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Les syndicats peuvent-ils mener victorieusement le combat

mardi 11 octobre 2022, par Karob, Robert Paris

Dirigeants syndicaux la main dans la main avec l’appareil d’Etat : pas étonnant, c’est lui qui paie !

Les syndicats peuvent-ils mener victorieusement le combat contre l’inflation, pour les salaires, pour les retraites, pour les services publics, pour la santé, pour les libertés et contre la guerre alors que le réformisme n’a plus de perspective du fait de l’effondrement du système ?

La grève qui dure dans les raffineries et dépôts de pétrole, son efficacité à bloquer les stations d’essence, et les hésitations du pouvoir et des patrons de TotalEnergies et de Esso-ExxonMobil à son égard, laissent croire que les syndicats sont en train de bouger, de se faire craindre, de se mobiliser, de se lancer contre nos ennemis. Pourtant, rien de plus faux. Les syndicats des raffineries de pétrole, qui ne visent pas du tout à changer le rapport de forces au sein de l’ensemble de la classe ouvrière, ont commencé à reculer sur leurs propres revendications en admettant que les patrons refusent de négocier sur les embauches et les investissements. Ils n’ont pas généralisé la grève à toutes les raffineries et tous les dépôts de pétrole. Ils se sont bien gardés de la généraliser à l’ensemble du secteur de l’Energie, à commencer par les centrales nucléaires. Ils ont refusé d’organiser dans toutes les entreprises des assemblées générales décisionnelles pour que les travailleurs décident si l’affrontement sur le pouvoir d’achat de la classe ouvrière doit se généraliser. Dans les raffineries et les dépôts en grève, les appareils syndicaux se sont juste un peu laissé pousser par la base, les syndicats au départ ne voulant que trois jours d’action et les salariés souhaitant la grève reconductible. Il était difficile pour les syndicats de refuser car il est évident que les entreprises du secteur font des bénéfices fabuleux alors que les salaires s’effritent face à l’inflation.

Seulement trois des six raffineries françaises sont bloquées sans que les syndicats expliquent pourquoi… Par exemple, aucun mouvement de grève n’a été relayé à la raffinerie de Lavéra de Pétroineos, située à Martigues dans les Bouches-du-Rhône. À la raffinerie Petroineos de Lavera (13), pour la CGT, le temps n’est pas non plus à la grève, la centrale syndicale expliquant que les salariés ont déjà obtenu des augmentations salariales jugées satisfaisantes. « Les résultats sont tellement bons en ce moment que c’était bien normal », assure Sébastien Varagnol de la CGT du site. Les raffineurs ont ainsi raflé une augmentation de salaire plancher de 200€ ainsi qu’une hausse de 20% de la prime de déplacement. « Partir en grève (à Lavera) pour les salaires des camarades de Total ne paraît pas envisageable aujourd’hui malheureusement », affirme le dirigeant cégétiste.

Enfin la coordination CGT Total, qui regroupe des syndicats CGT parmi les 200 filiales de Total en France (comme la SAFT, spécialisée dans la conception de batteries à usage industriel, Hutchinson connue pour ses pneus ou encore Argedis, qui gère les stations-services) et qui s’était mise en lutte de manière inédite en juin dernier, ne semble pas repartie pour un tour. « Les salariés ne sont pas au rendez-vous », regrette Éric Sellini. « Il faut faire un travail de fourmi dans les syndicats, dans les fédérations et à la confédération pour faire en sorte que ça prenne. » Une date de grève dans les entreprises du caoutchouc (Hutchinson, Michelin…) était d’ailleurs envisagée pour le 18 octobre. Elle a finalement été remplacée par un appel de la FNIC à la mobilisation aux côtés des raffineurs, sur les piquets de grèves, le 11 octobre. À la confédération, on réfléchirait à une nouvelle date de grève interprofessionnelle dans la semaine du 18 octobre.

Les revendications salariales des syndicats du pétrole sont modestes comme ils le soulignent eux-mêmes. « Le périmètre pétrole a une masse salariale de 1,5 milliard d’euros, affirme Eric Sellini, coordinateur CGT chez TotalEnergies, cité par le journal patronal Les Echos. A 10 %, ce serait un effort d’à peine 150 millions d’euros pour la direction, à comparer aux plus de 18 milliards de profits au premier semestre. La direction a été beaucoup plus réactive pour récompenser les actionnaires. »

Au plan national, les centrales syndicales (celles qui appellent à des journées de grèves, car les autres ne le font même pas) poursuivent leur stratégie catastrophique de type négociation/journée d’action. La journée d’action du 22 septembre n’a servi à rien et la journée d’action du 29 septembre non plus. Cette dernière a été sans lendemain… La première ne posait que le problème de la santé et la deuxième que celui des salaires. Aucune ne globalisait sur l’attaque antisociale d’ensemble que subit le monde du travail…

A propos du peu d’efficacité de la journée d’action du 29 septembre, le journal « Paris-Normandie » donnait la parole à un sociologue : « Tout mouvement social puissant est imprévisible. Mai 68, évidemment ou, plus récemment, les Gilets jaunes étaient imprévisibles. C’est d’ailleurs pour cela que le gouvernement cherche à colmater les brèches du pouvoir d’achat par des chèques énergie, des aides… Car sa grande crainte, ce n’est pas un mouvement syndical, une mobilisation identifiée mais un mouvement incontrôlable. Sans qu’un mouvement social se fasse craindre, il n’a aucune chance d’obtenir des concessions significatives. Un pouvoir ne bouge que s’il a peur de quelque chose. Il manque à cette mobilisation la dimension transgressive, quelque chose de moins normé. Finalement, ce genre de journée, ça ne leur fait plus peur. »

Les journées d’action des syndicats ne font « même pas peur » aux gouvernants écrit aussi « Le Parisien »…

Pas question pour les dirigeants syndicaux de transformer la grève des raffineries ou des centrales nucléaires en grève générale. Ils ne veulent même pas l’élargir au secteur de la Chimie !

Pas question pour ces centrales bureaucratiques de lier la question des salaires et de l’inflation aux autres questions sociales, notamment celle des retraites !!!

Encore moins question de lier la lutte contre la baisse du pouvoir d’achat à celle contre les aides aux capitalistes, à celle des politiques de plus en plus dictatoriales, à celle des répressions policières par exemple, à celle du gouvernement par conseils de défense, à celle contre la montée des dépenses d’armement, à la marche à la guerre…

Les dirigeants syndicaux cautionnent en fait toutes ces attaques antisociales car ils sont liés pieds et poings à l’Etat et aux capitalistes.

L’évolution de carrière de Philippe Martinez, dirigeant de la CGT, nous indique clairement que ces dirigeants se situent dans le camp des patrons… Après son poste de secrétaire général de la CGT et plutôt que de rejoindre son ancien poste de travail à Renault, Martinez se verrait bien comme conseiller spécial aux questions sociales auprès du PDG de Renault. Il faut croire qu’il pense avoir eu une action pro-patronale pour que le patron, en pleine attaque massive contre les emplois, puisse avoir besoin de lui…

« Je souhaite aussi être réintégré chez Renault et aimerais que mon expérience syndicale puisse servir mon entreprise, par exemple en tant que conseiller pour éviter les licenciements ou pour anticiper les évolutions de la boîte. »

On peut lire ainsi dans Libération :

« Philippe Martinez, actuellement secrétaire général de la CGT veut réintégrer Renault :

« Voici son message : « à six mois de la fin de son mandat, le responsable syndical de 61 ans a quelques conflits sur le feu : mobilisation nationale pour les salaires le 29, réforme des retraites – l’exécutif compte trancher d’ici la fin de la semaine sur la méthode qu’il adoptera – et de l’assurance chômage, débats à gauche sur le travail… Ce qui ne l’empêche pas de penser, aussi, à l’après, à son retour chez son employeur Renault, où il espère échapper au placard pour l’année qu’il lui reste avant la retraite.

Il a proposé au président du constructeur automobile, Jean-Dominique Senard, de devenir son « conseiller spécial en matière sociale et environnementale », ou bien de s’occuper des relations entre Renault et ses sous-traitants… L’intéressé lui a répondu qu’il allait y réfléchir. »

La trahison en rase campagne des dirigeants syndicaux à propos des intérêts fondamentaux des travailleurs ne se limite pas à Martinez. A la CGT, elle s’appelait aussi Lepaon et même Bernard Thibaut. Elle ne concerne pas particulièrement la CGT mais toutes les centrales syndicales, toutes plus liées les unes que les autres à l’Etat et aux grandes entreprises capitalistes.

Les appareils syndicaux se gardent d’intervenir contre les politiques de « leur » impérialisme partout dans le monde, que ce soit en Afrique ou en Ukraine…

Jamais ils ne contestent le pouvoir des capitalistes sur l’appareil de l’Etat et se refusent à toute intervention politique de la classe ouvrière…

Mais la trahison des appareils bureaucratiques n’est même pas la raison essentielle qui nécessite l’auto-organisation des travailleurs sous formes de gilets jaunes ou de comités de grève contrôlant entièrement le cours de la lutte.

La raison essentielle est le fait que la classe ouvrière en lutte ne peut qu’être révolutionnaire et que les syndicats ne sont que réformistes. Or une classe révolutionnaire ne peut elle-même se mesurer que si elle décide de ses propres choix, les met en œuvre elle-même et en mesure la justesse et l’efficacité par ses propres moyens.

A bas toutes les politiques réformistes qui nous maintiennent sous le capitalisme !

Négocier le poids des chaines, c’est négocier son esclavage mais c’est surtout le maintenir en place !

Négocier le poids de chaine, c’est reconnaitre le pouvoir du maître !

Négocier avec le grand capital qui s’effondre, c’est s’enchaîner à sa tombe !

Pour les salaires, les retraites, se soigner, etc, exproprions tous les capitalistes !

Prenons le pouvoir politique entre nos mains !

Prenons le pouvoir de nous organiser, de décider, d’appliquer nos décisions ! Formons nos comités de travailleurs ! Fédérons-nous !

A bas le pouvoir capitaliste et tous les petits pouvoirs qui le soutiennent, qu’ils se disent ou non de notre côté !

Lire aussi :

https://rapportsdeforce.fr/classes-en-lutte/raffineries-la-greve-peut-elle-setendre-100814731

https://www.lemonde.fr/politique/article/2022/09/29/journee-d-action-syndicale-la-reforme-des-retraites-rejoint-le-pouvoir-d-achat-en-tete-des-revendications_6143622_823448.html

https://www.midilibre.fr/2022/10/08/penurie-de-carburant-trois-des-six-raffineries-francaises-sont-toujours-a-larret-la-greve-reconduite-10722864.php

https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/essence-la-greve-dure-dans-les-raffineries-la-situation-se-corse-dans-les-stations-service-1867228

https://www.leparisien.fr/politique/journee-de-greve-et-de-manifestations-ce-jeudi-lexecutif-ne-croit-guere-a-une-explosion-sociale-28-09-2022-XS6RUXRPZJFPRETEEGLMX7UE5A.php

https://www.paris-normandie.fr/id346122/article/2022-09-28/le-pouvoir-ne-bouge-que-sil-peur-un-specialiste-du-syndicalisme-evoque-la

https://www.euractiv.fr/section/institutions/interview/philippe-martinez-pour-emmanuel-macron-et-lue-le-marche-prime-et-les-questions-sociales-sont-annexes/

https://www.liberation.fr/economie/social/philippe-martinez-la-reforme-des-retraites-cest-une-vraie-usurpation-20220926_62USQAP27NEWPOFRKTEXWWGLYM/

https://www.lopinion.fr/economie/depart-de-philippe-martinez-de-la-cgt-les-coulisses-dune-decision-sous-contrainte

https://www.rtl.fr/actu/politique/fermeture-de-4-sites-renault-en-france-martinez-tient-ghosn-pour-responsable-7800533766

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