Aux lois qui fabriquent des illégaux, des "sans-papiers", répondons que nous sommes des prolétaires sans frontières !
5 juillet 2009, 18:35, par Robert Paris
Travailleurs sans-papiers isolés - Bilan d’étape
Par foumonde le lundi 29 juin 2009, 15:41 - Paris - Lien permanent
Pourquoi ne soutenons-nous pas collectivement les travailleurs sans-papiers isolés qui s’étaient réfugiés à la Bourse du Travail ?
Pourquoi aucune organisation conséquente n’a-t-elle pas fermement condamné le mode infamant qu’a utilisé la CGT pour les en déloger ?
Rappel :
Au printemps 2008, des travailleurs sans papiers, soutenus par la CGT, occupent spectaculairement quelques grands restaurants parisiens puis une entreprise de nettoyage pour faire valoir leurs droits à régularisation.
La France (re)découvre l’existence de ces travailleurs (hommes et femmes) qui vivent sans papiers ni garanties, et ce parfois depuis plus de 10, 20 ans, alors qu’ils et elles sont salariés d’entreprises ayant pignon sur rue.
Mais un grand nombre de travailleurs sans papiers dépendant d’entreprises trop petites pour disposer d’un syndicat se retrouvent isolés et abandonnés à leurs seules initiatives, les forces syndicales relâchant leurs efforts de soutien une fois la régularisation au cas par cas obtenue pour ceux travaillant dans les entreprises qui disposent d’une représentation syndicale.
Avec la CSP 75 (Coordination des Sans-papiers 75), plus de 600 - puis jusqu’à 1300 - travailleurs isolés sans–papiers décident de se réfugier à la Bourse du travail, lieu historique de représentation des intérêts de tous les travailleurs, au 85 rue Charlot, dans le 3e. Ils y sont toujours, bien organisés mais oubliés, pour certains en famille avec leurs enfants.
En développant la répression et ses conséquences dramatiques, les politiques gouvernementales sécuritaires passent outre au plus élémentaire respect de citoyens dont nos sociétés ont besoin depuis longtemps pour assurer certaines activités en sous-emploi (le bâtiment, la restauration, l’aide à la personne…).
Chacun, chacune de nous, habitant ou travaillant à proximité peut se sentir concerné et responsable de cette profonde infamie, tout comme nous avons été choqués de ces enfants scolarisés en France qui risquent d’être expulsés, du jour au lendemain, dans un pays qu’ils n’ont jamais connu.
Face aux défis multiples de ce XXIème siècle, souhaitons-nous vivre dans des sociétés refermées sur elles-mêmes et aux abois ou dans un monde solidaire ?
24 juin, expulsion violente :
Mercredi 24 juin dernier, profitant d’une des manifestations hebdomadaires des travailleurs sans-papiers, un commando de gros bras de la CGT déloge à coups de gourdin et de gaz lacrymogène ceux qui sont restés à la Bourse (cf. article et vidéo, Libé du 24/06). Huit personnes ont été hospitalisées, dont un enfant et une femme plus de 24 heures.
L’UD-CGT de Paris a été contrainte de reconnaître la responsabilité de l’initiative le soir même tout en diffusant un communiqué de presse mensonger (cf. le communiqué de presse rectificatif de la CSP 75 ci-joint). Elle accuse les travailleurs d’avoir squatté les locaux alors qu’un accord de longue date avait préservé l’usage de plusieurs étages de la Bouse pour les syndicats ainsi que la condamnation de la grande salle.
A la rue, en ayant finalement réussi à négocier avec la police de récupérer leurs affaires, les sans-papiers décident de rester sur le boulevard du Temple devant l’entrée principale de la Bourse. Ils y sont toujours, décidés à y résister, tant qu’une régularisation collective ne leur aura pas été accordée, sachant que le cas par cas mène à l’arbitraire.
L’ostracisme récurrent :
Depuis 14 mois, seuls des militants ou politiques en leur nom, mais aucune organisation syndicale, politique ou associative conséquente, revendiquant par ailleurs la régularisation des tous les travailleurs sans-papiers et de leur famille, (CGT, NPA, RESF et toutes les autres…) n’a soutenu cette lutte sous l’argument cent fois répété qu’ils n’auraient jamais dû occuper un tel lieu emblématique, une maison du peuple et des travailleurs dans laquelle les sans-papiers considèrent avoir cherché refuge (cf. les 12 mensuels du Journal, téléchargeables sur le site de la Bourse occupée).
Au delà des échanges courtois ou aigre-doux, qui ont jalonné cette longue année, l’UD-CGT de Paris était prête à écouter les travailleurs sans-papiers dans leur commission « sans-papiers » à condition, au préalable, qu’ils aient quitté les lieux, ce qui les condamnaient à redevenir invisibles et sans armes.
Il est vrai qu’il a été reproché à la CSP 75 (Coordination des sans-papiers parisienne née de l’occupation de l’Eglise Saint-Bernard en 1996) de travailler difficilement avec tous les partenaires potentiels en privilégiant les intérêts des sans-papiers qu’elle défend (un bon nombre sont maliens, originaires de la région de Kayes, région sèche à tradition migratoire). Les rapports avec les différentes composantes de la communauté malienne ne sont certainement pas simples mais la CSP 75 a pu gérer ces 14 mois de conditions difficiles sans céder aux provocations. Malgré toutes les bonnes volontés, Il est difficile de mettre en oeuvre la démocratie (!!!), cela nous donne-t-il le droit de leur jeter l’anathème ?
La situation aujourd’hui :
Les travailleurs sans-papiers sont toujours là, résolus malgré les épreuves, hommes et femmes. Les syndicats sont maintenant assiégés dans leur propre maison, ne pouvant en sortir que par la petite porte et sans gloire.
Dans un courrier transmis par Martine Billard, Députée de Paris, le 26 juin, des militants de RESF ont proposé une réunion de coordination unitaire (qui a eu lieu samedi 27 au matin) et déclarent :
“La situation engendrée par l’affaire de la Bourse du travail depuis 14 mois est une bombe propre à faire exploser le mouvement des sans-papiers et celui de leurs soutiens qui, pourtant, n’ont pas besoin de ça. A en croire certains, les sans papiers ne seraient plus en lutte contre le gouvernement pour leur régularisation mais contre la CGT. Et la CGT serait le pire ennemi des sans papiers. Il faut arrêter ces divagations dont, à n’en pas douter, le gouvernement se réjouit ! (…) Nous proposons donc de geler toutes les discussions sur les responsabilités de uns et des autres jusqu’à la résolution de la crise actuelle. (…)”
Une prochaine réunion de coordination est prévue mercredi 1er juillet à 19h, à l’EDMP, 8 impasse Crozatier, 75012, Paris.
Pour l’heure, les militants d’organisations expriment leur consternation et grognent mais les organisations proprement dites ne s’engagent pas clairement ni pratiquement à soutenir le mouvement.
Une récente déclaration du syndicat CGT Saint-Gobain Aubervilliers (93), en critiquant leur direction nationale, pose bien le problème qui dépasse les problèmatiques de la seule CGT :
(…)
2) Le syndicat CGT Saint-Gobain Aubervilliers a pris connaissance de l’évacuation par la force des sans-papiers qui occupaient la Bourse du Travail depuis le 2 mai 2008.
Evacuation réalisée par un groupe de miliciens armés qui se prétendent nos camarades.
Scandalisé, le syndicat CGT Saint-Gobain Aubervilliers condamne explicitement et sans aucune réserve cette évacuation.
Si au lieu de négocier avec Hortefeux les critères scandaleux d’une immigration adaptée aux besoins du capitalisme, la confédération avait élargi le mouvement à tous les sans-papiers - les plus précaires des travailleurs -, si le mouvement avait pris l’ampleur des espoirs qu’il soulevait, si l’élargissement indispensable et possible n’avait pas été purement et simplement enterré par choix délibéré de la Confédération, nous n’en serions pas arrivés là.
On en arrive aujourd’hui à à peine 1500 régularisations, les portes désormais fermées et le mouvement en reflux. Et pourtant, ce n’est pas l’énergie d’un certain nombre de militants CGT et de structures locales qui a manqué pour développer et organiser, bien seuls, la lutte de nos camarades sans-papiers.
Il est absolument normal que le désespoir et le sentiment d’abandon se répandent chez nos camarades, alors qu’ils ont vu l’an dernier, concrètement, qu’il aurait été possible de gagner la régularisation pour tous les sans-papiers.
(…)
Travailleurs sans-papiers isolés - Bilan d’étape
Par foumonde le lundi 29 juin 2009, 15:41 - Paris - Lien permanent
Pourquoi ne soutenons-nous pas collectivement les travailleurs sans-papiers isolés qui s’étaient réfugiés à la Bourse du Travail ?
Pourquoi aucune organisation conséquente n’a-t-elle pas fermement condamné le mode infamant qu’a utilisé la CGT pour les en déloger ?
Rappel :
Au printemps 2008, des travailleurs sans papiers, soutenus par la CGT, occupent spectaculairement quelques grands restaurants parisiens puis une entreprise de nettoyage pour faire valoir leurs droits à régularisation.
La France (re)découvre l’existence de ces travailleurs (hommes et femmes) qui vivent sans papiers ni garanties, et ce parfois depuis plus de 10, 20 ans, alors qu’ils et elles sont salariés d’entreprises ayant pignon sur rue.
Mais un grand nombre de travailleurs sans papiers dépendant d’entreprises trop petites pour disposer d’un syndicat se retrouvent isolés et abandonnés à leurs seules initiatives, les forces syndicales relâchant leurs efforts de soutien une fois la régularisation au cas par cas obtenue pour ceux travaillant dans les entreprises qui disposent d’une représentation syndicale.
Avec la CSP 75 (Coordination des Sans-papiers 75), plus de 600 - puis jusqu’à 1300 - travailleurs isolés sans–papiers décident de se réfugier à la Bourse du travail, lieu historique de représentation des intérêts de tous les travailleurs, au 85 rue Charlot, dans le 3e. Ils y sont toujours, bien organisés mais oubliés, pour certains en famille avec leurs enfants.
En développant la répression et ses conséquences dramatiques, les politiques gouvernementales sécuritaires passent outre au plus élémentaire respect de citoyens dont nos sociétés ont besoin depuis longtemps pour assurer certaines activités en sous-emploi (le bâtiment, la restauration, l’aide à la personne…).
Chacun, chacune de nous, habitant ou travaillant à proximité peut se sentir concerné et responsable de cette profonde infamie, tout comme nous avons été choqués de ces enfants scolarisés en France qui risquent d’être expulsés, du jour au lendemain, dans un pays qu’ils n’ont jamais connu.
Face aux défis multiples de ce XXIème siècle, souhaitons-nous vivre dans des sociétés refermées sur elles-mêmes et aux abois ou dans un monde solidaire ?
24 juin, expulsion violente :
Mercredi 24 juin dernier, profitant d’une des manifestations hebdomadaires des travailleurs sans-papiers, un commando de gros bras de la CGT déloge à coups de gourdin et de gaz lacrymogène ceux qui sont restés à la Bourse (cf. article et vidéo, Libé du 24/06). Huit personnes ont été hospitalisées, dont un enfant et une femme plus de 24 heures.
L’UD-CGT de Paris a été contrainte de reconnaître la responsabilité de l’initiative le soir même tout en diffusant un communiqué de presse mensonger (cf. le communiqué de presse rectificatif de la CSP 75 ci-joint). Elle accuse les travailleurs d’avoir squatté les locaux alors qu’un accord de longue date avait préservé l’usage de plusieurs étages de la Bouse pour les syndicats ainsi que la condamnation de la grande salle.
A la rue, en ayant finalement réussi à négocier avec la police de récupérer leurs affaires, les sans-papiers décident de rester sur le boulevard du Temple devant l’entrée principale de la Bourse. Ils y sont toujours, décidés à y résister, tant qu’une régularisation collective ne leur aura pas été accordée, sachant que le cas par cas mène à l’arbitraire.
L’ostracisme récurrent :
Depuis 14 mois, seuls des militants ou politiques en leur nom, mais aucune organisation syndicale, politique ou associative conséquente, revendiquant par ailleurs la régularisation des tous les travailleurs sans-papiers et de leur famille, (CGT, NPA, RESF et toutes les autres…) n’a soutenu cette lutte sous l’argument cent fois répété qu’ils n’auraient jamais dû occuper un tel lieu emblématique, une maison du peuple et des travailleurs dans laquelle les sans-papiers considèrent avoir cherché refuge (cf. les 12 mensuels du Journal, téléchargeables sur le site de la Bourse occupée).
Au delà des échanges courtois ou aigre-doux, qui ont jalonné cette longue année, l’UD-CGT de Paris était prête à écouter les travailleurs sans-papiers dans leur commission « sans-papiers » à condition, au préalable, qu’ils aient quitté les lieux, ce qui les condamnaient à redevenir invisibles et sans armes.
Il est vrai qu’il a été reproché à la CSP 75 (Coordination des sans-papiers parisienne née de l’occupation de l’Eglise Saint-Bernard en 1996) de travailler difficilement avec tous les partenaires potentiels en privilégiant les intérêts des sans-papiers qu’elle défend (un bon nombre sont maliens, originaires de la région de Kayes, région sèche à tradition migratoire). Les rapports avec les différentes composantes de la communauté malienne ne sont certainement pas simples mais la CSP 75 a pu gérer ces 14 mois de conditions difficiles sans céder aux provocations. Malgré toutes les bonnes volontés, Il est difficile de mettre en oeuvre la démocratie (!!!), cela nous donne-t-il le droit de leur jeter l’anathème ?
La situation aujourd’hui :
Les travailleurs sans-papiers sont toujours là, résolus malgré les épreuves, hommes et femmes. Les syndicats sont maintenant assiégés dans leur propre maison, ne pouvant en sortir que par la petite porte et sans gloire.
Dans un courrier transmis par Martine Billard, Députée de Paris, le 26 juin, des militants de RESF ont proposé une réunion de coordination unitaire (qui a eu lieu samedi 27 au matin) et déclarent :
“La situation engendrée par l’affaire de la Bourse du travail depuis 14 mois est une bombe propre à faire exploser le mouvement des sans-papiers et celui de leurs soutiens qui, pourtant, n’ont pas besoin de ça. A en croire certains, les sans papiers ne seraient plus en lutte contre le gouvernement pour leur régularisation mais contre la CGT. Et la CGT serait le pire ennemi des sans papiers. Il faut arrêter ces divagations dont, à n’en pas douter, le gouvernement se réjouit ! (…) Nous proposons donc de geler toutes les discussions sur les responsabilités de uns et des autres jusqu’à la résolution de la crise actuelle. (…)”
Une prochaine réunion de coordination est prévue mercredi 1er juillet à 19h, à l’EDMP, 8 impasse Crozatier, 75012, Paris.
Pour l’heure, les militants d’organisations expriment leur consternation et grognent mais les organisations proprement dites ne s’engagent pas clairement ni pratiquement à soutenir le mouvement.
Une récente déclaration du syndicat CGT Saint-Gobain Aubervilliers (93), en critiquant leur direction nationale, pose bien le problème qui dépasse les problèmatiques de la seule CGT :
(…)
2) Le syndicat CGT Saint-Gobain Aubervilliers a pris connaissance de l’évacuation par la force des sans-papiers qui occupaient la Bourse du Travail depuis le 2 mai 2008.
Evacuation réalisée par un groupe de miliciens armés qui se prétendent nos camarades.
Scandalisé, le syndicat CGT Saint-Gobain Aubervilliers condamne explicitement et sans aucune réserve cette évacuation.
Si au lieu de négocier avec Hortefeux les critères scandaleux d’une immigration adaptée aux besoins du capitalisme, la confédération avait élargi le mouvement à tous les sans-papiers - les plus précaires des travailleurs -, si le mouvement avait pris l’ampleur des espoirs qu’il soulevait, si l’élargissement indispensable et possible n’avait pas été purement et simplement enterré par choix délibéré de la Confédération, nous n’en serions pas arrivés là.
On en arrive aujourd’hui à à peine 1500 régularisations, les portes désormais fermées et le mouvement en reflux. Et pourtant, ce n’est pas l’énergie d’un certain nombre de militants CGT et de structures locales qui a manqué pour développer et organiser, bien seuls, la lutte de nos camarades sans-papiers.
Il est absolument normal que le désespoir et le sentiment d’abandon se répandent chez nos camarades, alors qu’ils ont vu l’an dernier, concrètement, qu’il aurait été possible de gagner la régularisation pour tous les sans-papiers.
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