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Contre les bonnets rouges et les drapeaux rouges : la gauche réformiste, politique et syndicale

dimanche 24 novembre 2013, par Robert Paris

Contre les bonnets rouges et les drapeaux rouges : la gauche réformiste, politique et syndicale

Les syndicats qui ont manifesté en Bretagne contre les licenciements tenaient d’abord et avant tout à dénoncer la petite bourgeoisie des « bonnets rouges ». Ils ne tenaient pas à dénoncer d’abord le grand capital ni le gouvernement à son service. Ils ont mis en cause le « poujadisme » des bonnets rouges. Ils ont affirmé que les bonnets rouges étaient tous les patrons licencieurs, des salariés à la botte de leur patron, des profiteurs prêts à casser le code du travail, à supprimer les cotisations sociales et les retraites. Mais ils n’ont pas vu que celui qui casse le code du travail, qui s’attaque progressivement aux retraites mais sauve toutes les banques et tous les trusts, c’est le gouvernement de gauche. Il a fallu que la petite bourgeoisie bretonne lance la contestation pour que ces centrales syndicales se décident à organiser un mouvement rassemblant les salariés des entreprises menacées de licenciements. Et encore, ce n’est pas un mouvement de contestation comme les bonnets rouges. Les centrales syndicales se gardent bien de prendre la tête de la classe ouvrière contre le gouvernement et la grand patronat sur un programme d’ensemble englobant l’interdiction des licenciements, la défense des retraites et des services publics en proposant à la petite bourgeoisie, frappée ou menacée, de s’en prendre ensemble au grand capital. Non, elle utilise le mécontentement des salariés contre la petite bourgeoisie. Elle crie au poujadisme mais si une menace de démagogie d’extrême droite existe en France, c’est justement que, grâce aux centrales syndicales, la classe ouvrière n’apparaît nullement comme une force capable d’entraîner la petite bourgeoisie contre les banques et les trusts et contre le gouvernement qui les défend.

Les syndicats suivent ainsi le gouvernement de gauche qui estime impossible de sauver les petites entreprises alors qu’il a anticipé les sommes dues pour le sauvetage du Crédit Lyonnais, que sa bourse est ouverte pour tous les grands trusts et les grandes banques, que les centaines de milliards déboursés par l’Etat depuis 2007 pour sauver le grand capital sont la cause du naufrage des fonds publics, de la casse des services publics, des retraites, de la sécu et de la santé.

Les syndicats voudraient bien que la petite bourgeoisie soit présentée comme bouc émissaire des sacrifices et l’extrême droite tient la même propagande dans la petite bourgeoisie contre les travailleurs. Ni les uns ni les autres, ni le gouvernement de gauche, ne veulent s’en prendre aux véritables responsables et profiteurs de cette société : le grand capital des banques, des assurances, des trusts, ceux-là même qui jettent toute la société aux ordures en se jetant massivement sur la spéculation financière et en désinvestissant du capital productif. Même les aides massives de l’Etat ne servent pas à empêcher ce mouvement de désinvestissement comme le cas de PSA l’a très bien montré. L’Etat a versé quatorze milliards à ce trust mais cela n’empêche pas les propriétaires de PSA de vouloir se débarrasser le plus vite possible de leur propriété industrielle pour pouvoir plus vite la transformer en liquidités et les jouer en bourse.

Tous les Lepaon et les Berger ne sont capables de se mobiliser que pour aider le monde capitaliste à s’en prendre à des boucs émissaires. Qu’attendaient-ils pour unir les salariés de Renault et PSA à ceux de General Motors, de Petroplus, de ArcelorMittal, de Sanofi et de La Redoute, d’Air France ? Qu’ils soient menacés dans leurs intérêts de boutique parce que les bonnets rouges, eux, n’hésitent pas à mobiliser, à rassembler, à unir tous les secteurs de leur activité, des paysans aux transporteurs et aux petits entrepreneurs ! Mais, malgré les mensonges de Lepaon et Berger, le responsable de la catastrophe qui menace la société ne s’appelle pas d’abord la petite bourgeoisie mais le grand capital. Ce n’est pas les petits patrons qui ont lancé la crise de 2007-2008. Ce n’est pas eux qui ont été aidés à coups de centaines de milliards des Etats et des banques centrales. Ce n’est pas eux à qui on propose de ne même pas payer d’impôts. Les crédits d’impôts sous prétexte d’emploi, d’exportation, de recherche, etc, c’est des cadeaux que les gouvernements de gauche comme de droite font au grand patronat et seulement à lui ! Pourtant le grand capital joue contre l’économie, casse l’emploi, dénonce le gouvernement, le menace, le chantage. Eh bien, il n’y a pas meilleur défenseur de ce grand patronat que le gouvernement de gauche ! Il n’y a pas plus prompt à soutenir les plans sociaux des grands trusts, même ceux qui annoncent des bénéfices

En manifestant sur ces mots d’ordre, les syndicats n’ont fait que prétendre mettre la classe ouvrière à la remorque du gouvernement de gauche, le soutenir face aux couches moyennes qui sont frappées ou se sentent menacées par la crise. C’est cette politique des syndicats qui produit un risque fasciste en France. Elle ne fait pas qu’opposer les travailleurs et les couches moyennes, elle amène les milieux petits bourgeois à haïr les travailleurs et les prendre eux aussi comme boucs émissaires. Le Pen n’a même pas besoin de dire merci à Lepaon et Berger !

Quant aux travailleurs, au lendemain des journées d’action en Bretagne de Lepaon et Berger, que se passera-t-il ? Rien ! Quel programme d’action sera-t-il lancé dans la classe ouvrière de tout le pays ? Aucun ! Quel programme au nom de la classe ouvrière s’adressant aussi aux petits paysans, aux petits pêcheurs, aux petits artisans, aux petits commerçant et même aux petits patrons pour entraîner une lutte d’ensemble contre le grand capital et son gouvernement ? Zéro !

Ce programme ouvrier de perspectives sociales face à une société capitaliste qui n’a plus à offrir qu’accroissement du chômage et de la misère, ce n’est ni les syndicats ni la gauche politique qui gouverne qui vont nous l’offrir. Les travailleurs n’ont d’ailleurs pas besoin de ces gens-là qui soutiennent le capitalisme (et ont même la prétention de sauver le système) pour développer leur propre programme, leurs perspectives.

Ils ont par contre absolument besoin de son autonomie vis-à-vis du pouvoir et de tous ses soutiens politiques et syndicaux. Il lui faut s’assembler dans des réunions de salariés, dans les quartiers et les entreprises. Il lui faut unir toutes les parties aujourd’hui isolées, divisées de la classe ouvrière.

Unir public et privé, travailleurs et chômeurs, jeunes et vieux, avec ou sans papiers, Français et immigrés, les appareils réformistes à la botte du capitalisme ne le feront jamais. Et ils ne permettront jamais que cette force prolétarienne retrouvée soit un pôle pour entraîner la petite bourgeoisie contre le grand capital. Il est donc indispensable que les comités, les conseils, les coordinations de salariés, qu’il sera indispensable de construire, maintiennent une stricte indépendance du pouvoir, des appareils réformistes et de toutes les forces politiques ou syndicales qui prétendent réformer le capitalisme.

Messages

  • Les syndicats s’engagent sur le terrain dans un bras de fer avec les leaders des "bonnets rouges".

    "Nous [les syndicats] voulons lutter contre la montée du poujadisme et des corporatismes, a déclaré Laurent Berger. Pour Christian Le Tallec, salarié à la direction générale des finances publiques, "les difficultés de la Bretagne doivent être reprises par les organisations syndicales et non par des mouvements comme les bonnets rouges. Alan Courtel, affilié à la CGT et employé à la DDE, explique son geste. "Avec les bonnets rouges, ils font du détournement. Ils détournent le message des salariés au profit des patrons." Le mouvement des bonnets rouges a été organisé "par les patrons", a lâché Thierry Lepaon , secrétaire général de la CGT. Le secrétaire général de la CGT, Thierry Lepaon, dénonce ce matin, dans une vidéo relayée par Le Télégramme, le « traitement de faveur »(sic) dont bénéficieraient les Bonnets rouges en Bretagne, notamment concernant les dégradations ou les incidents liés aux manifestations et aux actions de ces derniers jours.

  • « A Quimper manifestent ceux qui veulent que continue la souillure de notre belle Bretagne par les nitrates de l’agriculture productiviste. A Quimper manifestent ceux qui veulent les salaires de misère pour les agriculteurs et le règne de la grande distribution. A Quimper les esclaves manifesteront pour les droits de leurs maîtres. » avait déjà déclaré Mélenchon, loin de proposer l’alliance de la faucille et du marteau....

  • Rejeter le mouvement des bonnets rouges au prétexte que le mouvement rassemble au delà des secteurs ouvriers, c’est se détourner des ouvriers eux-mêmes qui se sont mobilisés, c’est se détourner des autres couches du peuple travailleur, c’est laisser le terrain libre à la propagande pro-patronale, c’est trahir le projet d’alliance entre les différentes couches exploitées et opprimées, c’est encourager le jeu de division bourgeoise entre catégories populaires, c’est replier le mouvement ouvrier sur lui-même, c’est marginaliser le mouvement ouvrier et l’exclure du mouvement populaire, c’est laisser la direction idéologiques aux calculateurs bourgeois, c’est laisser passer l’occasion de marquer des points contre la droite et le Medef.

    Le prolétariat révolutionnaire n’ignore pas la difficulté des transporteurs menacés de faillites, ni la souffrance des éleveurs qui peinent à dégager l’équivalent d’un Smic pour tous leurs efforts. Le prolétariat révolutionnaire dénonce le grand patronat qui veut maintenir le système d’anarchie du marché, qui joue la concurrence sans frontière entre producteurs, qui exploite et le salarié, et le travailleur indépendant. ARS

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