était l’une des revendications immédiates.
Par contre, les autres points du cahier de charges n’ont pas encore trouvé une solution pérenne. Il s’agit notamment de la fin de la reforme de l’audiovisuel publique gabonais entamée depuis plusieurs années mais qui n’abouti pas.
Cette reforme sépare Gabon Télévision de Radio Gabon et fait de la RTG 2 une chaîne thématique. La reforme a aussi créé une autre entreprise de diffusion dénommée Télédiffusion du Gabon. Chaque nouvelle entité créée fonctionne comme un office et cesse donc de vivre accrochée sur le budget de l’Etat.
Les responsables de chaque entité ont été nommés sans plus. D’où la colère des agents qui disent travailler sans un réel statut. Ils ont donc bloqué le fonctionnement de ces médias pour voir claire. Durant la grève, Gabon Télévision et Radio Gabon ont considérablement réduit leurs programmes diffusant de la musique et des documentaires à longueur de journée. A 20 heures Gabon Télévision diffusait un mini journal de 10 minutes.
TELECOMMUNICATIONS
Au Gabon, le personnel de Gabon Télécom, filiale de Maroc Télécom, est en grève depuis le jeudi 13 novembre et menace de couper les lignes téléphoniques et Internet. Les grévistes exigent de la direction le paiement des primes réclamées et l’augmentation de la prime de logement.
La grève est la conséquence de problèmes mal réglés lors de la privatisation de Gabon Télécom, il y a sept ans. En 2007, lorsque Maroc Télécom rachète Gabon Télécom, la société est divisée en deux ; une maison mère qui gère le téléphone fixe et l’Internet, ainsi qu’une filiale qui gère la téléphonie mobile. Sur les 1 800 employés : 1 400 sont limogés, 380 conservent leur poste. Les Marocains fusionnent Gabon Télécom et sa filiale Libertis.
Apparait alors une première difficulté avec un déficit criant de personnel. A cela s’ajouté un deuxième problème : les agents de Libertis et de Gabon Télécom n’avaient pas les mêmes salaires. Le personnel de l’ex-Libertis reste mieux payé. Ce sont ces injustices que le Syndicat de national des télécommunications veut corriger. « Nous demandons qu’on harmonise les salaires et nous demandons qu’on paie la prime relative à cette mutualisation, que l’on relève la prime de logement, parce qu’à Libreville le logement coûte cher », explique Martin Essono, secrétaire général du Sinatel.
La direction générale de Gabon Télécom est restée injoignable. Toutefois, la société déficitaire durant plusieurs années est devenue très rentable et désormais son chiffre d’affaires explose.
FONCTION PUBLIQUE
L’Alliance pour le renouveau syndical au Gabon (ARESGA), une plate forme de plusieurs syndicats des travailleurs de la fonction publique a lancé samedi au terme d’une assemblée générale tenue à Libreville, un mot d’ordre de grève générale illimitée à partir de ce lundi pour dénoncer la rupture du dialogue avec le gouvernement.
« Nous avons décidé que tous les travailleurs se mobilisent. Et qu’à compter de lundi les actions seront manifestent et dures », a déclaré en lançant le mot d’ordre de grève, Joël Ondo Ella, porte-parole de l’ARESGA. Selon lui, cette grève va commencer par une grande marche des travailleurs en direction de la primature.
Les syndicalistes reprochent au premier ministre, Daniel Ona Ondo, d’être réfractaire au dialogue. Pour eux, le chef du gouvernement s’est « assis » sur les cahiers de charges assortis des négociations entamées par son prédécesseur, Raymond Ndong Sima en 2013. M. Ona Ondo ne cultiverait pas le principe de la continuité du service public avance-t-il tel que lui-même s’était engagé le 29 mars dernier lors de sa lettre de cadrage.
Pour les syndicalistes, « quand les gens ne dialoguent pas, on peut imaginer une notion de mépris ». Ils disent ne plus accepter le qualificatif de mauvaise fois qu’on leur attribue à tort.
« A l’endroit du chef du gouvernement qui est mandaté pour exécuter la politique du chef de l’Etat, nous disons non ; nous ne sommes plus d’accord avec un chantage sur la PIP et l’exclusion qui ne dit pas son nom », a-t-il lancé visiblement remonté. Les grévistes ne veulent plus de la Prime d’incitation à la performance (PIP) qui selon eux n’améliore pas le pouvoir d’achat du fonctionnaire.
Les syndicalistes réunis au sein de la Confédération des syndicats de l’administration publique (COSYNAP), du Syndicat national des professionnels des Eaux et Forêts (SYNAPEF), du Syndicat des travailleurs de l’agricultures et bien d’autres structures syndicales déjà en grève comme la Convention nationale des syndicats du secteur de l’éducation (CONSYSED) revendiquent dorénavant entre autres « sans délai » l’augmenter du Salaire minimum garanti (SMIG), le relèvement du point d’indice et la valorisation de la pension de retraite. Ils veulent que le point d’indice actuel qui est de 425 puisse évoluer de 425 à 800 au minimum. Le SMIG quant à lui, de 86 000 FCFA à 200 000 FCFA.
MARINS
La Compagnie Nationale de Navigation Intérieure et Internationale (CNNII) persiste dans son mouvement de grève lancé il y a quelques semaines. En effet, mercredi 4 décembre, le personnel de la CNNII section Port-Gentil et Libreville, a brandi des banderoles pour réclamer de meilleures conditions de travail, au grand désarroi des usagers de bateaux qui tentaient de rallier la capitale économique.
Avec des banderoles affichées devant les locaux de la Compagnie Nationale de Navigation Intérieure et Internationale (CNNII), le personnel de cette structure a décidé de réclamer de meilleures conditions de travail.
« Nous revendiquons le paiement des droits légaux, le contrat de travail, l’harmonisation salariale, le plan social, la gabonisation des postes », a expliqué un représentant du personnel de la CNNII. Face au silence de sa hiérarchie, le personnel de la compagnie a donc décidé d’observer un arrêt de travail depuis lundi 1er décembre. A Port-Gentil, le bâtiment abritant les bureaux de la CNNII est barricadé, les gros porteurs qui accostent sont bloqués rendant tout déchargement impossible.
Selon les employés de cette société, déplorent le fait que depuis trois mois, la direction générale est restée insensible à leurs cris de détresse, et après deux semaines de préavis de grève, la hiérarchie n’a pas daigné entamer de négociations, ni de rencontres. « En lieu et place de négociations, nous avons plutôt reçu des menaces de licenciements. Face à cela, nous disons trop c’est trop », martèle le représentant du Syndicat gabonais des marins (Sygama). Par rapport à cette situation, de nombreux voyageurs crient au désespoir.
« Avec cette grève, les déplacements seront difficiles entre Libreville et Port-Gentil, et de Port-Gentil vers Lambaréné. Le trafic est toujours très dense à cette période et cette grève n’arrange pas les choses », a déploré un voyageur qui a tenté de rallier la capitale économique, en vain.
HOPITAUX
Au Gabon, depuis deux semaines, le personnel de la santé est en grève. Il réclame le versement de la prime d’incitation à la performance (PIP), une nouvelle prime créée par le pouvoir pour corriger les injustices dans la fonction publique. Malheureusement plusieurs fonctionnaires sont exclus du bénéfice de cette prime d’où la grogne, comme dans les hôpitaux aujourd’hui, ce mardi 12 août, qui sont quasiment déserts.
Une mère arrive à la maternité du Centre hospitalier universitaire de Libreville avec sa fille sur le point d’accoucher : « On ne reçoit pas ». Déçue, elle repart en catastrophe.
Eric Bayé, directeur général du plus grand hôpital du Gabon reconnaît que la grève paralyse son établissement : « Nous observons que plusieurs services sont complètement fermés alors que le personnel d’astreinte et de garde est présent au poste. Donc il y a ce qu’on appelle une grève de zèle. Le personnel est bien présent, mais n’observe pas ce service minimum. Les patients souffrent énormément ».
« Nous avons le droit d’avoir notre part d’argent »
Presque tous les hôpitaux du service public sont touchés. Et pourtant, la semaine dernière, le Premier ministre Raymond Ndong Sima a officiellement annoncé que tous les fonctionnaires bénéficieront finalement de la prime réclamée.
« Pas du tout rassurés », rétorque Serge Mikala Moundanga, président du Syndicat national du personnel de la santé (Synaps). « Nous restons sur notre faim en disant que ce n’est qu’un discours. Nous pensons que nous avons le droit d’avoir notre part d’argent, qui a été versée dans les autres administrations, sans quoi nous n’allons pas reprendre notre travail », menace-t-il.
La prime d’incitation à la performance (PIP) est une prime créée par Ali Bongo. Elle profite à 30 000 fonctionnaires. Cependant, 40 000 autres en sont exclus pour le moment et la réclament.
DOUANES
Un mois après la signature du protocole d’accord avec le gouvernement sur la Prime d’Incitation à la Performance, les douaniers ont suspendu la trêve et annoncé l’arrêt des négociations.
Cette nouvelle grève de la Douane gabonaise a de quoi inquiéter les populations qui vont pour certaines voir leurs marchandises s’arrêter au port pendant une durée indéterminée et pour d’autres les prix augmenter, et notamment ceux des produits de première nécessité.
Les douaniers viennent donc de mettre un terme à la sérénité au sein des régies financières avec la rupture des négociations avec le gouvernement. Une décision prise en assemblée générale ce mardi 13 mai 2014. Les douaniers ont indiqué qu’ils vont « passer à la vitesse supérieure ». Ils accusent le gouvernement de ne pas tenir compte de leurs exigences pour ce qui est du montant de la prime de rendement et surtout de vouloir les flouer en ce qui concerne leurs spécificités douanières dans le payement de cette. Les douaniers dénoncent également des recrutements massifs qui ne correspondraient pas aux besoins réels de cette administration.
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