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L’émergence de l’homme, parmi les hominidés, une conséquence… du communisme des chasseurs-cueilleurs !

3 septembre 2019, 08:43

Encore sur le communisme primitif…

Marylène Patou-Mathis dans « Neanderthal, une autre humanité »

« On constate qu’au cours des vingt mille dernières années, la taille et le volume du cerveau humain se sont réduits de façon régulière. Il n’existerait donc plus de relation directe entre le volume cérébral et les capacités comportementales individuelles. Cela traduisait le développement, au cours de l’évolution humaine, de l’effet réversif de l’évolution, qui met au premier plan le rôle de la solidarité sociale (formation de groupe local, puis de tribu régionale, puis de famille de langages). (…)

Neanderthal, chasseur de grands mammifères, possédait les nombreuses aptitudes inhérentes à cet acte : habileté physique, sens de l’observation et de l’organisation (planification, gestion), connaissances du terrain et du gibier et maîtrise des techniques. L’acquisition de ces connaissances et savoir-faire nécessite un apprentissage et de nombreuses capacités cognitives, dont le langage, que possédait Neanderthal. Mais la chasse a une fonction sociale autant qu’économique. Elle est structurante, car elle augmente la cohésion du groupe notamment par la coopération (diversement réglée selon le mode de chasse pratiqué) ; plus la stratégie est sophistiquée, plus elle exige de collaboration. De ce fait, la coopération peut être élargie à plusieurs groupes, par exemple lors de grandes chasses, ces alliances temporaires scellent le réseau relationnel inter-groupes. Une chasse collective est plus fructueuse, mais elle sous-entend la nécessité de la capture d’une proie plus importante en taille ou de l’abattage de plusieurs bêtes et surtout une bonne coordination entre les chasseurs (avec communication orale et gestuelle), de même qu’une organisation sans faille. Les chasses aux mammouths, collectives et exceptionnelles, devaient donner lieu, comme hier chez les chasseurs d’éléphants, à des préparatifs et à des réjouissances. Elles favorisaient également les échanges de savoirs et de biens, entre groupes, créant ainsi un réseau où hommes et femmes pouvaient trouver un partenaire.

Mais, c’est, peut-être, le partage qui est le facteur social le plus important. A la différence des carnivores sociaux, ni les chimpanzés ni les babouins ne partagent leur nourriture à la façon des humains (exception faite entre les jeunes et leur mère). Chez les populations de chasseurs-cueilleurs, le partage du produit de la chasse est équitable ; cette pratique égalitaire assure la cohérence du groupe et renforce les interrelations. Souvent celles-ci dépassent le cadre du groupe ; un morceau de gibier peut devenir au sein du réseau tissé entre différentes communautés un objet d’échange ou un présent. Les conséquences de cet acte sont essentielles : les vieillards, les malades et les jeunes enfants restés au camp reçoivent leur part, ce qui est une forme de socialisation évoluée. Cependant, le partage des produits alimentaires crée une interdépendance économique plus étroite, notamment lorsqu’il s’agit de viande. En effet, chez les peuples chasseurs-cueilleurs, le statut des femmes est inversement proportionnel au gibier tué et à leur participation à cette activité ; les femmes sont plus dépendantes chez les Esquimaux qui consomment essentiellement des produits issus de chasses, que chez les Hadza de Tanzanie où l’alimentation végétale est très importante. Toutes ces constatations nous conduisent à penser que Neanderthal partageait avec les siens le produit de ses chasses. (…)

La chasse est donc un phénomène social, mais c’est aussi un révélateur social. C’est la valeur accordée à la viande qui confère à la chasse son rôle primordial. La viande rouge sauvage donne de la force puisque force il faut avoir pour l’obtenir. Dans les sociétés traditionnelles, un bon chasseur acquiert « virilité » et statut social ; il est un partenaire privilégié pour la femme et un allié recherché pour le groupe, donc un idéal convoité. En outre, la consommation de viande, du fait de son statut, obéit à des impératifs de dons ainsi qu’à des interdits alimentaires. Par exemple, chez les aborigènes d’Australie, des lois sévères proscrivaient les aliments permis ou interdits. (…) Parfaitement adapté physiquement et mentalement, Neanderthal a sans doute été le plus grand chasseur de tous les temps. La pratique de la chasse et les conséquences sociales qui en découlent le distinguent de ses prédécesseurs et le rapprochent de nous. (…)

Le partage ne porte pas seulement sur les tâches, il concerne aussi la nourriture. C’est une des conséquences les plus importantes de la chasse. Dans les sociétés de chasseurs, le gibier abattu est distribué à chacun des membres du groupe. (…) La survie du groupe dépend de ce partage de la nourriture, c’est un corollaire pour ce type d’économie. Cette pratique renforce les liens entre les individus et permet au plus faible de survivre. Ces liens devaient s’étendre au-delà du groupe. »

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