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Où en est la lutte des sans-papiers en France ?

jeudi 7 janvier 2010

UN GRAND MEETING DE SANS-PAPIERS : A LA FOIS LEUR FORCE ET LEUR FAIBLESSE CAR ILS SONT LA POUR APPLAUDIR DES LEADERS SYNDICAUX AUTO-PROCLAMES ET NON POUR DECIDER EUX-MEMES DES PERSPECTIVES DE LEUR LUTTE CE QUI EST POURTANT LE SEUL MOYEN POUR QU’ELLE SOIT VICTORIEUSE

Intervention de Coulibaly Fousseyni ancien porte-parole de la grève des sans-papiers de Viry Chatillon (91) lors d’une assemblée syndicale le 21 novembre 2009

Mers chers camarades,

Après la victoire éclair et totale des sans papiers de Viry Chatillon qui s’était caractérisée par son auto-organisation (tracts rédigés par les grévistes, défense des sans-papiers par eux-mêmes, comité de grève, et victoire malgré la répression et l’absence de soutien des syndicats), il ne me semble pas que les leçons de ce type de mouvement soient suffisamment tirées dans les suites de la lutte des sans-papiers. Ils peuvent, comme tous les travailleurs, contrôler eux-mêmes leurs piquets de grève, leurs luttes et les perspectives de celles-ci malgré tous les appareils politiques et syndicaux qui ne sont pas du tout contrôlés, eux, par les travailleurs…

C’est l’Etat, et non les travailleurs, qui a plus que jamais besoin de ces « partenaires sociaux », ces médiateurs à double casquette, ces tampons sociaux pour qu’ils enlèvent la direction des luttes aux travailleurs eux-mêmes. Pour les canaliser et limiter les conséquences de leurs luttes. Pour les empêcher de prendre conscience de leur force et de s’organiser indépendamment. C’est cette organisation de classe indépendante (du pouvoir et des classes dirigeantes) que l’Etat et les exploiteurs ont toujours craint et cela qui les a amené il y a bien longtemps déjà à liquider les syndicats en tant que mode d’organisation des travailleurs pour la lutte de classe la plus déterminée, en tant que direction de la classe ouvrière.

Après l’expulsion des travailleurs sans-papiers de la bourse du travail de Paris par l’organisation CGT – que je condamne une nouvelle fois avec fermeté et indignation -, on peut voir les mêmes personnes se mêler à la danse, certes pour propager la gangrène bureaucratique et réformiste dans le syndicalisme et faire de ces travailleurs et de leur lutte un outil de travail pour leurs buts organisationnels et sociaux opposés à ceux des travailleurs.

C’est en expulsant les travailleurs sans-papiers de la Bourse du travail de Paris que la CGT avait dévoilé sa vraie face, action dont toute la violence et toute la honte revient au principal syndicat de France.

Suite à venir… du texte

Le mouvement évolue, alors que manifestement pour le gouvernement, l’affaire est pliée. La circulaire est publiée, maintenant, on revient à l’ordre. D’où la multiplication des évacuations, comme encore Mardi à Aulnay sous Bois, ou chaque fois qu’un site est occupé. On s’attend dans les jours qui viennent à d’autres expulsions, et particulièrement de toutes les occupations qui ne relèvent pas directement du droit de grève.
Dans le BTP, aujourd’hui la plupart des sites occupés par les isolés sont évacués et les camarades éparpillés. Les occupations d’entreprises se poursuivent, comme sur le chantier du Tramway, Porte des Lilas, avec toujours une belle détermination, malgré le froid vif qui devient un allié du gouvernement.
Dans l’intérim, il y a encore une forte mobilisation, et les délégués se retrouvent quotidiennement pour faire le point de la lutte, de nouvelles agences sont régulièrement occupées.

En province, toujours pas de vrai déblocage.

Le gouvernemenbt et le patronat ne céderont pas à la méthode de la CGT car celle-ci occupe les sans-papiers sans développer réellement leur lutte.

Et la suite du mouvement devra être donnée par des travailleurs s’organisant par eux-mêmes !!!

L’expulsion des sans-papiers de la Bourse du travail, à Paris, par ... la CGT

Un nouvel épisode de la lutte des sans-papiers :

le comité de grève des intérimaires sans-papiers de Viry-Chatillon,

un founou-founou* dans l’Essonne.

(juin 2008 - janvier 2009)

par Waraa

* un founou founou c’est un tourbillon d’air ou un petit cyclone

Avec 30 camarades sans-papiers, j’ai fait la grève de juin 2008 à janvier 2009. Je présente en ce début janvier 2009, à toi lecteur, avec ou sans-papiers, mes meilleurs voeux pour, comme dit le poète, la faim universelle, la soif universelle, nos sommets libres ...

Cher lecteur,
Une des particularités de la lutte des intérimaires sans-papiers de Viry-Châtillon est qu’elle a été dirigée par un comité de grève des travailleurs en lutte. Le protocole de fin de conflit a été signé le 5 janvier 2009 entre ce comité de grève et la direction de l’entreprise. Nous avons été capables de diriger notre lutte, de la gagner (30 régularisés sur 31), par nous-mêmes de bout en bout.
C’est parce que nous n’avons pas attendu des sauveurs (syndicats, associations, partis politiques), que nous nous sommes même opposés à eux lorsqu’ils ont voulu nous déposséder de la direction de notre lutte, la freiner, au nom de notre intérêt, que nous avons gagné. J’espère que l’histoire de cette lutte dans l’Essonne sera instructive pour les travailleurs, afin qu’ils dirigent eux-mêmes leurs luttes à venir. C’est une des conditions nécessaires à leur victoire.
Waraa, janvier 2009

Je vous présente quelques-uns des acteurs :
 Waraa, militant sans-papiers
 Bertrand, dirigeant syndicaliste
 Alexandre, militant révolutionnaire
 Chantale, dirigeante syndicaliste et élue locale
 Anne, militante associative
 Jacqueline, militante associative
 Pierre, écrivain et militant associatif religieux
 Bernadette, Maire et militante religieuse
 Abdel et Mouloud, syndicalistes

Merci à toutes les personnes qui sont passées nous soutenir sur le piquet de grève. Nos sincères hommages à l’une d’entre elles qui nous a quitté fin 2008. Je lui dédie cette brochure et la salue pour le courage qu’elle a montré face à la maladie qui ne l’a pas empêchée de participer à nos actions jusqu’au bout. Merci pour tout ce que tu fis pour nous, repose en paix.

Du Mali à Paris
Je m’appelle Waraa. Je suis né au Mali.
J’y ai étudié la comptabilité à l’Ecole Spéciale de Gestion et d’Administration des Affaires (ESGAF), puis occupé quelques emplois. J’ai fait partie de l’Association des élèves et étudiants du Mali et fut secrétaire général des Jeunes Panafricanistes de l’ESGAF.
Arrivé en France en 2001, je suis entré légalement avec un visa touristique.
Dès l’arrivée à l’aéroport, il m’a fallu trouver un endroit où dormir. Je me suis rendu au foyer de la Commanderie de la porte de la Villlette ou je fus hébergé par un compatriote. Le lendemain, je sortis comme les autres pour aller chercher du travail. Nous n’avions pas besoin d’aller trop loin. Des recruteurs venaient à proximité du foyer et nous emmenaient dans leurs camionnettes, pour aller travailler au noir.
Je travaillais à la journée. Je ne savais pas, le matin en me levant, si je trouverais du travail. Mon visa était valable pour un mois.
A Paris, j’ai été impressionné par tous ces trains souterrains, ces gratte-ciel, ces personnes venues de tous les continents, ces rues goudronnées. Bref, je me suis dit qu’il ne me restait plus qu’à chercher là où je pourrais trouver moi aussi un gros sac d’argent, le prendre et rentrer au Mali. Mais la réalité est très différente : l’argent ne va pas à tout le monde ; il est gardé, protégé à une échelle inimaginable, pour ne profiter qu’à certains. J’ai pas mis beaucoup de temps à voir l’écart entre la grande richesse et la grande pauvreté et cela m’a coupé le souffle, à commencer par ma propre situation de sans papiers, et celle de milliers d’autres personnes, avec ou sans papiers.

Un de mes premiers chantiers : la Bibliothèque François Mitterrand
J’ai travaillé pour une entreprise de nettoyage industriel sur le chantier de la Bibliothèque François Mitterrand, qui était en construction. L’entreprise appartenait à un tunisien, il faisait de la sous-traitance. Je lavais les vitres, transportais du matériel en le portant sur le dos, en montant et descendant à pieds huit étages.
En travaillant pendant trois mois, j’ai gagné un assez de sous pour me faire faire une fausse carte de séjour pour 1500 FF (environ 200 euros).
Sur le chantier de la Bibliothèque François Mitterrand j’ai été repéré par Armand, un Ivoirien. Son entreprise était aussi en sous-traitance avec la société TQ4, une des grandes entreprise de nettoyage en France. J’étais très mal payé et Armand disait avoir une proposition plus intéressante à me faire. Il m’a proposé de devenir chef d’équipe pour lui.
J’ai également travaillé à la Tour Gambetta à la gare de Lyon. Il me fit travailler dans le quartier d’affaire de La Défense, à la tour Le Coeur de La Défense. Ce chantier, sur lequel je travaillais donc en sous-traitance pour TQ4, appartenait à Bouygues.
Mon travail consistait à recruter d’autres sans-papiers qui, comme moi, avaient du mal à trouver du travail, à pointer les arrivées et les heures travaillées par les gars sur le chantier, à planifier leur travail. Les heures supplémentaires n’étaient pas payées.
Trois mois après, j’ai été embauché par une entreprise.
Quand j’ai quitté SP3.
Souvent, on travaillait 24 heures d’affilée. Je commençais à 7 heures du matin, finissais à 7 heures le lendemain matin, rentrais chez moi, puis le même jour revenais à 14 heures pour travailler jusqu’à 20 ou 21 heures, et recommencer à 7 heures le lendemain matin. TQ4 a fait venir d’autres boîtes de nettoyage en sous-traitance, car Bouygues voulait finir le chantier dans les délais, alors que du retard avait été pris. Une cinquantaine de sans-papiers furent recrutés pour accélérer le travail.
On n’avait pas de syndicat. Sur le chantier, nous étions quasiment tous Africains, dont deux maghrébins, l’un chef d’équipe et l’autre conducteur d’engins.
On a eu des problèmes de paye. Comme je l’ai dit, TQ4 avait le marché, mais il le sous-traitait à Tenlos, l’entreprise d’Armand. Parfois, Tenlos payait avec un retard d’un mois, sans fiche de paye, et le salaire n’était pas complet.
C’est là qu’un autre responsable de TQ4 m’a repéré. Un chargé d’affaire de cette entreprise voulait me recruter. Lors d’un entretien, ils se sont aperçus que je n’avais pas de papiers. Ils ne pouvaient donc pas m’intégrer dans l’équipe prévue. Cependant, le chargé d’affaire m’a proposé de travailler, avec ma fausse carte de séjour, pour une autre entreprise, qui soi-disant appartenait à son ami. Ils ont accepté de me recruter pour cette société.
C’était une société de démolition. J’ai fait des chantiers à Levallois, à la tour PB12, près de La Défense, et à Paris, près de la rue de Solférino, pour un chantier du grand groupe Petit.
Au total nous étions une quarantaine à travailler sur ces chantiers. Seuls deux ou trois avaient des papiers.
Nous travaillions toujours sous les cris des chefs. Pas le droit de répondre au téléphone. Impossible d’aller boire deux fois dans la journée sans avoir la remarque "Tu passes ta journée à aller boire !" En plus du poids du sac de gravats sur le dos, on devait supporter de se faire hurler dessus.
Sur un chantier, on nous a fait démolir des bâtiments pleins d’amiante. Sans aucune protection. Normalement, les bâtiments auraient du être désamiantés avant leur démolition. Et nous n’aurions dû intervenir qu’après le désamiantage. Dans les faits, on a détruit des bâtiments qui étaient en partie seulement désamiantés.
La responsabilité de la démolition était confiée à un ouvrier, chef d’équipe de fait... mais sans la paye correspondante. Et cela avec de multiples accidents. Il n’y avait aucune coordination entre les différentes équipes et les règles de sécurité n’étaient pas respectées. L’un d’entre nous a voulu soulever avec un pied de biche des cloisonnements de vitres. La vitre s’est brisée et un éclat l’a blessé au mollet. Il y avait du sang partout. Cela a nécessité l’intervention des pompiers. Les chefs ont demandé qu’on évacue les lieux et qu’on se cache. Ils nous ordonnaient de ne surtout pas décliner notre identité à l’inspection du travail, appelée par les pompiers. En effet, quand un inspecteur du travail arrive, il cherche habituellement les consignes de sécurité mais en plus, parfois, il peut faire un contrôle d’identité.
J’étais "chef d’équipe" du blessé. Je voulais témoigner et suis resté dans ce but, bien que n’ayant pas de papiers. Il n’y eut pas de contrôle d’identité. Le blessé, était le seul de l’étage à avoir des papiers. Je me permets au passage un petit saut vers le futur.
L’hypocrisie de l’Etat face au système des vrais-faux papiers.
Le nom que je lus sur les papiers du blessé, je le retrouvais cinq ans plus tard sur la liste des grévistes de chez G. dont je parlerai plus loin en détail. Or ce nom était trop rare pour qu’il s’agisse d’une coïncidence, c’était forcément le nom de la même personne. Mais le gréviste portant ce nom n’était pas le blessé du chantier. Je me permis donc de demander discrètement au camarade gréviste des nouvelles du blessé. Il me répondit qu’il travaillait toujours dans le Bâtiment, et qu’ils étaient plusieurs à travailler sous son identité, donc avec le même numéro de Sécurité Sociale et plusieurs cotisations mensuelles, chacun étant déclaré dans une entreprise distincte. Aucun ne peut faire un arrêt de travail à son nom, ni toucher des indemnités chômage, par peur de déclencher une enquête. Mais, bien sûr, sans enquête, les organisme de l’Etat qui sont concernés savent que plusieurs personnes travaillent sous la même identité, mais tant qu’il s’agit d’encaisser les cotisations, ça passe. Dans l’autre sens, quand il s’agirait de verser des prestations, des scrupules naissent, cela nécessite des enquêtes. Ceux qui travaillent sous une fausse identité remplissent tout de même une déclaration de revenus à leur vrai nom d’un montant de 0 euros pour laisser une trace de leur présence en France pour une année, document qui appuiera leur future demande de régularisation. Mais les revenus qu’ils ont reçus sous un faux nom sont inscrits sur la déclaration de revenus faite à ce nom. Cette déclaration fait donc apparaître plusieurs salaires d’une seule personne qui aurait travaillé au cours d’une même année, à temps plein, à temps partiel, en CDI, en CDD, pour différentes entreprises, et même dans une mairie. Les services de l’Etat savent qu’une seule personne ne peut travailler plus que 24 heures par jour, mais cela ne les gêne pas de participer à ces déclarations frauduleuses.
Nous partageons bien sûr l’impôt à payer avec le camarade qui nous prête son nom. Ce système fait que nous payons des impôts en permanence, sans pouvoir jamais recevoir les prestations auxquelles nous devrions avoir droit.
Revenons sur le chantier.
Mon premier licenciement : une sanction disciplinaire
Dans l’entreprise de démolition, j’avais un CDD d’un an. C’était mon premier contrat écrit. Face à tous les problèmes qui surgissaient entre salariés et chefs de chantier, je commençais à réagir. Un conducteur des travaux a repéré mes interventions ; il ne les appréciait pas. Je devenais pour lui un élément récalcitrant. Effectivement, je demandais des gants, des masques et je revendiquais que les règles de sécurité les plus élémentaires soient respectées. J’ai été licencié au bout d’un an et demi. Motif officiel : fin de chantier ; en réalité une sanction disciplinaire. J’avais fait des dizaines de chantiers.
Celui-ci se termina par un licenciement.
Tour Gambetta, Gare de Lyon
Je commence à chercher du travail par les boîtes d’intérim. L’une me propose d’aller faire du nettoyage industriel à la Tour Gambetta, Gare de Lyon, après présentation d’une simple photocopie d’une pièce d’identité française et sans certificat de travail. Ma feuille de mission remplie, rendez-vous est pris avec le patron, devant la tour Gambetta, Gare de Lyon. Nous sommes deux intérimaires. Le patron nous amène dans un local technique (au lieu d’un vestiaire), où nous nous changeons. Nous montons sur le toit de la tour de quatorze étages pour vérifier la nacelle. Nous recevons un talkie-walkie, moyen de prévenir la sécurité en cas de problème. Nous nous retrouvons à deux dans la nacelle et après une heure ou deux de nettoyage des vitres, la nacelle se bloque entre le 11ème et le 12ème étage, la commande de la nacelle ne fonctionnant plus. Nous ne pouvons plus ni monter ni descendre. Nous appelons la sécurité qui cherche pendant des heures une solution, en vain. Le patron est prévenu ; il arrive en hâte, courant dans tous les sens. Il semble inquiet. Nous sommes tous dans le pétrin, à différents points de vue. Sans papiers, je risque d’être placé en centre de rétention et expulsé. Lui risque d’être mis en cause : a-t-il fait respecter les consignes de sécurité, les vérifications techniques pour la nacelle, sait-il qu’il emploie un sans-papiers ? Il a raison de s’inquiéter car comme dit plus haut, la boîte d’intérim m’a envoyé sans m’avoir demandé de certificat de travail, ni mon habilitation à monter dans une nacelle. Finalement, des pompiers descendent par une corde jusque dans la nacelle, nous fixent des harnais et nous descendent le long d’une corde jusqu’au sol. Je ne suis jamais parti en vacances à la montagne, et j’ai eu là ma première aventure d’alpiniste. Je n’ai pas manqué de demander aux pompiers de m’envoyer leurs photos de la scène pour en garder un souvenir, ce qu’ils ont fait.
La boîte d’intérim a mis fin à ma mission, il a fallu que je me batte pendant une semaine pour que cette journée me soit payée.
Mon arrivée à G. comme intérimaire
J’ai cherché du travail dans une autre agence d’intérim, sur le boulevard Magenta, que j’ai surnommé boulevard de la honte, expression reprise dans le titre d’un article du journal Le Monde consacré à notre grève. Cette fois-ci je me présentais avec la carte d’identité française d’un cousin. Outre le cousin qui travaillait sur deux emplois (comme éboueur pour une mairie et dans une société de nettoyage), ses deux frères travaillaient déjà avec cette même carte d’identité.
Ils travaillaient comme moi dans le secteur du Bâtiment et des Travaux Publics.
Une boîte d’intérim m’a proposé d’aller travailler comme terrassier. On aurait dû me demander un certificat de travail, attestant de mon expérience dans ce métier. Je ne savais même pas ce qu’était un terrassier. Mais la boîte d’intérim ne me demanda rien. Etre terrassier, c’est simplement avoir la force de manier la pelle et la pioche. Le travail consistait à casser avec le marteau piqueur de 7 heures du matin jusqu’à 16 heures, et creuser des trous d’un mètre quatre-vingt toute la journée, 3 ou 4 trous par jour au minimum. Je commençais donc à travailler comme terrassier chez G. en 2004.
Conscient de la précarité de ma situation : intérimaire et sans-papiers, je devais non seulement ne pas me mettre à dos le chef de chantier, mais travailler deux fois plus que les autres et faire profil bas.
Le chef de chantier ne savait pas que j’étais sans-papiers.
Après deux ans, j’ai décidé d’arrêter de travailler sous le nom du cousin car j’avais finalement gagné la confiance du chef de chantier qui appréciait mon travail. J’ai recommencé à travailler avec la fausse pièce d’identité qui portait mon vrai nom. Ce changement de nom, du jour au lendemain, avec de faux papiers, au vu et au su de la boîte d’intérim et de mon chef de chantier, n’a posé aucun problème. Le chef de chantier disait qu’il allait s’arranger avec la boîte d’intérim, ce qui fut fait. Les collègues du chantier se sont eux aussi habitués très vite à mon nouveau nom, sous lequel je suis devenu aide-plombier. Je changeais des compteurs, des colliers, posais des paragrêles, faisais le tirage pour remplacer les tuyauteries en plomb. J’ai demandé une formation pour passer le CACES pour la conduite d’engins, que j’effectuais quand je faisais le tirage. Cette proposition n’a pas plu à la responsable de la boîte d’intérim qui m’a toujours dit que même si j’y avais droit, elle ne pouvait pas m’y envoyer, car je n’avais pas de papiers.
De plus, il y eut à partir de juillet 2007 un durcissement des contrôles sur les boîtes d’intérim, initié à cette époque par le ministère de l’immigration. Tout cela m’a conduit à être le premier sur les listes de ceux dont le CDD ne fut pas renouvelé.
Après trois ans et demi j’ai donc été licencié en 2007, sous prétexte que je n’avais pas de papiers.
Les contrats n’étaient pas établis avec exactitude. Ils étaient souvent signés tardivement, juste avant ou après la date de fin de contrat officielle. Ce système permettait de pouvoir nous licencier du jour au lendemain. C’était mon deuxième licenciement ; il était justifié verbalement par ma situation de sans-papiers. Les motifs invoqués dans les deux lettres de licenciement étaient : fin de contrat de chantier pour la première et fin de mission après trois ans et demi pour le deuxième.
C’était la goutte d’eau qui fit déborder le vase !
En route vers la grève
Le chef de chantier de chez G. m’a proposé de continuer en empruntant les vrais papiers de quelqu’un d’autre et en m’inscrivant dans une autre boîte d’intérim. Certains d’entre nous le firent. J’ai refusé pour ne pas simplement déplacer mon problème, car j’avais déjà demandé à mon conducteur de travaux de faire une démarche administrative pour ma régularisation. Sachant qu’il y avait beaucoup de sans-papiers qui pourraient prendre exemple sur ma demande, ils ont refusé de faire des démarches.
Finalement je me suis inscrit sous un troisième nom avec des vrais papiers d’emprunt dans une autre société du Bâtiment, TJFR, tout en restant en contact avec les camarades de chez G. qui avaient accepté de revenir travailler pour ce groupe sous un autre nom et en passant par une autre boîte d’intérim.
Je contactais également ceux qui avaient été licenciés comme moi pour leur demander d’agir.
J’ai proposé à tous ces camarades d’aller protester contre ces licenciement à la boîte d’intérim, pour dénoncer son hypocrisie, complice de celle du groupe G.. Mes camarades étaient d’accord sur le fond, mais redoutaient les représailles. Le 15 avril 2008 une vague d’occupation d’entreprises par les sans-papiers est organisée par l’UL CGT de Massy et l’association Droit Devant. Je saisis l’occasion du licenciement du plus ancien des intérimaires sans-papiers (10 années chez G.) pour allonger ma liste de contacts parmi les travailleurs sans-papiers de chez G. J’explique aux camarades que, si on ne fait rien, personne ne sera épargné par les licenciements, puisque le plus ancien lui-même était licencié, alors qu’il revenait chez G. sous un autre nom par le biais d’Adecco. C’est ainsi qu’ils prennent conscience qu’il faut rejoindre le mouvement des sans-papiers. Cela démontre l’espoir qu’a suscité ce mouvement, que nous étions très nombreux à vouloir rejoindre. Le moment était venu de mettre fin à toute cette hypocrisie.
Un autre coup s’était ajouté à tout cela, la mort de mon père.
La mort de mon père et autres tranches de vie de sans-papiers
Mon père était un ancien combattant de l’armée française. Non seulement il n’était pas favorable à mon départ pour la France, mais il tenait à m’expliquer que partir non seulement ne résoudrait pas mon problème, mais que j’allais repartir à zéro avec d’autres dans la même situation que moi.
Aujourd’hui mon père n’est plus, ce père qui s’est battu « pour la France » et reçut comme récompense une carte d’ancien combattant, délivrée par la France en 1982 à tous ceux qui ont servi l’armée française et un petit pécule comme pension. Il est décédé le 31 janvier 2008, ayant toujours en mémoire ses faits d’armes et ses séjours en France dans le cadre de ses missions.
On m’annonce le décès de mon père la nuit du jeudi. Je ne pouvais retenir mes larmes toute la nuit face à ce malheur et à ma condition de prisonnier français, privé de la liberté la plus élémentaire, qui est simplement la libre circulation, pour rendre un dernier hommage à mon père ! Le pire c’est que le matin, je devais reprendre le travail, me contenter simplement d’informer le chef de chantier que je venais de perdre mon père. Le chef m’a demandé de prendre mes congés le jour même, précisant que les jours me seront payés par la sécurité sociale. Simplement, il ne savait pas que je n’avais pas de papiers !
Je lui réponds "ça peut aller". Je ne lui ai pas dit que, travaillant sous un nom d’emprunt, il m’est impossible de fournir les justificatifs pour obtenir le congé, car je risquerais de perdre mon emploi. De ce fait, je reprends ma pelle et ma pioche, les larmes aux yeux. A chaque larme qui coule, mon coeur se durcit de colère aux souvenirs du père qui défilent sous mes yeux toute la journée.
De la prison où je vis depuis 8 ans, je me contente avec un coeur plein de douleur, de faire mes condoléances. Encore une fois, papa, que la terre te soit légère, ton fils, si loin et si triste, est près de toi. Ajoutez à cela l’accouchement de ma femme en 2006. Je travaillais chez G., mais je ne pouvais pas bénéficier de congés paternité. Cela aussi j’y avais renoncé. Quand je suis malade ou blessé, je suis obligé de serrer les dents. Cinq à six ans de travail, sans arrêt, sans congés ... nos chefs de chantier le savent très bien. Les indemnités chômage, je n’en rêve même pas ! Oui, c’est ça aussi la vie d’un travailleur sans-papiers. Privé de toutes les libertés : on se cache pour travailler, on se cache pour circuler, et on n’a pas le droit de se promener n’importe ou, n’importe quand, n’importe comment, car nous sommes des proies. Chaque sans-papiers est un prisonnier, et chaque prisonnier a une histoire, qui a besoin d’être racontée. Je me donne pour devoir de raconter celle de mes camarades de chez G., qui ne font pas exception à la règle. Voici des épisodes de la vie de deux d’entre eux.
Moussa est arrivé en France quand il avait 20 ans. Il en a aujourd’hui quarante. Il est toujours sans-papiers. Il a été expulsé trois fois. Il s’est retrouvé menotté, la bouche bâillonnée afin de l’empêcher d’interpeller les passagers de l’avion. Il est allé plusieurs fois en prison en France, quinze mois en tout, pour avoir résisté à d’autres tentatives d’expulsion. Comme les autres, il travaillait avec une fausse carte, et fut arrêté arbitrairement par la police, pour contrôle d’identité.
Moussa est finalement libéré, mais il écope de dix années d’interdiction de séjour sur le sol français. Tenez-vous bien, sous le coup de cette interdiction, Moussa travaillait. Il versait des cotisations sociales et il payait des impôts que l’état encaissait. Son interdiction de séjour a expiré en juin 2008. Quelle hypocrisie !
Ousmane, né à Sadiola dans une famille paysanne, fut attiré par la mine d’or de cette ville, exploitée par la SOMADEX (Société Malienne d’exploitation), filiale de Bouygues. Il y a travaillé comme manoeuvre parmi ces gigantesques machines qui dévorent les paysages, pour un maigre salaire qui permet juste de subsister. Le reste du fruit de la production va dans les poches de Bouygues et de ses partenaires maliens. La population ne reçoit que les dégâts sur l’environnement, la pollution. La population ne connaît pas encore tous les effets de ces produits chimiques. Il n’y pas d’hôpital digne de ce nom, de réseau routier etc... Ousmane a quitté son Sadiola natal malgré lui, mais s’est promis d’y retourner car, me disait-il, c’est à la jeunesse de faire la gloire de Sadiola, de la bâtir à son image. C’est Ousmane qui recevra les coups des cadres de G. et sera envoyé à l’hôpital.
Les préparatifs de la grève
J’ai décidé d’organiser une rencontre dans un café. Nous fûmes trois la première fois. J’avais une liste d’une quarantaine de camarades (comptés une seule fois chacun, malgré nos multiples identités !). Ils avaient donné leur accord pour se joindre à nous ultérieurement. Sur les conseils de syndicalistes rencontrés lors des manifestations qui ponctuaient le mouvement des sans-papiers, je suis passé, avec ma liste, à l’UL-CGT de Viry-Châtillon pour expliquer notre situation. Pouvaient-ils nous aider ? Pourrions-nous faire partie des entreprises occupées lors de la prochaine vague de grève ? Ils nous répondirent qu’ils ne pouvaient pas nous laisser partir en grève, car ils manquaient de militants pour piloter le mouvement.
Avec un camarade, nous avons assisté, au côté de 2000 autres sans-papiers le 12 juin, au grand meeting de la Halle Carpentier. Les orateurs, parmi eux Bertrand, annonçaient, sous les applaudissements enthousiastes des sans-papiers, une troisième vague de grève avec occupation. Comme d’autres, nous avons donc donné aux organisateurs le nom de notre entreprise avec la liste des sans-papiers prêts à l’occuper pour demander leur régularisation. J’étais heureux d’avoir un bon contact avec Bertrand, ce qui me donnait de l’espoir. Pour moi Bertrand était LE sauveur. Il m’a dit qu’il me rappellerait pour prendre rendez-vous. Il ne m’a pas rappelé. De même, j’ai recontacté à de nombreuses reprises, en vain, l’UL-CGT de Viry. Je tenais mes camarades informés chaque jour de mes démarches. N’ayant plus d’espoir dans la CGT, je contactai Droit-Devant, co-organisateur des deux vagues de grève et du meeting du 12 juin. Droit-Devant nous a proposé de passer les voir la semaine d’après, ce que nous avons fait. Une vingtaine d’entre nous a adhéré à leur association. Ils nous demandèrent de patienter et d’attendre que vienne notre tour pour nous mettre en grève. Je ne pouvais plus attendre et rester dépendant de leurs atermoiements. J’ai décidé de convoquer une assemblée des sans-papiers pour leur proposer de lancer nous-même notre mouvement.
Une Assemblée Générale s’est tenue le 28 juin dans un foyer de travailleurs africains, elle a réuni 38 camarades sans-papiers.
J’ai expliqué aux camarades que nous sommes simplement des travailleurs, la force vive de la société, une puissance qui ignore son pouvoir. Avoir peur des représailles aujourd’hui, c’est ignorer le fait qu’on souffre déjà de ces représailles.
Avant cette assemblée, j’avais adressé, le 23 juin, une lettre à la direction de l’entreprise du groupe pour l’informer de notre situation et solliciter une rencontre, en toute urgence, pour mettre fin à cette situation qui durait depuis 10 ans. Cette lettre était restée sans réponse.
J’expliquai aux gars que la CGT et Droit Devant ne pouvant pas nous aider, nous devions décider par nous-même de nous mettre en mouvement ou pas. Prenons l’initiative de la grève, les appareils nous suivrons ! Pour gagner notre liberté, qui n’a pas de prix, nous ne devons pas avoir peur de prendre des risques. Nous devons le faire pour nous, et nous servirons d’exemple pour ceux qui sont encore dans la crainte. Nous avons voté la grève avec occupation du site à Viry. Certains voulaient l’occupation des boîtes d’intérim. J’expliquai qu’occuper directement le siège de G. qui nous employait depuis 10 ans sans interruption aurait plus de poids que l’occupation dispersée des différentes boîtes d’intérim. Les syndicalistes nous avaient aussi conseillé d’occuper les boîtes d’intérim. Mais nous voulions mettre l’entreprise qui nous utilisait face à ses responsabilités. Nous avons décidé qu’à partir du lundi 30 juin nous occuperions le siège du groupe G. à Viry-Châtillon. Cette décision, comme toutes celles que nous avions prises ne devait être connue que de nos camarades.
La grève avec occupation commence
Lundi, personne ne devait rejoindre son chantier mais chacun devait se rendre à 6h45 devant la gare de Viry-Châtillon. Je demandais aux camarades de ne pas former d’attroupement devant la gare, mais de se séparer en petits groupes. Nous nous sommes retrouvés à une trentaine. Je suis parti avec deux camarades en reconnaissance vers le site situé à 300 m de la gare. Après inspection, nous demandons par téléphone portable aux camarades de venir nous rejoindre par petits groupes.
A 7h30 l’occupation a démarré. Nous nous tenions devant l’accueil avec neuf drapeaux CGT. J’ai été demander à la secrétaire d’informer la direction de notre présence : "Nous sommes des travailleurs sans-papiers du groupe G. en grève avec occupation du site."
Un DRH s’est présenté et a aussitôt pris contact avec un délégué syndical CGT de l’entreprise, Fernandez. J’avais déjà rencontré Fernandez qui, bien que se disant solidaire avec nous, n’avait pas agi. Une fois arrivé, Fernandez est invité par la direction pour parler de la situation. Ensuite Fernandez et la direction me demandent de proposer aux grévistes de s’installer dans le local syndical de Fernandez. Clairement, ils veulent protéger l’image de l’entreprise. Avec Samba et Boulai nous allons rencontrer la direction, pendant que les autres vont rejoindre le local syndical.
Pendant la négociation, la direction, par derrière, a appelé la police nationale. A la grande satisfaction de la direction, qui espérait peut-être que nous serions immédiatement menottés, deux policiers font irruption dans la salle de réunion. Un policier demande : qui est le responsable du mouvement ? Je me manifeste. Ils me demandent pourquoi nous manifestons sur la voie publique.
Je réponds que nous ne manifestons pas sur la voie publique. Nous sommes des travailleurs sans-papiers du groupe G., en grève pour demander notre régularisation. Très bien, répond-il, nous nous reverrons bientôt !
La direction nous demande la liste des grévistes. Nous leur communiquons 38 noms. La direction contacte les boîtes d’intérim concernées et les invite sur le site. Ils viennent le jour même. Le ton monte entre la direction de G., les boîtes d’intérim et nous. La direction feint de découvrir que nous avons utilisé de multiples identités : nous avons été abusés par les boîtes d’intérim, dit le DRH d’une entreprise de G. Il menace de porter plainte contre nous pour usurpation d’identité. Je réplique que, si nous avons pu changer 2 ou 3 fois de noms au vu et au su des boîtes d’intérim, des chefs de chantiers et des conducteurs de travaux, c’est que l’entreprise du groupe G. était complice de ces usurpations d’identité. Compte-tenu de la solidité de mes arguments, appuyés par des preuves, à ce jour, le groupe G. n’a jamais porté plainte contre nous pour usurpation d’identité. Les négociations continuent jusque tard dans la soirée. Puis, elles reprennent le lendemain et le surlendemain, du matin au soir. La direction fait l’historique des contrats de chaque salarié. Nous sommes tous des intérimaires. Elle propose finalement, en tenant compte de l’ancienneté, 12 requalifications en CDI, 12 CDD avec le groupe G., 7 autres CDD avec les boîtes d’intérim. Sur les 38 cas, seuls ceux des 31 grévistes présents sur le site sont donc étudiés. Nous refusons les 19 CDD.
Il a fallu l’intervention du PDG d’une des entreprises du groupe pour obtenir 12 autres CDI. Pour les 7 restants, la situation restait bloquée. La tension était montée en flèche, à plusieurs reprises, pendant les discussions.
Régulièrement, j’appelais Bertrand pour le tenir au courant de la situation. "Ah vous avez démarré ?", fut sa première réaction. "C’est bien, je vous soutiens". Il est venu après quelques jours d’occupation et a assisté à certaines négociations. Mais, une fois les 24 dossiers constitués, aucun syndicat ou association n’était plus présent pour nous accompagner déposer les dossiers à la Préfecture de l’Essonne. C’est même le PDG qui les a déposés, le 11 juillet.
Lors des négociations nous avons obtenu que les dossiers soient déposés collectivement à la préfecture de l’Essonne, et non dispersés selon nos lieux de résidence. Une fois les dossiers déposés, nous avons eu la visite du journal Le Parisien qui m’a interviewé. L’article qui est paru, a fait bondir la direction, qui exigeait de nous de la discrétion.
Le 14 juillet, nous avons eu la première visite de Jacqueline, de Droit-Devant et, vers le 16, la visite de Chantal, du syndicat CGT, pour les fiches de synthèses des dossiers déposés. Quelques jours plus tard, Chantal revient accompagnée d’un autre responsable de l’UD-CGT. Ils nous demandent de lever l’occupation du site, condition selon eux pour que nos dossiers soient traités. Nous refusons et leur demandons d’obtenir de la Préfecture une garantie écrite, seule condition pour que nous envisagions de reprendre le travail. Après notre refus, l’UD nous tourne le dos. Mais Bertrand continue à revenir nous voir de temps en temps.
Les conditions de l’occupation sont très difficiles : des cartons trouvés dans les poubelles pour dormir, à 20 dans un local de moins de 20 mètres-carrès et les autres dans la cage d’escalier qui mène à la cantine de l’entreprise, devant les toilettes, avec des couvertures qui ont déjà servi en 2006 aux travailleurs sans-papiers de Buffallo Grill. Et pour manger, on cotise 5 euros chacun pour aller acheter la nourriture dans un foyer africain à 20 km de là. Les repas arrivés, on mange debout, car nous n’avons qu’une seule table, qui nous sert aussi de bureau lors de nos réunions. Car, nous travaillons régulièrement sur nos dossiers. La cantine de l’entreprise est à quelques mètres de notre local. Les salariés du groupe nous voient manger debout les uns contre les autres et passent sans nous saluer, y compris les délégués syndicaux du groupe. Il y a des exceptions. L’une d’elle est Fatima qui, dès les premiers jours et pendant toute la grève, vient nous rendre visite après sa journée de travail. Ne pouvant plus cotiser chacun pour 5 euros tous les deux jours, ce qui avait couvert nos frais, nous commençons, après deux mois, à organiser des collectes. Les collectes sur le marché avaient parfois lieu sous la menace de la police qui nous demandait de quitter les lieux, car nous n’avons soi-disant pas le droit de distribuer des tracts ou de collecter de l’argent sans les syndicats. Nous n’avions que peu de tracts, car nous les tirions à nos frais. Nous avions pris contact avec les managers des restaurants des alentours (dont Mac Donald’s, KFC, etc) pour qu’ils nous donnent leurs restes du soir, en leur expliquant que nous étions en grève, que la direction misait sur l’épuisement de nos ressources en argent et en nourriture, afin que nous quittions les lieux. Ils n’ont pas accepté. A ce moment nous avons reçu le soutien de l’association d’Anne, d’Evry, qui avait déjà aidé les sans-papiers grévistes d’une entreprise de nettoyage urbain implantée dans cette ville.
Après plus de deux mois de grève, les sept dossiers restants n’avaient toujours pas pu être déposés, l’entreprise du groupe concernée refusant de remplir les deux CERFAs, formulaires indispensables pour les formalités. La raison invoquée par l’entreprise était que cinq ne totalisaient pas une ancienneté suffisante, et que les deux autres étaient des employés extérieurs. Une délégation s’est rendue à l’accueil de l’entreprise pour recueillir des informations sur ces deux dossiers, informant qu’elle ne quitterait pas ce bâtiment avant d’avoir été reçue par la direction. La direction a choisi l’épreuve de force, demandant à des cadres de l’entreprise de nous faire sortir manu militari, en ayant eu soin que cette scène ait lieu devant un huissier convoqué par ses soins. Nous résistons. Ils en viennent aux mains, coups de pieds, insultes. D’autres grévistes nous rejoignent pour s’interposer. Un des deux salariés concernés est blessé à la main, les pompiers l’évacuent vers l’hôpital, ou il reçoit 10 jours d’ITT (incapacité totale de travail). La police intervient, nous demande de sortir après avoir écouté la version des cadres. Nous refusons, demandons de rester pour faire entendre notre version des faits, et préciser que ce n’est pas à la police de décider de notre évacuation. Après le départ de la police la direction revient à la raison, et accepte de nous recevoir. La blessure du camarade nous a conduit à porter plainte contre la direction. Informée, la direction décide de faire les deux dossiers et s’associe à la négociation avec l’autre entreprise pour les 5 autres dossiers, à condition que nous retirions la plainte. La presse locale s’empare de cet incident, le relatant dans deux articles. La situation est enfin débloquée, les dossiers de tous les grévistes sont maintenant déposés en préfecture, après trois mois de grève !
Peu à peu, les régularisations arrivent. Une au bout d’un mois, puis 8 autres après deux mois. Une vingtaine en tout après 5 mois. Les convocations à la Préfecture restent angoissantes, car on ne sait pas toujours à quoi s’attendre : s’agit-il d’une régularisation, ou d’une arrestation ?
Le silence des élus locaux
Dès les premières semaines de l’occupation, nous avons adressé un courrier aux élus de Viry-Châtillon pour une demande de soutien, financier ou moral. Nous n’avons jamais eu de réponse. C’est pourquoi nous nous sommes déplacés à plusieurs reprises pour les rencontrer dans leur mairie.
En effet, dans cette lutte de sans-papiers le pire est de rester isolés et invisibles. C’est ce qui m’a poussé à continuer de tendre la main à tous les élus de l’Essonne. D’autant plus que nous avons travaillé pour leurs villes. Dans nos courriers de demande de soutien adressés à ces élus, on faisait allusion à la précarité de nos conditions d’occupation (on rappelait qu’on dormait sur des cartons ramassés dans les poubelles, sous les cages d’escalier sans-chauffage, même par terre, sur des tables, des chaises). Et tout cela simplement parce que nous exigions notre régularisation, pour vivre dans la légalité et le respect de nos droits en tant que travailleurs, ce qui est une simple exigence de justice sociale.
Nous nous disions que le premier soutien des travailleurs au sein d’une ville devrait être son maire. C’est ce qui nous motivait pour leur écrire, les appeler, nous déplacer jusqu’à leur mairie pour leur demander de venir sur le piquet nous soutenir. Ce soutien que nous cherchions n’était pas forcément matériel, financier ou alimentaire. Il était surtout moral. Mais nous l’avons cherché en vain ! Ces appels au secours étaient des cris dans le désert. Aucun coup de fil de la maire de Viry, pour prendre des informations, aucun élu ne vint spontanément sur le piquet. Chantal, qui faisait partie de l’équipe de la Maire, nous rendit visite, mais à titre de représentante de l’UD91, pour nous demander ensuite de lever l’occupation, puisque nos dossiers étaient déjà déposés en Préfecture ! Certes nous avons reçu une aide alimentaire pendant trois semaines, mais elle s’est interrompue sans que l’on sache pourquoi.
Des élus de Viry, vus lors des deux rencontres que nous avons eues avec la maire et son équipe, je ne peux garder que de mauvais souvenirs. Madame la maire tapait du poing sur la table en nous disant : "mais nous comprenons votre situation, elle est injuste. Mais ce problème des sans-papiers est un problème national. Nous ne pouvons pas nous mettre au-dessus de la loi. Les sans-papiers, nous les avons soutenus lors de l’occupation du restaurant B.G.". Non, madame la maire, ce n’est pas un problème national, mais international. C’est la précarité, la misère. Ces sont ces guerres impérialistes qui dévastent nos pays, en pillant leurs richesses qui nous font fuir. Et cette exploitation que nous subissons ici, vous en connaissez très bien la cause. Mais, je ne sais si vous la combattez ou la soutenez. Six mois de grève et d’occupation dans des conditions d’hygiène épouvantables, avec parfois des camarades qui tombent malades, avec seulement de l’aspirine pour les soigner. Ils disaient que cela leur suffisait. Mais je savais que c’était la fatigue, le stress, le sentiment d’abandon, d’injustice qui les frappaient, alors qu’ils avaient accompli leurs devoirs : travail, cotisations sociales, impôts nationaux ... et locaux (taxe d’habitation), Madame la maire ! ce dont les politiques ne veulent pas parler. Et Madame la maire nous disait qu’elle était au courant de toutes nos difficultés et même de l’incident qui avait conduit à la blessure d’un camarade évacué à l’hôpital de Juvisy, avec 10 jours d’ITT, l’incident évoqué par la presse locale. Elle nous disait être au courant des incidents par les journaux, et suivre l’évolution de la situation par l’intermédiaire de Chantal (que pourtant nous ne voyions plus depuis des semaines). Nous avons même été mieux accueillis dans une mairie de droite, dont le maire a reconnu l’absurdité de la situation des sans-papiers, y compris dans sa commune.
Face au même silence des élus de Grigny, la ville voisine, que nous sommes allés leur rendre visite à deux reprises, l’accueil fut plus chaleureux qu’à Viry. Ils étaient gênés, mais nous écoutaient et ne nous coupaient pas la parole. A l’issue de notre deuxième visite, nous avons eu des coups de fil et reçu douze lits de camps. Ils se sont engagés à soutenir les dossiers restants.
Dans l’Essonne, il existe un centre de rétention. Elus de l’Essonne, allez-vous laisser ceux qui, comme nous, construisent et entretiennent vos villes y être enfermés et expulsés ? Un de ceux qui a participé à la construction du centre de rétention du Mesnil-Amelot y a été placé par la suite ! Quelle horreur ! Dans ces centres passent des milliers de travailleurs, et même des enfants. Et nous qui n’y sommes pas encore placés ni expulsés, nous vivons dans une prison à ciel ouvert. Les droits de l’homme ne sont pas respectés dans les pays les plus pauvres, mais c’est aussi parce qu’ils ne le sont non plus en France, qui est dite être le pays des Droits de l’Homme.
La lutte des sans-papiers et la politique de la CGT
Ce qui a caractérisé la lutte des sans-papiers depuis le jour où ils ont décidé de cesser de se cacher et ont commencé, avec les "saint Bernard" en 1996, de manifester au grand jour, c’est d’affirmer une exigence claire : des papiers pour tous ! Par la suite, dans toutes la manifestations, les sans-papiers et ceux qui luttent avec eux ont affirmé haut et clair : « Le cas par cas, on n’en veut pas ! »
Ce qui a étonné les sans papiers engagés dans les grèves pour des papiers, c’est que cette affirmation était battue en brèche, non par le pouvoir, mais par des organisations -syndicats, associations et partis politiques - qui étaient censés militer à leurs côtés.
Si les sans-papiers de Viry-Chatillon ont été amenés à s’organiser indépendamment en comité, c’est que les organisations qui menaient cette lutte ont refusé de les soutenir et, pire, ont considéré que leurs dossiers n’étaient même pas déposables !
La CGT, en particulier, du moins celle qui participait à cette lutte - puisque l’essentiel de la CGT n’y participait même pas - a eu un espèce de monopole des relations avec le pouvoir pour déposer des dossiers, au nom duquel la CGT avait accepté des critères pour prendre les dossiers plus restrictifs que les critères légaux. Cela signifiait que des travailleurs isolés, seuls en grève, ou dans de petites entreprises, n’ayant travaillé qu’en intérim ou ne satisfaisant pas pour une raison ou une autre aux critères établis par la CGT se voyaient refusé leur dossier, non par la préfecture mais, par avance, par… la CGT ou les militants qui agissaient à ses côtés !
La meilleure preuve du fait que la CGT était en dessous de la loi, c’est qu’elle a refusé les grévistes de Viry-Chatillon, alors qu’ils ont obtenu satisfaction par la lutte et sans passer par la CGT.
Bien des sans papiers sont reconnaissants à la CGT d’avoir pris la tête de la lutte mais ils ne savent pas que la véritable force, celle que craignait le pouvoir, ce n’était pas la force de la CGT mais la force des sans papiers en lutte. Ce que craignait particulièrement le pouvoir, c’est que les salariés s’organisent indépendamment. C’est cela qui a donné un créneau à la CGT pour prendre la tête de la lutte sans du tout se mettre à dos patrons et gouvernement, au contraire. Mais, ce faisant, ils n’agissaient pas véritablement dans l’intérêt des travailleurs puisqu’ils les empêchaient de prendre conscience de leur force et de s’organiser.
Après deux mois d’occupation, nous avons reçu la visite d’Alexandre qui a été le premier à me demander si je savais quelque chose sur la révolte du peuple malien en 1991 contre le dictateur Moussa Traoré. Alexandre était le premier à approuver que les travailleurs s’organisent eux-mêmes, mais, cela nous allions le réaliser progressivement. Nous avions déjà commencé à organiser nous-mêmes le piquet de grève sans être dirigés par un syndicat ou une association, à négocier nous-mêmes avec la direction et à rédiger et distribuer nos tracts. Nous avons mis sur pied la répartition des tâches de piquer, de repas, d’accueil sur le piquet, la trésorerie et les parties occupées du siège. Il y avait cinq d’entre nous à l’entrée, cinq à la sortie, cinq à l’accueil, cinq devant le local syndical et la pharmacie. Les tracts écrits étaient proposés à l’assemblée et, une fois adoptés, étaient tirés et signés du « collectif des travailleurs sans-papiers de Viry-Chatillon ». En utilisant la reprographie de son entreprise, Alexandre a pu nous tirer quelques milliers de tracts. J’ai repris le texte complet d’un tract que j’avais écrit auparavant, mais que l’UD avait censuré, et on l’a imprimé après l’avoir transformé. Comme depuis deux mois nous dirigions notre grève par nous-même, Alexandre, qui voyait cela d’un bon œil, nous suggéra que ces tracts soient signés "Comité de grève des sans-papiers du groupe G., site de Viry-Châtillon". C’est ce que nous avons fait sans encore mesurer l’importance et les conséquences de ce geste, - l’importance même du mot - même si Alexandre nous avait déjà prévenu que nous faisions un geste important qui allait susciter de nombreuses réactions hostilités de la part des « soutiens ».
Un comité de grève, ce n’est pas rien…
Nous avons donc été amenés à fonder un comité de grève parce que nous nous dirigions déjà nous-mêmes, et cela parce que ceux dont nous attendions une aide d’organisation nous avaient dit d’arrêter notre lutte, que ce soit des syndicats, des associations, des élus, et des militants politiques, y compris ceux de gauche ou de la gauche de la gauche … Tous voulaient nous convaincre que nous ne correspondions pas aux critères, que nous devions cesser la grève, cesser de populariser notre lutte, cesser d’interpeller tout le monde, etc…
Du coup, nous étions bien obligés de nous organiser nous-mêmes. Mais nous n’imaginions pas à quel point la formation d’un comité de grève, et parfois ce nom lui seul, allait susciter de réactions violentes de la part de tous ces gens-là.
Bien des grévistes, sous la pression de tous ceux qui auraient dû soutenir notre lutte, ont hésité et des conflits en sont sortis. L’importance d’être organisés en comité de travailleurs n’apparaît pas du tout comme quelque chose qui va de soi, que les travailleurs doivent défendre à tout prix. Et pourtant, c’est de cela qu’il s’agit. C’est du soutien que va venir l’attaque contre notre organisation.
Nous n’avons pas attendu des sauveurs (syndicats, associations, partis politiques). Nous nous sommes même opposés à eux lorsqu’ils ont voulu nous déposséder de la direction de notre lutte, la freiner, au nom de notre intérêt. Je pense que c’est parce que nous avons agi ainsi que nous avons gagné. J’espère que l’histoire de cette lutte dans l’Essonne sera instructive pour les travailleurs, afin qu’ils dirigent eux-mêmes leurs luttes à venir.
Il est important de comprendre que, même si les travailleurs ne la soutiennent pas spontanément, même s’ils la craignent, cette idée doit être défendue avec acharnement. Elle seule est la garantie que les travailleurs mènent eux-mêmes la lutte jusqu’au terme qu’eux-mêmes auront fixé et pour les objectifs qui soient vraiment les leurs.
Pourquoi les travailleurs eux-mêmes craignent de s’organiser en comités ? Parce qu’ils n’assument pas d’affirmer qu’ils sont eux-mêmes la force. Ils acceptent que les organisations les traitent en assistés et parfois, ils demandent aux organisations qui prétendent les soutenir un tel paternalisme.
Nous organiser nous-mêmes, c’est le pas fondamental. Rappelons nous la Commune de Paris de 1871 dont Engels disait :
« Le philistin social-démocrate a une fois de plus été envahi par une terrible frayeur à la prononciation des mots ¨dictature du prolétariat¨. Eh bien, messieurs, voulez-vous savoir à quoi ressemble cette dictature ? Regardez la Commune de Paris, c’était cela la dictature du prolétariat. »
Lorsque les travailleurs s’organisent eux-mêmes, ce n’est pas rien et les réformistes de tous poils se sentant attaqués, réagissent violemment, qu’ils soient des syndicalistes, des associatifs ou des militants politiques.
J’ai déjà fait allusion à la révolte populaire du Mali en 1991. Il faut que je fasse une petite parenthèse là-dessus.
L’insurrection au Mali en 1991 et la chute de Moussa Traore
Le lieutenant Moussa Traoré a pris le pouvoir en novembre 1968, déposant le premier président du Mali, Modibo Keita. Il va régner pendant 23 ans sans partage sur le pays. Le parti unique, UDPM, va dominer le Mali jusqu’au 26 mars 1991. C’est la révolte populaire qui va les faire chuter. Le climat social est à la révolte dès 1990. La misère a atteint un niveau insupportable. On a vu un directeur d’école démonter le plafond d’une salle de classe pour la revendre afin de nourrir sa famille. La peur du régime, qui emprisonne et torture, a été telle pendant toutes ces années que les opposants osent à peine parler entre eux.
Mais la révolte est telle que la peur va tomber. L’Association des Elèves et Etudiants du Mali, après la répression de 1979, se réveille de longues années de silence et de soumission. AEEM et Comité National d’Initiative pour la Démocratie appellent à une manifestation pour le multipartisme le 10 décembre 1990. Plus de dix mille manifestants répondent à l’appel. C’est la plus grande manifestation jamais organisée au Mali sous le régime de Moussa Traoré. La manifestation se déroule pacifiquement dans la capitale Bamako, mais le pouvoir n’entend pas reculer. Les organisateurs et les manifestants non plus. Le 24 janvier 1991, ils appellent à une nouvelle manifestation qui va enclencher le cycle des affrontements se terminant par la chute du dictateur. Les manifestants bloquent la route et saccagent les édifices publics. Les forces de l’ordre ouvrent le feu sur les manifestants faisant de nombreux morts et blessés. Le 25 janvier, des chars sont déployés contre les manifestants et les écoles sont fermées. Le 28 janvier, à la nouvelle de l’arrestation de plusieurs élèves et étudiants, dont le secrétaire général de l’AEEM, Oumar Mariko, le mouvement explose en insurrection de toute la jeunesse, englobant celle des quartiers populaires. Ces derniers, tout particulièrement les jeunes chômeurs, armés de bâtons et de pierres, envahissent les rues de la capitale, brûlent des magasins et des édifices publics, ainsi que des voitures. Les résidences de plusieurs membres du gouvernement et du parti unique, dont celle du directeur général des douanes, beau-frère du président Traoré, sont entièrement saccagées. A partir de ce moment, les émeutes se multiplient tous les jours dans Bamako, où les manifestants érigent des barricades. Cette situation se propage aux villes de province. Les morts de manifestants et le nombre de blessés ne cessent de croître tous les jours. Le 29 janvier, ce sont des centaines de manifestants arrêtés qui ont été torturés, dont une douzaine d’enfants de moins de douze ans. Le général-président a annoncé que l’interdiction aux associations de faire de la politique est levée, mais cela ne diminue pas la pression de la rue. L’AEEM revendique la libération de tous les emprisonnés.
Le 22 mars 1991, les émeutes reprennent à Bamako. De violentes manifestations parcourent la capitale. Les forces de l’ordre tirent à balles réelles et tuent. C’est un véritable carnage à la mitraillette et à la grenade offensive. La guerre est déclarée par le pouvoir aux jeunes manifestants qui enflamment le ministère de l’emploi. Le 23 mars, la jeunesse scolarisée est rejointe dans la révolte par les chômeurs et les travailleurs. Les travailleurs de la COMATEX, dont le dictateur-président a dit, avec une expression de profond mépris, qu’ils ne savent même pas qui ils sont, ont arrêté le travail. Les émeutes s’étendent à l’ensemble du pays. Des répressions violentes ont lieu à Sikasso et Diola. Certains policiers se font lyncher. Le centre commercial de Bamako est le siège d’un véritable carnage. Tout ce qui appartient aux responsables du régime est saccagé. Les commerçants sont attaqués eux aussi. Les morts continuent de tomber, mais, cette fois, la foule ne recule plus devant les forces de l’ordre.
Les jours suivants, les manifestations continuent, s’attaquant à la BIRD et à la Banque Mondiale de Bamako. L’hôtel de ville est saccagé. Deux dignitaires proches de l’ancien président ont été lynchés par la foule en colère. Le 29 mars, des villas de dignitaires sont pillées. L’Etat d’urgence a été décrété dans les villes du Mali. Le bilan est de nombreux manifestant morts et de centaines de blessés graves qui ont les membres déchiquetés. Le chef de l’Etat lance un appel au calme et affirme sa « totale disponibilité pour une dialogue et une consultation et pour trouver des solutions durables des différents problèmes ». Les manifestants répondent « C’est terminé. On ira jusqu’au bout. » Il y a déjà un bilan de plusieurs centaines de morts. La grève générale commence, paralysant le pays. Les mères de famille, révoltées que leurs enfants soient tués comme des lapins, s’attaquent à mains nues à la présidence à Coulouba. Le général-président leur barre la route avec des blindés. Mais l’armée ne marche plus et on est à un doigt d’une grave mutinerie. Affirmant agir en coordination avec les organisations démocratiques, les militaires déposent la dictature de Moussa Traoré et prennent le pouvoir le 27 mars 1991.
Pour permettre d’évoquer la profondeur de la révolte du peuple malien, ce qui se passe après des années d’oppression, des années de peur, de souffrances, quand tout un peuple dit que cela suffit, quand toute la haine que le régime a suscité se retourne contre lui, je souhaiterais rajouter quelques mots sur ce fameux « article 320 » né de cette révolte contre la dictature de Moussa Traoré, en 1991. Alors que chacun avait vécu un régime de terreur au point que nul n’imaginait la chute d’un tel régime, la peur avait changé brutalement de camp… Certains ministres ont préféré se donner la mort plutôt que de se faire arrêter par les manifestants. Les corps étaient trimbalés dans les rues de Bamako. Le ministre de l’Enseignement fut arrêté et découpé en morceaux, puis son corps brûlé devant l’hôpital central de Bamako.
Il faut préciser à tous ceux qui ne l’ont pas vécu ce qu’est l’article 320, allusion aux articles au nom desquels le régime arrêtait, torturait, faisait disparaître ses ennemis, opposants, syndicalistes, jeunes, …
Ce que les manifestants appelaient « article 320 », c’est qu’on achetait pour 300 francs CFA un litre d’essence et 20 francs CFA pour une boite d’allumettes – ce qui faisait en tout 320 francs CFA pour en finir avec des démons, des ennemis des travailleurs et des jeunes qui n’avaient jamais eu la moindre pitié pour le peuple malien.
La prise de la prison centrale a permis de libérer les prisonniers. Toutes ces scènes ont été vécues par des milliers de gens mais elles ont été camouflées, ou déformées, par tous les média pro-occidentaux qui avaient toujours soutenu le régime d’oppression de Moussa Traoré qui était au service des grandes puissances impérialistes.
Bien entendu, ces média internationaux, comme les régimes des pays riches n’avaient aucun intérêt à montrer comment un peuple esclavagisé pouvait se transformer du jour au lendemain en lions que rien ne pouvait arrêter, pas même de verser le sang des oppresseurs, jusqu’à ce qu’à la chute du régime.
Mais ce n’était que le début d’un combat pour en finir avec toute dictature…
Qu’est-ce qui a manqué pour aller plus loin ? Certainement, c’est le manque d’organisation des opprimés : des femmes, des jeunes, des travailleurs. Comme ici en France, l’absence de tradition d’organisation se paie cher. Ce sont des comités des combattants, des exploités qui ont manqué.
A Viry, on avait donc décidé de nous organiser en comité de grève … et ce n’était pas sans susciter des réactions…
Un comité de soutien : le loup dans la bergerie
Il y a eu plusieurs incidents qui ont commencé à me montrer que nous allions dans un sens qui ne plaisait plus aux soutiens. Un jour, Bertrand a rencontré Alexandre au piquet. Comme Alexandre soutenait l’idée du comité de grève, Bertrand m’a pris à part pour m’expliquer qu’Alexandre ne devait pas rester au piquet de grève : « Eloignez ce mec du piquet, c’est un agitateur ». En fait, Alexandre était militant CGT en même temps que militant révolutionnaire. J’ai commencé à comprendre pourquoi Bertrand, et bien d’autres, ne voulaient pas que nous nous organisions en comité de grève.
Il faut rappeler les circonstances. Nous affrontons l’hiver dans ces conditions rudes, les coeurs serrés et grelottant de froid de jour comme de nuit, mais avec un seul mot d’ordre jusqu’à la victoire : notre unité. Quand soudain, les sociaux-démocrates ont cherché à infiltrer le comité de grève.
Par sociaux-démocrates, j’entends ici les ennemis politiques des travailleurs, déguisés en amis, politique, syndical et associatif, des travailleurs.
Ils formèrent sur le piquet un relais des dirigeants politiques et syndicaux locaux qui n’avaient pas réussi à arrêter l’ouragan. Sous la forme d’un Comité de Soutien, ils ont cherché à se substituer au comité de grève pour prendre la direction du mouvement afin de l’étouffer. Ce comité de soutien formalisé le 1er novembre était leur outil de travail. Ils se servaient de notre lutte pour faire de la publicité à leurs organisations, se servant de nous comme des hommes sandwich. Ils nous dissuadaient d’interpeller les élus de l’Essonne. Ces manifestations seraient soi-disant contre productives, comme disait Bertrand et certains membres du comité de soutien. Au fond des choses, ils souhaitaient que nous restions cloîtrés dans le silence. Quand je leur expliquai que le comité de grève reste au dessus de tout, cela leur déplaisait, même s’ils répondaient démagogiquement : "bien sûr", avec un sourire.
Ce sont de très bons acteurs, je ne comprenais pas au début pourquoi Alexandre m’avait dit que j’introduisais le loup dans la bergerie. Camarades, si de cette brochure vous retenez une chose, c’est j’espère apprendre à repérer ces faux qui sont pires que des adversaires, et à ne jamais lâcher la direction de votre lutte. Que ceux qui veulent vous soutenir se mettent individuellement aux ordres du comité de grève. Vos camarades auront du mal à comprendre pourquoi vous vous opposez à ces "camarades" si sympathiques ! Mais c’est votre devoir de combattant dans une lutte de le faire, dans l’intérêt de vos camarades qui ne comprendront pas forcément que vous appeliez "ennemi invisible" celui qu’ils voient comme leur ami, leur sauveur. Vous serez peut-être traité de dictateur, mais c’est le seul chemin qui vous permettra de tenir la barre jusqu’à la victoire. Nous avons fini par dissoudre ce comité de soutien. J’aurais dû dès le départ m’opposer à sa mise en place. Le bateau du comité de grève a tangué, mais nous avons remis ces pirates dans leur petite chaloupe, qui retourna surfer sur le web. Le complexe d’infériorité des travailleurs sans-papiers doit disparaître pour céder la place à leur unité. Pour ceux qui pensent que les travailleurs sans-papiers sont des travailleurs fragiles, incapable de gérer leurs luttes, nous avons été un contre-exemple.
Au départ, moi comme chacun de mes camarades, nous n’avions vu aucun problème à la manière dont « le soutien » pouvait interférer dans notre lutte. C’est l’expérience qui m’a montré que c’était loin d’être aussi simple. Les travailleurs, comme ceux qui affirment vouloir seulement les aider, défendent des buts, des conceptions, des objectifs plus ou moins clairement, plus ou moins consciemment. Pour les travailleurs, c’est souvent la première expérience alors que les militants du soutien savent où ils veulent en venir et ce qu’ils ne veulent pas. Et « le soutien » entendait non seulement proposer, convaincre, mais même imposer ses conceptions aux travailleurs en lutte. Parmi « les soutiens », il y avait des réformistes, des religieux, des syndicalistes, des maoïstes, des communistes révolutionnaires, etc, etc. Les désaccords avec « les soutiens » se sont révélés profonds, philosophiques même. Certains s’interrogeront sans doute sur ce que vient faire la philo là-dedans. Bien sûr, chacun vient à la lutte avec sa propre façon de défendre ce qu’il pense et cela pose des tas de problèmes mais, lorsqu’ils sont partie prenante du combat, cela est très différent. La lutte peut rassembler des gens d’horizons très divers avec un but commun et les aléas de la lutte montrent à chacun quelle conception choisir. Mais justement, dans les conceptions philosophiques qui nous ont opposé au soutien, il y a justement ces fameux buts et conceptions communes. Ainsi, je pense que le comité de grève, c’est-à-dire une organisation indépendante des travailleurs en lutte, est incompatible avec les conceptions de toutes les autres organisations traditionnelles. Celles-ci cachent derrière leurs buts organisationnels, leurs objectifs derrière des idéologies qui combattent, dominent, écrasent, divisent, trahissent toute les luttes des exploités. Leur idéologie, c’est d’abord l’idée que nous sommes de pauvres travailleurs qui ont besoin de leur paternalisme, qui ne sauront pas se diriger eux-mêmes, qui ne sauront que nous faire tromper ou exploser de colère sans but, que nous avons besoin d’organisations qui écrivent à notre place, qui soient nos contacts avec l’administration et que nous serions en somme des malheureux faisant de la peine et trop heureux que l’on prenne des décisions à leur place !!! Certains travailleurs, y compris des travailleurs qui ont la nationalité, ont des papiers et un emploi, ont tendance à accepter ce rôle, tant qu’ils ne voient pas que cela nuit considérablement à leur cause et que cela détourne leur combat de ses vrais objectifs.
Cette lutte, pour moi, a été plus que riche. Dans le fond, on a lutté, on a gagné, difficilement, mais on a gagné quand même. Mais dans le fond, dans cette lutte pour de simples droits démocratiques, je me suis demandé : comment ça se fait que des personnes engagées comme Alexandre, des militants communistes révolutionnaires qui militent pour l’abolition des frontières entre les pays, pour un monde sans papiers, pour l’égalité de fait sur l’économie du monde qui ne peut se faire qu’en expropriant les grands détenteurs des richesses du mondes par les exploités, pour l’égalité des sexe, pour l’abolition des classes sociales au niveau mondial, etc, etc, bref comment cela se fait, que, contrairement aux réformistes, il se trouve aux côtés des ouvriers sans papiers, qu’il les aide sans chercher à parler, à agir à leur place, qu’il défend par exemple un comité de grève des sans papiers, dirigé par eux-mêmes, tire des tracts écrits par eux-mêmes, etc, etc… Mes amis, ces questions m’ont fait énormément de bien, parce que j’ai compris qu’avoir des idées et les défendre, c’est important à une échelle incroyable. Et la première de ces idées est : travailleurs, défendez-vous vous-mêmes. Personne ne peut rien faire pour vous à votre place !
Travailleurs de tous les pays, avec ou sans-papiers, à vos marques, unissons-nous !
« J’ignore où se livrera le combat entre le vieux monde et le nouveau, mais peu importe : j’y serai. Que ce soit à Rome, à Berlin, à Moscou, je n’en sais rien, j’irai et sans doute bien d’autres aussi. Et quelque part que ce soit, l’étincelle gagnera le monde ; les foules seront debout, prêtes à secouer les vermines de leurs crinières de lions. », comme l’écrivait la révolutionnaire Louise Michel dans ses « Mémoires ».

Enfin la victoire !
Le centième jour d’occupation, on a pris soin d’inviter une animatrice de la radio F.P.P. à l’assemblée générale ainsi que certains cadres de chez G. qui n’ont pas répondu à l’invitation par peur des représailles de la part de leurs directions respectives. Ce centième jour était l’un des moments les plus déterminants de l’occupation, nous subissions en effet une énorme pression morale, suite à la menace d’expulsion transmise par un courrier adressé par la direction à chacun d’entre nous. Moralement éprouvés, physiquement à bout, sous-alimentés, squelettiques, certains étant sous contrôle médical, nous devions subir en plus la pression due au fait qu’il fallait payer nos loyers, payer les tickets de transport pour aller nous changer à la maison. Les taxes d’habitation tombaient également à ce moment.
Après 6 mois de grève, nous avons gagné : 30 sur 31 grévistes ont été régularisés.
"Je suis enfin un homme libre me dit, les larmes aux yeux, l’un d’entre eux. Après 8 années de clandestinité, je pourrai enfin aller voir ma femme et mes enfants au pays, relever la tête et être fier de moi. Il était temps de mener cette lutte."
Oui mon cher camarade, mieux vaut tard que jamais. Mais simplement si nous la classe pauvre, les misérables de la société, les inférieurs, les humiliés, les exploités, nous les travailleurs avec ou sans-papiers, si on pouvait simplement se rendre compte de notre puissance au sein de la société, on se serait servi depuis longtemps de ce pouvoir pour redresser toutes les barres.

Conclusion et bilan
Nous qui avons fui nos pays respectifs, assiégés par les impérialo-capitalistes, ou dont les Etats sont en guerre pour leurs intérêts et pas pour ceux des peuples, nous nous sommes retrouvés dans un monde sans droit. Car quels sont les nôtres ?
Après avoir traversé la Méditerranée au risque de nos vies, même si nous venons d’un pays en état de guerre, il n’est pas facile d’obtenir en Europe le fameux statut de réfugié. Un tel refus est-il acceptable ? Michel Rocard a dit que la France ne peut accueillir toute la misère du monde, sans poser la question de l’origine de cette misère. Mais les politiques comme lui connaissent la cause de cette misère. C’est l’impérialisme qu’ils défendent. Ils nous claquent les portes par-ci par-là. On a même du mal à se faire soigner, à obtenir les droits élémentaires. Mais aux aéroports, à l’Elysée, à Matignon, ils déroulent le tapis rouge à nos dirigeants, pour des négociations confidentielles et souterraines ! Que font-ils d’autre ensemble ? En tout cas ils ne parlent pas des droits des sans-papiers expulsés, des anciens combattants, pas des droits des travailleurs qui voudraient bénéficier de leur retraite en rentrant « au pays », pas non plus de faire la lumière sur le cas des sans-papiers qui laissent leur vie dans les centres de rétention ou dans les bavures policières. Sinon Hortefeux ne se serait pas vanté de son score de personnes expulsées par la force, avec une fierté à rougir pour longtemps. Cette situation est non seulement une réalité mais est devenue une banalité, car la presse relate régulièrement ces expulsions, ces bavures, ces morts, les incidents dans les centres de rétention. Aux membres des classes dirigeantes, aux bourgeois, à leurs confrères de classe du monde entier, ils ne fermeront jamais la porte. Ils viennent passer leur visite médicale, leur bilan de santé à l’Hôpital du Val-de-Grace et repartent en catimini, comme si de rien n’était. Le lendemain, on entend à la télé que tel ou tel pays capitaliste occidental a donné une aide de 800 millions au Mali pour l’ « aide au développement ». Et c’est ainsi qu’on essaye de nous voiler la face, par ces cadeaux empoisonnés.
Oui, mon cher camarade, nous avons entendu ce qu’un Etat occidental nous a offert. Alors qu’avons nous fait pour qu’il nous fasse ce cadeau ? Quelle démagogie ! Car, au fait, où passent nos matières premières (l’or, le pétrole, le bois, le fer, l’uranium, le cotran, la bauxite etc). Ces Etats qui défendent les intérêts des entreprises comme Bouygues, Total, Bolloré, nous prennent cent fois plus qu’ils ne nous donnent, et ce n’est pas avec autant de publicité. Ce cadeau est aussi le prix du silence sur l’exploitation de cette jeunesse, des sans-papiers expulsés, sans droits. L’amélioration du sort des peuples des pays opprimés n’aura pas sa source dans ces cadeaux empoisonnés ni dans aucune mesure prise par ce système. La jeunesse ne veut pas du poisson, elle veut le droit de pêcher. C’est à nous, les travailleurs, les exploités de redresser la barre. Combien nos associations de sans-papiers ont-elles construit de routes, de dispensaires, d’écoles, creusé de puits, fondé des coopératives d’aide alimentaire, investi pour l’irrigation, financé des soutiens scolaires. Nous avons compris que l’aide la plus utile et la plus rentable est celle qui vient de nous-même, et pas des états impérialo-capitalistes, ni du "codéveloppement". Nous les travailleurs, nous sommes les vrais vecteurs du développement de nos pays. Nous apportons des projets concrets pour la population qui gémit toujours sous le poids des guerres, de l’exploitation, de la corruption, de l’oubli. Nos aides sont largement supérieures à celles des cadeaux empoisonnés. Les richesses du monde doivent appartenir aux travailleurs qui les produisent. Nous, les sans-papiers, ne nous faisons pas d’illusion, ce ne sont pas les appareils syndicaux qui éclaireront notre histoire. C’est à nous de la faire, de parler en notre nom. De ce que l’on a vécu, de ce que l’on vit, de notre devenir. La blessure c’est la nôtre, l’humiliation, c’est nous qui la vivons tous les jours. C’est nous qui avons perdu des camarades en traversant la Méditerranée, laissant derrière nous toute une vie, toute une histoire.
Aujourd’hui, nous sommes le 14 juillet 2009 qui symbolise la prise de Bastille, ce qui m’amène a avoir une profonde pensée pour ces prolétaires du monde entier qui sont en lutte et particulièrement ceux de la Bourse du travail de Paris expulsés par ces méthodes barbare de la CGT ! En tant que militant ouvrier et solidaire de tous les travailleurs je condamne avec toute fermeté cet acte inadmissible de la CGT ! Après ces gestes honteux de la CGT en tant que premier syndicat de France mais qui a eu aussi le monopole de discussion avec le sommet de l’Etat sur cette lutte de sans papiers ! Le but de la réunion du premier au 8 impasse Crozatier était simplement de faire table rase de cette violence perpétrée contre ces travailleurs sans papiers qu’ils traitaient d’anarchistes, etc… Je comprends parfaitement le mépris qu’ils pouvaient avoir envers ces travailleurs !
Nous, travailleurs, ne manquons pas ce rendez-vous. Cette histoire, c’est nous qui devons la raconter. Chacun est son propre historien, son propre écrivain. L’essentiel c’est cette histoire authentique que nous racontons, ce qu’aucun historien ne peut faire sans nous. Prendre ce bâton de pèlerin est un devoir, pour expliquer, informer, former pour mieux préparer les prochaines luttes. Bref, enseigner les conditions de la libération de la classe ouvrière.
L’objectif numéro un, selon la philosophie que je défendrais dorénavant, c’est que les travailleurs eux-mêmes apprennent qu’ils sont, eux, la force. Et c’est là que la connaissance du passé est indispensable, même dans une simple grève, dans tous les combats, petits et grands, des travailleurs, avec ou sans papiers. Le combat pour des conceptions justes dans ce domaine est toujours un grand combat qui se heurte à tous les préjugés, à tous les fatalismes et à tous les paternalismes. Parce que je pense que personne ne peut dissocier le cultivateur et la semence ; en termes clair, pour les idées communistes révolutionnaires dans le monde du travail, la lutte est plus que considérable au plein sens du terme. Voilà pourquoi je pense que lire les Marx, Engels et les révolutionnaires qui ont fait la révolution de 1917 est très important pour nous, les exploités.
La philosophie est un des aspects importants pour chaque ouvrier, pour chaque exploité. Comprendre le monde qui nous entoure est indispensable à tous les travailleurs. Et c’est possible. Croire que le monde est figé, qu’il ne peut pas changer, c’est une philosophie, mais ce n’est pas celle qui convient à la classe opprimée. Croire qu’il y aura toujours des oppresseurs, que le système que nous avons connu depuis notre naissance est éternel, ce n’est pas un fait : c’est également une philosophie. Elle est diffusée partout, mais elle n’est pas plus définitive pour autant. Les travailleurs sont, bien entendu, influencés largement par l’opinion générale et donc sont tributaires de ces préjugés. Les faits, les vrais, disent tout autre chose. L’histoire, la science, les philosophies apprennent, au contraire, que les conceptions peuvent changer, que le monde a changé, que les Empires ont chuté, que les systèmes ne sont pas éternels, que la lutte des opprimés a changé le monde, que les travailleurs sont la force, que les masses font l’Histoire, comme les masses pauvres de Paris qui ont fait tomber, non seulement la Bastille, mais la royauté et le système féodal.
L’évènement de cette année fut l’élection d’Obama aux Etats-Unis et mes collègues de lutte avaient regardé la télé jusqu’a petit matin et moi je pense que quelque soit le président élu ? aux Etats-Unis ou ailleurs, noir, blanc, marron, asiatique, ce qui compte, c’est qu’elle classe sociale il va servir, parce que je pense que les problèmes du monde du travail ne sont rien d’autre que ceux de la lutte entre intérêts opposés des classes sociales. Des travailleurs ont été touchés qu’un noir accède à la présidence et ont pensé que cela signifiait un recul du racisme aux USA. Bien entendu, les nuances politiques, sociales et économiques des classes dirigeantes ne sont pas à négliger ou à ignorer. Nous devons combattre des courants racistes, antisémites, machistes. Le génocide des Juifs comme le massacre du Rwanda nous en disent long sur la capacité des classes dirigeantes à aller très loin dans l’horreur si elles se sentent menacées dans leur domination par la montée de la lutte des classes. Mais, dans mon for intérieur je pense que, vu l’ampleur de la crise économique mondial, les classes dirigeantes peuvent choisir qui que se soit qui est capable de défendre leurs intérêts, quelle que soit la couleur de peau, le sexe, etc…, du moment que, dans l’immédiat, il peut les sauver de la lutte des opprimés.
Le militantisme et l’engagement ne sont pas innés et personne ne naît avec des idées déjà établies. Et encore moins pour militer que pour quoique ce soit. L’existence d’un individu est tellement aléatoire que, en tant travailleur, on n’est absolument pas à l’abri de quoi que soit et il est difficile, dans ces conditions, d’envisager de militer. Mais, au fait, militer pour quelles idées ? Je me suis rendu compte que, même au Mali, avec nos camarades de l’école, je militais, à mon échelle très petite, contre la dictature, pour une « démocratie », pour le multipartisme, etc, etc. Sans même le savoir, nous militions pour des objectifs démocratiques bourgeois. Sans savoir, surtout, que d’autres objectifs étaient possibles pour les opprimés : ceux qui consistent à se battre véritablement pour eux-mêmes en tant qu’opprimés.
En fait, ce que je veux dire à tous les travailleurs, du monde entier, c’est qu’il nous faut non seulement travailler et lutter dans ce monde mais comprendre le monde, comment il fonctionne : son économie, sa politique, son histoire. Je pense qu’aujourd’hui je tente de comprendre le monde son économie, sa politique, son idéologie etc. c’est vrai que l’existence d’un homme est complètement « imprédictible ». Qu’on le veuille ou non, que, du lever du soleil au coucher du soleil, de jour comme de nuit, on fait ou on dit des choses qui peuvent avoir un but précis, sciemment ou inconsciemment, souvent contre le monde, souvent pour le monde ; or, que je ne vois rien autour de moi qui soit un faveur d’un monde vivable pour les exploités. Nous disposons seulement de notre force de travail, quand on a la chance d’en avoir. Rien d’autre n’est fait pour nous, exploités. Mais nous devons non seulement le dénoncer mais le comprendre.
J’ai toujours entendu dire partout que le communisme c’est le sang, la dictature, la guerre, que le mur de Berlin est tombé, que le communisme, c’est le pire des projets pour la société humaine, et pourtant Alexandre se dit communiste révolutionnaires donc internationaliste de fait, je ressent que j’ai toujours été communiste révolutionnaire. Même si j’ignorais cette façon de voir et d’expliquer le monde en tant société de classe, je pense que c’est ce qu’il y a de le plus important, contrairement à ce qui nous a été enseigné a l’École, à ce que l’on nous dit tous les jours. A mon avis, cela signifie qu’il faut complètement repenser le monde y compris sa philosophie.
J’aimerais d’ailleurs vous soumettre quelques réflexions de penseurs en philosophie du changement :
« Une révolution est un phénomène purement naturel qui obéit davantage à des lois physiques qu’aux règles qui déterminent en temps ordinaire l’évolution de la société. Ou plutôt, ces règles prennent dans la révolution un caractère qui les rapproche beaucoup plus des lois de la physique, la force matérielle de la nécessité se manifeste avec plus de violence. »
Le militant révolutionnaire Friedrich Engels, l’ami de Karl marx

"Si les hommes de demain doivent un jour briser leurs chaînes, il faudra qu’ils comprennent ce qui les a forgées."
L’historien et sociologue Barrington Moore
« Seule l’explication marxiste de tout ce qui s’est passé peut rendre à l’avant-garde prolétarienne sa confiance en elle-même. »
Léon Trotsky dans « Le marxisme et notre époque »
Friedrich Engels dans un courrier à Conrad Schmidt du 27 octobre 1890 : "Ce qui manque à tous ces messieurs, c’est la dialectique. Ils ne voient toujours ici que la cause, là que l’effet. Que c’est une abstraction vide, que dans le monde réel pareils antagonismes polaires métaphysiques n’existent que dans les crises, mais que tout le grand cours des choses se produit sous la forme d’action et de réaction de forces, sans doute, très inégales, — dont le mouvement économique est de beaucoup la force la plus puissante, la plus initiale, la plus décisive, qu’il n’y a rien ici d’absolu et que tout est relatif, tout cela, que voulez-vous, ils ne le voient pas ; pour eux Hegel n’a pas existé…"

J’évoquerai aussi le peintre Vincent Van Gogh qui écrivait :
"Du moment que nous nous efforçons de vivre sincèrement, tout sera pour le mieux, même si nous devons avoir inévitablement des peines sincères et de véritables désillusions ; nous commettrons probablement aussi de lourdes fautes et accomplirons de mauvaises actions, mais il est vrai qu’il vaut mieux d’avoir l’esprit ardent, même si l’on doit commettre plus de fautes, que d’être mesquin et trop prudent. Il est bon d’aimer autant que l’on peut, car c’est là que gît la vraie force, et celui qui aime beaucoup accomplit de grandes choses et en est capable, et ce qui se fait par amour est bien fait. "....

ANNEXES

TRACTS
Les salariés intérimaires sans-papiers du groupe Fayat, site de Viry-Châtillon (91) sont en grève !
Ceux qui les maintiennent dans la précarité sont les mêmes qui bloquent les salaires, licencient : soutenez la lutte des sans-papiers !
Fayat est un grand groupe français du secteur BTP. Depuis le 30 juin, 31 de ses travailleurs, sans-papiers, se sont mis en grève pour demander leur régularisation afin de sortir de l’ombre à laquelle sont condamnés tous les sans-papiers et d’obtenir les mêmes droits que les autres salariés. À ce jour, 14 ont été régularisés, ce qui est une première victoire. Ces grévistes travaillent chez Fayat depuis, 5, 7, 8 ou 10 ans pour certains ! Ils ont toujours travaillé comme intérimaires (pour BGI, TRIO, ADECCO, SOVITRAT, RANDSTAD, MB Services, VISTAR etc). Ils payent leurs impôts, cotisations sociales, sans pour autant bénéficier des prestations sociales (indemnité journalière, chômage, aide au logement etc). La plupart sont chef de famille avec des enfants. Ils se battent aujourd’hui pour les droits les plus élémentaires : le droit de conserver leur travail, un titre de séjour. C’est une exigence de justice ! Ils font partie de la France qui se lève tôt.
Nous les croisons tous les jours quand ils travaillent sur nos communes de l’Essonne comme Viry-Châtillon, Corbeil-Essonne, Juvisy.
Le comité de grève des sans-papiers de FAYAT (Viry-Châtillon) a décidé la reconduction de la grève jusqu’à la régularisation de tous les sans-papiers de cette entreprise. Il appelle les salariés, les étudiants, les citoyens, les élus de Viry-Châtillon et de l’Essonne à participer aux différentes actions, manifestations, collectes pour les soutenir.
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Le cas par cas on n’en veut pas ! Des papiers pour tous ! *******************************************
TRACT
Les salariés intérimaires sans-papiers du groupe Fayat, site de Viry-Châtillon (91) sont en grève !
Ceux qui les maintiennent dans la précarité sont les mêmes qui bloquent les salaires, licencient : soutenez la lutte des sans-papiers !
Fayat est un grand groupe français du secteur BTP. Le 30 juin, 31 de ses travailleurs, sans-papiers, se sont mis en grève pour demander leur régularisation afin de sortir de l’ombre à laquelle sont condamnés tous les sans-papiers et d’obtenir les mêmes droits que les autres salariés. À ce jour, 17 ont été régularisés, ce qui est une première victoire. Ces grévistes travaillent chez Fayat depuis, 5, 7, 8 ou 10 ans pour certains ! Ils ont toujours travaillé comme intérimaires (pour BGI, TRIO, ADECCO, SOVITRAT, RANDSTAD, MB Services, VISTAR etc). Ils payent leurs impôts, cotisations sociales, sans pour autant bénéficier des prestations sociales (indemnité journalière, chômage, aide au logement etc). La plupart sont chef de famille avec des enfants. Ils se battent aujourd’hui pour les droits les plus élémentaires : le droit de conserver leur travail, un titre de séjour. C’est une exigence de justice ! Ils font partie de la France qui se lève tôt.
Nous les croisons tous les jours quand ils travaillent sur nos communes de l’Essonne comme Viry-Châtillon, Grigny, Corbeil-Essonne, Juvisy, Evry etc.
Le comité de grève des sans-papiers de FAYAT (Viry-Châtillon) a décidé la reconduction de la grève jusqu’à la régularisation de tous les sans-papiers de cette entreprise. Il appelle les salariés, les étudiants, les citoyens, les élus de Viry-Châtillon et de l’Essonne à participer aux différentes actions, manifestations, collectes pour les soutenir.
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Le cas par cas on n’en veut pas ! Des papiers pour tous ! *******************************************
Manifestation vendredi 21 novembre (RdV : 17h Gare de Grigny-Centre puis vers la Mairie de Grigny) Soyons nombreux !

TRACT
Les salariés intérimaires sans-papiers du groupe Fayat, site de Viry-Châtillon (91) sont en grève, soutenons-les !
Ceux qui les maintiennent dans la précarité sont les mêmes qui bloquent les salaires, licencient, cassent les services publics. Au 5ème mois de leur lutte ils ont plus que jamais besoin de vous.
Fayat est un grand groupe français du secteur BTP. Le 30 juin, 31 de ses travailleurs, sans-papiers, se sont mis en grève pour demander leur régularisation afin de sortir de l’ombre à laquelle sont condamnés tous les sans-papiers et d’obtenir les mêmes droits que les autres salariés. À ce jour, 17 ont été régularisés, ce qui est une première victoire. Ces grévistes travaillent chez Fayat depuis, 5, 7, 8 ou 10 ans pour certains ! Ils ont toujours travaillé comme intérimaires (pour BGI, TRIO, ADECCO, SOVITRAT, RANDSTAD, MB Services, VISTAR etc). Ils payent leurs impôts, cotisations sociales, sans pour autant bénéficier des prestations sociales (indemnité journalière, chômage, aide au logement etc). La plupart sont chef de famille avec des enfants. Ils se battent aujourd’hui pour les droits les plus élémentaires : le droit de conserver leur travail, un titre de séjour. C’est une exigence de justice ! Ils font partie de la France qui se lève tôt.
Nous les croisons tous les jours quand ils travaillent sur nos communes de l’Essonne comme Viry-Châtillon, Grigny, Corbeil-Essonne, Juvisy, Evry etc.
Le comité de grève des sans-papiers de FAYAT (Viry-Châtillon) a décidé la reconduction de la grève jusqu’à la régularisation de tous les sans-papiers de cette entreprise. Il appelle les salariés, les étudiants, les citoyens, les élus de Viry-Châtillon, de Grigny et de l’Essonne à participer à la manifestation pour les soutenir.
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Le cas par cas on n’en veut pas ! Des papiers pour tous !
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TRACT
Madame la Maire de Viry-Châtillon, Monsieur le Président de la Communauté d’Agglomération des Lacs de l’Essonne, Madame la Député de la 7 ème circonscription de l’Essonne Monsieur le Conseiller général de Viry-Châtillon, Mesdames, Messieurs les Sénateurs de l’Essonne, Mesdames, Messieurs les Conseillers régionaux d’Ile-de-France,
31 sans-papiers du groupe Fayat, se sont mis en grève sur le site de Viry-Châtillon le 30 juin, ils en appellent à votre soutien. Ils payent depuis des années des cotisations sociales, des impôts, ils sont donc des salariés à part entière. Malgré cela, utilisés par le patronat, condamnés à se taire dans la crainte d’être licenciés, dénoncés et conduits vers des centres de rétention (comme celui de Palaiseau dans notre département de l’Essonne) pour être expulsés. Or une partie importante du chiffre d’affaire du groupe Fayat provient de contrats avec les collectivités territoriales dont vous êtes les élus. Ces travailleurs sans papiers travaillent donc souvent pour nos communes, communautés d’agglomérations, notre département, notre région. Ils ont besoin de votre soutien. Tout comme le patronat et le gouvernement, vous devez prendre vos responsabilités, et mettre fin à cette hypocrisie : ces travailleurs sans-papiers doivent être régularisés.

Discours de Waraa, porte-parole du Comité de Grève des travailleurs sans-papiers du groupe Fayat, site de Viry-Châtillon (Essonne), devant l’assemblée de CLCGT, à Paris le 29 novembre 2008.

Chers camarades,
Qu’on ne vous vende pas la peau de la bête avant de l’abattre. La lutte des travailleurs sans papiers est loin d’être terminée, même s’il n’y a plus d’information dans les mensuels, même s’il n’y a plus de mobilisation du côté de la CGT. Des comités de grève dirigés par les travailleurs prendront le relais et nous poursuivrons la lutte avec la détermination farouche jusqu’à la victoire finale. La CGT est l’interlocuteur responsable dans les rapports avec l’Etat, mais refuse l’unité avec les comités de sans-papiers pour l’extension de la lutte. Là, aujourd’hui, il y a nécessité de la direction de la lutte par les sans-papiers eux-mêmes. Cette lutte d’envergure ne peut et ne doit pas reposer dans les mains de ces quelques spécialistes syndicaux qui poursuivent les tractations confidentielles avec le sinistre Hortefeux sans associer les sans-papiers dans ces négociations souterraines. Après les négociations avec le cabinet du ministère de l’immigration le 16 octobre, j’aimerais interroger mes camarades de la Confédération sur le devenir des milliers de travailleurs sans-papiers qui ne rentrent pas dans ces critères, soi-disant « apaisés et harmonisés ». Avec ce rapport officiel (sur la rencontre du 16), ministériel et validé par la CGT, c’est des milliers de travailleurs qui se sont vus exclure de la régularisation. Sur les 150 000 € récoltés par la confédération en guise de solidarité aux travailleurs sans-papiers, l’UD 75 affirmait que chaque gréviste avait obtenu 200€. Je tiens à vous informer qu’à ce jour, rien n’a été donné aux 31 grévistes de Viry-Châtillon abandonnés par l’UL CGT de Viry-Châtillon et l’UD 91 parce qu’à Viry, c’est les travailleurs eux-mêmes qui dirigent leur mouvement. Avec le grand silence des politiques : pendant cinq mois aucune visite des élus de la ville de Viry, ni de Grigny. Et malgré la pression nous avons obtenu à ce jour 20 régularisations sur 31 et nous restons unis et fermes sur nos revendications avec un seul mot d’ordre : Régularisation de tous les travailleurs sans papiers ! Car c’est simplement ces hommes et ces femmes qui se lèvent à cinq heures du matin pour aller faire vos ménages, garder vos enfants, la restauration, l’aide aux personnes âgées, le bâtiment et les travaux publics, qui versent des cotisations sociales, paient des impôts et taxes mais qui sont traités avec hypocrisie au grand silence de certains appareils syndicaux comme chez Fayat avec ses 16 000 salariés et des hommes politiques de gauche comme de droite. Dans cette Europe forteresse la libre circulation des personnes est devenu un privilège pour ces pays impérialistes qui ne fermeront jamais leurs frontières aux américains, aux japonais et aux bourgeois des pays dominés. Dans ces pays de « Droits de l’Homme » c’est des centres de rétention qui poussent comme des champignons et des hommes et des femmes y laissent leur vie dans des conditions obscures juste pour la liberté. Les enfants sont terrorisés par la police et que doit-on dire à ces enfants au sujet de la Liberté, de l’Egalité, et de la Fraternité, qui sont les valeurs de ce pays ? Ces hommes et ces femmes, fuient nos pays respectifs assiégés par les impérialo-capitalistes, ou sont attirés simplement par l’aimant du capitalisme. On se défenestre à l’arrivée de la police, la police se fait accompagner par les pompiers, ces farces épouvantables sont devenues non seulement une réalité mais aussi une banalité de cette première décennie du XXIe siècle. La presse en donne des nouvelles régulièrement. Le sinistre ministre français, responsable de cet état de fait, se félicite publiquement de la réussite de son action, de l’efficacité de son ministère, annonçant son score de personnes expulsées par la force avec une fierté à rougir pour longtemps. Nous, les travailleurs sans papiers avons décidé d’affronter cette politique discriminatoire pour engager des luttes pour le respect de nos droits en tant que travailleurs. 1000 régularisations sur plus de 400 000 sans-papiers, c’est une goutte d’eau dans la vase. C’est des milliers de travailleurs qui sont sous le poids de l’exploitation, de l’esclavage. Ce système, fait de notre dignité de travailleur une valeur d’échange, cette valeur se mesure au degré d’émancipation de l’hypocrisie des hommes politiques à tous les niveaux. La fermeté du gouvernement n’explique pas la situation. C’est plutôt la faiblesse de la classe ouvrière. Que l’immigration ne soit pas un moyen pour eux de diviser les travailleurs ! et ceux qui cultivent le nationalisme et le rejet de l’étranger ne camouflent pas les causes de la crise : c’est simplement le système capitaliste qui a atteint ses limites. Et une fois de plus, ce n’est pas les immigrés qui doivent s’intégrer c’est plutôt la classe ouvrière dans son ensemble qui doit s’intégrer. Nous entamons notre sixième mois d’occupation et on a besoin de votre soutien (vous avez une caisse de solidarité à l’entrée pour ceux qui veulent nous soutenir). C’est à nous de prendre la bête par les cornes et aux appareils syndicaux de nous suivre. Et pas le contraire. Ce qui pose problème aujourd’hui pour la continuité du mouvement (pour une grève générale) nous remercions les camarades de CLCGT qui nous ont soutenus jusqu’ici et merci pour l’invitation.

A mes frères de souffrance, de combat et d’espoir,
Aux prolétaires, avec ou sans papiers,

Nous souffrons de faim et de soif,
Nous crevons de misère
Et, plus encore, d’absence de liberté et d’indignité,
Nous crevons d’envie de vous dire : allez vous en !
En vous offrant nos derniers habits,
De ces haillons, portés de père en fils,
Par des esclaves, simplement des prolétaires,
Pour que vous, nos exploiteurs,
Vous essuyez, avec vos mains pleines de sang,
De vos sueurs faites de haine et de mépris pour les travailleurs !
Alors, laissons nous manger du cas – cas,
Laissons nous, les sans-papiers, les sans-droits, les sans-asile,
Laissons nous brouter de l’herbe sauvage,
Mais par cette herbe, broutée à la sueur de nos fronts,
Incolore et inodore, à saveur de liberté
Et de fraternité (noir, blanc, jaune, bleu, etc),
Prolétaires du monde avec qui nous partageons le cas – cas de la souffrance !
Nous sommes des nègres, noirs et blancs,
Nous sommes des jaunes …
Mais nous sommes les prolétaires,
Nous ne voulons pas du racisme
Qui cherche à nous diviser.
Il n’y a pas de race sur la Terre,
Pas de division entre les hommes,
A part celle entre riches et pauvres, entre bourgeois et prolétaires.
Ils nous appellent les sans-papiers, les clandestins,
Mais, par delà, ces divisions mensongères,
Nous sommes tous des travailleurs !
Ils veulent faire de nous des miséreux, des assistés,
Mais nous sommes la force !
Nous sommes l’avenir !
En avant, mes amis, mes camarades, mes frères !

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Pour nous contacter vous pouvez vous rendre sur les sites de Matière et Révolution ou du CRI-TSF, aux pages web :
http://www.matierevolution.fr
http://cri.tsf.free.fr
ou écrire à l’adresse cri.tsf@free.fr

Quand un système bafoue la dignité humaine, quand les hommes politiques, du Nord ou du Sud (les CRA, Centres de Rétention Administrative d’ici sont aussi les leurs), de gauche ou de droite piétinent et violent les droits de l’homme comme si c’était une banalité, la lutte doit être un sacré et indispensable devoir de toutes les classes opprimées, pour faire place à cette fraternité universelle tant attendue par les travailleurs, avec ou sans papiers, du Nord ou du Sud. Tel était le rêve d’un enfant du tiers-monde. Vous lirez dans cette brochure comment il s’est retrouvé à la tête d’un comité de grève de travailleurs.
Si la lutte lui a beaucoup apporté, beaucoup appris, nous avons souhaité que d’autres bénéficient de cette expérience.

Messages

  • Alors que la CGT s’associe aux autres syndicats et associations pour définir des limites mises au mouvement des sans papiers, une circulaire et non une régularisation, des cas de régularisation et non la revendication "des papiers pour tous", une forme de lutte limitée à certaines catégories de sans-papiers, il se trouve que le travail précédent de limitation du mouvement par la CGt a produit ses effets : le gouvernement n’estime plus devoir accorder quelques régularisations pour le calmer et frappe les piquets.

    La CGT était déjà loin d’être impliquée pour l’essentiel de ses militants et de ses structures, seul le groupe autour de Raymond Chauveau s’impliquant, la politique de la CGT est bien loin d’avoir permis au mouvement de pleinement se développer. Les derniers délégués nommés par cette superstructure qui se moque de l’infrastructure n’ont rien à voir avec une véritable direction démocratique du mouvement.

    L’éditorial de Raymond Chauveau du numéro un du journal intitulé "Le journal des sans-papiers en grève" qui ne leur donne pas la parole écrit :

    "Nous sommes au ministère de l’immigration avec la CGT, la CFDT, Solidaires, la FSU et l’UNSA pour uen quatrième réunion de négociation. (...) Il faut une circulaire de régularisation. (...) Nous avons déjà obligé le ministère de l’immigration à déclarer qu’il allait procéder à la rédaction d’une nouvelle circulaire. (...) Ces négociations complexes doivent lier le savoir faire syndical avec la connaissance des associations (...) Nous voulons cette circulaire pour en finir avec leur condition d’esclaves modernes. Nous allons maintenant entrer dans cette période si particulière où le gouvernement et le patronat estimeront qu’ils ont été au bout de leurs concessions et ne bougeront plus. Les pressions sur le mouvement vont devenir plus fortes et les tentatives de divisions plus nombreuses."

    ce discours du "dirigeant" de la lutte des sans-papiers mérité réflexion. il en dit long sur la conscience du rôle qu’il a joué pour calmer la lutte et sur les limites de son réformisme.

    Sarkozy a choisi de faire de la CGT de Chauveau son interlocuteur privilégié des sans-papiers avec les préfectures afin d’éviter une extension incontrôlée. Maintenant que cet objectif est réalisé, il n’est plus contraint de régulariser au cas par cas les dossiers proposés par la CGT. la comédie est terminée... mais pas la lutte des sans-papiers !

    N’EN DEPLAISE A TOUS LES ENCADREURS PROFESSIONNELS DES LUTTES, LA LUTTE DES SANS-PAPIERS NE FAIT QUE DE COMMENCER !!!

  • Un écrit de 1833 :

    L’AFRICAIN A PARIS.

    Air : Tout le long, le long de la rivière.

    Petits blancs, vous êtes surpris
    De me rencontrer à Paris.
    J’ai fait le voyage d’Afrique
    Pour voir la quasi-république
    Qu’on nous disait à tous momens
    Le meilleur des gouvernemens.
    A nos dépens on aura voulu rire
    Adieu, petits blancs, je rejoins mon navire,
    Je rejoins bien vite mon navire.

    On disait Paris accouché
    D’un souverain à bon marché
    On nous l’a fait si magnanime
    Que j’ai cru voir sous son régime
    Le prolétaire exempt d’impôt
    Mettre en chantant la poule au pot.
    A nos dépens, etc.

    J’ai cherché ce bon souverain
    Dont chacun veut presser la main.
    [4.1]Un jour enfin sur mon passage
    J’en vis un dans un équipage,
    Mais environné de soldats ;
    Il ne se montrait qu’à cent pas.
    A nos dépens, etc.

    Je me figurais qu’en ces lieux
    Tout le monde vivait heureux,
    Et venait par philantropie
    Vous demander une copie
    D’un nouveau genre de traité
    Appelé charte-vérité.
    A nos dépens, etc.

    Chez nous souvent on a conté
    Que vous aviez l’égalité.
    Ici, pour informé plus ample,
    Le pouvoir donne comme exemple
    Les combattans de St-Méry
    Et la duchesse de Berry !
    A nos dépens, etc.

    jules C.

  • IL n’y a aucune organisation politique ou syndicale digne de ce nom qui ne puisse ecrire l’histoire des sans papiers mieux que les sans papiers eux meme ,parlé ou representé les sans papiers mieux qu’ eux meme de ce fait toutes ces negociations souteraines et confidentielles aux noms des sans papiers sans les sans papiers n’est que de la poudre aux yeux des sans papiers de veritables armes de destruction massive contre cette lutte qui n’a tjs pas dit son nom ! cet intitulé "journal des sans papiers en lutte" est plutot le journal de la jungle ou du parc geologique. que les sans papiers soient sourds ou miets qu’ils soient mangeurs de cas-cas ou qu’ils broutent de l’herbe et guider par leur instinct ! ou se trouvecette lettre, ce mot,cette phrase ,ce paragraphe écrit par un sans papiers ! ces embelis de pages ; ces discours à l’infini ;ces negociations à l’infini ne valent pas mieux qu’une simple phrase prononcée et écrite par un sans papierssur notre lutte, notre liberation etc. car cela c’est de l’or ! ON est et on ne sera jamais mieux representé que par nous meme tout le reste :negociation ;ecriture ;discours etc est completement demagogique et illusoire ! SANS PAPIERS JE SUIS SANS PAPIERS JE RESTERAI ! je ne demanderai point la parole ; j’ecrirai et je m’exprimerai a chaque fois que je juge utile et necessaire en toute independence de vu et cela sans arriere pensée et cette bonne merde sera la mienne !!! WAARA !

    • Manifestation à Rosarno (Calabre) le 7 décembre 2010

      A Rosarno, commune de la province de Reggio de Calabre, a éclaté, jeudi 7 janvier 2010, une révolte de travailleurs immigrés, originaires pour l’essentiel de l’Afrique. Jusqu’à ce W-E la révolte continuait. Les travailleurs immigrés africains ont occupé la rue pour se défendre. Ils ont fait la démonstration de leur refus d’être des humains invisibles, des mains sans droits qui doivent toutefois cueillir avec délicatesse des clémentines odorantes et pour le reste de vivre avec les rats comme des rats.Les survivants condamnés d’une odyssée

      « La chasse aux Noirs »

      En décembre 2008 déjà, des travailleurs immigrés du Ghana et du Burkina Faso étaient descendus dans la rue à Rosarno : deux de leurs camarades avaient été gravement blessés suite à des tirs de kalachnikov en provenance d’une voiture.

      Un de ces nombreux « incidents » qui illustrent une « chasse aux Noirs », dans un contexte d’hyper-exploitation qui s’appuie conjointement sur les réseaux mafieux et la politique du gouvernement Berlusconi, symbolisé en la matière par le ministre Roberto Maroni de la Ligue du Nord. Et, dans cette Calabre-là, les sbires mafieux n’acceptent pas que les immigrés lèvent les yeux ou se défendent. Car se faisant, ils portent atteinte à la « Pax mafiosa » nécessaire à la récolte « à bas prix » des clémentines et autres agrumes.

      Ce vendredi 8 janvier 2010, la représentante du HCR (Haut-Commissariat pour les réfugiés) a déclaré qu’elle était très préoccupée d’un risque de « chasse aux immigrés » à Rosarno. D’autant plus que Maroni, dès jeudi, affirmait avec force que cette situation était le fait « d’une trop grande tolérance face à l’immigration clandestine ».

      Le quotidien L’Unità – au mieux de centre gauche – écrit dans son édition du 7 janvier 2010 : « La rage des extracommunautaires couvait depuis un certain temps, bien qu’en mai 2009, finalement, les trois premiers exploiteurs aient dû payer pour un délit qualifié de réduction à l’esclavage. »

      Les travailleurs immigrés qui arrivent dans cette région sont les survivants d’une odyssée durant laquelle ils ont été contraints d’assister à la mort de leurs congénères : dans les déserts, dans la mer ou dans les « camps de rétention extracommunautaires » financés par l’Union européenne et la Suisse.

      Ils ont quitté des pays rongés par des guerres – derrière lesquelles se camouflent des conglomérats miniers ou des groupes pétroliers – et détruits par l’exploitation néocoloniale prenant appui sur des « élites » corrompues, alliées de leurs corrupteurs.

      Ils arrivent dans une terre où, par milliers, ils ne seront que des bras pour cueillir des agrumes dès novembre et repartiront en mars après la récolte des oranges, migrant en Italie d’une région à l’autre, selon les récoltes. Sans toit, sans eau, sans électricité, sans sanitaires, reclus parfois dans des bâtiments industriels désaffectés. Cette vidéo faite par Médecins sans Frontières en 2008 illustre leur situation.

      Pour reprendre la formule d’un des leurs : « Nous vivons entre les rats et la peur. » Un autre, originaire du Maroc, confie au journaliste Attilio Bolzoni du quotidien La Repubblica : « Je vis dans la peur, la peur de faire savoir à ma fa mille comment je vis en Europe. »

      En fin d’année dans la région de Rosarno, chaque matin, des « contremaîtres » arrivent devant les baraques avec des camionnettes pour engager ces travailleurs immigrés qui n’ont littéralement plus rien si ce n’est leurs bras – de jeunes hommes – pour travailler 12 à 14 heures par jour, pour 20 euros, en payant 5 euros pour le « transport ».

      Les médecins de MSF – dont certains ont travaillé dans des pays avec des conditions dites « difficiles » – sont abasourdis par ce qu’ils ont découvert. Ainsi, les attaques du froid, les « fumées » dégagées par les feux allumés dans des baraques pour cuisiner ou se réchauffer provoquent de graves difficultés respiratoires. A cela s’ajoutent des infections diverses, des maladies dermatologiques. Cristina Falconi – responsable du projet MSF – souligne que : « Beaucoup parmi eux souffrent de dépression. Car ils vivent cette dégradation de leurs conditions de vie comme une défaite dont ils ne se relèveront jamais plus. Et quand ils téléphonent chez eux ils disent que tout va bien et ce sont ces mensonges qu’ils se racontent à eux-mêmes qui les dépriment encore plus. »

      Une lutte particulière, mais qui a un passé

      Ces travailleurs immigrés sont au bout d’une chaîne. Les grands producteurs, avec l’aide de la mafia, ont bloqué la création de coopératives de petits producteurs. Les prix payés pour les clémentines et les oranges ont fortement chuté : les grandes surfaces et les exportateurs imposent leur « pouvoir d’achat ».

      Dès lors, dans le sud de l’Italie, pérégrine une armée de sans-papiers. La très grande majorité ne pourra obtenir une régularisation, car ils ont reçu un mandat d’expulsion avec interdiction de revenir en Italie. Dès lors, une véritable « armée de réserve » composée de « clandestins » se déplace, selon la saison, pour récolter des tomates à Foggia, des clémentines puis des oranges à Rosarno, puis des olives à Alcame et des pommes de terre à Cassibile. Et cela dans le contexte d’une agriculture du sud de l’Italie en crise.

      Les conditions d’exploitation qu’ils rencontrent font penser – au-delà des différences – à celles des journaliers du sud de l’Italie qui, suite à la Seconde Guerre mondiale, ont mené des luttes très dures et ont engagé des mouvements d’occupation des terres. Des journaliers qui étaient traités comme des criminels par les pouvoirs.

      C’est dans cette longue lutte que s’inscrit la révolte des travailleurs immigrés africains qui ont déboulé dans les rues de Rosarno parce qu’ils refusent qu’on leur tire dessus (deux jeunes ont été la cible de tirs avec des fusils à air comprimé), qu’on les « traite comme des animaux » pour reprendre une formule qui revient sans cesse dans leurs déclarations. Ils se sont défendus comme des êtres humains dont la rage adoucit la souffrance – en cassant quelques voitures et vitrines de magasins – et ont été réprimés par la police comme « des animaux ».

  • SEMAINE DE SOLIDARITE avec les inculpés de Vincennes
    dimanche 10 janvier 2010 (12h46)

    SEMAINE DE SOLIDARITE AVEC LES INCULPES DE L’INCENDIE DE VINCENNES

    Le centre de rétention administrative de Vincennes était la plus grande prison pour sans-papiers de France. le 21 juin 2008, un retenu qui avait réclamé en vain ses médicaments y est mort. Le lendemain, le 22 juin, au cours d’une révolte collective, le centre est parti en fumée. 10 personnes sont inculpées pour cette révolte. Etre solidaire des inculpés de l’incendie de Vincennes, c’est être solidaire de toutes celles et ceux qui, d’une manière ou d’une autre, se révoltent contre un monde où des millions de vies sont suspendues à des bouts de papiers.

    Quelques initiatives prévues à Paris pour la semaine de solidarité :

    * SAMEDI 16 à 15h. Porte des Lilas. Balade solidaire autour des piquets de grève de sans-papiers.

    * SAMEDI 16 à 19h, au CICP (21ter rue Voltaire, M° Rue des Boulets) : Réunion publique autour de la révolte de Vincennes et du procès : Infos, débat, projection

    * SAMEDI 23 à 14h, République (angle de la rue du temple/place de la République) Balade contre la machine à expulser

    * SAMEDI 23 à 19h, au bar des Lauriers (98, rue des Couronnes, M° Couronnes /Jourdain) Projo - discussion sur les luttes des sans-papiers

    * DIMANCHE 24 à 15h, à la CIP (14, quai de Charente, M° Corentin Cariou) Projection, discussion sur les luttes à l’intérieur et à l’extérieur des centres de rétention en Europe et ailleurs.

    * Procès les 25, 26 et 27 janvier au TGI de Paris, 13h30, 16e chambre.

    Et sur les ondes :

    * Samedi 16 à 13h30 sur Radio Libertaire (89,4 FM), Chroniques rebelles

    * Mardi 19 à 19h sur FPP (106.3FM), Au fond près du radiateur

    *Jeudi 21 à 12h30, FPP, Actualité des luttes

    * Vendredi 22 à 19h, FPP, L’envolée

    liberte-sans-retenue@riseup.net

    • Pourquoi pas un cortège sans papiers à Amiens le 13 ?
      Travailleurs avec ou sans papiers même combats.
      Non à la répression de tous les travailleurs et des familles ouvrières.
      DEs papiers pour tous, un salaire mini à 1500 euros pour tous, un revenu minimum de 1500 euros pour tous au chomage, un logement pour tous.Non aux heures sup,travail posté, du W-E, décalé, astreintes : partage du travail entre tous les travailleurs/chomeurs.

      Article de la CGT :

      La Cgt rejette toute forme de criminalisation
      lundi 11 janvier 2010
      La Cgt réaffirme son soutien aux 6 salariés de continental qui doivent passer en appel de leur jugement à Amiens le 13 janvier et demande que leur relaxe soit prononcée. C’est un véritable enjeu de justice sociale !

      La crise pèse durement sur l’emploi, les plans de licenciements, les fermetures d’entreprises sont annoncés quotidiennement.

      Si la crise est réelle, elle n’est pas due au hasard mais à des choix politiques et économiques qui visent à toujours augmenter les profits sans prendre en compte la justice sociale.

      Les salariés premières victimes de cette crise ont leur mot à dire, c’est ce qu’ils tentent de faire.

      Malheureusement trop d’employeurs refusent tout dialogue et portent la responsabilité des situations de blocage.

      Aussi face à la désespérance, les salariés ne veulent pas « mourir en silence ». La crise est trop souvent le prétexte pour licencier, délocaliser ou fermer des entreprises. Ils sont souvent contraints face au mur patronal et des pouvoirs publics à exprimer fortement leur colère légitime.

      D’où vient la violence : de ceux qui veulent discuter, faire des propositions alternatives aux licenciements ou de ceux qui refusent tout dialogue ?

      Les exemples sont nombreux, ERDF, CARTERPILLAR, MOLEX, CONTINENTAL, la SNCF, BOUYGUES, et les salariés sans papiers menacés d’expulsion… tous luttent pour leur emploi, pour nos emplois. En réponse à leurs justes revendications on leur oppose de la répression, des condamnations. La solution n’est pas dans la criminalisation, mais dans de véritables négociations.

      La Cgt continuera de combattre toutes les formes de discrimination et de criminalisation de l’action syndicale et appelle l’ensemble des salariés et tous les citoyens emprunts de justice sociale à s’y opposer massivement dans l’unité la plus large.

      Montreuil le 11 janvier 2010
      Source cgt.fr

  • J’oubliais dans la liste de revendications ouvrières : retraites pour tous à 50ans à taux plein. Interdiction du travail de nuit. Santé et éducation/culture gratuite et obligatoire pour tous. Semaine de travail de 3 jours payés à 1500 euros mini pour les travaux pénibles donc répétitifs.

  • Va-t-on vers une reprise de cette lutte des sans papiers ?

    Rien ne filtre plus dans la presse concernant les sans papiers de chez Generis... fililae de Veolia.

    Qu’en est-il ? l’intersyndicale a-t-elle déjà joué son rôle ?

    ou bien le gouvernement a-t-il lâché des renouvellements ? avant de frapper et arrêter à Pantin hier ?

    quelle est cette politique d’entre deux tours ? gagner les voix lepenistes qui souhaitent abattre les umpistes indésirables pour lepen ?

    http://www.matierevolution.org/spip.php?breve130#forum2519

  • La CGT du Val-de-Marne occupe le centre administratif et de sécurité du marché d’intérêt national (MIN) de Rungis. Le syndicat demande la régularisation des salariés sans-papiers travaillant sur place.

  • La FCPE de la Haute-Garonne et le Réseau éducation sans frontière (RESF) dénoncent la séparation d’une famille. Jeudi 9 mars 2017, en fin de matinée, M. Q., Albanais d’origine, est passé en audience, au tribunal administratif de Toulouse. L’homme, père de trois enfants, contestait, devant la justice, une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) dont il faisait l’objet.

    Mais sa demande d’asile a été refusée, le contraignant à retourner au centre de rétention de Cornebarrieu (Haute-Garonne), où il est placé depuis le lundi 6 mars.

    Or, dénonce l’association de parents d’élèves, sa famille et lui ont fait une demande de droit séjour « pour des raisons médicales », concernant l’un des enfants. « Mais la préfecture a fait le choix d’appliquer l’OQTF, sans atteindre la fin de la procédure », ajoute-t-elle. En effet, lundi 6 mars, le père de famille a été arrêté puis conduit à Cornebarrieu. Son expulsion vers son pays d’origine ne serait maintenant plus qu’une « question de jours » car, selon la FCPE, plus rien n’y ferait obstacle.

    Sa femme et ses trois enfants, dont deux sont scolarisés au collège Georges-Sand et le troisième à l’école Bénezet, vivent toujours dans le squat géant, situé impasse des Arènes, récemment endommagé par un feu de cuisine.

  • Jadis, Bruno Le Roux défendait les enfants de sans papiers. Devenu ministre de l’Intérieur, il est aujourd’hui leur bourreau.

  • Brahim TOUNKARA vit en France depuis 15 ans (2001), sa femme Coumba KONTE l’a rejoint en 2010. Ils ont deux enfants, Noukhoussa, trois ans et demi, scolarisé en maternelle aux Ulys (91) et Boubou deux ans. Ils attendent un troisième enfant. Je veux croire que vous mesurez la dévastation de la situation de cette jeune femme et de ses enfants, conséquence de votre décision. Pour parler clair, les enfants n’ont pas eu assez à manger depuis l’arrestation de leur père et des habitants des Ulis ont collecté nourriture et argent sur le marché pour subvenir à leurs besoins. Il est évident que Brahim Tounkara va tenter de revenir retrouver les siens. Que feriez-vous, à sa place ? Et que direz-vous à ses enfants s’il se noie en tentant de franchir la Méditerranées que vos collègues et vous-même transformez en tombeau pour des milliers de migrants chaque année ?

    Brahima Tounkara a été arrêté parce qu’il n’avait pas de titre de transport dans l’autobus qu’il empruntait. On peut, en 2017, en France, être soupçonné du détournement d’un million d’€ grâce à des emplois fictifs, être soupçonnée de rétribuer son garde-du corps 7000 € pour un emploi à mi-temps et de faire rémunérer illégalement plusieurs de ses proches ou encore organiser une soirée à près de 400 000 € à Los Angeles aux frais de son ministère et être candidat aux élections présidentielles. Mais resquiller dans l’autobus est sanctionné de 15 jours d’emprisonnement, d’une expulsion ligoté et bâillonné et d’une interdiction du territoire de trois ans. Sans parler de la situation de ses enfants, rendus quasi orphelins.

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