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Editorial 17-01-2010 - Les grandes puissances s’inquiètent pour Haïti !!!

23 janvier 2010, 22:25

C’est la France qui a accordé, en 1986, un droit d’asile à l’ex-dictateur Jean Claude Duvalier, qui a emporté, dans ses valises, 900 millions de dollars des caisses de l’État, soit plus que la dette extérieure du pays à l’époque. A ce jour, il n’est pas extradé malgré les demandes répétées de la justice haïtienne, afin de le juger et récupérer les sommes volées. L’argent de l’ex-dictateur et de sa famille se trouvent dans des banques étrangères, de surcroît suisses. Haïti a entamé une procédure pénale afin de faire face aux réticences des banques suisses à vouloir restituer la fortune de Duvalier et son clan.

La France a accordé, en 1986, un droit d’asile à l’ex-dictateur Jean Claude Duvalier, qui a emporté, dans ses valises, 900 millions de dollars des caisses de l’État. A ce jour, il n’est pas extradé.

La stratégie et l’implantation américaine dans la région remontent à loin et se sont amplifiées durant la guerre froide. Washington considère par ailleurs Haïti comme une arrière base face à son voisin Cuba. Les américains ont trouvé des alliés importants en la personne des dictateurs qui se sont succédé à la tête du pays. L’économie de Haïti a été démantelée à partir des années 70 au profit des entreprises américaines. Le soulèvement de la population dans les années 80 a amené au pouvoir le président Jean-Bertrand Aristide, qui a promis d’importantes réformes, notamment agraires qui auraient pris en charge des aides aux paysans pauvres, qui auraient construit de nouvelles infrastructures et ouvert le champ politique. Ce n’était pas du goût de l’établishment américain qui fomenta un coup d’État ayant chassé en 1991 le président Aristide. L’administration Clinton allait changer de position en envoyant des troupes sur l’île en 1994, afin d’assurer la réélection d’Aristide, dans la mesure où il promit la docilité. Or, une fois au pouvoir, ce dernier ne put accepter la feuille de route américaine et alla même jusqu’à demander aux USA 21 milliards de dollars d’indemnité pour le pillage de son pays. L’Amérique recourut alors à son arme fatale dans la région, imposant un embargo, qui a asphyxié l’économie haïtienne, et ce, avec la complicité des Nations Unies qui ont envoyé des troupes sur place. Vint alors un second coup d’État en douce contre Aristide qui allait amener au pouvoir le gouvernement de Gérard Latortue. Ce dernier a généralisé la corruption qui a notamment profité à son clan. L’élection de René Préval en 2006, en bénéficiant de l’image d’ancien allié d’Aristide, a suscité de l’espoir dans les couches sociales les plus pauvres, qui ont voté massivement pour lui. Mais l’illusion n’allait pas durer longtemps, la crise sociale s’étant amplifiée et l’appauvrissement galopant. Aristide est toujours en exil d’où il réclame son droit au retour et le droit pour son parti, Fanmi Lavalas, de participer aux élections.

Économie ruinée et lendemains incertains

Les différents plans d’ajustements structurels imposés par le FMI et la Banque Mondiale, qui servent plutôt l’intérêt des marchés occidentaux, ont ruiné l’agriculture de Haïti et sa paysannerie. Cette politique a provoqué en 2008 une grave crise alimentaire et plus d’instabilité politique. Le taux de chômage est d’environ 65% de la population active. Le secteur informel domine l’économie haïtienne et la majorité de la population vit avec moins d’un dollar par jour. L’exode rural de la paysannerie vers les villes, notamment à Port-au-Prince, allait voir l’avènement de bidonvilles et l’accentuation de la main-d’oeuvre bon marché. Le marché du textile, avec ses « ateliers à sueurs », est détenu par les entreprises américaines. La dégradation de la situation sociale, la déforestation massive, la destruction de l’agriculture paysanne, auxquelles se sont ajoutés les violents cyclones de 2004 et 2008, ont carrément ravagé le pays.

Il ressort des médias que la tragédie actuelle est de la seule faute du gouvernement, en oubliant d’expliquer les origines du désastre politique qui frappe ce pays. Présenter les bateaux de croisières comme transportant des sauveurs, revient à cacher l’autre image de ce pays offert à l’exotisme des étrangers, même dans les moment les plus terribles de son histoire. Présenter les USA avec leur flottes de guerre et la France comme sauveurs, c’est cacher la responsabilité de ces pays dans les drames d’Haïti. Les médias montrent les images des anges en kaki qui veilleraient sur l’ordre et une équitable distribution des aides. C’est ainsi qu’on s’achète bonne conscience en brandissant une bienveillance mondiale et un altruisme sans frontière. Dans la cacophonie médiatique, Sarkozy lâche une phrase et se querelle avec les USA. Puis, il se ravise. Le gâteau est minuscule, mais pourquoi pas arracher une part. Or l’oncle Sam ne cède rien, même pas un brin dans l’enfer.

Présenter les USA avec leur flottes de guerre et la France comme sauveurs, c’est cacher la responsabilité de ces pays dans les drames d’Haïti.

L’ingérence étrangère, l’imposition par les organismes internationaux de politiques sociales d’austérité, le changement du régime au grès des puissants sont rapidement dévoilés comme autant d’eau versée dans le moulin du drame même si les médias ne veulent faire tomber le masque. Dénué d’infrastructures adéquates, de services publics opérationnels, la catastrophe s’explique ainsi en grande partie par la situation sociale du pays. Haïti a besoin aujourd’hui d’une réelle solidarité planétaire, mais surtout d’une indépendance effective afin de se reconstruire et surmonter la douleur de son deuil.

Mohammed Yefsah

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