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Révolte sociale en Algérie et en Tunisie

7 janvier 2011, 18:35, par saïd

Après la Tunisie, c’est au tour de l’Algérie de se soulever contre la vie chère, le chômage, le manque de perspectives. Depuis mercredi, plusieurs quartiers d’Alger se sont embrasés. Violente, la révolte a également touché d’autres villes du pays. Les matchs de foot ont été annulés. Revue de presse des deux côtés de la Méditerranée.

A l’origine de ces soulèvements, une rumeur. Mardi, un bruit court dans les rues de Bab El Oued, quartier populaire d’Alger. Le quotidien algérien El Watan le précise :

« Une descente de police serait prévue pour déloger tous les vendeurs à la sauvette qui squattent les trottoirs. »

En réaction, dès mercredi, plusieurs quartiers de la capitale se sont embrasés. A Bab El Oued, quartier populaire du centre d’Alger d’où est parti l’insurrection, des jeunes sont descendus dans la rue pour scander des slogans hostiles au pouvoir. Comme le montre le diaporama du Monde.fr, certains ont attaqué le commissariat du quartier en jetant des pierres.

Les émeutes se sont étendues jeudi à des quartiers périphériques de la ville. Le Figaro souligne :

« Le quartier huppé d’El Biar situé sur les hauteurs [d’Alger] a été pris d’assaut par une quarantaine de jeunes armés de sabres qui se sont attaqués à de nombreuses boutiques. »

Une protestation violente

Le soulèvement se démarque de la Tunisie par la plus grande violence des émeutiers. Un épicier a raconté à Libération :

« La police a jeté des gaz lacrymogènes sur eux et a même tiré des balles à blanc. Et puis, certains jeunes en ont profité pour tout détruire. Ils ont cassé des vitrines et ont pris de l’argent des produits. »

Sur YouTube, de nombreuses vidéos postées prouvent les altercations qui ont opposé les jeunes et les forces de l’ordre :

La protestation a également gagné d’autres villes du pays : Tipaza, Bourmedes, Bejaia ont été le théâtre d’émeutes. Dès mercredi, des protestations ont aussi éclaté à Oran, dans l’Ouest du pays. Liberté, quotidien national algérien, décrit :

« Rapidement, la chaussée sera recouverte de pneus qui seront incendiés, de blocs de pierre et autres objets hétéroclites empêchant tous les véhicules de passer. A coups de pierres, les jeunes manifestants s’en prirent à certains automobilistes et au mobilier urbain. »

Routes barrées, matchs de football annulés

Divers axes routiers ont été barrés par les émeutiers. Le quotidien en ligne Tout sur l’Algérie (TSA) a déclaré que le 6 janvier que l’ouest de l’Algérie était coupé de la capitale :

« Il est impossible de gagner l’ouest algérien en voiture ou par train. Tous les trains à destination de l’ouest (Blida, Chlef, Oran, Tlemcen…) ont été annulés par la SNTF. L’autoroute Est-Ouest est coupée à plusieurs endroits dans la wilaya de Blida. »

Le site Internet du journal Le Matin Dz a annoncé que les matchs du championnat national de football qui devaient se dérouler ce week-end ont été reportés.
Une soudaine hausse des prix

Depuis plusieurs jours, la grogne s’était fait sentir sur les marchés algériens. A l’origine des protestations se trouve en effet une hausse soudaine des denrées alimentaires. El Watan précise :

« Les prix des produits de première nécessité tels que le sucre, l’huile, la farine et les céréales ont enregistré une “forte” augmentation, allant de 20% à 30% pour certaines de ces denrées. »

Ce bond des prix est dû à la flambée des cours des produits alimentaires de base sur les marchés internationaux. En effet, l’Algérie importe beaucoup.

Le pouvoir, resté silencieux pendant plusieurs jours, s’est enfin exprimé ce vendredi. El Watan reprend la déclaration du ministre du Commerce Mustapha Menbada :

« Un Conseil interministériel se tiendra demain samedi pour examiner les moyens de juguler la forte hausse de prix de certains produits de large consommation enregistrée ces derniers jours. »

Corruption et chômage des jeunes

Selon Ouest-France, c’est aussi la frustration des Algériens, impuissants devant la corruption de leurs dirigeants, qui les a poussé à descendre dans la rue :

« Malgré la manne pétrolière qui a généré un confortable matelas de 155 milliards de dollars (119 milliards d’euros) de réserves de change, la redistribution déséquilibrée de la rente a engendré de légitimes frustrations.

Alors que les barons du régime et leurs clientèles ne cessent de défrayer la chronique de la corruption en affichant un train de vie agressif, les couches populaires continuent de tirer le diable par la queue. »

Comme en Tunisie, c’est la jeunesse qui est descendue dans la rue : Ouest-France évoque « la grogne d’une jeunesse sans perspectives », dont une grande partie est sans emploi. Selon le FMI, 75% des Algériens ont moins de 30 ans, et 20% des jeunes sont au chômage.
Les révoltes de 1988, souvenir omniprésent

Quand ils évoquent les soulèvements actuels, les médias algériens font unanimement référence aux émeutes de la faim survenues en 1988, à l’issue desquelles avait eu lieu une ouverture politique qui avait bénéficié aux islamistes.

Le même terreau existe actuellement, affirme TSA :

« La situation actuelle présente de troublantes similitudes avec celle qui a précédé octobre 1988. »

En plus des pénuries et de la hausse des prix, il y a, selon ce média tunisien, l’existence de rumeurs sur le pouvoir en place. Selon certains, les « absences prolongées » du président Abdelaziz Bouteflika présageraient de sa mauvaise santé et de la fin de son règne.

Pour d’autre, il s’agit d’une stratégie pour « se replacer dans un jeu politique qui commence à lui échapper ». Selon le journal, les interrogations sur le pouvoir « suggèrent que la course à la succession est presque officiellement ouverte. »

Après une matinée d’acalmie, les émeutes ont repris le 7 janvier dans l’après-midi.

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