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Que penser des intellectuels staliniens ?

11 juin 2015, 06:24

Girouette que Sartre : vivhyste à l’époque de Vichy, résistant quand il est prouvé que la résistance réussit, engagé quand ça fait bien, stalinien quand ça a un succès populaire, gauchiste quant c’est à la mode, maoïste de même, puis antistalinien quand le stalinisme début se chute. il suit le vent, le Jean-Paul...

Si Sartre a été au moins équivoque par rapport à Vichy, il s’est rattrapé ensuite en se faisant juge de ceux qui avaient été faibles par rapport au fascisme.

A la libération, sous prétexte d’épuration des fascistes, les staliniens ont la mainmise sur le comité d’épuration de l’édition, comité où siègent Sartre, Vercors et Seghers, tous trois écrivains et éditeurs...

Sartre le justifie en prétendant que l’écrivain ne peut pas éviter d’être engagé.
L’article de Sartre de présentation des Temps modernes s’ouvre sur cette formule péremptoire : "Tous les écrivains d’origine bourgeoise ont connu la tentation de l’irresponsabilité : depuis un siècle, elle est de tradition dans la carrière des lettres" . Or, poursuit Sartre, chaque écrivain peut, en certaines circonstances (l’affaire Dreyfus pour Zola, l’administration coloniale du Congo pour Gide), mesurer sa responsabilité : "l’occupation nous a appris la nôtre". Aucune dérobade n’est donc possible, "tout écrit possède un sens" et constitue un acte qui engage son auteur : "L’écrivain est en situation dans son époque : chaque parole a des retentissements. Chaque silence aussi. Je tiens Flaubert et Goncourt pour responsables de la répression qui suivit la Commune parce qu’ils n’ont pas écrit un mot pour l’empêcher" . La guerre aura au moins permis de restituer la littérature à ce qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être, "une fonction sociale", qu’il s’agit de faire jouer dans le sens d’une transformation de la société bourgeoise : "le but lointain que nous nous fixons est une libération" .

Cela justifiera toutes les cautions du stalinisme....

Dans la série des essais réunis sous le titre de "Qu’est-ce que la littérature ?", Sartre est logiquement conduit à faire lui aussi le procès des écoles littéraires qui se sont vouées au culte de la beauté, c’est-à-dire à "la perfection dans l’inutile" , à la négation du monde réel et de la vie. Si par essence la littérature est une action par dévoilement, elle ne peut échapper à sa propre aliénation qu’en nommant l’aliénation sociale (la situation d’oppression où vit la majorité des hommes). Par là, elle conduit chaque homme à prendre son entière responsabilité : "la fonction de l’écrivain est de faire en sorte que nul ne puisse ignorer le monde et que nul ne s’en puisse dire innocent" - ce qui suppose que l’écrivain ait choisi de ne pas parler pour ne rien dire : tous les sujets ne se valent pas, "il s’agit de savoir de quoi l’on veut écrire : des papillons ou de la condition des Juifs" . Ceci ne signifie pas que l’art d’écrire soit sans importance. Certes le style (dans la prose, à l’inverse de la poésie) "doit passer inaperçu", mais il est indispensable, car il agit par persuasion, comme "une force douce et insensible" . Sartre peut donc définir son projet en ces termes :

« Dans la "littérature engagée", l’engagement ne doit pas faire oublier la littérature et notre préoccupation doit être de servir la littérature en lui influant un sang nouveau, tout autant que de servir la collectivité en essayant de lui donner la littérature qui lui convient . »

On voit combien la théorie de Sartre suit le ton de chaque époque, ce qu’elle doit à l’expérience récente de la guerre ; combien sont réelles ses analogies avec les positions communistes. Ses différences sont pourtant irréductibles. La réflexion que poursuit Sartre en ces années 1945-1947 à propos du marxisme, de l’URSS et du PCF, le conduit très vite à exclure que l’on puisse être à la fois écrivain et militant : "la politique du communisme stalinien est incompatible avec l’exercice honnête du métier littéraire" .

Sartre prend donc la position inverse de la précédente : tout engagement politique, pour lui, est une tromperie de l’art....

La logique intellectuelle dans tout cela ? Non, c’est la logique de l’intérêt bien conçu du plumitif...

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