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Crashs à répétition dans le transport aérien : ce n’est pas la fatalité, c’est le profit qui tue ...

27 décembre 2009, 19:54

le 16 août 2005, un avion colombien de la West-Caribeean Airways s’écrasait à la frontière Colombo-Venezuelienne avec 160 Martiniquais et Guadeloupéens à son bord. Cet avion était un avion-poubelle. Un avion de vingt-cinq ans d’âge, rafistolé avec des pièces de rechange achetées au marché noir et auquel ses propriétaires imposaient des rotations démentielles entre les Petites Antilles, en particulier la Martinique et la Guadeloupe, et l’Amérique centrale (Panama, Costa-Rica etc…). L’enquête qui a suivi le crash a ainsi démontré que l’avion en cause pouvait effectuer jusqu’à trois rotations dans la même journée (nuit comprise) entre, par exemple, Fort-de-France, Pointe-à-Pitre et Panama-City !

Les principaux actionnaires de la West-Caribbean Airways sont des généraux de l’armée colombienne, proches du président Uribe. Bien que l’Aviation Civile Colombienne elle-même ait, à diverses reprises, produit des rapports dénonçant le manque de fiabilité de la flotte de cette compagnie, bien que des mesures d’interdiction de vol aient été temporairement prises à son encontre, les avions-poubelle colombiens n’en continuèrent pas moins à transporter des passagers Martiniquais et Guadeloupéens en Amérique centrale.
Pourquoi ? Et comment était-ce possible.

Pourquoi ? Pour une question de fric tout simplement ! La Martinique et la Guadeloupe disposent de la monnaie la plus forte du monde, l’euro, et ont un pouvoir d’achat considérablement supérieur aux pays voisins. Les actionnaires de la West-Caribbean y ont vu là un bon moyen de rafler des sous sans bourse délier eux-mêmes, c’est-à-dire sans effectuer sur leurs avions les contrôles permanents exigés par l’Aviation Civile Internationale. Ces millions d’euros sont allés directement dans les poches des généraux colombiens actionnaires de la compagnie.

Comment ? Parce que l’Aviation Civile Française n’effectuait que des contrôles superficiels sur les vols de la West-Caribbean au départ des aéroports de la Martinique et de la Guadeloupe. Sans compter que, malins comme des singes, cette compagnie s’arrangeait souvent pour les y faire décoller entre 2h et 4h du matin, moment où les contrôleurs de nos deux pays n’étaient pas en activité.

Lorsque l’avion-poubelle a fini par s’écraser, à aucun moment les autorités colombiennes n’ont dépêché des secours à Machique, zone située certes au Venezuela, mais tout près de la frontière colombienne. Lorsqu’au stade de Dillon, à Fort-de-France, une grande cérémonie de deuil fut organisée en présence de divers chefs d’état (Chirac, Chavez etc.), la Colombie n’envoya aucun représentant officiel ! Trois jours plus tard, une sous-ministresse de la Culture (sic) débarqua à Fort-de-France en s’excusant de n’avoir pas pu rallier à temps la Martinique à cause des difficultés de…liaison aérienne.

A l’évidence, le comportement du gouvernement Uribe a relevé du mépris pur et simple envers les Martiniquais et les Guadeloupéens.
Envers les nègres martiniquais et guadeloupéens. Car outre l’appât du gain, il ne faut pas sous-estimer le côté raciste de cette affaire quand on sait qu’en Colombie, nègres et Indiens sont traités comme des sous-hommes. D’ailleurs, on remarquera que jamais la West-Caribbean n’a mis d’avions-poubelle sur ses lignes en direction des Etats-Unis. Voyager de Bogota à Miami ou de Bogota à Boston sur West-Caribbean, c’était voyager sur des avions presque neufs et surtout parfaitement sûrs. Normal, la clientèle yankee qui était transportée était majoritairement WASP (White Anglo-Saxon Protestant) !

Donc, des généraux colombiens actionnaires de cette compagnie sont directement responsables de la mort de 160 Martiniquais et Guadeloupéens. Or, quelle action a été entreprise contre eux ? Aucune ! Ni le gouvernement Chirac ni celui de Sarkozy n’ont soulevé ce problème puisque Alvaro Uribe est le dernier chien de garde de l’impérialisme occidental en Amérique du Sud. Quant à nos autorités locales (conseil régional et général), elles ne pouvaient rien faire vu les pouvoirs restreints dont elles disposent, notamment en matière de relations avec le reste de la Caraïbe. Enfin, quant aux familles des disparus, écrasées par la douleur, on comprend tout à fait que cet aspect des choses ait pu leur échapper.

Il me semble que le temps est venu de lever le voile sur ce crime commis de sang-froid par les généraux colombiens actionnaires de la West-Caribbean lesquels savaient pertinemment que les avions qu’ils faisaient voler vers nos pays étaient des avions-poubelle. Le gouvernement français a tout à fait la possibilité d’exiger de Bogota que leurs noms soient révélés publiquement et qu’une action en justice soit entreprise à leur encontre par une instance judiciaire internationale. Pourquoi pas le Tribunal pénal international ? Il faudrait aussi que nos élus antillais cessent de cacher leur tête sous le sable comme des autruches et fassent pression sur l’Elysée pour obliger ce dernier à agir. Et l’opinion publique antillaise, notamment les intellectuels, devraient se mobiliser également au lieu d’applaudir comme des « « tèbè » à la libération d’Ingrid Bétancourt. Je précise que je n’ai rien contre cette personne en particulier.
Qu’elle ait pu être libérée est une bonne chose. Bravo ! Mais pourquoi n’y a-t-il aucune mobilisation internationale en faveur de la libération des 11.000 Palestiniens qui croupissent depuis des années dans les geôles d’Israël ? Pourquoi Bush et Sarkozy s’apprêtent-ils à participer à l’ouverture des J.O. de Pékin alors que les peuples du Tibet et du Sinkiang (musulmans) sont écrasés par le régime de Pékin ? Deux poids, deux mesures comme d’habitude…

J’appelle donc la presse antillaise à un peu plus de décence quant à la libération de madame Bétancourt. Leur jubilation, reproduction simiesque de celle de la presse occidentale, est une insulte envers nos 160 compatriotes assassinés lors du crash de la West-Caribbean.

Raphaël Confiant

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