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Un spectre hante l’anthropologie : le spectre du communisme primitif

19 décembre 2013, 18:25, par Robert Paris

Une des meilleures preuves, contrairement à ce que croit Darmangeat, que l’amélioration de la situation des femmes n’est pas récente et occidentale est la pornographie qui date des années 70 et a tellement pris de l’ampleur qu’on pourrait croire aujourd’hui qu’elle a toujours existé. Elle diffuse et banalise la violence faite aux femmes et le viol et même la pédophilie.

Voici ce qu’écrit le sociologue Richard Poulin dans "Pornographie, rapports sociaux de sexe et pédophilisation" :

En 1953, naissaient le magazine Playboy et la pornographie contemporaine. En 1963, était créé en France le magazine Lui. En 1965 au Royaume-Uni et, en 1968, aux États-Unis, paraissait Penthouse tandis qu’en 1972, le film Gorge profonde [Deep Throat] obtenait une audience débordant le ghetto des salles des cinémas pornographiques. Fondé en 1974, le magazine Hustler poussait plus loin les limites. L’arrivée successive des vidéocassettes, des DVD puis du Web engendrait une explosion de la production et de la consommation de la pornographie tout en modifiant profondément la structure des marchés. En Occident, les magazines voyaient décroître leur audience. Les nouvelles technologies favorisaient la consommation dans les lieux privés ; en conséquence, les salles de cinéma X disparaissaient. Dans un même mouvement, la production pornographique se transformait : le gonzo (un « divertissement d’humiliation » ou, en anglais, « humilitainment ») et la pornographie dite « amateur » envahissaient les marchés. Du coup, la pornographie facilement disponible devenait plus violente et humiliante. Elle influençait la pornographie « traditionnelle ». Les hardeuses étaient esquintées sur les lieux de tournage. En outre, la pornographie mettait en scène des jeunes femmes de plus en plus jeunes, des adolescentes, des écolières… Au point tel qu’il est maintenant difficile de distinguer cette pornographie utilisant des jeunes femmes à peine d’âge légal (barely legal) de celle qui exploite des mineures. En fait, à partir des sites Web annonçant des « teenies », des « youngies », des « jeunes filles », etc., et qui assurent que les jeunes sont âgées de 18 ans et plus, le surfeur accède facilement à des images, à des pages et à des sites de pornographie infantile.
Dans les années 90, cette industrie et ce commerce du « fantasme sexuel » envahissaient l’ensemble des moyens de communication et influençaient la publicité, les médias, y compris les magazines féminins, la mode, la littérature, etc. Ses codes et son idéologie s’imposaient et transformaient les imaginaires ainsi que les pratiques sociales et intimes. La pornographie faisait désormais « chic » et branchée ; elle était même considérée comme un facteur de libération sexuelle (et non plus de soumission sexuelle). Les références à la pornographie étaient tellement systématiques qu’on en oubliait qu’il n’en avait pas toujours été ainsi. Elle participait à la sexualisation de la sphère publique ainsi qu’à l’hypersexualisation (ou la sexualisation accentuée) des filles.
De son côté, l’industrie mondiale de la pornographie visait la reconnaissance, proclamait sa légitimité et s’achetait une vertu. Elle a désormais sa presse spécialisée, ses festivals du film, ses salons et ses foires, ses chaînes spécialisées de télévision, ses créneaux horaires sur les chaînes généralistes, ses émissions promotionnelles, ses sites qui foisonnent et qui sont parmi les plus rentables de la toile mondiale. Elle a également ses animatrices à la radio et à la télévision, ses invités aux talk shows populaires, ses séries télévisées et ses téléréalités, ses stars, etc. Bref, la pornographie s’est banalisée tout en offrant une idée glamour et excitante de ce que serait une « carrière » dans l’industrie. Le recrutement en est facilité. Elle serait même devenue pour les femmes une expression non seulement de leur liberté sexuelle, mais une façon de prendre confiance, d’exprimer leur sensualité et de renforcer leur « pouvoir sexuel », particulièrement de séduction.

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