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Le réductionnisme et la conservation de l’ADN

8 décembre 2009, 08:54, par Robert Paris

Longtemps, on a pensé que 95% du génome humain ne servait pas à grand chose, puisqu’il n’était pas utilisé pour la fabrication de ces précieuses protéines qui nous constituent. Mais c’était aller semble-t-il trop vite en besogne... Il y a quelques années de toutes petites molécules étaient découvertes chez le ver, appelées microARN, dont on aurait pu rapidement se détourner, considérant qu’elles faisaient partie de ces gènes « inutiles » puisque non codant pour des protéines. Mais, « en découvrant que les mêmes microARN étaient conservés du ver de terre jusqu’à l’homme, on a compris qu’ils devaient jouer un rôle très important », explique Bernard Mari, chercheur à l’Institut de Pharmacologie Moléculaire et Cellulaire de Sophia Antipolis(1). Toutes les recherches menées depuis ces premières découvertes l’ont confirmé.

Des applications en virologie et en cancérologie

« On sait désormais que ces toutes petites molécules sont d’importants régulateurs de la cellule ; une seule d’entre elles est capable de contrôler des dizaines voire des centaines de gènes ». On devine à partir de là, le rôle crucial qu’elles peuvent jouer dans la multiplication des cellules, leur différenciation, avec des applications cliniques des plus prometteuses dans le champ de la cancérologie, mais aussi de la réponse aux virus. « En ciblant un seul de ces microARN, on peut espérer rectifier en une seule fois l’expression de plusieurs gènes cibles », confirme Bernard Mari. Au sein de l’équipe dirigée par Pascal Barbry, il s’intéresse particulièrement au rôle de ces microARN dans le cancer du poumon : « Grâce à des outils extrêmement performants (ce laboratoire a été l’un des tout premiers en France à disposer d’un séquenceur à très haut débit, NDLR), on est parvenu à montrer que leur expression était totalement dérégulée chez les malades. La « photographie » de ces microARN nous fournit ainsi des renseignements cruciaux sur l’état de prolifération et de différenciacion des cellules tumorales ».

Une propriété qui pourrait dans l’avenir être utilisée pour affiner encore le diagnostic et le pronostic des tumeurs : « L’interprétation du tableau d’expression de ces microARN est assez simple ; c’est un peu oui ou non, selon le type de cancer et sa gravité ».

Déjà des essais cliniques chez l’homme

Concernant leur utilisation en thérapeutique, c’est dans le domaine de la virologie que l’on trouve les plus grandes avancées. « On a découvert en partenariat avec une équipe montpelliéraine, un microARN spécifique, nécessaire à la réplication du VIH. D’autre part, des premiers essais cliniques avec des médicaments qui ciblent un autre microARN important dans l’hépatite C sont en cours ».

Ainsi, la découverte de ces microARN, capables de régner en maître sur la cellule, a ouvert la voie à de nouveaux médicaments, des « ARN thérapeutiques », qui pourraient être utilisés demain pour soigner des maladies aussi diverses que le cancer, l’hépatite, et peut-être même des troubles métaboliques.

1. Membre de l’Equipe physiologie, génomique des Eucaryotes, dirigée par Pascal Barbry, il était co-organisateur du congrès du Groupe Biologie du Développement qui s’est tenu en octobre à Nice sur le thème : « MicroARN et petits ARN non codants : nouveaux acteurs en physiopathologie ».

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