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Qu’est-ce qu’une onde ?

jeudi 16 janvier 2020, par Robert Paris

Vagues ondulatoires

Ondes transversales et longitudinales

Onde circulaire

Onde acoustique

Onde mécanique

Interférences d’ondes de deux sources de même fréquence

Ondes d’un dipôle

Interférences des deux fentes de Young

Images d’interférences

Onde avec point stationnaire

Onde sans point stationnaire

Onde progressive

Qu’est-ce qu’une onde ?

« Une onde est un mécanisme par lequel l’énergie est transmise sans qu’il soit besoin de déplacer de la matière. » C’est du moins ce que disent les manuels scolaires et universitaires. Cependant, il est quand même question de déplacement de matière dans l’onde mécanique (par exemple l’onde d’air de l’acoustique et l’onde d’eau de la vague et de la houle) et, pour l’onde de lumière et d’énergie, il est nécessaire de déplacer de la matière virtuelle du vide quantique. Il faut donc préciser que c’est la matière de masse inerte (dite « réelle ») qui n’est pas déplacée ou plus exactement dont l’onde n’est pas le déplacement. Fréquemment, le déplacement de matière ne va même pas dans le même sens que le déplacement de l’onde ! D’autre part, quand on dira qu’un certain type de vague peut être considéré comme une onde, ceux qui ont reçu une vague se demanderont comment on peut affirmer qu’une vague ne déplace pas de matière ?!!! On pense par exemple aux « vagues scélérates » qui renversent des navires !!! Ou aux tsunamis qui détruisent des côtes !!!

Il ne faut pas dire que le mouvement de l’onde est un mouvement sans matière mais que c’est un mouvement différent de celui de la matière. Dans une onde d’eau, il y a mouvement de l’eau mais ce n’est pas le même mouvement que celui de l’onde. Un exemple bien connu est la « Ola » du football par laquelle les supporters et les spectateurs acclament les joueurs. Ils se lèvent et s’assoient de manière cadencée et l’onde, soit un mouvement du haut vers le bas comme celui des molécules de l’onde d’eau, que cela produit ne va pas de haut en bas mais d’un côté à l’autre des tribunes.

Einstein dira : « Le mouvement de l’onde est celui d’un état de la matière et non de la matière elle-même. »

On voit qu’Einstein ne parle pas de déplacement d’énergie mais de « daplacement d’un état de la matière »….

Le fait de parler d’onde signifie développer un concept scientifique qui va servir dans des domaines très divers (lumière, matière, électromagnétisme, rythmes, sons, chocs, etc.) et pour des ondes de type très divers (ondes longitudinales, ondes transversales, ondes sphériques, ondes planes, ondes sinusoïdales et bien d’autres), concept qui ramène les différents phénomènes à une caractéristique commune : le type de propagation périodique avec des propriétés caractéristiques de cette propagation comme de contourner les obstacles, de former des cumuls additifs aussi bien que soustractifs donnant naissance à des interférences. L’onde étant caractérisée par deux éléments (la période et la phase), deux ondes de même période qui voisinent ont aussi périodiquement des phases additives et des phases soustractives et donnent naissance à des franges avec augmentation d’amplitude puis annulation d’amplitude successivement. Donc en fait une onde, du moins une onde sinusoïdale, a trois caractéristiques : période, phase, amplitude. La phase change sans cesse et elle représente un peu la hauteur au sein de l’onde. La période indique le temps de reproduction du phénomène à l’identique. L’amplitude indique la hauteur maximale de l’onde. En théorie, ondes et corpuscules sont des phénomènes diamétralement opposés puisque le premier est continu et le deuxième discontinu, le premier donne naissance à des franges d’interférence et pas la second, le premier contourne les obstacles et pas le second, etc. Certains phénomènes semblent exclusivement ondulatoires et d’autres exclusivement corpusculaires. Mais la physique quantique a démontré que c’est une illusion. Les ondes elles-mêmes sont fondées sur des corpuscules. Au lieu d’être des corpuscules de matière réelle, ce sont des corpuscules de matière virtuelle (celle du vide). L’énergie, la lumière, les ondes de matière et de lumière, tous sont fondés sur des mouvements au sein des particules et antiparticules virtuelles du vide quantique. La matière dite réelle est fondée sur le mouvement des bosons de Higgs au sein du vide qui distribue la propriété de matière inerte successivement aux diverses particules virtuelles du nuage qui entoure la particule réelle, ce qui fait que sa position est dite « incertaine » puisqu’elle saute d’une particule virtuelle à une autre, la particule « réelle » n’étant jamais la même. D’où l’onde de probabilité de présence de la particule réelle. En somme, tout, matière et lumière, forces et énergie, mouvement et changement, ondes et corpuscules, espace et temps, tout repose sur le vide quantique et tout est fait des particules et antiparticules du vide et de leur manière de se composer et de se disposer. C’est pour cela qu’il n’y a pas opposition diamétrale ni entre onde et corpuscule, ni entre matière et énergie, ni entre matière et vide, ni entre matière et lumière.

Einstein/Infeld dans « L’évolution des idées en Physique » :

« Qu’est-ce qu’une onde ?

« Une nouvelle part de Washington et arrive très rapidement à New York, bien que pas un des individus qui prennent part à sa propagation ne fasse le voyage d’une cité à l’autre. Il y a là deux mouvements tout à fait différents, celui de la nouvelle, qui part de Washington à New York, et celui des personnes qui l’ont répandue. Le vent qui passe sur un champ de blé fait naître une onde qui se propage à travers tout le champ. Ici de même nous devons distinguer entre le mouvement de l’onde et le mouvement des épis séparés, qui ne subissent que de petites oscillations.

Nous avons tous vu des ondes qui se répandent en cercles de plus en plus larges quand on jette une pierre dans un lac. Le mouvement de l’onde est très différent de celui des particules d’eau. Les particules se relèvent et s’abaissent. Le mouvement de l’onde est celui d’un état de la matière et non de la matière même. Un bouchon de liège flottant sur l’onde le montre clairement, car il se relève et s’abaisse à l’imitation du mouvement réel de l’eau, au lieu d’emporté par l’onde.

Afin de mieux comprendre le mécanisme de l’onde, considérons de nouveau une expérience idéalisée. Supposons un grand espace uniformément rempli d’eau, d’air ou de quelque autre « milieu ». Quelque part au centre se trouve une sphère. Au début de l’expérience il n’y a aucun mouvement. Soudainement la sphère commence à « respirer » rythmiquement, elle se dilate et se contracte tout en gardant sa forme sphérique. Mais que se passera-t-il dans le milieu ? Commençons l’observation au moment où la sphère commence à se dilater. Les particules du milieu qui se trouvent dans le voisinage immédiat de la sphère sont poussées dehors, de sorte que la densité d’une sphérule d’eau ou d’air, selon le cas, croît au-dessus de sa valeur normale. De même, quand la sphère se contracte, la densité de cette partie du milieu qui la touche directement décroît. Ces changements de densité se propagent à travers tout le milieu. Les particules constituant le milieu n’exécutent que de petites vibrations, mais le mouvement dans son ensemble est celui d’une onde qui progresse. Ce qui est essentiellement nouveau ici, c’est que, pour la première fois, nous constatons le mouvement de quelque chose qui n’est pas matière, mais de l’énergie qui se propage à travers la matière.

En nous servant de l’exemple de la sphère pulsante nous pouvons introduire deux concepts physiques généraux, qui sont importants pour caractériser les ondes. Le premier, c’est la vitesse avec laquelle l’onde se propage. Ceci dépendra du milieu, qui est différent suivant qu’il est formé d’eau, par exemple, ou d’air.

Le second, c’est celui de la longueur d’onde. Dans la cas d’ondes de la mer ou d’un fleuve, c’est la distance qui sépare le creux d’une onde du creux de l’onde suivante ou la crête d’une onde de la crête de l’onde suivante. C’est ainsi que les ondes de la mer ont des longueurs d’onde plus grandes que celles des fleuves.

Dans le cas de nos ondes produites par une sphère pulsante, la longueur d’onde est, à un instant déterminé, la distance entre deux sphérules voisines qui montrent une densité maxima ou minima. Il est évident que cette distance ne dépendra pas uniquement du milieu. Le rythme de pulsation de la sphère aura certainement un grand effet, la longueur d’onde devenant plus courte si la pulsation devient plus rapide, et plus longue si la pulsation est plus lente.

Ce concept d’onde s’est montré très fécond en physique. Le phénomène se réduit au mouvement de particules qui, selon la théorie cinétique, sont les constituants de la matière. Ainsi, toute théorie qui se sert du concept d’onde peut, en général, être regardée comme une théorie mécanique. L’explication des phénomènes acoustiques, par exemple, est essentiellement basée sur ce concept. Les corps vibrants, tels que les cordes vocales et les cordes de violons, sont des sources d’ondes sonores qui se propagent à travers l’air de la manière indiquée à propos de la sphère pulsante. Il est ainsi possible de ramener au moyen du concept d’onde, tous les phénomènes acoustiques à la mécanique.

Nous avons insisté sur la distinction qu’il faut faire entre le mouvement des particules et celui de l’onde elle-même, qui est un état du milieu. Ces deux mouvements sont très différents, mais il est évident que dans notre exemple de la sphère pulsante les deux mouvements s’effectuent sur la même ligne droite. Les particules du milieu oscillent le long de courts segments, et la densité croît et décroît périodiquement en conformité avec ce mouvement. La direction dans laquelle l’onde se propage et la ligne sur laquelle sont situées les oscillations ne forment qu’une seule ligne. Cette espèce d’onde est appelée « longitudinale ». Mais n’y a-t-il que cette espèce d’onde ? Il est important pour nos considérations ultérieures d’envisager la possibilité d’une espèce différente d’onde, appelée « transversale ».

Modifions notre précédent exemple. Nous avons toujours la sphère, mais elle est plongée dans un milieu différent, une espèce de gelée, au lieu de l’être dans l’air ou dans l’eau. En outre, la sphère n’exécute plus de pulsations, mais tourne d’un petit angle dans un sens et revient ensuite, toujours de la même façon rythmique et autour d’un axe déterminé. La gelée adhère à la sphère ; les portions adhérentes sont ainsi obligées d’imiter son mouvement. Ces portions forcent celles qui sont situées un peu plus loin d’imiter le même mouvement, et ainsi de suite, de sorte qu’une onde est produite dans le milieu.

Si l’on se rappelle la distinction entre le mouvement du milieu et le mouvement de l’onde, on voit qu’ici ils ne sont pas situés sur la même ligne. L’onde se propage dans la direction du rayon de la sphère, tandis que les particules du milieu se meuvent perpendiculairement à cette direction. Nous avons ainsi produit une onde transversale.

Les ondes qui se propagent à la surface de l’eau sont transversales. Un bouchon de liège flottant se relève et s’abaisse seulement, mais l’onde se propage le long d’une surface plane. Les ondes sonores, d’autre part, fournissent l’exemple le plus familier d’ondes longitudinales.

Une remarque de plus : l’onde produite par une sphère pulsante ou oscillatoire dans un milieu homogène est une « onde sphérique ». Elle est ainsi appelée parce qu’à un moment quelconque tous les points d’une sphère qui entourent le centre se comportent de la même manière. Considérons une portion d’une telle sphère, qui se trouve à une grande distance du centre. Plus loin se trouve cette portion, plus petite nous la prenons, et plus elle ressemble à un plan. Nous pouvons dire, sans vouloir être par trop précis, qu’il n’y a pas de différence essentielle entre la portion d’un plan et la portion d’une sphère dont le rayon est suffisamment grand. Nous parlons très souvent de petites portions d’une onde sphérique, qui se trouve très éloignée du centre, comme d’ « ondes planes ». Plus loin du centre des sphères nous plaçons la portion de notre dessin couverte de hachures, plus l’angle formé par les deux rayons est petit, et plus notre représentation d’une onde plane est correcte. Le concept d’une onde plane, comme beaucoup d’autres concepts physiques, n’est qu’une fiction, qui ne peut être réalisée qu’avec un certain degré d’exactitude. C’est cependant un concept utile… »

L’Encyclopédie de Diderot, D’Alembert, Jaucourt :

ONDE, s. f. en terme de Physique, est l’assemblage d’une cavité & d’une élévation sur la surface de l’eau ou de tout autre fluide. Voyez les articles Fluide & Ondulation.

On peut concevoir la formation des ondes de la maniere suivante.

La surface de l’eau tranquille étant naturellement plane & parallele à l’horison ; si, de quelque maniere que ce soit, elle vient à se creuser vers le milieu, comme en A (Pl. de l’Hydrodynam. fig. 30.) sa cavité sera aussi-tôt environnée d’une élévation BB. Et le fluide qui compose cette élévation descendant par sa gravité, & allant au-dessous du niveau en vertu de sa vîtesse acquise, il se formera une nouvelle cavité ; mais cette nouvelle cavité ne se peut faire qu’en élevant l’eau des deux côtés, ce qui remplira la premiere cavité, & formera une nouvelle élévation vers C ; & par la dépression de cette derniere élévation, l’eau en formera une nouvelle du même côté. Il y aura ainsi un mouvement successif dans la surface de l’eau, & la cavité qui pousse en avant l’élévation, sera mûe de A vers C. Cette cavité jointe à l’élévation voisine forme ce qu’on appelle une onde, & l’espace occupé par l’onde sur la surface de l’eau, mesuré suivant la direction de l’onde, est appellé la largeur de l’onde.

Comme les lois de ce mouvement ont été déterminées par M. Newton, nous allons en donner la substance.

1°. Lorsque la cavité A, par exemple, est environnée de tous les côtés par une élévation, & que le mouvement dont nous venons de parler s’étend en tout sens, le mouvement des ondes est circulaire.

2°. Supposons à présent que AB (fig. 31.) soit un obstacle contre lequel vient heurter l’onde qui commence en C, & proposons-nous d’examiner le changement que l’eau souffre dans un point quelconque E, lorsqu’elle est arrivée en ce point. Dans tous les lieux où l’onde passe librement, elle s’éleve, forme ensuite une cavité qui se remplit aussi tôt après ; & pendant que la surface du fluide éprouve ce changement, ses parties vont & viennent dans un petit espace. La direction du mouvement est le long des rayons CI, CD, &c. & la vîtesse peut être représentée par la ligne CE. Que ce mouvement soit décomposé en deux autres suivans GE & DE dont les vîtesses soient respectivement représentées par ces lignes ; par le mouvement suivant DE les particules n’agiront pas contre l’obstacle ; mais après le choc elles continueront leur mouvement dans cette direction avec la même vîtesse, & ce mouvement sera représenté par EF, en supposant EF & ED égales entr’elles : mais le mouvement suivant GE étant directement opposé, l’obstacle est détruit entierement. Car quoique les particules qui frappent cet obstacle soient élastiques, elles ne sont pas en cette occasion sujettes aux lois de la percussion des corps à ressort parfait, à cause que les ondes qui se meuvent continuellement en avant & en arriere, n’ont qu’un mouvement progressif, si lent, que le choc des particules contre l’obstacle ne peut changer leur figure. Voyez Percussion.

Mais il y a une réflexion des particules qui vient d’une autre cause. L’eau ne pouvant pas aller en avant à cause de l’obstacle, & étant poussée par celle qui la suit, prend le chemin où elle éprouve le moins de résistance, c’est-à-dire, qu’elle monte ; & cette élévation qui est plus grande en quelques endroits qu’en d’autres, est produite par le mouvement qui se fait suivant la direction GE ; parce que c’est par ce seul mouvement que les particules frappent contre l’obstacle.

L’eau par sa descente acquiert la même vîtesse que celle avec laquelle elle s’étoit élevée, & ses particules sont repoussées par l’obstacle avec la même force dans la direction EG que celle avec laquelle elles le frappent. De ce mouvement & de celui qui se fait suivant EF dont nous venons de parler, il naît un mouvement suivant EH dont la vîtesse est exprimée par la ligne EH qui est égale à la ligne EC. Ainsi par la réflexion la vîtesse de l’onde n’est pas changée, mais seulement sa direction ; son mouvement se faisant alors suivant EH, de la même maniere que, si en pénétrant l’obstacle, elle eût continué son mouvement le long de EH. Si du point C on tire la perpendiculaire CD à l’obstacle, & qu’on la prolonge, ensorte que Dc soit égal à cD, la ligne EH continuée passera par c : & comme cette démonstration convient également à tous les points de l’obstacle, il s’ensuit que l’onde réfléchie a la même figure de ce côté de l’obstacle qu’elle auroit eue par-delà la ligne AB, si elle n’avoit point frappé l’obstacle. Si cet obstacle est incliné à l’horison, l’eau y montera & en descendra en y souffrant un frottement, parce que la réflexion de l’onde sera troublée & même souvent entierement détruite, & c’est là la raison pour laquelle il arrive souvent que les bancs des rivieres ne réfléchissent pas les ondes.

S’il y a un trou comme H dans l’obstacle BL, la partie de l’onde qui y passera continuera son mouvement en ligne droite & s’étendra vers QQ ; & il se formera en ce point une nouvelle onde qui se mouvra dans un demi-cercle dont le centre sera celui du trou. Car la partie supérieure de l’onde qui a passé la premiere par le trou, coule & descend dans le moment vers les côtés, & forme en descendant une cavité qui devient entourée d’une élévation de chaque côté du trou, & qui se meut de la même maniere que nous l’avons expliqué à l’occasion de la premiere onde.

Pareillement, une onde à laquelle on oppose un obstacle comme AO, continue de se mouvoir entre O & N ; mais elle s’étend vers O dans une partie de cercle dont le centre n’est pas loin de O ; & de-là nous pouvons aisément conclure quel doit être le mouvement d’une onde derriere un obstacle quelconque N. Les ondes sont souvent produites par le mouvement d’un corps qui fait des vibrations, & s’étendent encore circulairement, quoique le corps fasse ses vibrations en ligne droite : car l’eau qui s’éleve par l’agitation, forme en descendant une cavité qui se trouve entourée d’élévations de tous les côtés.

Différentes ondes ne se dérangent pas les unes les autres, même lorsque leurs mouvemens suivent différentes directions, c’est ce que l’expérience nous fait connoître tous les jours.

Pour déterminer la vîtesse des ondes, il est à propos d’examiner un autre mouvement de même genre. Imaginons un fluide renfermé dans un tube cylindrique recourbé EH (fig. 32), ensorte que la quantité de fluide contenue dans la branche EF soit plus haute que dans l’autre branche de la partie lE divisée en deux parties égales en i. Il est clair que la liqueur contenue dans la branche EF descendra par sa gravité, en remontant en même tems de la même quantité dans la branche EH, & que lorsque la surface du fluide sera arrivée en i à la même hauteur dans les deux branches ; le fluide, au lieu de rester en équilibre, continuera de se mouvoir par la vîtesse acquise en descendant, & montera dans le tube GH, tandis qu’il descendra dans la branche EF d’une quantité il égale à Ei, à la petite différence près produite par le frottement contre les parois du tube. Dans cette nouvelle position, le fluide qui est dans le tube GH étant le plus haut, descendra par sa gravité, ensorte que le fluide monte & descend ainsi tour-à-tour jusqu’à ce qu’il ait perdu tout son mouvement par le frottement.
La quantité de matiere à mouvoir est tout le fluide contenu dans le tube, la force motrice est le poids de la colonne lE dont la hauteur est toujours double de la distance Ei ; laquelle distance augmente & diminue par conséquent en même raison que la force motrice. Mais la distance Ei est l’espace que parcourt le fluide en arrivant de la situation EH à la situation du repos ; & cet espace est par conséquent comme la force qui agit continuellement sur le fluide. Or si on se rappelle que c’est un principe semblable sur lequel est fondé l’isochronisme de la cycloïde ; on verra de la même maniere que quelle que soit l’inégalité des vibrations du fluide, ces vibrations sont de même durée, & que le tems de ces vibrations est le même que celui des oscillations d’un pendule, dont la longueur seroit la moitié de celle qu’occupe le fluide dans le tube, c’est-à-dire la moitié des lignes E F, F G, G H. Voyez Pendule.

Pour déterminer par ces principes la vîtesse des ondes, considérons différentes ondes qui se suivent immédiatement, comme A, B, C, D, E, F, (fig. 33.) Toutes se mouvant de A vers F ; l’onde A a parcouru toute sa largeur, lorsque la cavité A est arrivée en C ; ce qui ne sauroit avoir lieu sans que l’eau qui est en C ne monte à la hauteur du sommet de l’onde, & qu’elle ne descende ensuite à la profondeur C. Et comme tout ce mouvement ne donne aucune agitation sensible à l’eau qui est au-dessous de la ligne hi, on peut le regarder comme étant de même espece que celui que nous venons d’examiner, & prendre par conséquent, pour le tems que l’eau met à monter & à descendre, c’est-à-dire, pour le tems qu’une onde met à parcourir sa largeur, celui de deux oscillations d’un pendule égal en longueur à la moitié de BC, ou le tems d’une oscillation du pendule qui seroit égal à B, C, D, c’est-à-dire, quadruple du premier.

Ainsi la vîtesse de l’onde dépend de la longueur de la ligne B, C, D, laquelle est d’autant plus grande que l’onde s’étend plus loin & descend plus bas. Dans les ondes fort larges, qui ne s’élevent pas bien haut, les lignes B, C, D different peu de la largeur de l’onde ; & par conséquent le tems que chaque onde met à parcourir sa largeur, est celui qu’un pendule égal à cette largeur mettroit à faire une oscillation. Voyez Oscillation.

Dans les mouvemens des pendules, & par conséquent dans ceux des ondes, les espaces parcourus sont en raison du tems & de la vitesse ; d’où il s’ensuit que les vitesses des ondes sont comme les racines quarrées de leurs largeurs : car comme les tems dans lesquels elles parcourent leurs largeurs, sont dans la raison de ces racines quarrées, il faut aussi que les vitesses soient dans la même raison, afin que le produit des tems par les vitesses, soit comme la largeur des ondes, ou les espaces parcourus. Chambers.

M. Newton, comme nous l’avons dejà dit, est le premier qui ait donné les lois du mouvement des ondes. On les trouve à la fin du II. livre de ses
princip. à peu près telles que nous venons de les exposer. Ce philosophe conclut du théorème précédent, que des ondes qui seroient de 3 piés de large, & qui seroient par conséquent de la longueur du pendule à secondes, parcourroient en une seconde un espace égal à leur largeur ; & qu’ainsi dans l’espace d’une minute, ces ondes feroient environ 183 piés, & 11000 piés environ dans une heure. Au reste, j’ajoute que ce théorème n’a lieu que dans l’hypothèse que les particules du fluide montent & descendent verticalement dans leurs vibrations ; mais comme elles montent & descendent suivant des lignes courbes, M. Newton avertit que la vitesse des ondes n’est déterminée qu’à-peu-près par sa théorie.

Le même auteur nous donne aussi les lois de la propagation des ondes dans un fluide élastique ; & il en déduit la vitesse du son à peu près telle que l’expérience la donne. Voyez Son, voyez aussi Ondulation. (O)

ONDULATION, s. f. en Physique ; est une sorte de mouvement oscillatoire ou de vibration, que l’on observe dans un liquide, & qui le fait alternativement hausser & baisser comme les vagues de la mer. C’est ce que M. Newton & plusieurs autres après lui, ont appellé onde. Voyez Onde.

Si le liquide est uni & en repos, le mouvement d’ondulation se multiplie par des cercles concentriques, comme on peut le remarquer en jetant une pierre ou quelqu’autre corps, sur la surface d’une eau tranquille, ou même en touchant légèrement avec le doigt ou autrement la surface de l’eau.

La cause de ces ondulations circulaires, c’est qu’en touchant la surface du liquide, on produit une dépression à l’endroit du contact. Par cette dépression les parties subjacentes sont poussées successivement hors de leur place, & les parties voisines sont poussées en-haut, ensuite de quoi elles retombent ; & de cette maniere les différentes parties du liquide s’élevent & s’abaissent alternativement en cercle.

Lorsqu’on jette une pierre dans l’eau avec violence, ces sortes d’ondulations ou de vibrations réciproques sont très visibles : car alors le liquide s’élevant plus haut autour de l’endroit de l’immersion, à cause de l’impulsion violente qu’il a soufferte, & retombant ensuite, met en mouvement les parties voisines, qui par ce moyen s’élevent de même autour de l’endroit où est tombée la pierre, comme au-tour d’un centre, & forment le premier cercle ondulatoire, lequel retombant ensuite, donne une impulsion au fluide voisin, mais plus éloignée du centre. Ce fluide s’élève pareillement en cercle, & ainsi successivement il se produit des cercles toujours plus grands. Voyez un plus grand détail à l’article Onde.

Ondulation, se dit aussi d’un certain mouvement par lequel les parties de l’air sont agitées de la même manière que les vagues de la mer. C’est ce qu’on croit qui arrive, quand on frappe une corde d’un instrument de Musique. Voyez Corde.

On croit aussi que le mouvement ondulatoire de l’air est la cause du son. Voyez Son.

Quelques auteurs aiment mieux appeller ce mouvement du nom de vibration, que de celui d’ondulation. Voyez Vibration.

M. Huyghens, dans son traité de la lumiere, imprimé en 1690, & qui est le dernier ouvrage que ce grand géometre ait donné au public, imagine que la lumiere se propage par des especes d’ondulations semblables à celles qui se forment sur la surface de l’eau : une des plus grandes difficultés qu’on puisse faire contre ce système, est tirée de la nature des ondulations même, qui se répandent en tout sens, au lieu que la lumiere se propage suivant des lignes droites. Voyez Lumiere. Chambers. (O)

Ondulation, terme de Chirurgie, se dit du mouvement d’un fluide épanché dans une cavité. Quelques auteurs confondent l’ondulation & la fluctuation, & regardent ces termes comme synonymes. Il paroîtroit plus d’exactitude à distinguer leur signification, & appeller fluctuation le mouvement qu’on imprime à une colomne du fluide épanché, voyez Fluctuation ; & entendre par ondulation, le sentiment que le malade a du mouvement de la liqueur qui flotte dans une cavité. Ainsi le sentiment d’ondulation est un signe de l’hydropisie de poitrine, quoiqu’elle ne se puisse manifester par la fluctuation. (Y)

De Broglie dans « La physique nouvelle et les quanta » :

Dans le nouvelle physique quantique, sous la forme que lui a imprimée le développement de la mécanique ondulatoire, les idées de corpuscules et d’ondes, de localisation dans l’espace et le temps et d’états dynamiques bien définis sont « complémentaires » ; il entend par là que la description complète des phénomènes observables exige que l’on emploie tour à tour ces conceptions, mais qu’en un sens ces conceptions sont néanmoins inconciliables, les images qu’elles fournissent n’étant jamais simultanément applicables d’une façon complète à la description de la réalité. Par exemple, un grand nombre de faits observés en physique atomique ne peuvent se traduire simplement qu’en invoquant l’idée de corpuscules de sorte que l’emploi de cette idée peut être considéré comme indispensable au physicien ; de même l’idée des ondes est également indispensable pour la description d’un grand nombre de phénomènes. Si l’une de ces deux idées était rigoureusement adaptée à la réalité, elle exclurait complètement l’autre, mais il se trouve qu’en fait, elles sont toutes les deux utiles dans une certaine mesure pour la description des phénomènes et que, malgré leur caractère contradictoire, elles doivent être alternativement employées suivant les cas. Il en est de même des idées de localisation dans l’espace et le temps et d’état dynamique bien déterminé : elles sont aussi « complémentaires » comme les idées de corpuscules et d’ondes auxquelles, elles sont d’ailleurs, nous le verrons, étroitement rattachées. On peut se demander comment ces images contradictoires n’arrivent jamais à se heurter de front parce qu’il est impossible de déterminer simultanément tous les détails qui permettraient de préciser entièrement ces deux images et cette impossibilité qui est exprimée en langage analytique par les relations d’incertitude d’Heisenberg repose en définitive sur l’existence du quantum d’action. (…) Ainsi, on peut dire que les corpuscules existent puisqu’un grand nombre de phénomènes peuvent être interprétés en invoquant leur existence. Néanmoins, dans d’autres phénomènes, l’aspect corpusculaire est plus ou moins voilé et c’est un aspect ondulatoire qui se manifeste. (…) Il est inconcevable en mécanique classique que le mouvement du point matériel traversant un trou dépende du fait qu’il y ait ou pas d’autres trous dans l’écran à distance finie du premier (expérience des fentes de Young). »

Louis de Broglie, dans « Nouvelles perspectives en Microphysique » :

« En 1927, je la considérais (l’onde pilote, dite « onde de Broglie ») comme une solution avec singularité des équations linéaires admises par la Mécanique ondulatoire pour l’onde Phi (onde dite « de probabilité de présence » par la physique quantique). Diverses considérations, et en particulier le rapprochement avec la théorie de la Relativité générale, m’ont fait penser que la véritable équation de propagation de l’onde de Broglie pourrait être non-linéaire comme celles que l’on rencontre dans la théorie de la gravitation d’Einstein, équation non-linéaire qui admettrait comme forme approximative l’équation linéaire de la Mécanique ondulatoire quand les valeurs de l’onde de Broglie seraient assez faibles. (…) Malheureusement ce changement de point de vue ne facilite pas la résolution des problèmes mathématiques qui se posent car, si l’étude des solutions à singularités des équations linéaires est souvent difficile, celle des solutions des équations non-linéaires est plus difficile encore. (…) Einstein a beaucoup insisté sur une propriété importante des équations non-linéaires. Si les équations d’un certain champ sont linéaires, on peut toujours trouver une solution à singularités de ces équations telle que la singularité ait un mouvement prescrit à l’avance. On pourra d’ailleurs ajouter à la solution à singularité une solution continue et cette adjonction n’aura aucune influence sur le mouvement de la singularité. Il n’en est plus du tout de même si les équations du champ sont non linéaires car on ne peut plus alors obtenir une solution en ajoutant plusieurs solutions : la non-linéarité crée une sorte de solidarité entre des solutions qui auraient été indépendantes si l’approximation linéaire avait été valable partout. Cette non linéarité explique que la singularité et l’onde de Broglie ne soient pas indépendantes comme elles le seraient s’il y avait linéarité et qu’elles restent en phase. (…) De plus, la non-linéarité, peu sensible dans le corps du train d’ondes, peut réapparaître sur leurs bords où les groupes de dérivées de l’onde de Broglie pourrait prendre de grandes valeurs ; il y a là aussi une circonstance qui peut s’opposer à l’étalement des trains d’ondes. Il apparaît donc qu’une théorie non linéaire des ondes de Broglie pourrait permettre d’obtenir des « groupes d’ondes sans étalement » représentant par exemple un corpuscule qui se déplacerait d’un mouvement rectiligne et uniforme sans perdre son onde (…) Nous avons vu que dans la théorie des ondes de Broglie, comme dans l’interprétation relativiste de la gravitation, la non-linéarité des équations de base doit jouer un rôle essentiel et seul pouvoir expliquer la solidarité de l’onde et du corpuscule. Nous sommes actuellement arrivés à l’image suivante. Un train d’ondes de Broglie, constituant un corpuscule au sens large du mot, serait une sorte d’unité étendue et organisée, un peu analogue à une « cellule » dans l’acception biologique du terme. Il comprendrait en effet essentiellement les trois parties suivantes : 1° une sorte de noyau, la région singulière, le corpuscule au sens étroit du mot, siège de phénomènes essentiellement non linéaires ; 2° une région environnante étendue, siège d’un phénomène sensiblement linéaire ; 3° une enveloppe constituant les bords des trains d’ondes où la non-linéarité jouerait peut-être à nouveau un rôle important. Or, ce me semble être l’intervention des phénomènes non linéaires qui donnerait à cette « cellule » son unité, sa solidarité et sa permanence. S’il est vrai que la non-linéarité soit la véritable clef de la Microphysique corpusculaire, on comprend aisément pourquoi la Physique quantique actuelle n’est pas parvenue à écrire le dualisme onde-corpuscule et a dû se contenter d’une description uniquement statistique et probabiliste des phénomènes de l’échelle atomique. Prenant a priori pour base des équations linéaires et ne sortant pas du domaine de l’analyse linéaire, la théorie actuelle fait disparaître les accidents locaux dus à la non-linéarité (tels que les régions singulières et éventuellement les bords abrupts de trains d’ondes), elle efface ainsi les structures corpusculaires et, incapable de saisir la véritable relation entre onde et corpuscule, elle ne peut plus aboutir qu’à des images continues à caractère statistique. (…) L’onde continue (…) ne comportant aucune région singulière (…) ne décrit pas vraiment la réalité physique. »

Feynman, Cours de physique de Feynman (électromagnétisme – tome 1) :

« Essayez de vous imaginer ce que peuvent être à présent les champs électriques et magnétiques dans l’espace de cette salle de cours. Tout d’abord, il y a un champ magnétique permanent ; il provient des courants intérieurs de la terre – c’est le champ magnétique terrestre permanent. Puis il y a certains champs électriques irréguliers et presque statiques, sans doute produits par des charges électriques engendrées par frottement, à cause du mouvement des gens sur leurs chaises et du frottement des manches de leurs vêtements sur les bras des fauteuils. Puis il y a d’autres champs magnétiques produits par les courants oscillants transportés par les fils électriques – champs qui varient à la fréquence de 60 cycles par seconde, synchronisés sur le générateur de Boulder Dam. Mais les champs électriques et magnétiques qui varient à des fréquences beaucoup plus élevées sont plus intéressants. Par exemple quand la lumière se propage de la fenêtre au sol, et d’un mur à un autre, il y a de petites ondulations des champs électriques et magnétiques qui se propagent à 300.000 kilomètres par seconde. Puis il y a encore les ondes infrarouges qui se propagent de vos fronts chauds vers le tableau froid. Et nous avons oublié la lumière ultraviolette, les rayons X et les ondes radio qui se propagent à travers la pièce.

A travers la pièce, il y a des ondes électromagnétiques qui transportent la musique d’un orchestre de jazz. Il y a des ondes modulées par une série d’impulsions représentant les images d’événements qui ont lieu dans d’autres parties du monde, ou bien d’aspirines que l’on peut imaginer qui se dissolvent dans des estomacs que l’on peut imaginer. Pour prouver la réalité de ces ondes, il est simplement nécessaire de brancher un dispositif électronique convenable, qui convertisse ces ondes en images et en sons.

Si nous poussons encore plus loin cette analyse, même pour les plus petites ondulations, nous verrons des ondes électromagnétiques minuscules qui sont arrivées dans la pièce après avoir parcouru des distances énormes. Il y a maintenant de minuscules oscillations du champ électrique, dont les crêtes sont séparées par une distance de trente centimètres, qui proviennent de millions de millions de kilomètres, et qui sont transmises à la terre par le vaisseau spatial Mariner II qui vient juste de passer devant Vénus. Ses signaux transportent des résumés d’informations captées sur les planètes (informations obtenues par des ondes électromagnétiques qui se sont propagées de la planète au vaisseau spatial).

Il y a de multiples petites oscillations des champs électriques et magnétiques, qui sont des ondes ayant pris naissance à des millions d’années-lumière – dans les galaxies les plus reculées de l’univers. On a prouvé que tout ceci était vrai en « remplissant la pièce de fils » - en construisant des antennes aussi grandes que cette pièce. Ces ondes radio ont été détectées en des endroits de l’espace qui se situent au-delà de la portée des plus grands télescopes optiques. Même eux, les télescopes optiques, sont simplement des collecteurs d’ondes électromagnétiques. Ce que nous appelons les étoiles, ne sont en réalité que des interférences, interférences obtenues à partir de la seule réalité physique que nous ayons pu déceler jusqu’à présent – à partir d’une étude précise des ondulations, d’une complexité sans fin, des champs électriques et magnétiques qui nous parviennent sur terre.

Je vous ai demandé de vous imaginer ces champs électriques et magnétiques. Que faites-vous ? Savez-vous comment faire ? Comment est-ce que moi j’imagine le champ électrique et le champ magnétique ? Qu’est-ce que je vois vraiment ? Quelles sont les exigences de l’imagination scientifique ?

Est-ce bien différent d’essayer d’imaginer que la pièce est remplie d’anges invisibles Non, ce n’est pas la même chose qu’imaginer des anges invisibles. Il faut un degré d’imagination bien plus élevé pour songer au champ électromagnétique que pour songer à des anges invisibles. Pourquoi ? Parce que pour rendre imaginables des anges invisibles, il me suffit simplement de modifier un tout petit peu leurs propriétés – je les rends faiblement visibles et je peux voir alors la forme de leurs ailes, leurs corps, leurs auréoles. Une fois que j’ai réussi à imaginer un ange visible, l’abstraction nécessaire – qui consiste à prendre des anges presque invisibles et à les imaginer complètement invisibles – est relativement simple. Alors vous dites, « Monsieur le Professeur, donnez-moi s’il vous plaît, une description approximative des ondes électromagnétiques, même si elle doit être légèrement floue, de façon à ce que moi aussi je puisse les voir, comme je vois les anges presque invisibles. Puis je modifierai cette image jusqu’à atteindre l’abstraction nécessaire. »

Je suis navré, mais je ne le peux pas. Je ne sais pas comment faire. Je n’ai aucune image de ce champ électromagnétique qui soit, en un certain sens, précise. J’ai étudié le champ électromagnétique depuis longtemps – il y a 25 ans, j’étais comme vous maintenant, et j’ai 25 ans d’expérience de plus pendant lesquels j’ai réfléchi à ces ondes sinueuses.

Quand je commence à décrire le champ électromagnétique qui se propage dans l’espace, je parle des champs électrique E et magnétique B et j’agite les bras et vous pouvez vous imaginer que je peux les voir. Je vais vous dire ce que je vois. Je vois des sortes de lignes floues et ondulées – ici et là un E ou un B écrit sur elles d’une certaine manière, et peut-être que certaines des lignes portent des flèches – une flèche ici ou là qui disparaît quand je la regarde de trop près. Quand je parle des champs qui sillonnent l’espace, je fais une confusion terrible entre les symboles dont je me sers pour décrire les objets, et les objets eux-mêmes. Je ne peux vraiment pas me construire une image qui se rapproche même à peu près des vraies ondes. Donc, si vous éprouvez une certaine difficulté à matérialiser cette image, ne craignez surtout pas que votre difficulté soit exceptionnelle. »

Lochak, Diner et Farge dans « L’objet quantique » :

« Mais qu’est-ce qu’une onde et qu’est-ce qu’un corpuscule ?

Un exemple, un peu guerrier mais suggestif, illustre la différence entre les ondes et les corpuscules (…) Imaginons un homme sur qui l’on tire des coups de feu et qui s’abrite derrière un mur. L’homme échappe aux balles parce que celles-ci sont bien localisées et suivent des trajectoires, qui ou bien s’arrêtent sur le mur, ou bien passent à côté sans être déviées par l’obstacle : les balles ont un comportement corpusculaire. Mais en même temps, bien qu’abrité derrière le mur, cet homme entend les coups de feu parce que le son ne reste pas localisé, il se répand dans tout l’espace et contourne les obstacles : le son a un comportement ondulatoire.

Précisons cela en commençant par les corpuscules, dont la définition est plus simple. Nous appellerons corpuscule un petit élément matériel localisé dans une région délimitée de l’espace et dont l’essentiel des propriétés est susceptible d’être décrit par un nombre fini (mais non nécessairement petit) de caractéristiques : par exemple sa position, sa vitesse, sa masse, sa charge électrique, ou d’autres propriétés. Les objets du monde matériel qui nous entoure sont de caractère corpusculaire, que ce soit une pierre, une chaise, une automobile, ou la balle d’arme à feu dont il était question à l’instant.

Les objets du monde microphysique, tel qu’un électron, ou un composant du noyau atomique, ou une autre particule ont, eux aussi, des propriétés corpusculaires qui les apparentent à ce que nous venons de dire et qui se manifestent dans de très petites régions de l’espace, de l’ordre de ce qu’on appelle un fermi, c’est-à-dire 10 puissance moins 13 centimètres (il y a donc mille milliards de fermis dans un millimètre). Une molécule, qui peut être des millions de fois plus grande, possède elle aussi des propriétés corpusculaires.

Beaucoup plus complexe est la définition de l’onde. Nous appellerons onde un phénomène étendu dans une vaste région (éventuellement illimitée) de l’espace, qui est susceptible de se propager, comme les ondes sur l’eau, qui possède un élément de périodicité et qui se manifeste dans les applications de la mécanique quantique par les cinq propriétés suivantes : 1) La diffraction 2) Les interférences 3) L’effet tunnel 4) La stationnarité 5) Et enfin trois autres propriétés que nous regroupons parce qu’elles sont étroitement liées : la délocalisation, l’indiscernabilité et la mise en phase, propriétés qui interviennent dans les systèmes d’un grand nombre de particules. (…)

Quand la lumière se comporte comme un jet de corpuscules : l’effet photoélectrique

Cet effet, découvert par Hertz (en 1887), consiste en la transformation d’énergie lumineuse en énergie électrique. En éclairant certaines substances matérielles, il est, en effet, possible de créer un courant électrique, soit en expulsant d’un métal les électrons libres qui se trouvent à l’intérieur, soit en mettant des électrons en mouvement dans un milieu semiconducteur. Il faut, pour cela, que la fréquence de la lumière utilisée soit suffisante : l’effet ne se produit qu’au-delà d’un certain seuil et l’énergie cinétique des électrons croît avec la fréquence de la lumière selon une loi simple découverte par Einstein. L’intensité du courant électrique ainsi produit, intensité qui est donnée par le nombre d’électrons mis en mouvement, est proportionnelle à l’intensité de la lumière.

La théorie d’Einstein est fondée sur l’hypothèse que les photons, dans lesquels se concentre l’énergie de l’onde lumineuse, percutent simplement les électrons dans la matière, ce qui les met en mouvement et rompt l’équilibre de leur état. Il faut donc, pour cela, que les photons soient suffisamment énergétiques. Or Einstein a défini leur énergie à partir de la loi de Planck, qui relie directement cette énergie E à la fréquence v de l’onde lumineuse par une formule qui est si célèbre que nous l’écrirons : E= hv.

Quand la matière se comporte comme des ondes : la diffraction des électrons.

Les électrons contournent les obstacles alors que les balles ne le font pas…

La diffraction des ondes consiste en leur capacité de diffuser à travers les petites ouvertures et de contourner les obstacles. Dans la physique classique, comme dans notre expérience habituelle, cette propriété s’oppose donc aux propriétés corpusculaires. (…) La particule (la balle) et l’onde (le son) constituent des objets physiques différents (…) Ce qui est entièrement nouveau dans le domaine quantique, c’est que la particule, par exemple le photon ou l’électron, constitue avec l’onde un seul et même objet (…) cette propriété se retrouve dans toutes les particules du monde microphysique, tels que les protons, les neutrons ou les atomes eux-mêmes : toutes sont douées de propriétés ondulatoires. La théorie de De Broglie affirme qu’à tout élément matériel de masse m animé d’une vitesse v est associée une onde dont la longueur d’onde est égale à h divisé par mv. (…) La longueur d’onde diminue quand la masse augmente : donc quand la masse augmente (…) les propriétés ondulatoires ne se feraient sentir que si la vitesse de l’objet était assez petite (…) pour faire en sorte que la longueur d’onde soit assez grande. (…) C’est la raison pour laquelle nous ne rencontrons pas, autour de nous, de propriétés ondulatoires de la matière et cette dernière nous apparaît donc purement corpusculaire. (…) Les électrons se diffractent réellement et ils peuvent vraiment contourner un obstacle comme le fait une onde sonore qui contourne le mur et comme le fait, d’ailleurs, la lumière. (…)

Les particules sur une seule onde cohérente sont délocalisées et indiscernables

Délocalisation et indiscernabilité, ces deux propriétés jouent un rôle important en physique atomique et en physique des solides. Leur signification peut se ramener à une assertion très simple : elles apparaissent dès que les propriétés ondulatoires l’emportent sur les propriétés corpusculaires. La particule nous apparaît alors comme un objet étendu, comme une onde, et elle perd sa localisation, qui est, précisément, une propriété corpusculaire. (…)

Quand deux objets sont identiques, on peut continuer de les discerner pourvu qu’on puisse les suivre dans leur mouvement en les localisant à chaque instant. (…) Si les particules étaient des corpuscules « vrais », classiques, elles suivraient des trajectoires et ceci permettrait de les considérer comme discernables tout en étant identiques. D’ailleurs, même des particules quantiques identiques restent discernables si elles ont toujours été suffisamment éloignées l’une de l’autre pour qu’on puisse les localiser. (…) Mais en général, en raison des propriétés ondulatoires des particules quantiques, leur localisation est plus floue que celle des « vrais » corpuscules. (…) il suffit que deux particules aient interagi ne serait-ce qu’une seule fois pour que les deux particules deviennent indiscernables (…) Ce seul fait suffit à démontrer que les propriétés statistiques d’un ensemble de telles particules sont tout à fait différentes de celles d’un ensemble d’objets ordinaires, classiques. (…)

Vis-à-vis des statistiques, une autre propriété des particules jouera ici un rôle fondamental, le spin.

« To spin » signifie en anglais « tourner » et le spin consiste en ce que, de même que la Terre et les autres planètes tournent sur elles-mêmes comme de gigantesques toupies, les électrons et presque toutes les autres particules en font autant, encore qu’il faille, ici encore, tempérer le sens de cette phrase parce que, en réalité, personne n’est vraiment capable de décrire cette « rotation » de la particule. Tout ce qu’on peut affirmer, c’est que les particules possèdent les lois de symétrie et un certain nombre de comportements physiques qui permettent de les assimiler à de petites toupies. Mais on ne voit pas vraiment tourner la toupie.

(…) Le moment magnétique de l’électron a des effets importants à notre échelle, parce qu’il joue un rôle fondamental dans les propriétés magnétiques de la matière, l’autre origine du magnétisme étant le mouvement « orbital » des électrons, c’est-à-dire le fait qu’en « tournant » dans l’atome leur charge électrique crée un courant, lequel engendre un champ magnétique. (…) La « rotation » liée au spin peut s’effectuer, on l’imagine, avec différentes vitesses ou énergies, mais surtout, il se trouve qu’elle peut s’effectuer de deux manières fondamentalement différentes qu’on peut relier au fait simple suivant : (nous pouvons revenir à l’état initial en faisant deux tours on en faisant un tour). (…) Cette propriété géométrique (le fait qu’il y a deux manières de tourner) divise les particules en deux grandes catégories : 1) Les fermions dont le principal représentant est l’électron 2) Les bosons dont le principal représentant est le photon, la particule de lumière. Leurs propriétés statistiques sont entièrement différentes. Les fermions sont individualistes, ce qui s’exprime par une grande loi physique : le principe d’exclusion de Pauli, en vertu duquel deux fermions de même nature (par exemple deux électrons) ne peuvent jamais se trouver exactement dans le même état physique (…) Cette propriété individualiste des fermions est fondamentale pour comprendre la stabilité de la matière, principalement celle des atomes et des molécules et pour comprendre la classification des éléments chimiques et leurs principales propriétés. Et elle est tout aussi importante pour la structure des solides. (…)

Au contraire, les bosons sont grégaires ; non seulement ils peuvent coexister dans un même état, mais ils s’y agglutinent en s’y attirant mutuellement et ils peuvent s’accumuler en nombre dans un même état, portés par une même onde, contrairement aux électrons.

Le cas le plus important est celui de la lumière parce que, si nous avons une onde lumineuse qui possède une couleur (donc une fréquence de vibration), une polarisation (donc un type de vibration) déterminés et qui, de plus, est cohérente (c’est-à-dire qu’elle possède une phase déterminée et que tous ses points vibrent soit à l’unisson soit avec des écarts de vibration constants), cette onde pourra être porteuse d’un grand nombre de photons qui auront ces mêmes qualités en commun : on dira que ces photons sont cohérents, ou en phase. De plus, l’« esprit grégaire » des bosons fera que, si une telle onde lumineuse tombe sur un atome qui est capable d’émettre un photon de la même couleur que l’onde, celle-ci provoquera l’émission du photon qui viendra se joindre aux autres et augmentera l’intensité de la lumière en maintenant sa cohérence. C’est le phénomène d’émission stimulée de la lumière, découverte par Einstein (en 1916) et dont Louis de Broglie a prédit les propriétés de cohérence (en 1924). (…) Le rassemblement d’un grand nombre de bosons sur une même onde cohérente peut constituer un phénomène brutal qui se produit soudainement, au-dessus d’un certain seuil de température (généralement très bas) et qui porte le nom de condensation d’Einstein. (…) Cette condensation appartient à la classe des transitions de phase, parmi lesquelles on peut citer des exemples courants de transitions qui peuvent se produire à des températures ordinaires, comme la solidification d’un liquide, ou la condensation d’une vapeur. (…)

Si on abaisse suffisamment la température d’un fluide, l’agitation moléculaire se ralentissant, les longueurs d’onde associées au mouvement des molécules vont s’allonger et les molécules pourront se diffracter les unes sur les autres. Alors, au lieu d’être déviées par les collisions, elles pourront se traverser mutuellement, comme se traversent les ondes, sans se gêner les unes les autres et elles poursuivront leur route sans avoir subi de choc véritable. Et puisque la viscosité est due aux chocs moléculaires, il s’ensuivra qu’au-dessous d’une certaine température, les chocs perdant de leur importance, on devrait observer une brusque chute de viscosité que les théories anciennes ne prévoyaient pas et qui résulte des propriétés ondulatoires de la matière. »

Etienne Klein dans « Dictionnaire de l’ignorance » :

« Cette description des particules, entremêlant les propriétés des ondes et celles des corpuscules, est révolutionnaire. Elle met en relation des images que notre esprit isole dans des catégories distinctes, voire opposées. L’étrangeté de la chose vient de ce que toutes les particules, qu’elles soient de lumière ou de matière, nous appariassent soit comme des ondes (elles peuvent interférer – l’interférence est une addition qui est inhibitrice) soit comme des corpuscules (elles semblent ponctuelles quand on détecte leur position), mais elles ne sont ni des ondes ni des corpuscules. (…) Puisque les concepts d’onde et de corpuscule apparaissent mutuellement exclusifs en même temps qu’indissociables, il n’existe aucune possibilité de définir leur sens au moyen, d’une seule expérience. On ne peut pas les combiner en une seule image. Néanmoins, ils sont nécessaires l’un à l’autre pour épuiser tous les types d’information que nous pouvons obtenir sur un objet quantique à l’aide des divers appareils de mesure. (…) Dans la bouche de Niels Bohr, le mot complémentarité n’est pas à prendre dans son sens usuel. La complémentarité ne signifie nullement pour lui quelque chose comme « collaboration » ou « association ». La dualité n’est pas un duo, l’association de l’onde et du corpuscule n’est pas une synthèse. Elle incluse toujours au contraire l’exclusion mutuelle et la disjonction des éléments qu’elle met en vis-à-vis. Il faut la voir comme une sorte de paradoxe irréductible qui lie un concept à sa négation. (…) Comme nous dit John Bell, dans la bouche de Niels Bohr, (…) la complémentarité est proche du concept de contradiction (…) Contradiction est le mot fétiche de Bohr, comme l’ont fait remarquer Wootters et Zurek dans un article de 1979. »

L’onde de lumière réfléchie page 1

L’onde de lumière réfléchie page 2

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