Accueil > 03 - Livre Trois : HISTOIRE > 2eme chapitre : Révolutions de l’Antiquité > Lamentations mésopotamiennes ou quand les villes de la Mésopotamie antique (...)

Lamentations mésopotamiennes ou quand les villes de la Mésopotamie antique ont chuté

vendredi 4 juin 2021, par Robert Paris

Ni un tsunami, ni une tempête, ni une sécheresse ni une guerre, ni l’abandon des dieux n’ont emporté les villes de Mésopotamie et leur civilisation... On se souvient que les lamentations antiques d’Egypte recouvraient des situations dans lesquelles les plus pauvres avaient renversé le régime et même le système social…

En Egypte comme en Mésopotamie, les écrivains avaient du mal à comprendre comment des sociétés aussi solides et anciennes avaient pu chuter complètement et irrémédiablement et ils en attribuaient la faute aux dieux qui avaient abandonné les hommes…

Lire ici sur les révolutions sociales de l’Egypte antique

Villes de Mésopotamie

Ruines d’Ur

Ruines de Çatal Hüyük

Ruines d’Uruk

Ruines d’Agadé

Ruines d’Eridu

La chute et la destruction des villes de Mésopotamie

Les sociétés sumériennes, akkadiennes et élamites de Mésopotamie sont passées de l’égalitarisme à la division en classes. De là sont nées de sources de conflits irréconciliables et des révolutions qui ont renversé les villes devenues villes-Etats.

Çatal Hüyük, la première ville du monde, était égalitaire

Révolutions de l’Antiquité

Des textes ont subsisté sur ces chutes, cinq lamentations principales : sur la ville d’Ur, sur le pays de Sumer et la ville d’Ur, sur la ville de Nippur, sur la ville d’Eridu, sur la ville d’Uruk.

Les lamentations donnent des interprétations purement mythiques de la chute de ces villes, attribuant aux dieux l’action des hommes et notamment les révoltes et révolutions et leur répression.

Comment les Sumériens ont disparu en 2007 avant notre ère

La plus célèbre, la Lamentation sur Ur, dresse ainsi le tableau terrible de la ville assassinée, avec l’accord des dieux, par les ennemis du pays de Šimaški et d’Elam :

Lamentation sur la ville d’Ur :

" Le sang des pays comme du bronze et du plomb s’accumule ;

Ses morts fondent d’eux-mêmes comme de la graisse au soleil ;

Ses hommes qu’anéantit la hache, aucun casque ne les protège ;

Comme une gazelle prise au piège, ils s’allongent, la bouche dans la poussière...

Les mères et les pères qui ne sortent pas de leur maison sont recouverts par le feu ;

Les enfants couchés dans le giron de leur mère, comme des poissons sont emportés par les eaux...

Puisse ce désastre être entièrement anéanti !

Comme la grande grille de la nuit, puisse la porte être refermée sur lui ![...]"

Source

« Les tessons enflammés et la poussière pleuvent en averse –
Le peuple gémit.

À force d’entasser les cadavres, c’est un mur de corps que l’on élève – le désastre engloutit tout pêle-mêle.

Le peuple gémit.

La tempête qui détruit de fond en comble le pays gronde sur la terre […]
Les cadavres fondent d’eux-mêmes comme graisse au soleil.

Les hommes abattus par la hache, aucun casque ne les protège, […]

Les femmes âgées, les hommes âgés qui ne quittent pas leur maison sont jetés aux flammes

Les enfants couchés dans le giron de leur mère, comme des poissons sont emportés par les eaux… »

Source

« L’ouragan, comme un lion, se lança à l’attaque. Et quand la tempête fut enfin rappelée hors de la ville, cette ville n’était plus qu’un amas de ruines. Ô vénérable Nanna, de cette cité en ruine, elle se retira ! En ce temps-là, la tempête se retira du Pays et son peuple, qui n’était pourtant pas fait d’argile, était répandu sur son sol comme une multitude de tessons. À sa muraille, des brèches avaient été faites. À sa haute porte, à toutes ses entrées, les cadavres étaient accumulés. Dans toutes les grand’rues processionnelles, ils étaient étendus, tête contre épaule ; dans toutes les impasses et les allées, les corps sans vie étaient empilés, et sur les places, où l’on faisait naguère danser les gens du Pays, ils étaient accumulés en tas. Le sang du Pays avait rempli toutes les fosses, comme du cuivre ou de l’étain en fusion, et les cadavres, comme des carcasses de moutons laissées au soleil, se décomposaient sur place.

De ses hommes que la hache de bataille avait abattus, les têtes n’avaient pas été mises dans un linceul : comme des gazelles prises dans un piège, ils gisaient le nez dans la poussière. Ses hommes que l’épée avait fauchés, n’avaient pas été enveloppés des bandelettes funèbres : ils étaient comme des enfants morts-nés qu’on aurait laissés dans le sang de l’accouchement. Ses hommes que la masse d’arme avait fracassés, n’avaient pas été mis dans des étoffes fines, et bien que n’étant pas pris de boisson, ils gisaient écroulés sur l’épaule de leur voisin.

Celui qui s’était élancé au combat, l’arme de l’ennemi l’avait arrêté net, et celui qui s’était enfui, la tempête l’avait repoussé, lui aussi ; à l’intérieur d’Ur le fort comme le faible avaient péri de la famine. Les vieilles gens, qui ne pouvaient quitter leur maison, furent livrés aux flammes. Les tout-petits, dormant encore sur le sein de leur mère, furent emportés d’un coup, comme les poissons pêchés au filet dans la mer, et leurs nourrices aux bras robustes restèrent les bras vides.
La raison du Pays fut anéantie ; le bon sens du Pays fut englouti comme dans un marécage. La mère abandonna sa propre fille sous ses yeux, le père se détourna de son propre fils ; les épouses furent abandonnées dans la ville, les enfants laissés là, les richesses éparpillées çà et là ; le peuple des Têtes Noires fut déporté de chez lui vers des quartiers d’esclavage.

Leur Reine, comme un oiseau à l’envol, quitta sa ville. Nikkal, comme un oiseau à l’envol, quitta sa ville. Sur toutes les richesses du Pays, entassées comme elles l’étaient, des mains malpropres se jetèrent. Aux entrepôts du Pays, remplis à craquer comme ils l’étaient, on mit le feu. […] À l’intérieur de la sainte éminence à étages, la belle résidence-Ekishnugal, les grandes haches de cuivre mordirent comme des molosses ; Shimashkéens et Elamites, les destructeurs, traitèrent ce sanctuaire comme une quantité négligeable.

Ils cassèrent tout de la belle demeure avec leurs haches, et ils firent de la ville un monceau de ruines, jusqu’à ce que la Dame crie : « Hélas ! Ma ville ! », qu’elle s’écrie : « Hélas ! Ma demeure ! » ; jusqu’à ce que Nikkal crie : « Hélas ! Ma demeure ! ». Elle était en larmes : « Ah ! Ma ville a été détruite ! Ah ! Ma demeure a été ravagée ! Ô Nanna ! Ur a été ravagée, et sa population a été dispersée ! »

Lamentation sur les ruines d’Ur

« Les tessons enflammés et la poussière pleuvent en averse –

Le peuple gémit.

À force d’entasser les cadavres, c’est un mur de corps que l’on élève – le désastre engloutit tout pêle-mêle.

Le peuple gémit.

La tempête qui détruit de fond en comble le pays gronde sur la terre […]

Les cadavres fondent d’eux-mêmes comme graisse au soleil.

Les hommes abattus par la hache, aucun casque ne les protège, […]

Les femmes âgées, les hommes âgés qui ne quittent pas leur maison sont jetés aux flammes

Les enfants couchés dans le giron de leur mère, comme des poissons sont emportés par les eaux… »

La destruction se passe vers 2004, avant notre ère, lors de l’effondrement de l’empire de la troisième dynastie suite à plusieurs invasions. Les vers ont été composés, recopiés par un scribe, sous les rois d’Isin, vers le 19e-17e siècle. Nous ignorons le nom du poète.

Que nous dit ce récit total, presque clinique, de l’absolue dévastation qui fait cortège à la guerre ? Il évoque la destruction des énormes murailles, la fierté d’Ur. Le saccage des palmeraies, des champs fertiles et des canaux. S’y ajoute la dimension de massacre que donnent à voir dans le passage cité ces corps de femmes, d’hommes, d’enfants, de vieillards, figurés sans qualités, dans la banalité de l’horreur…

La lamentation mésopotamienne porte le deuil d’un monde anéanti.

Source

Lamentation d’Ur

Le seigneur livra tout au vent dans sa bergerie.
Il abandonna son enclos, l’aurochs abandonna son enclos, le seigneur de tous les pays abandonna son enclos, Enlil abandonna le sanctuaire Nippur, Son épouse Ninlil l’abandonna, Ninlil abandonna le temple à Ki’ur.
Le seigneur du pays l’abandonna, Ninurta abandonna le temple Eçumeça, La maîtresse de Keç l’abandonna

Ninma abandonna le temple de Keç,
Celle d’Isin l’abandonna, (livra tout) au ventdans sa bergerie,
Ninisina abandonna le sanctuaire Egalma∆, (livra tout) au ventdans sa bergerie.
La maîtresse du pays (d’)Uruk l’abandonna, (livra tout) au ventdans sa bergerie,

Innana abandonna le temple d’Uruk, (livra tout) au vent dans sa bergerie.

Nanna abandonna Ur , (livra tout) au ventdans sa bergerie
Suen abandonna l’Ekiçnuμal, (livra tout) au ventdans sa bergerie.

Son épouse Ningal l’abandonna, (livra tout) au ventdans sa bergerie,

Ningal abandonna son ENUNku , (livra tout) au ventdans sa bergerie.

L’aurochs d’Eridu l’abandonna, (livra tout) au ventdans sabergerie,

Enki abandonna le temple d’Eridu , (livra tout) au ventdans sa bergerie.(
Son épouse Damgalnuna [l’abandonna, (livra tout) au ventdans sa bergerie],)

Damgalnuna [abandonna le ..., (livra tout) au ventdans sa bergerie].)
Nin[açte]23abandonna son temple à Larak, (livra tout) au ventdans sa bergerie.)
Çara abandonna l’Ema∆, (livra tout) au ventdans sa bergerie.
Usaara abandonna le temple à Umma, (livra tout) au ventdans sa bergerie.
BaU abandonna Iriku, (livra tout) au ventdans sa bergerie, abandonna l’Eduga, son gynécée, (livra tout) au ventdans sa bergerie.

Sa mère AbbaU l’abandonna, (livra tout) au ventdans sa bergerie,
AbbaU abandonna le Maguena, (livra tout) au ventdans sa bergerie.
La divinité protectrice de la maison l’abandonna, (livra tout) au ventdans sa bergerie,

Lamma abandonna l’Esilasirsir, (livra tout) au ventdans sa bergerie.
La mère de Lagas l’abandonna, (livra tout) au ventdans sa bergerie,

atumdu abandonna le temple de Lagas , (livra tout) au ventdans sa bergerie.
Celle de Niμen l’abandonna, (livra tout) au ventdans sa bergerie,

la grande maîtresse abandonna le temple à Sirara, (livra tout) au vent dans sa bergerie.
Celle deKinirça l’abandonna, (livra tout) au vent dans sa bergerie,
Dumuziabzu abandonna le temple de Kinirça, (livra tout) au vent dans sa bergerie.
Celle de Guaba l’abandonna, (livra tout) au vent dans sa bergerie,
Ninmarki abandonna le sanctuaire de Guaba, (livra tout) au vent dans sa bergerie.

C’est le premier kirugu.

Chacun d’eux livra (tout) au vent dans sa bergerie, est oppressé par les gémissements à ce propos
.
O vache, tes meuglements ne retentissent plus dans l’étable, l’enclos princierne sert plus à rien.
C’est son refrain.
O ville, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Amère est ta lamentation, élève ta lamentation ! Amère est la lamentation sur sa bonne ville détruite, amère la lamentation sur sa (ville d’)Ur détruite .

Amère est ta lamentation, ville, élève une lamentation !

Amère est la lamentation sur sa (ville d’)Ur détruite. Amère est ta lamentation, jusqu’à quand oppressera-t-elle ta maîtresse qui esten larmes ?

Amère est ta lamentation, jusqu’à quand oppressera-t-elle Nanna qui est en larmes ?

Ouvrage en briques d’Ur, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Ekiçnuμal, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

0Sanctuaire ENUNku, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Ki’ur-la-Grande-Place, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Sanctuaire Nippur, ville, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Ouvrage en briques de l’Ekur, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

ÇUÇa, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Ubçuunkena, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Ouvrage en briques d’Iriku, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Esilasirsir, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Maguena, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Ouvrage en briques d’Isin, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Sanctuaire Egalma∆, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Ouvrage en briques du pays (d’)Uruk, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Ouvrage en briques d’Eridu, amère est la lamentation, élève ta lamentation !

Amère est ta lamentation, jusqu’à quand oppressera-t-elle ta maîtresse qui est en larmes ?

Amère est ta lamentation, jusqu’à quand oppressera-t-elle Nanna qui est en larmes ?

O ville, ton nom existe (encore), mais toi—malheur à moi ! —te voilà détruite .

O ville, tes murailles se dressent (encore)46, mais ton pays est anéanti

file :///C :/Users/HP/AppData/Local/Temp/La%20lamentation%20sur%20Ur%202_2_2.pdf

La lamentation sur Nippur :

« La bonne ville — Comment a-t-elle été vidée ? Ses précieuses ordonnances ont été avilies.Dans la ville, comment ses fêtes ont-elles été détruites ? Ses plus grands rites ont été mis sens dessus dessous. Nippur, au coeur de laquelle les mets avaient été distribués, où le peuple des têtes noires avait propagé une bonne semence, la ville du coeur de laquelle la raison était apparue, c’est là que les Anuna avaient fixé les normes de l’Ubçuunkena, la place où sont rendus de grands jugements, où ils avaient révélé ce qui assurait de justes décisions (Nippur) où ses dieux avaient établi (leurs) demeures, où des chapelles étaient érigées, des trônes dressés, où des libations de boissons alcoolisées et de sirop avaient été décrétées comme destin pour le lieu d’offrandes royal sacré et les repas du soir dans ses plus grandes salles à manger. Nippur, ville à la large ombre à laquelle le peuple des têtes noires s’était rafraîchi, comme il (Enlil) a négligé ses demeures ! C’est lui-même qui les a dispersées comme des vaches à la débandade. Cette ville dont le coeur déborde d’amères larmes, jusqu’à quand la déesse, sa maîtresse, ne s’enquérera-t-elle pas d’elle ? L’Egula qui avait connu le brouhaha — comme dans lieu désolé, personne n’y entre plus. En ce qui concerne Nippur, la ville où tous les grands souverains s’étaient prélassés — Pourquoi ceux-ci ont-ils disparu ? Le pays où l’on avait donné à manger aux têtes noires des nourritures variées comme à des moutons, jusqu’à quel jourrestera-t-il abandonné ? Larmes, plaintes, abattement, désespoir ! Jusqu’à quand le corps sera-t-il enflammé et le coeur ne s’apaisera-t-il pas vis-à-vis de lui ? (Là où) cymbales et tambours alaavaient retenti — Pourquoi le jour est-il passé dans d’amers ilu ? Les joueurs de balaμ, pourquoi sont-ils assis sur son ouvrage en brique ? Ils lui parlent en pleurant de la lassitude qui s’est appesantie sur eux. Les gens dont le conjoint est tombé, dont l’enfant est tombé, lui disent en chantant : ’Hélas, notre ville détruite ! ’ »

Source

Malédiction d’Agadé :

« 
e messager ne prenait plus la route, le bateau du chargé de mission ne passait plus par la rivière.
Pillage des ressources rurales Les chèvres rousses d’Enlil furent emmenées en butin de leur parc à bétail, ils emmenèrent aussi leurs bergers. Les vaches furent emmenées de leur enclos, ils emmenèrent aussi leurs pâtres.
Inversion des rôles Les gardes étaient mis au carcan. Sur le chemin, les bandits se tenaient en embuscade.
Début de la destruction À la Grand’porte du pays, les vantaux étaient bloqués dans la boue ; dans tout le pays, les gens, depuis leurs murailles, poussaient des plaintes de désespoir ;
Approvisionnement agricole de substitution, mais disparition générale des ressources Au cœur même des villes et non plus dans la vaste campagne alentour, on avait planté les jardins. Comme au jour où les villes étaient édifiées pour la première fois, les grands terroirs ne produisaient pas encore de grain, les terres inondées ne produisaient pas de poissons, les vergers irrigués ne produisaient pas d’arbre fruitier ni de vigne, les denses nuages de pluie ne pleuvaient pas, la végétation ne poussait pas.
Flambée des prix (entre 60 et 600 fois le prix normal) En ce temps-là l’huile était à 1 sicle (d’argent) le ½ litre, le grain était à 1 sicle* le ½ litre, la laine était à 1 sicle la ½ mine** ; de poisson on remplissait un ban*** pour 1 sicle : on achetait à ce prix sur les marchés de leurs villes.
La famine décime la population Celui qui dormait sur le toit mourait sur le toit. Celui qui gisait à l’intérieur de la maison ne recevait pas de sépulture. Poussés par la faim, les gens s’attaquaient les uns aux autres.
Les rues sont envahies par les chiens errants Dans le Ki’ur, le quartier sacré dédié au dieu Enlil, les chiens se rassemblèrent dans la rue silencieuse. Ils y dévoraient les hommes allant par deux. Ils y dévoraient les hommes allant par trois.

Source

Pourquoi cette ville (Agadé) sera détruite :

« Si une ville est installée sur une hauteur, il n’est pas agréable de vivre dans cette ville

Si une ville est installée dans un creux, cette ville sera heureuse […]

Si une ville émet un vacarme continuel, cette ville sera détruite

Si une ville s’abaisse sur elle-même en émettant un grondement comme dans un camp militaire, cette ville disparaîtra bientôt. »

Source

La lamentation sur Sumer et Ur :

« Pour dégrader les jours, pour que les règles tombent en oubli, la tempête, telle un ouragan, engloutit (tout) pêle-mêle. Que les me (pouvoirs) de Sumer seraient avilis, que le règne propice s’évanouirait, que les villes seraient détruites et les maisons démolies, que les parcs à bestiaux seraient jetées bas et les bergeries rasées, qu’il n’y aurait plus de boeufs dans ses (de Sumer) parcs à bestiaux,que ses moutons ne se multiplieraient plus dans ses bergeries,que les canaux charrieraient des eaux saumâtres, que sur les bons champs croîtraient des mauvaises herbes,que dans la steppe pousseraient des ’herbes lamentation’, que la mère ne partirait plus à la recherche de son enfant,que le père de famille ne dirait plus : ’Ah ! ma (chère) femme !’, que la jeune épouse ne serait plus heureuse dans le giron (de son mari), que le petit enfant ne grandirait plus sur les genoux (de ses parents), que la nurse ne chanterait plus de berceuse, que la royauté changerait de demeure,que les décisions intelligentesseraient bloquées,que la royauté serait emportée hors du pays et qu’elle poserait ses yeux sur tout l’univers, que, sur l’ordre d’An et d’Enlil, les règles tomberaient en oubli, que, après qu’An a froncé les sourcils contre tous les pays, après qu’Enlil a jeté un regard (favorable) sur une terre étrangère, après que Nintur a repoussé ses propres créatures, après qu’Enki a maudit le Tigre et l’Euphrate et Utu condamné chemins et routes, les me de Sumer tomberaient en oubli et ses règles seraient altérées,que les me de royauté et le règne d’Ur seraient écartés, que l’Ekiçnuμal du fils princier serait avili, que l’unité du peuple de Nanna, pullulant comme des brebis, serait déchirée, que d’Ur, le sanctuaire aux riches offrandes, les offrandes seraient détournées, que ses gens ne séjourneraient plus dans leurs demeures, qu’ils seraient livrés dans des lieux hostiles, que ce seraient des Çimaçkéens et des Elamites hostiles qui occuperaient leurs logis, que des ennemis s’empareraient de son pâtre dans sonpropre palais qu’Ibbi-Sîn serait emmené au pays d’Elam dans des rets—des dunes du Zabu, au bord de la mer, jusqu’à la frontière d’Ançan —, que, contrairement à une hirondelle qui s’est envolée de son gîte, il ne reviendrait plus vers sa ville, que des mauvaises herbes pousseraient sur les deux rives parallèles du Tigre et de l’Euphrate, que l’on ne foulerait plus les routes, que l’on n’irait plus à la recherche des chemins, que, après avoir été (solidement) fondées, villes et agglomérations seraient comptées pour collines de ruines, que, après avoir pullulé, le peuple des ’têtes noires’ serait massacré, que la houe ne s’approcherait plus des bons champs, que la semence ne s’enfoncerait plus dans la terre,que l’e’ellu, le chant du bouvier, ne retentirait plus dans la steppe, que la crème ne serait plus apprêtée dans le parc à bestiaux, que ... serai(en)t détruites. que le pâtre n’entourerait plus d’une clôture la magnifique bergerie,quen’y retentiraient plus les ilulamas des bergers et le bruit des barattes lors du barattage (de la crème), que les animaux seraient décimés dans la steppe, que les êtres vivants seraient anéantis,que les quadrupèdes de Çagan ne laisseraient plus tomber sur la terre (leurs) crottes, que les marais seraient ’crevassés’, qu’ils n’auraient plus de nom, que dans les cannaies croîtraient des ’roseaux mauvaise tête’ et qu’ils périraient dans la/leur puanteur31,que, quoique n’étant pas des plantes desséchées, les arbres des vergers irrigués s’effondreraient tout seuls,qu’à Ur, grand aurochs qui s’était campé belliqueusement et débordait de confiance en soi,la ville d’où la semence apparut, détentrice de la fonction d’enet de la royauté, fondée sur un sol vierge,serait en hâte passé le licol comme à un grand boeuf, qu’on lui plierait la nuque vers le sol, c’est ce destin que décrétèrent An, Enlil, Enki et Nin∆ursaμ/Ninma∆.Un destin décidé par eux ne peut être modifié, qui pourrait bien l’altérer ? Qui pourrait s’opposer aux ordres d’An et d’Enlil ? An frappa de crainte (les gens de) Sumer dans leurs demeures, le peuple eut peur. Enlil fit s’écouler des jours malsains, ils plongèrent la ville dans le silence. Nintur verrouilla les greniers du pays, Enki ’lia’ les eaux du Tigre et de l’Euphrate, Utu arracha des bouches la justice et les paroles dignes de confiance, Innana remit à des pays en révolte (tout ce qui touche) à la bataille et aux combats et Ninμirsu répandit Sumer devant les chiens comme (si c’était) du lait. Sur le pays s’abattit un désespoir comme on n’en avait (encore) jamais connu ni vu, une chose ineffable et insaisissable. Sortant de chez eux, une main porteuse de confusion frappa tous les pays. Cette ville : ses dieux se détournèrent d’elle, son pâtre disparut. Chez eux, les gens respiraient péniblement. La tempête les immobilisa, le jour ne revint pas vers eux. Il y eut (bien) pour eux des jours nouveaux, mais ils furent pires que tous ceux qui avaient précédé. Voilà ce que fit Enlil, le pâtre des ’têtes noires’ : Enlil, pour détruire les bonnes maisons, pour décimer les honnêtes gens, pour que l’on jette le mauvais oeil sur les enfants des honnêtes gens et sur les aînés, Enlil fit alors sortir les Gutis de (leurs) montagnes. Leur avance était le déluge d’Enlil, auquel personne ne peut résister.Le grand vent de la steppe remplit la steppe, il souffla devant eux. La steppe dans toute son étendue fut mise sens dessus dessous, plus personne ne put la traverser. Dans le jour devenu très obscur, des tessons enflammés formèrent comme un filet. Un feu très sombre s’unit au jour lumineux. En ce jour sombre, les dents furent amoncelées, les corps jetés pêle-mêle. Le jour était une herse sortie du ciel, la houe frappa la ville. Alors le ciel fut pris de tremblements et la terre frappée —l’oeil de la tempête était agité. Le ciel se brouilla, l’ombre le recouvrit, les montagnes grondèrent. Utu se coucha à l’horizon, ce fut la ’poussière du kur’ qui passa Nanna se coucha au zénith, le peuple eut peur. On décrète aux dieux de cette ville une (autre) demeure, chacun d’eux se tient à l’écart.Tous les pays ennemis poursuivent ses gens, ceux qui n’ont pas encore été exterminés62.Ils arrachent les immenses arbres à la racine, se déchaînant contreles forêts.Après avoir dépouillé63les vergers irrigués de leurs fruits, ils enlèvent les bourgeons.Ayant inondé les moissons encore en épis, ils diminuent le (rendement de) grain. Lignes gravement cassées et pratiquement incompréhensibles. Ils amoncelèrent [...] comme des (tas de) gerbes, ils étalèrent [...] comme des gerbes.[La masse d’armes(?)] jonche [le Tigre] et l’Euphrate de cadavres, elle fracasse les têtes.Le père de famille se détourna de son épouse, disant : ’Ce n’est pas mon épouse !’ La mère se détourna de son enfant, disant : ’Ce n’est pas mon enfant !’ Le propriétaire de (bons) champs quitta ses champs, disant : ’Ce ne sont pas mes champs !’ Le propriétaire d’une bonne maison quitta sa maison, disant : ’Ce n’est pas ma maison !’ Le riche s’éloigna de ses possessions.La royauté du pays fut alors avilie. Après que tiare et couronneavaient été portées sur la tête, elles furent toutes deux... Après que tous les pays avaient suivi une seule trace, leur unitéfut déchirée. D’Ur, le sanctuaire aux riches offrandes, les offrandes furent [détournée(?) ]. Le peuple de Nanna, pullulant comme des brebis, fut avili. Son roi resta hébété dans son propre palais, Ibbi-Sîn plongea son palais dans les gémissements, lui-même versant des larmes douloureuses sur l’Enamtila qui avait réjoui son coeur. Le déluge, retournant la terre (comme) une houe, passe en nivelant (tout). Telle une grande tempête, il emplit la terre de ses hurlements, qui pouvait lui échapper ? Que les villes seraient détruites et les maisons démolies… »

Source

La destruction de la vile d’Eridu :

« Ziusudra, debout à son côté, entendit [Enki] : "Tiens toi près du mur à ma gauche, Près du mur, je vais te parler ; prend garde à mes mots, fais attention à mes instructions. Par notre décision, un déluge va balayer toutes les villes et tout le pays. Il a été décidé que la semence de l’humanité doit être détruite. Aucune décision, aucun ordre de l’assemblée des Dieux ne peut être révoqué. Aucun contrordre n’a été donné par An et Enlil. Leur royauté, leur mandat va se terminer ; leurs cœurs sont fatigués...
Tous les vents mauvais et les tempêtes surgirent ensemble, et l’inondation balaya toutes les villes et le pays. Alors que le déluge déferla sur la terre, les vagues et les tempêtes de vent secouérent l’énorme bateau pendant sept jours et sept nuits… »

Source

Lire aussi

Lamentations sur la destruction d’Uruk :

« Qui a fait cela…… ? Pourquoi …… ? Celui qui avait rendu les personnes aux têtes noires si nombreuses ? Qui a renversé …… ? …… a été détruit - qui a restauré …… ? Qui a confronté …… ? Celui-là a écrasé ……. Utu, qui sous forme humaine rend jugement à la cour de justice du ciel, s’est mis et n’est pas ressuscité. …… portait un lourd fardeau de péché. …… les verdicts modifiés de Lord Nunamnir. …… qui peut frapper …… ? …… et ils s’approchent (?). …… il apporte ……. …… d’Enlil ……. Il …… et met fin à ……. petit non. chacun et chacun ……. …… ses voies étaient ……. …… sa destruction et démolition, ……. Le …… des dieux …… attention. ……, qui a négligé ……, …… la ville a regardé l’approche du fantôme maléfique. …… respirait douloureusement, il pleurait amèrement. …… il n’y eut aucun hochement de tête. Il se consola avec des larmes et des lamentations - la ville tremblait. Une main souillée le frappa et aplatit son crâne - la ville s’effondra. L’éclat redoutable submergé comme ……. La ville fière de toutes les terres est devenue comme celle qui sème le chaos. Les vachers fidèles ont eux-mêmes renversé chaque parc à bestiaux. Les bergers en chef ont eux-mêmes brûlé (?) Chaque bergerie. Ils les ont construits comme des tas de grains, ils les ont étalés comme des tas de grains, ils ont été convulsés. …… ils ont trempé les champs avec de l’eau, ils ont transformé la ville en marais. Ils ont fait tout cela. Comme les roseaux dans un terrain vague, la vie ne pouvait pas être relancée. Ils ont apporté la ruine. Des choses maléfiques menaçaient (?) La ville. Un silence s’installa dans le cœur effrayé de ses habitants comme un manteau. Ses bonnes divinités udug sont parties, ses divinités lamma se sont enfuies. Sa divinité lamma (a dit) "Cachez-vous dans le pays ouvert" et ils ont pris des chemins étrangers. Le dieu protecteur de la ville s’est retourné contre elle et son berger l’a abandonnée. Son esprit gardien, bien que n’étant pas un ennemi, a été exilé (?) Dans un pays étranger. Ainsi, tous ses dieux les plus importants ont évacué Unug, ils s’en sont tenus éloignés. Ils se cachaient dans les collines et erraient (?) Dans les plaines hantées. Dans la ville bâtie sur la paix, la nourriture et la boisson ont été renversées comme un vase saman. Dans les pâturages, un bruit tumultueux s’éleva, les ânes et les moutons furent chassés. Personnes âgées et bébés, prenant leur repos, …… devant ……. Ils ont vu …… et massacré (?) ……. Il …… et ouvrit son poing fermé. Il …… et tendit la main. Le …… de Sumer, la ville dont le roi est passé sur une terre ennemie, pour ……. - il l’a frappé avec la puissance de son arme. Il ... et a transformé l’endroit en poussière. Il …… et a entassé les gens en tas. ……, combien de temps avant que ses charmes soient restaurés ? Le …… du ciel …… et le peuple …… jusqu’aux limites du ciel. Il ……, étendit la main et provoqua la terreur dans le pays. Enlil est sorti avec une grande férocité. Il a annoncé : " Un déluge projetant la houe sur le sol sera invoqué. A son front de guerre sera une …… hache, à son arrière ce sera un ……. Ses poils envahis seront une herse, son dos sera des flammes. . Son visage sera une tempête malveillante qui enveloppe le ciel et la terre. »

Source

Pour continuer :

L’histoire d’Ur, de la chute d’Ur III à l’abandon par Samsu-iluna

La naissance de la civilisation en Mésopotamie, ce n’est pas un produit de l’Etat

Comment Babylone a disparu ?

[Çatal Hüyük, la première ville du monde, était égalitaire -> https://www.nationalgeographic.fr/histoire/2020/06/catal-huyuk-la-premiere-ville-du-monde-etait-egalitaire

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.