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Témoignages sur la révolution russe

11 November 2017, 08:12

Trotsky :

Le fait que le prolétariat soit arrivé au pouvoir pour la première fois dans un pays aussi arriéré que l’ancienne Russie tsariste n’apparaît mystérieux qu’à première vue ; en réalité, cela est tout à fait logique. On pouvait le prévoir et on l’a prévu. Plus encore : sur la perspective de ce fait, les révolutionnaires marxistes édifièrent leur stratégie longtemps avant les événements décisifs.
L’explication première est la plus générale : la Russie est un pays arriéré mais elle n’est seulement qu’une partie de l’économie mondiale, qu’un élément du système capitaliste mondial. En ce sens, Lénine a résolu l’énigme de la révolution russe par la formule lapidaire : « la chaîne s’est rompue à son maillon le plus faible ».
Une illustration nette : la grande guerre, issue des contradictions de l’impérialisme mondial, entraîna dans son tourbillon des pays qui se trouvaient à des étapes différentes de développement, mais elle posa les mêmes exigences à tous les participants. Il est clair que les charges de la guerre devaient être particulièrement insupportables pour les pays les plus arriérés. La Russie fut la première contrainte à céder le terrain. Mais pour se détacher de la guerre, le peuple russe devait abattre les classes dirigeantes. Ainsi, la chaîne de la guerre se rompit à son plus faible chaînon.
Mais la guerre n’est pas une catastrophe venue du dehors comme un tremblement de terre. C’est, pour parler avec le vieux Clausewitz, la continuation de la politique par d’autres moyens.
Pendant la guerre, les tendances principales du système impérialiste du temps de « paix » ne firent que s’extérioriser plus crûment. Plus hautes sont les forces productives générales, plus tendue la concurrence mondiale, plus aigus les antagonismes, plus effrénée la course aux armements, et d’autant plus pénible est la situation pour les participants les plus faibles. C’est précisément pourquoi les pays arriérés occupent les premières places dans la série des écroulements. La chaîne du capitalisme mondial a toujours tendance à se rompre au chaînon le plus faible.
Si, à la suite de quelques conditions extraordinaires ou extraordinairement défavorables (par exemple, une intervention militaire victorieuse de l’extérieur ou des fautes irréparables du gouvernement soviétique lui-même), le capitalisme russe était rétabli sur l’immense territoire soviétique, en même temps que lui serait aussi inévitablement rétablie son insuffisance historique, et lui même serait bientôt à nouveau la victime des mêmes contradictions qui le conduisirent en 1917 à l’explosion. Aucune recette tactique n’aurait pu donner la vie à la révolution d’Octobre si la Russie ne l’avait portée dans son corps. Le parti révolutionnaire ne peut finalement prétendre pour lui qu’au rôle d’accoucheur qui est obligé d’avoir recours à une opération césarienne.

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