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Où en est la crise ? Reprise ou approfondissement ? En attendant un nouveau krach ?
mercredi 24 juin 2009
La Banque Mondiale s’inquiète
Dans son rapport publié lundi, la Banque Mondiale s’inquiète du tarissement des flux de capitaux privés vers les pays en développement. En effet, ils sont attendus en baisse de 49% sur l’année, à 363 milliards de dollars contre 707 milliards en 2008. Une catastrophe pour les pays les plus pauvres, dont une grande partie de la population vit grâce à eux. Autre prévision inquiétante, l’institution internationale anticipe un recul de 9,7% du volume du commerce mondial en 2009, qui devrait être suivi d’une reprise de seulement 3,8% en 2010.
Ce faible rebond est expliqué par Justin Lin, économiste en chef de la Banque mondiale, cité dans un communiqué : pour lui c’est « la nécessité de restructurer le système bancaire, s’ajoutant aux limites des politiques expansionnistes des pays à revenus élevés », qui empêcheront un « rebond mondial de grande ampleur ». Ainsi, en dépit des récents signes d’amélioration constatés dans différents pays, l’institution considère les perspectives concernant l’économie mondiale comme « inhabituellement incertaines » et appelle les Etats à faire preuve de vigilance dans la conception de leurs plan de sortie de crise, afin notamment de leur éviter de devoir faire face à un endettement excessif.
La Banque mondiale a révisé à la baisse ses prévisions de croissance pour 2009, estimant que le PIB mondial devrait enregistrer une contraction de 2,9% et mettant en garde contre une hausse de la pauvreté liée à une chute des investissements dans les pays en développement.
"La récession mondiale s’est aggravée", souligne l’organisation dans un rapport diffusé dimanche et intitulé "Global Development Finance 2009 : Charting a Global Recovery" ((Financement du développement à l’échelle internationale 2009 : tracer la voie de la reprise mondiale).
Selon la Banque mondiale, le PIB mondial devrait enregistrer une contraction de 2,9% en 2009, avant de rebondir pour se chiffrer à 2% en 2010 et à 3,2% en 2011.
Ces dernières prévisions sont bien inférieures à celles que l’organisation avait présentées en mars dernier. Elle avait alors prévu une contraction du PIB mondial de 1,7%.
Dans son nouveau rapport, la Banque mondiale souligne que les flux de capitaux internationaux -qui étaient tombés à 707 milliards de dollars l’an passé contre 1,2 billion de dollars en 2007- devraient à nouveau diminuer en 2009 pour se chiffrer à 363 milliards de dollars.
La croissance des pays en développement ne devrait s’élever qu’à 1,2% cette année, après avoir progressé de 8,1% en 2007 et de 5,9% en 2008.
En mettant de côté la Chine et l’Inde, le Produit intérieur brut (PIB) des autres pays en développement devrait fléchir de 1,6%, provoquant des pertes d’emploi et entraînant encore davantage de personnes dans la pauvreté.
La croissance dans les pays en développement devrait ensuite se situer à 4,4% en 2010 et à 5,7% en 2011, sans retrouver la vigueur qui la caractérisait avant la crise actuelle.
Selon la Banque centrale, la région d’Europe et d’Asie centrale est celle qui a été le plus durement affectée par les récents développements, en grande partie parce que de nombreux pays de la zone souffraient d’importants déséquilibres avant la crise. En 2009, le PIB de cette région devrait chuter de 4,7% avant de progresser d’environ 1,6% en 2010.
En Amérique et dans les Caraïbes, le PIB régional devrait diminuer de 2,3% en 2009 avant d’atteindre une croissance de 2% en 2010, souligne l’organisation, qui prévoit pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord une diminution de moitié de la croissance à 3,1% cette année, suivie d’une remontée à 3,8% en 2010 et 4,6% en 2011.
Durement touchée par la crise, la région de l’Asie de l’Est et du Pacifique devrait de son côté connaître cette année une croissance estimée à 5%, la reprise graduelle dans l’ensemble de la région étant attendue au deuxième semestre 2009, avec une hausse du PIB régional de 6,6% prévue en 2010 et de 7,8% en 2011.
Le PIB de l’Asie du Sud, qui a vu ses flux de capitaux et la croissance de ses investissements diminuer, devrait lui croître de 4,6% en 2009, contre une croissance de 6,1% en 2008. La production régionale devrait ensuite progresser de 7% en 2010 et de 7,8% en 2011.
La BNP-Paribas estime que "le retour au potentiel de croissance n’est pas pour demain même si l’accumulation récente de bonnes surprises sur les statistiques économiques occulte cette réalité".
Les Etats-Unis n’ont "pas besoin pour le moment" d’un nouveau plan de relance de l’économie, a déclaré mardi le président américain Barack Obama lors d’une conférence de presse, en estimant que les résultats du premier plan de relance n’étaient pas encore palpables.
Interrogé sur l’éventualité de la mise en place d’un deuxième plan de relance économique après celui de 787 milliards de dollars adopté en février par le Congrès, M. Obama a répondu : "pas encore".
"Je pense qu’il est clair maintenant que le chômage va monter au dessus de 10% (...) en raison du fait que même après que les employeurs et les entreprises ont commencé à investir à nouveau, cela prend du temps en principe pour que la reprise économique fasse sentir ses effets sur les chiffres de l’emploi", a-t-il dit.
M. Obama a prévenu que "cela va être une année difficile, une période difficile".
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1. Où en est la crise ? Reprise ou approfondissement ? En attendant un nouveau krach ?, 24 juin 2009, 18:09, par Robert Paris
Le coût des mesures post-crise engagées par les Etats-Unis a eu pour effet de creuser de manière spectaculaire le déficit budgétaire qui devrait atteindre $1840 md au titre de l’exercice 2009 (soit près de 13% du PIB).
Cette situation, appelée à s’aggraver à court terme (+$3000 md de déficit à fin 2011), marque l’insuffisance des mesures du plan américain devant l’ampleur de la crise.
Les signaux envoyés par les responsables américains eux même et par l’attitude de la Chine, premier créancier des EU, laissent présager d’un effondrement imminent du dollar, ce qui rendrait inéluctable une réforme du système monétaire international, fondé depuis 1971 sur la suprématie mondiale du billet vert.
Quelles conséquences sur l’ordre économique mondial ? Analyse.
Les Etats-Unis ont suivi au cours des vingt dernières années une politique économique orientée vers l’encouragement, à outrance, de la consommation et de la croissance, notamment en s’ouvrant commercialement aux grands pays émergents, à leur tête la Chine.
Cette politique procédait d’un double pari : tolérer la sous-évaluation des monnaies des pays émergents (par rapport au dollar), garant de coûts de fabrication ou d’assemblage des produits manufacturés américains particulièrement bas, tant que l’excédent commercial bilatéral au profit de ces pays (plus de $230 md par an, pour la chine) est employé pour le financement de l’endettement des Etats-Unis. Avec $760 md en 2009 sous forme de bons du Trésor américain, la Chine est devenue en quelques années le premier créancier des Etats-Unis devant le Japon.
Pour faire face à la crise sans précédent qui frappe l’économie états-unienne, ce pays a dû d’abord mobiliser des ressources importantes pour contenir l’aggravation de la situation des organismes bancaires et financiers et soutenir les secteurs productifs clefs les plus touchés.
De son côté, l’Empire du Milieu ne pouvait jusqu’ici se permettre de tolérer une aggravation de la situation financière et économique des EU sans risquer des conséquences néfastes sur sa propre économie en termes de dépréciation des créances chinoises sur le Trésor américain mais surtout de perte de compétitivité à l’exportation. Il a donc continué à placer prudemment son excédent en devises aux EU, même si le rythme de ces placements a baissé au profit de l’acquisition de matières premières et du métal précieux.
La question est alors de savoir si la Chine est capable de poursuivre sa contribution décisive au maintien du dollar. La réponse pourrait s’avérer négative pour au moins deux raisons :
D’abord, l’administration Obama semble décidée à traiter de manière structurelle le déficit budgétaire et surtout à reconquérir, dans la durée, la vitalité de l’appareil de production des EU, condition nécessaire pour freiner la destruction sans précédent des emplois aux Etats-Unis et provoquer un retour viable de la croissance réelle.
Ensuite, la Chine, elle-même, n’est pas épargnée par la crise et ce pays a déjà mis en place un plan de relance ($580 md) qui vient s’ajouter au plan de soutien à l’économie dans le cadre du programme pluriannuel de croissance, volontariste et ambitieux, adopté par les autorités chinoises.
Dans ces conditions, le maintien actuel du Dollar face à l’Euro, monnaie de la première zone commerciale mondiale, s’expliquerait en grande partie par la liquidation des investisseurs américains de leurs positions sur les marchés internationaux.
De même, l’augmentation récente des cours du baril de pétrole n’a rien d’un signe de reprise de la croissance de l’économie mondiale réelle mais constituerait le résultat d’une pression spéculative sur l’or noir.
En visite à Pékin le 1er juin dernier, le secrétaire américain au Trésor Timothy Geithner avait indiqué que "Les problèmes internationaux ne pourront pas être résolus, sans la coopération entre les Etats-Unis et la Chine".
Les Etats-Unis devront notamment "créer un système financier plus stable et plus fort, protégeant mieux consommateurs et investisseurs" et faire en sorte que "les volumes d’épargne croissent". La Chine, de son côté, doit « accroître la consommation [intérieure] et dépendre moins de ses exportations et pour cela, permettre au yuan de grimper grâce à un meilleur régime de taux de change » a tenu à préciser T. Geithner, sans parler explicitement de manipulation de la monnaie chinoise jugée sous-évaluée par les Etats-Unis mais tolérée jusqu’ici pour les raisons évoquées plus haut.
Les pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) viennent de tenir le 17 juin dernier en Russie leur premier sommet. "Nous pensons qu’il est vraiment nécessaire d’avoir un système de devises stable, prévisible et plus diversifié", ont déclaré les dirigeants des quatre pays, réunis à Ekaterinbourg en Russie.
La Chine semble ainsi privilégier une coopération financière et économique prudente avec les Etats-Unis, tout en renforçant ses relations avec les pays producteurs de matières premières et en se rapprochant de ses partenaires au sein du BRIC.
L’effondrement du dollar serait donc imminent et c’est la Chine qui en décidera de la date, lorsqu’elle commencera à échanger en masse son stock de réserves libellés en dollar, probablement après le prochain comité pour le dialogue stratégique et économique convenu avec les EU (en marge du sommet du G20 en avril dernier) et qui se devrait se tenir au cours de cet été à Washington.
Cet effondrement ne manquera pas, dans un premier temps, de provoquer une flambée des cours des matières premières. Si la récession s’installe durablement aux EU, il handicapera sérieusement l’économie mondiale particulièrement dans la zone Euro, gros importateur de matières premières et exportateur important vers les EU (dont l’Allemagne est le premier fournisseur), mais aussi au Japon (l’un des principaux fournisseurs et créanciers des EU) et dans les pays producteurs de pétrole, à cause de la récession aux EU et dans la zone Euro, tous deux gros consommateurs de l’or noir.