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Quand Paul Fabra prétend que la cause de la crise actuelle du capitalisme est... l’erreur de Karl Marx

15 mai 2014, 11:09, par Robert Paris

Il est sans importance pour le capitaliste qu’il avance le capital constant pour retirer un profit du capital variable ou qu’il avance le capital variable pour mettre en valeur le capital constant, qu’il engage de l’argent sous forme de salaires en vue d’augmenter la valeur des machines et des matières premières, ou qu’il l’engage sous forme de machines et de matières premières afin d’exploiter la force de travail. Bien que la partie variable du capital soit seule à créer la plus-value, elle ne le fait qu’à la condition que les autres parties du capital, les instruments de production, soient également avancées. Comme le capitaliste ne peut exploiter le travail que s’il avance du capital constant et qu’il ne peut mettre en valeur le capital constant que s’il avance du capital variable, ces différents éléments s’identifient dans sa conception, et cela d’autant plus facilement que le taux réel de son gain se détermine par le rapport de celui-ci, non pas au capital variable, mais au capital total, par le taux du profit et non par celui de la plus-value. (Nous verrons dans la suite qu’un même taux de profit peut correspondre à différents taux de plus-value). (...)

La seule chose qui intéresse le capitaliste est le rapport de la plus-value (de l’excédent de valeur que lui rapporte la vente de ses marchandises) à l’ensemble du capital qu’il a avancé ; quant au rapport entre cet excédent et les divers éléments de son capital, il ne s’en préoccupe guère et il a même tout intérêt à s’en faire une idée fausse. Bien que l’excédent de la valeur de la marchandise sur le prix de revient naisse dans le procès de production, il ne se réalise que dans le procès de circulation, et comme sa réalisation et son importance sont déterminées par la concurrence et les conditions du marché, c’est aussi dans le procès de circulation qu’il semble prendre naissance. Cependant, qu’une marchandise se vende au-dessus ou au-dessous de sa valeur, il n’en résulte qu’une modification dans la répartition de la plus-value, qui n’affecte ni l’importance ni la nature de cette dernière. En outre, la circulation réelle est non seulement accompagnée des transformations que nous avons étudiées dans le volume II, mais celles-ci y marchent de pair avec la concurrence ainsi qu’avec l’achat et la vente des marchandises au-dessus et au-dessous de leur valeur, qui font que la plus-value réalisée par chaque capitaliste dépend autant de la fraude que de l’exploitation du travail. (...)

Durant le procès de production, la nature de la plus-value n’échappe pas un instant au capitaliste avide du travail d’autrui, comme nous l’avons constaté dans l’étude de la plus-value. Mais le procès de production est passager et se confond continuellement avec le procès de circulation : de sorte que si le capitaliste peut s’assimiler avec plus ou moins de netteté la conception d’un gain né de la production et si, par conséquent, il se rend compte de la nature de la plus-value, cette notion arrive tout au plus à acquérir la même importance que l’idée qui fait résulter la plus-value de la circulation indépendamment de la produc­tion, du mouvement du capital en dehors de ses rapports avec le travail. Même des économistes modernes, comme Ramsay, Malthus, Senior, Torrens, invoquent les phéno­mènes de circulation comme preuve de ce que le capital seul, dans son existence objective et dégagé de ses rap­ports sociaux avec le travail (rapports sans lesquels il ne serait pas capital), est une source de plus-value. (....)

La transformation de la plus-value en profit par l’intermédiaire du taux du profit n’est cependant que la suite de l’interversion du sujet et de l’objet dans le procès de production, où les forces productives du travail (forces subjectives) prennent l’apparence de forces productives du capital. D’un côté, la valeur, le travail passé qui assujettit le travail présent, est personnifiée dans le capitaliste ; de l’autre côté, l’ouvrier apparaît sous la forme objective de la force de travail, comme une marchandise. Cette interversion, qui se fait déjà sentir dans les rapports simples de la production, est accentuée par les transformations et les modifications qui se manifestent dans le procès de circulation.

Ainsi qu’on peut s’en rendre compte par l’exemple de l’école ricardienne, il est absolument inexact de considérer les lois du taux du profit comme étant les mêmes que celles du taux de la plus-value ou inversement, ce qui répond, il est vrai, à la conception des capitalistes. L’expression pl/C rapporte la plus-value à la valeur de tout le capital avancé, que celui-ci soit consommé ou seulement employé dans la production. Elle représente le degré d’augmentation de valeur du capital tout entier et exprime, pour employer des termes qui correspondent à la nature de la plus-value, le rapport entre la grandeur de la variation du capital variable et la grandeur du capital total avancé. (...)

En employant la terminologie de Hegel, nous pouvons donc dire que l’excédent, lorsqu’il se reflète du taux du profit en lui-même, c’est-à-dire lorsqu’il se caractérise par ce dernier, apparaît comme engendré par le capital, soit annuellement soit dans une période de circulation déterminée.

Bien que la différence quantitative ne porte que sur les taux du profit et de la plus-value et non sur la plus-value et le profit eux-mêmes, le profit est une autre forme de la plus-value, dans laquelle celle-ci dissimule son origine et son existence. Alors que la plus-value met en lumière la relation qui existe entre le capital et le travail, le profit, qui est rapporté au capital tout entier, montre celui-ci en relation avec lui-même et établit la différence entre sa valeur primitive et la nouvelle valeur qu’il s’est créée. Que cette valeur nouvelle ait pris naissance dans les procès de production et de circulation, cela tombe sous le sens ; mais sa genèse reste mystérieuse et semble déterminée par des vertus spéciales et secrètes du capital. Plus nous approfondirons le problème de la mise en valeur, plus les rapports du capital paraîtront mystérieux et moins se révèlera le secret de son organisme interne.

Relire le raisonnement : Marx, Le Capital, Livre III, Paragraphe 1

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