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La disparition de la civilisation mégalithique sans laisser d’autres traces que de grandes pierres : une des grandes discontinuités de l’histoire de la société humaine

5 septembre 2019, 07:36, par Robert Paris

Jean-Paul Demoule, dans « Les dix millénaires oubliés qui ont fait l’histoire » :

« C’est au cours du Néolithique que les tombes nous révèlent, soit par les objets qu’emporte le défunt, soit par l’architecture funéraire elle-même, l’accroissement des inégalités sociales. Les monuments mégalithiques sont la forme la plus spectaculaire de l’exaltation de la puissance des chefs, protégeant leur corps et leurs richesses à jamais enfouies, et ancrant leurs sujets dans le territoire… Ces dalles étaient tirées à l’aide de cordes et roulées sur de rondins, comme cela a pu être reproduit de manière expérimentale… La chambre funéraire du dolmen de Gavrinis dans le golfe du Morbihan est recouverte de l’un des trois morceaux d’un grand menhir, qui mesurait à l’origine quatorze mètres de haut, et dont un autre fragment recouvre, non loin de là, un autre dolmen célèbre, la table des Marchands de Locqmariaquer. Ces bris volontaires sont aussi l’indice de probables tensions sociales, sinon idéologiques, et l’on connaît même, non loin de là, à Beltz, toujours dans le Morbihan, tout un groupe de menhirs volontairement abattus et enterrés, dès la période néolithique… De tels monuments sont évidemment réservés aux dominants, et les morts étaient accompagnés de biens précieux, par exemple des haches polies en jadéite provenant des Alpes ou des perles en variscite venues de Catalogne…

A ces monuments démesurés, qui s’imposaient pendant plusieurs siècles sur les bords de l’Atlantique, du Portugal au Danemark, mais particulièrement sur la côte bretonne, succèdent à partir de 3500 environ avant notre ère des monuments beaucoup plus modestes et collectifs. Il s’agit des coffres en pierre, plus rarement en bois, appelés par les archéologues allées couvertes, d’environ deux mètres de large et d’une vingtaine, en moyenne, de longueur, où l’on accédait par une dalle percée d’un orifice circulaire, et qui n’étaient souvent plus recouvertes par un tertre de pierre ou de terre. Au lieu de quelques individus hors du commun accompagnés d’objets de luxe, ce sont plusieurs dizaines, voire plusieurs centaines de corps qui y étaient déposés, au fur et à mesure des décès, et presque sans objets d’accompagnement… Il semble donc qu’avec ces allées couvertes la pyramide sociale se sont nettement abaissée et que les rituels funéraires, visiblement minimalistes, soient maintenant accessibles, sinon à toute la communauté, du moins à des clans familiaux, dont on peut supposer qu’ils ont été le lieu de résistance à des pouvoirs personnels excessifs. »

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