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Pourquoi le capitalisme s’autodétruit de manière irrémédiable et pourquoi il est inutile de chercher à le réformer

31 octobre 2013, 11:07, par Robert Paris

Comment chercher quelle politique devrait être celle de la classe ouvrière ? Il faut commencer par chercher à comprendre la politique des classes dirigeantes. Pour cela, ce n’est pas ce que ressentent les travailleurs qui peut nous guider mais il faut, presque au contraire, essayer de se mettre à la place des classes exploiteuses. Si vous faisiez partie des classes dirigeantes, que feriez-vous si vous constatiez que l’économie capitaliste est incapable de dépasser le mur de capitalisation, qu’elle a atteint un sommet du haut duquel elle ne peut plus que chuter, quelle seront vos préoccupations, quelle sera votre politique et comment pouvez-vous vous servir du pouvoir politique que vous détenez encore pour défendre vos intérêts de classe ? Telle est la première question que doivent se poser des révolutionnaires qui constatent que le capitalisme chute irrémédiablement.

Plusieurs objectifs des classes dirigeantes viennent à l’esprit :

1°) Faire croire que les questions de classe ne comptent pas face à une situation catastrophique et que tout le monde (c’est-à-dire les exploiteurs et les exploités) doit se serrer les coudes, au sein de l’entreprise, au sein du secteur, au sein du pays, au sein d’une nationalité, d’une ethnie, d’une religion ou d’une région (Europe par exemple). Contre qui ? Eh bien contre les autres groupes, c’est-à-dire les autres entreprises, les autres pays, les autres peuples… Donc développer les questions identitaires en prétendant que l’insécurité vient de là, que la déstabilisation de la société vient de là, que l’effondrement social vient de là… Avec ensuite le but de transformer la crise économique et sociale en crise raciale, en crise religieuse, en crise ethnique. On se souvient que les classes dirigeantes avaient agi de même quand elles craignaient la révolution bourgeoise comme dans le massacre de la Saint-Barthélemy. On se souvient que la bourgeoisie avait agi de même lors du fascisme, lors des années qui ont suivi 1990 en Algérie, lors du génocide rwandais ou dans les guerres raciales de Yougoslavie.

2°) Faire croire que les Etats sont là pour sauver les peuples, pour lutter pour la reprise économique, pour défendre les entreprises, pour défendre les emplois et les salaires alors qu’ils sont là uniquement pour défendre les intérêts de la classe exploiteuse, intérêts qui ont justement besoin de licencier, de casser les salaires, de détruire toute confiance en eux-mêmes des travailleurs et des milieux populaires et toute capacité pour eux d’apparaître comme un pôle social et politique des opprimés, des révoltés, des jeunes, des chômeurs, des banlieues, des petits bourgeois eux-mêmes menacés.

3°) Casser le moral des travailleurs en leur faisant croire, avec l’aide des bureaucraties des appareils syndicaux, que les travailleurs sont sans force du moment que le chômage augmente, sans force face aux licenciements, face aux politiques d’austérité, face à la casse des retraites, des services publics ou du code du travail. La meilleure démonstration de faiblesse des travailleurs consiste dans les politiques syndicales comme les journées d’action qui n’ont absolument aucune action sur les classes dirigeantes, soi-disant pour contrer les attaques. La meilleure manière consiste aussi à isoler les salariés qui sont en butte aux attaques et surtout à ne pas relier leur lutte avec les autres en cours ou à venir. Casser les moral consiste aussi pour ces appareils à se battre contre toute tentative autonome des salariés pour prendre eux-mêmes les décisions dans leurs luttes, pour constituer leurs propres comités de lutte. Casser le moral, c’est passer son temps à dire à ceux qui mènent une action syndicale limitée que tout va mal du fait des travailleurs qui n’ont pas été convaincus de la nécessité ou de l’efficacité de ce type d’action ou des gens qui la dirigeaient. Casser le moral des travailleurs, c’est ce que font aussi les centrales syndicales en participant aux négociations qui mènent ouvertement à des reculs, à des attaques, à des contre-réformes. Casser le moral des travailleurs, c’est leur affirmer à chaque attaque partielle que si on n’y va pas cette fois, c’est qu’on est foutus, qu’on a perdu, que c’est trop tard, qu’on ne pourra plus régir, etc… Casser le moral des travailleurs, c’est contribuer à faire croire que le problème vient de l’étranger. Casser le moral des travailleurs, c’est leur répéter qu’ils doivent compter sur d’autres que sur eux-mêmes : sur les appareils syndicaux, sur les élections démocratiques, sur l’Etat, sur les patrons eux-mêmes. Casser le moral des travailleurs, c’est refuser à ceux-ci toute intervention dans un autre sens que purement économique, apolitique, purement légaliste, sans lien avec les luttes des travailleurs des autres pays, sur un terrain purement nationaliste, corporatiste, sectoriel et même individualiste. Casser le moral des travailleurs, c’est leur faire croire qu’ils ne sont pas une classe révolutionnaire crainte des classes dirigeantes à condition qu’ils agissent de manière autonome des institutions bourgeoises, à condition qu’ils s’organisent eux-mêmes, à condition qu’ils ne s’arrêtent pas aux barrières de la légalité bourgeoise, à condition qu’il ne demandent pas à leur pire ennemi politique, l’Etat bourgeois, de les sauver…. Casser le moral des travailleurs, c’est faire croire que les travailleurs ne peuvent pas vivre sans devenir des esclaves des patrons. Casser le moral des travailleurs, c’est les tourner en ennemis des travailleurs d’à côté : non Musulman contre Musulman, jeunes contre vieux, hommes contre femmes, tous contre les Roms, avec papiers contre sans papiers, travailleurs contre chômeurs, CDI contre CDD, privé contre public, Européens contre non Européens, Français contre Européens, tous contre les Grecs et on en passe… Casser le moral des travailleurs, c’est faire croire qu’il existe quelque part quelqu’un, un homme politique, un financier, un dirigeant syndical qui aurait « la solution » alors que la seule solution, c’est la classe ouvrière, ce sont les exploités s’organisant, se réunissant, décidant, agissant par eux-mêmes, se construisant comme une force d’avenir, affirmant leurs programmes. Casser le moral des travailleurs, c’est les faire passer pour faibles, pour victimes, pour des pauvres que d’autres devraient défendre alors qu’ils sont la principale force sociale face au capitalisme finissant et failli. Ceux qui cassent le moral des travailleurs ne sont pas seulement les bourgeoisies et les politiciens et Etats à leur service. Ce sont d’abord les faux amis de la gauche, de la gauche de la gauche, des syndicats y compris les plus à gauche, des groupes d’extrême gauche qui accompagnent les politiques syndicales et, pour certains, qui accompagnent les gauches. Une caractéristique commune à tous ces casseurs du moral des travailleurs : ils plaignent la classe ouvrière, pleurent, crient, hurlent et trépignent mais ils n’expliquent jamais ce qui se passe ni pourquoi, ils refusent d’analyser la crise comme un effondrement définitif, ils refusent d’admettre que le capitalisme n’est pas éternel. Ils parlent même de révolution nécessaire en disant en même temps que le système n’a pas de limite comme si un système pouvait céder la place alors qu’il disposait encore des moyens de subsister, alors que les classes dirigeantes seraient encore capables de le diriger et non dans l’impasse… Comme si les révolutions sociales ne provenaient pas des conditions objectives mures, comme si les révolutionnaires devaient seulement dénoncer plaintivement et pas armer politiquement les exploités. Casser le moral des travailleurs, c’est s’appuyer sans cesse sur la prétendue opinion publique populaire pour faire reculer le niveau de conscience en disant que les travailleurs sont très loin d’avoir une telle conscience, très loin d’avoir une telle organisation, très loin d’avoir une telle mobilisation. Au lieu de rendre fiers les travailleurs de leur passé et de leur avenir, ils se servent des étapes présentes pour les opposer à ce qui serait nécessaire. Ils leur répètent « vous n’en êtes pas là, vous en êtes loin, vous êtes mauvais, vous êtes insuffisants, vous êtes faibles, vous n’êtes pas en lutte suffisante, vous n’êtes pas assez syndicalistes, vous n’êtes pas assez communistes même ». Eh bien, les communistes révolutionnaires doivent diffuser un message parmi les travailleurs qui va dans le sens inverse : tout ce que font les Etats, tout ce que font les gouvernants, tout ce que font les classes dirigeantes visent à faire croire aux travailleurs qu’ils ne sont pas une force parce que tous ces adversaires du prolétariat ont, dans la situation mondiale qui vient, une peur panique des opprimés, la plus grande force sociale du monde face à un monde capitaliste sans force et sans perspective d’avenir.

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