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Le droit du Capital contre le droit du Travail !

dimanche 30 août 2015

Le Medef et l’Etat veulent mettre entre parenthèse le droit du travail en France

A l’université d’été de la principale organisation patronale francaise, le Medef (Mouvement des entreprises de France), son dirigeant Robert Gattaz a exigé une réforme en profondeur « d’ici Noël » du droit du travail français. La veille de cette déclaration, le premier ministre Manuel Valls publiait dans le journal d’affaires Les Echos une tribune dans laquelle il déclare qu’il faut « repenser la façon d’aborder une règlementation du travail devenue trop complexe ».

Gattaz a expliqué la hâte avec laquelle il voulait cette réforme par la forte probabilité d’une crise économique majeure provoquée par la crise boursière chinoise. « La raison principale qui me fait penser qu’il faut accélérer les réformes c’est une crise asiatique ou chinoise », où « le reste du monde risque d’être affaibli ». Il avait « très peur de ce qui arriverait au bateau France » s’il n’a pas « colmaté les brêches et se retrouve à affronter une deuxième tempête du type subprimes dans six mois ou un an ».

Le gouvernement lui-même prépare une telle « réforme » du droit du travail depuis des mois. Il a commandité un rapport sur cette question rédigé par l’ancien conseiller d’Etat Jean-Denis Combroxelle, qui porte son nom. Valls attend beaucoup des « propositions audacieuses » faites dans ce rapport, qui doit être remis au mois de septembre. Combroxelle insiste sur la place prépondérante à donner aux accords au niveau de l’entreprise.

Les déclarations du Medef et du gouvernement sont le prélude à un assaut mené sur des droits fondamentaux des travailleurs en France, à l’image des mesures d’austérité imposées par l’Union européenne à la classe ouvrière en Grèce.

L’idée du Medef est essentiellement de remplacer la législation du travail existante par des accords faits au niveau des seules entreprises. Tant Gattaz, qui ne tarit pas d’invoquer « la peur » du patronat d’embaucher tant que les réformes resteront insuffisantes, que le gouvernement se servent du prétexte cynique de la « lutte contre le chômage » pour vendre leur attaque.

Les raisons invoquées par le gouvernement comme par le Medef sont l’amélioration de la compétitivité des entreprises françaises face à leurs rivales et la nécessité de renforcer l’attractivité de la France pour les investisseurs. Il s’agit en fait pour le patronat de retirer tous les obstacles posés par la législation du Travail à une exploitation et à des baisses de salaire sans limite, et à la destruction des conditions de travail et de la protection sociale des salariés. « Le gouvernement qui règlera ce problème entrera dans l’histoire », a dit Gattaz.

Le fait de baser les rapports du travail et les décisions, qui devront avoir force de loi, sur la seule entreprise, élimine les négociations tarifaires au niveau national et tente d’atomiser les travailleurs. Le salarié individuel ainsi isolé serait livré à l’arbitraire patronal, et le recours à des tribunaux du travail serait quasiment impossible. Mettre patron et salariés sur le même niveau au nom d’une liberté plus grande, comme le fait Valls, est de la pure escroquerie.

Le Medef dit vouloir « faire primer les accords d’entreprises sur la loi », et Gattaz insiste qu’il veut « des accords prioritaires mettant en priorité (sic) le dialogue social dans les entreprises ».

Discutant la proposition du Medef, Les Echos écrivent : « Un socle de droit resterait commun à tous les salariés... toute la question est de savoir quel est le périmètre de ce socle ».

Une telle mesure a le potentiel de remettre en question le rôle des syndicats au niveau national. C’est une question à laquelle le Medef et le gouvernement, qui comptent sur la collaboration des syndicats, réfléchissent. Gattaz a dit vouloir envoyer une lettre aux syndicats pour en discuter.

Cette offensive comporte un avertissement pour les travailleurs. Appliquées, ces mesures provoqueront inévitablement une large et forte résistance dans la classe ouvrière.

Mais cette résistance sera surtout confrontée au fait qu’elle devra s’organiser indépendamment des syndicats et des formations politiques existantes. Vis-à-vis des réformes proposées par le Medef, les syndicats n´ont au plus que des objections purement tactiques. Ils veulent maintenir leurs privilèges mais n’ont aucune opposition de principe à une dictature des patrons dans la vie économique, en France comme en Europe.

C’est pour cela qu’ils n’ont organisé aucune opposition sérieuse, ni aux mesures d’austérité et à la montée du chômage en France sous Hollande et le PS, ni à travers l’Europe avec les programmes d’austérité imposés par l’Union européenne.

Les nouvelles propositions sont lourdes de conséquences. Elles vont dans la direction d’une codification des rapports de classe tels qu’instituée par la Charte du travail du régime de Vichy, dont un des buts était de supprimer toute action commune des travailleurs et les atomisait de fait face à l’employeur au nom d’une égalité abstraite promise par l’Etat capitaliste.

Tant Gattaz que le gouvernement prennent pour référence un livre sorti au mois de juin, co-écrit par l’ancien garde des sceaux sous la présidence de François Mitterrand, Robert Badinter, et le professeur de droit du Travail et ex-président du Conseil constitutionnel Antoine Lyon-Caen. Le but du livre, intitulé Le travail et la loi, est prétendument de « simplifier le code du travail ».

Les visées du Medef ont été préparées par le rapport Combroxelle et le livre de Badinter et Lyon Caen. Le livre prétend remettre en lumière les “principes qui constituent les fondement” du Droit du Travail. Il réduit un Code du travail qui dans sa forme actuelle existe depuis 1973 à cinquante “principes” et une liste de “droits” censée protéger les salariés au niveau de l’entreprise qui, si acceptée, pourra servir de base juridique à une oblitération pure et simple du Code du travail.

Sous prétexte de ne laisser du code du travail que les “principes essentiels” on prépare sa mise en touche. Les “principes” sont énoncés par Badinter et Lyon-Caen d’une façon suffisamment vague pour laisser toute latitude à l’employeur de faire ce qu’il voudra.

Le président du Medef avait « salué l’initiative » lors de la sortie du livre en juin en ajoutant cyniquement que ses auteurs étaient de « grands personnages de gauche ».

Il a dit mercredi 26 août sur BFM-TV, « Ce qui est extraordinaire, c’est qu’il y a un consensus qui est en train de s’opérer entre économistes de gauche et de droite ». Il a ajouté, « L’accord d’entreprise devient prépondérant... Le dirigeant va pouvoir régler ses problèmes avec ses salariés et non pas par une loi de 3500 pages auxquelles personne comprend rien ».

Gattaz résume ainsi toute l’hostilité de l’aristocratie financière et du gouvernement PS aux droits démocratiques et sociaux des travailleurs.

Par Francis Dubois

Messages

  • Les stagières, jeunes étudiants qui travaillent pendant quelques semaines ou mois en entreprise, sont un bon exemple de ce que veut le patronat pour l’ensemble des salariés : 1 exploitation décomplexée, c"est à dire des employés qualifiés qui sont sous payés, et qui réalisent plus de travail qualifié ou non , qui sont extrêmement polyvalents, flexibles , ne prennent aucun congés car il n’y ont pas droit ou alors en échange d’un nombre d’heures supplémentaires non rémunérés.
    A l’heure actuelle, ces stagières sont payés entre 500 et 800 euros/mois et représentent 20% de l’effectif d’une entreprise pendant plusieurs mois par an, en France.
    La menace de se voir mal noté par le chef de service, est permanente. Les enseignants participent aussi à véhiculer l’idéologie ce type de rapports sociaux.
    La lutte de classe marque durement les premiers contacts de la jeunesse prolétaires, qu’on devienne ouvrières spécialisées ou ingénieurs.
    Les syndicats se fichent complètement de cette situation et laissent seul les stagières pendant que les matons en costard chemises les accueillent au son de : "bienvenu , vous le savez évidemment...vous êtes ici pour être exploités !" Paroles entendues par un stagière ingénieur en 1 er année de stage dit "ouvrier" dans une usine de fabrication de moteur d’avion, en juin 2015.

  • De quel droit des patrons licencient maintenant des salariés ayant refusé de travailler le dimanche comme à Cora alors que la loi avait juste autorisé les patrons à faire travailler des volontaires ?!!! 6,5 millions de salariés ont travaillé un dimanche en 2016 dont 3 millions de manière habituelle, selon la Dares. C’est-à-dire que trois millions et de mi de salariés se sont vus obligés de travailler le dimanche sous menace de licenciement !!!

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