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La révolution de 1905 à Bakou

mercredi 10 août 2022, par Robert Paris

Les revendications des ouvriers du pétrole de Bakou (décembre 1904)

"Sous le régime tsariste, on nous interdit de tenir des réunions, de discuter entre nous de nos besoins. Mais nous savons bien que notre force réside dans notre union et que notre salut est dans une discussion générale ouverte de nos problèmes. Pour cette raison, nous réclamons : 1. La liberté absolue de convoquer des assemblées d’ouvriers, la liberté de la parole et de la presse ... 2. La liberté d’organiser des unions, des fonds d’aides mutuelles et des grèves ... Mais quelle autorité défendra nos intérêts ? Il n’y a que nous-mêmes, le peuple, qui puissions être les défenseurs de nos intérêts ... Un peuple ne devrait pas avoir de maîtres, il ne peut y avoir que des serviteurs, élus par le peuple, pour exécuter les lois du peuple ... Par conséquent, nous exigeons immédiatement : 3. A bas l’autocratie tsariste ! 4. Vive l ’autocratie du peuple ! Nous exigeons : 5. La convocation immédiate d’une Assemblée constituante panrusse des représentants de la population de toute la Russie, sans considération de confession ou de nationalité ... 6. Le droit au suffrage universel, direct et égal, par bulletins de vote secrets. 7. A bas la guerre ! 8. Vive la journée de 8 heures ! 9. Vivent les fêtes de deux jours du ]" Mai ! "

Le gouvernement du tsar est affolé. Il veut faire un emprunt pour poursuivre la guerre, mais on ne lui fait plus crédit. Il promet de convoquer des représentants du peuple, mais en réalité, rien de nouveau ne se passe, les persécutions continuent, les fonctionnaires commettent toujours leurs abus, il n’y a pas de rassemblements populaires libres, pas de journaux populaires autorisés, les prisons où languissent les combattants pour la cause ouvrière restent fermées. Le gouvernement tsariste s’efforce de dresser les peuples les uns contre les autres, il a organisé un massacre à Bakou, en excitant les Tatares contre les Arméniens ; en éveillant la haine du peuple abêti, il prépare maintenant un nouveau massacre de juifs.

Camarades ouvriers ! Nous ne permettrons pas qu’on insulte davantage le peuple russe. Nous défendrons la liberté, repousserons tous ceux qui veulent détourner la colère populaire de notre véritable ennemi. Nous déclencherons une insurrection armée pour renverser le gouvernement tsariste et conquérir la liberté de tout le peuple. Aux armes, ouvriers et paysans ! Organisez des rassemblements secrets, constituez des milices populaires, munissez-vous de n’importe quelle arme, mandez des hommes de confiance pour s’entendre avec le Parti ouvrier social-démocrate de Russie ! Que le 1er Mai de cette année soit pour nous la fête de l’insurrection populaire, préparons-nous y, attendons le signal de l’attaque décisive contre le tyran. A bas le gouvernement tsariste ! Nous le renverserons et nommerons un gouvernement révolutionnaire provisoire pour convoquer une Assemblée constituante populaire. Que les députés du peuple soient élus au suffrage universel, direct, égal et au scrutin secret. Que les défenseurs de la liberté sortent des prisons et rentrent d’exil ; que les réunions populaires se tiennent ouvertement et que les journaux du peuple soient publiés sans la surveillance des maudits fonctionnaires. Que le peuple tout entier s’arme, qu’on donne un fusil à chaque ouvrier pour que le peuple lui-même, et non une poignée de pillards, décide de son sort. Que des comités paysans libres se forment dans les campagnes pour renverser le régime féodal des propriétaires fonciers, pour délivrer le peuple des brimades des fonctionnaires, pour rendre aux paysans les terres qu’on leur avait enlevées.

Lénine

La grève des chemins de fer s’étend inéluctablement, entraînant ligne après ligne, convoi après convoi. Le 11 octobre, le général gouverneur de Courlande édictait d’urgence un règle-ment punissant de trois mois de prison l’arrêt du travail sur les voies ferrées. Ce défi reçut une réponse immédiate. Le 12, il n’y avait plus un seul train entre Moscou et Kreuzburg, toute la ligne était en grève, le train de Windau n’arrivait pas. Le 15, à Windau, l’élévateur et l’agence commerciale des chemins de fer suspendaient le travail.Dans la nuit du 11 au 12, le mouvement s’arrêta sur tous les embranchements de la Vistule. Dans la matinée, aucun train ne partit de Varsovie pour Pétersbourg. Dans la même journée, le 12, la grève enveloppa Pétersbourg. L’instinct révolutionnaire lui avait indiqué la bonne tactique : elle avait d’abord soulevé toute la province, elle avait inondé le Pétersbourg des dirigeants de milliers de télégrammes d’alarme, elle avait ainsi créé le « moment psycholo-gique », elle avait terrorisé le pouvoir central, et ensuite elle arrivait en personne pour porter le dernier coup. Dans la matinée du 12, avec une complète unanimité, le travail s’arrêta sur tout le réseau de Pétersbourg. Seule la ligne de Finlande fonctionnait encore, attendant la mo-bilisation révolutionnaire de ce pays ; cette voiene devait être fermée que quatre jours plus tard, le 16. Le 13 octobre, la grève atteignit Reval, Libau, Riga et Brest. Le travail cesse à la station de Perm. Le trafic est interrompu sur une partie de la route de Tachkent. Le 14, se mettent en grève le réseau de Brest, la ligne de Transcaucasie et les stations d’Askhabad et de Novaïa Boukhara, sur les lignes de l’Asie centrale. Le même jour, la grève commençait sur la ligne de Sibérie ; elle débutait par Tchita et Irkoutsk, et, gagnant de l’Orient à l’Occident, elle arrivait, le 17 octobre, à Tcheliabinsk et Kourgane. Le 15 octobre, elle était à Bakou, le 17 à la gare d’Odessa.

Léon Trotsky dans son "1905"

Mais ce soulèvement de Saint-Pétersbourg, le 22 janvier n’était que le point culminant d’une grève de masse qui avait mis en mouvement tout le prolétariat de la capitale du tsar, en janvier 1905. A son tour, cette grève de janvier à Saint-Pétersbourg était la conséquence immédiate de la gigantesque grève générale qui avait éclaté peu auparavant, en décembre 1904, dans le Caucase, à Bakou et tint longtemps toute la Russie en haleine. Or, les événements de décembre à Bakou n’étaient eux-mêmes qu’un dernier et puissant écho des grandes grèves qui, en 1903 et 1904, tels des tremblements de terre périodiques, ébranlèrent tout le sud de la Russie, et dont le prologue fut la grève de Batoum dans le Caucase en mars 1902.

Rosa Luxemburg

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