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Les luttes de classe se développent en Chine

26 janvier 2016, 05:29

Alors que le nombre de grèves a presque doublé en un an en Chine, où la liberté syndicale n’existe pas, les arrestations de militants ouvriers et d’avocats défenseurs des droits de l’homme se sont multipliées ces derniers mois. « Trouble à l’ordre public », « incitation à la subversion », « subversion contre l’Etat »... En ce début d’année 2016, les inculpations tombent.

Plus de 130 avocats et employés de firmes juridiques avaient été interpellés en juillet dernier par les forces de l’ordre. Au moins 16 d’entre eux étaient détenus au secret depuis. Sept viennent d’être inculpés de « subversion », « d’incitation à la subversion » et de « subversion contre l’Etat », ont indiqué plusieurs de leurs proches à l’AFP, ce 12 janvier.

Quatre militants ouvriers arrêtés début décembre par les autorités de la province industrielle du Guangdong [1], surnommée l’atelier du monde, ont eux aussi été formellement inculpés, a-t-on appris ce même 12 janvier. Zeng Feiyang, directeur du centre d’aide aux travailleurs de Panyu et deux de ses collaborateurs, Zhu Xiaomei et Meng Hang, sont accusés de « trouble à l’ordre public » et He Xiaobo, du centre d’aide aux travailleurs de Nanfeiyan, de « détournement de fonds ».

Durant les deux semaines qui ont précédé leur inculpation, les medias officiels chinois ont lancé une campagne de diffamation coordonnée contre ces quatre militants et plus particulièrement Zeng Feiyang le directeur du centre de Panyu, dénonce le célèbre défenseur des droits des travailleurs, Han Dong Fang, dans une lettre adressée au Quotidien du peuple et publiée sur le site du China Labour Bulletin (CLB), l’organisation indépendante qu’il a créée à Hong Kong. Les medias les ont notamment accusés d’avoir incité les travailleurs à la grève et d’avoir accepté des fonds d’organisations étrangères.

Le Quotidien du Peuple ayant explicitement mentionné les liens entre Zeng Feiyang et le China Labour Bulletin, Hang Dong Fang indique notamment dans sa lettre au rédacteur en chef du media le plus officiel du pays, que cette coopération était connue des autorités du Guangdong depuis ses débuts il y a cinq ans. Il souligne que le centre de Panyu dirigé par Zeng Feiyang est devenu un pionnier de la négociation collective en Chine, en aidant les travailleurs à élire des représentants et en élaborant des stratégies pacifiques et respectueuses de la loi pour amener les employeurs « obstinés » à la table des négociations. Il rappelle que le centre de Panyu a permis aux ouvriers d’obtenir près de 200 millions de yuans en salaires, indemnités de licenciement ou contributions des employeurs à leur assurance sociale. Enfin, Han Dong Fang précise que le CLB et les autres groupes avec lesquels celui-ci travaille en Chine continentale ont, somme toute, « essentiellement fait le travail du syndicat officiel chinois, l’ACFTU, et ont de plus développé un modèle réalisable pour une réforme du syndicat en Chine ».

Les travailleurs chinois n’ont visiblement pas besoin d’être incités à la grève. De janvier à novembre 2015, de source officielle, 2354 grèves ou mouvements de protestation ont éclaté, soit près de deux fois plus qu’en 2014 (1207). Le mois le plus « chaud », novembre, en a compté 301. Mais, s’il fallait désigner des responsables, c’est du côté des employeurs qu’on les trouverait... Des employeurs qui n’hésitent pas à fermer brutalement leur entreprise, laissant du jour au lendemain leurs ouvriers sur le carreau, avec des mois de salaires impayés et sans aucune indemnité.

De plus, si le ralentissement économique explique une partie des fermetures, les ouvriers ne peuvent que constater que leurs employeurs sont avant tout motivés par la recherche d’un coût du travail plus faible qu’ils partent trouver dans les pays d’Asie du Sud Est, comme au Bangladesh, où ils délocalisent leur production. Ces dernières années en effet, les salaires ont significativement augmenté en Chine. Ainsi le salaire d’un ouvrier a été multiplié par trois en dix ans dans la province du Guangdong.

Le gouvernement chinois, en choisissant une nouvelle fois de recourir à la répression, est en train de confirmer, pour ceux qui en douteraient, sa nature profonde, celle de gendarme d’un des ateliers du monde. Mais surtout, il montre à quel point il se sent menacé...

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