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Les paradoxes qui ont révolutionné notre compréhension du monde

18 avril 2011, 15:38, par robert

Ra joutons : Josephson : Le paradoxe de l’effet tunnel : on peut franchir une barrière de potentiel et c’est même un moyen fondamental pour traverser la matière avec un coût énergétique moindre et à vitesse supraluminique (paradoxe complet : d’espace, de temps, de matière et de vitesse !). Qui plus est, c’est un moyen essentiel au vivant…

La question centrale des paradoxes est bien la dialectique.

Il est intéressant de remarquer que le dilemme entre reconnaissance ou refus du tiers exclus est au cœur de la crise des mathématiques contemporaines. Contre l’école de Hilbert, les mathématiciens intuitionnistes, Brouwer et son école, ont fait le choix délibéré de rejeter le tiers exclus. Ils conservent le principe d’identité et le principe de contradiction, mais n’utilisent pas le tiers exclus. De leur point de vue, le principe du tiers exclus est au mieux inutile : on peut fort bien mener des démonstrations sans l’utiliser. Au pire, il devient stérilisant, car il tranche par avance des propositions indécidables, sans que cela résulte d’un examen factuel conscient et délibéré. Dans le même ordre, nous savons aussi que la démonstration par l’absurde repose sur le principe du tiers exclus. En effet elle dit, pour prouver R, je suppose non R, or en le supposant, je trouve une contradiction, c’est donc que non R est fausse enfin, d’après le principe du tiers exclus, R est vraie. Si on rejette le tiers exclus, on accepte l’implication, mais pas sa réciproque. Il s’ensuit donc que les mathématiciens intuitionnistes rejettent aussi la validité de la démonstration par l’absurde. Cela permet de comprendre pourquoi les mathématiciens se sont trouvés dans une situation incongrue, car si on va jusqu’à remettre en cause les modalités logiques de la démonstration, pour adopter des positions différentes, il n’est plus possible de s’entendre. Ce sont des logiques différentes qui s’affrontent -.
Il est donc tout à fait concevable qu’un même phénomène naturel puisse représenter un paradoxe insupportable pour un esprit aligné sur la logique duelle et n’en soit plus pour un esprit qui pense d’emblée dans une logique non-duelle. Le cœur du problème réside dans la place que nous donnons à ce tiers qui est au-delà de un et deux et les transcendent en même temps, ce tiers que nous n’excluons pas, mais qu’au contraire nous incluons, ce tiers qui précisément permet d’inclure sans exclure. Comme l’écrit Basarab Nicolescu : « Les mots trois et trans ont la même racine étymologique : le "trois" signifie " la transgression du deux, ce qui va au-delà de deux ». Trois vient du sanskrit, tri qui entre dans la composition d’un grand nombre de structures de la Nature selon la pensée indienne.
On doit à Stéphane Lupasco, que commente ici Basarab Nicolescu, une tentative pour introduire dans la description de la réalité une logique du tiers inclus qui permet d’aborder de manière nouvelle les paradoxes naturels. Nous avons vu que la physique classique, reposant sur la logique duelle, donnait de la matière et de l’énergie une définition non-contradictoire. Ce que la théorie quantique a révélé, c’est que matière et énergie procédaient d’une entité événementielle originaire non-contradictoire. Que l’entité originaire que nous visons dans nos descriptions scientifique sous le nom de Réalité, puisse contenir en elle la potentialité des contraires posait un problème complètement inédit aux physiciens.
La solution que donna Bohr consista mettre en avant ce qu’il appelle le principe de complémentarité. Il le dit dans le texte suivant : « personnellement, je pense qu’il n’y a qu’une seule solution : admettre que dans ce domaine de l’expérience, nous avons affaire à des phénomènes individuels et que l’usage des instruments de mesure nous laisse seulement la possibilité de faire un choix entre les différents types de phénomènes complémentaires que nous voulons étudier ». Le phénomène est un, l’observation scientifique est une extension de nos organes des sens par des instruments de mesure. En définitive, l’observateur détermine ce qu’il veut observer. il détermine la forme selon laquelle il peut identifier un phénomène. Soit une forme ondulatoire, soit une forme corpusculaire, dans le cas de la lumière. Et c’est à ce niveau qu’il donne une interprétation duelle, dite « classique ». Il est donc indispensable de prendre en compte son point de vue, autant que de recevoir un point différent, tout en admettant la complémentarité des descriptions. Or, la conséquence en est que l’idée même d’objectivité forte qui prévalait dans la science classique s’effondre. Ne subsiste qu’une objectivité faible. Bohr a lui-même fait remarquer en 1938 que les théoriciens des sciences humaines aussi feraient bien de le comprendre. L’observateur ne peut saisir que la réponse provoquée par sa propre question.
En 1935, Stéphane Lupasco s’attaquait au même problème pour lui donner une solution dans ce qu’il appelle le principe d’antagonisme. Celui-ci nous dit que l’actualisation d’un phénomène est inséparable de la potentialisation de son contraire. L’onde actualisée est conjointe à une structure corpusculaire potentialisée ; inversement, la structure corpusculaire et conjointe à une structure ondulatoire potentialisée. Chacune d’entre elle correspond à une forme élémentaire de conscience. Mais que se passerait-il si deux actualisation/potentialisation se trouvaient dans un état d’équilibre ? Le principe de complémentarité deviendrait inutilisable. Nous ne pourrions en avoir aucune idée, aucune image et aucun fait ne pourrait leur correspondre. Nous aurions affaire à une pure Vacuité. Nous ne pourrions le formuler que par des négations : ni ceci, ni cela, ni onde, ni particule. Cet état de potentialités coexistantes symétriques est appelé par Lupasco « état T ». Ce tiers est ce que la logique duelle exclut. Lupasco l’appelle le tiers-inclus. Or si nous considérons la potentialisation comme une conscience élémentaire, sa relativisation par rapport à son contraire la fait apparaître comme conscience dans le champ de la dualité. Cet état intermédiaire est bien réel et il possède un dynamisme propre. On pourrait même parler ici selon Lupasco de matière primordiale. Le principe d’antagonisme conduit à la reconnaissance d’une entité matière-énergie qui est conscience de conscience. Lupasco l’appelle sans détour l’énergie psychique. Son avènement ne peut que se traduire par une conscience de ce avec quoi elle est en interaction, donc conscience auto-référente. L’énergie psychique porte en elle-même ce caractère de dynamisme infini de ce qui ne connaît pas d’autre chose que ce avec quoi elle est en interaction, c’est-à-dire elle-même, dans sa transparence à soi. C’est sur ce fondement qu’est possible ce que nous appelons une conscience objective, car elle fonde précisément l’intersubjectivité.

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