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Edito – La révolution qui vient…

jeudi 16 octobre 2014, par Robert Paris

Edito – La révolution qui vient…

Ce texte n’a nullement pour but de faire du futurisme ni de la politique fiction. Il ne s’agit même pas de prendre des quelconques désirs révolutionnaires pour des réalités. Nous sommes les mieux placés pour avoir conscience que les travailleurs ne sont pas préparés à des échéances révolutionnaires éventuelles, faute de l’existence d’une organisation internationale des travailleurs et d’une conscience d’une perspective de changement allant dans le sens de la propriété collective des moyens de production. En fait, nous ne croyons pas plus aux prédictions en termes politiques que dans d’autres domaines et nous sommes persuadés que l’avenir nous réserve de nombreuses surprises, tout particulièrement en ce qui concerne la capacité révolutionnaire du peuple travailleur du monde. On ne s’en souvient plus aujourd’hui mais que les peuples travailleurs d’Egypte et de Tunisie balaient leurs dictateurs a surpris le monde entier. Et le développement d’une vague révolutionnaire mondiale n’est nullement un développement historique qui apparaît comme une suite logique de la situation actuelle et pourtant… Pourtant, si la crise révolutionnaire a été retardée à coup de centaines de milliards de dollars notamment, si le système peut sembler toujours bien en place, son effondrement n’est que retardé et la révolution est toujours potentiellement présente.

Et c’est cette perspective révolutionnaire qui explique toutes les politiques des bourgeoisies mondiales depuis 2008. Des USA à la Chine, les classes dirigeantes vivent dans la crainte d’une montée révolutionnaire prolétarienne et c’est cela qui explique tous leurs choix fondamentaux, qu’ils soient économiques, politiques ou militaires.

Depuis la crise économique de 2007-2008, toutes les mesures économiques comme politiques ont consisté à la retarder, quitte à en aggraver l’ampleur. Elles ont consisté à inonder d’argent public les marchés et à jeter encore autant d’argent pour sauver toutes les banques et tous les trusts. Il faut remarquer que cela n’a jamais été le cas lors de crises précédentes qui ont pourtant été nombreuses et multiformes. Toutes les crises du capitalisme avaient servi, au contraire, à supprimer des entreprises en faillite, permettant ensuite une reprise économique dans un environnement éclairci. Cette fois, telle n’est plus la politique du capitalisme mondial qui estime qu’on ne peut plus laisser couler une seule grande entreprise, les petites étant par contre abandonnées sans pitié. Il ne s’agit pas de sauver les salariés. Il ne s’agit même pas seulement d’aider les grands capitalistes. Le système a estimé que la seule chute d’un gros capitaliste signifierait un risque systémique mondial ! Il s’est donc donné du temps en aggravant l’ampleur de la crise puisque celle-ci provenait d’une trop grande quantité de capitaux volatils, non investis dans la production. Ils ont multiplié encore cette quantité et livré des sommes colossales aux marchés financiers déjà surabondants.

Ils se sont donc seulement donnés du temps en retardant l’effondrement, augmentant l’ampleur qu’aura ensuite celui-ci. C’est dans le but de profiter de ce délai pour préparer politiquement et socialement la situation qui viendra. Certes, il y a eu une vague révolutionnaire dans le monde arabe et au Maghreb, s’étendant de manière limitée en Afrique ou au Brésil, ainsi qu’en Islande ou en Bosnie. Mais pas encore de vague prolétarienne mondiale. Et, depuis, les Etats capitalistes de la planète pensent avoir développé tous les pare-feux aux risques révolutionnaires.

Ils ont en effet tout fait pour détourner la colère des peuples, pour les diviser, pour les déboussoler. Et ils continuent à ne faire que cela. Ils sèment partout la haine, ici contre les Roms, là entre Japonais et Chinois ou entre Coréens, entre Ukrainiens, entre Musulmans chiites et sunnites, ou entre Occidentaux et Musulmans, ou encore entre Européens et Russes et on en passe des oppositions comme entre Alsaciens et Français, entre Ecossais et Anglais sans reparler de la Corse ou de la Bretagne…

Et, au sein d’un même pays, ils opposent les jeunes et les vieux, les banlieues et les autres, tous contre les fonctionnaires, contre les immigrés, contre les sans papiers, etc, etc…

Ce sont les sentiments fascistes qu’ils espèrent ainsi implanter parmi les peuples tout en glorifiant la guerre mondiale, en justifiant le maximum de guerres aux quatre coins de la planète, en faisant croire aux peuples qu’ils sont menacés par le terrorisme… Il s’agit à la fois d’habituer les peuples à l’idée d’une guerre mondiale, de faire croire que cela libérerait le climat, que la Russie et la Chine les menace, etc… Toute cette politique n’a qu’une seule source : la crainte des classes dirigeantes mondiales de la révolution sociale qui va sortir de l’effondrement seulement retardé du système capitaliste.

Certes, les travailleurs ne se revendiquent pas aujourd’hui d’une lutte mondiale pour faire chuter le capitalisme. Certes, ils n’ont pas aujourd’hui une parole publique affirmant qu’ils vont agir en tant que classe pour le renverser et bâtir le socialisme. Le stalinisme est passé par là et n’a pas laissé pierre sur pierre de confiance dans les perspectives historiques du prolétariat. La social-démocratie avait déjà œuvré pour détruire cette confiance et n’a cessé de travailler en ce sens. Mais cela ne suffit pas aux classes dirigeantes qui savent parfaitement que si conditionne d’abord la révolution prolétarienne, ce sont les conditions objectives, et d’abord économiques, de la domination capitaliste. Il ne suffit pas que les travailleurs croient à l’avenir du système. Encore faut-il que ce dernier puisse fonctionner. Or, c’est exactement ce qui a été mis en cause en 2007-2008 et c’est pour cette raison qu’il a été impossible de laisser la crise causer des faillites, impossible d’avoir une récession qui aurait permis d’avoir ensuite une reprise économique, comme dans toutes les crises précédentes du capitalisme. C’est exactement pour cela que les classes dirigeantes ne voient l’avenir qu’au travers d’une montée tous azimuts des fascismes et des guerres dans le monde.

Et c’est aussi pour cela que nous ne sommes plus au bout d’une série des défaites historiques, des trahisons conjointes de la social-démocratie et du stalinisme, mais à l’aube d’une ère nouvelle : d’une nouvelle série de crises révolutionnaires historiques. Nous sommes à nouveau entré dans ce que nos prédécesseurs appelaient « une ère des révolutions et des contre-révolutions ».

Bien sûr, on ne nous dit pas que la montée des guerres, des terrorismes, des guerres civiles, des insurrections égyptienne, tunisienne, etc, ont eu comme seule raison la crainte de la révolution sociale. On s’en garderait bien ! Le but est exactement inverse : que les travailleurs ne se sentent surtout pas une classe forte, existant à l’échelle mondiale, ayant les mêmes intérêts et le même programme à défendre, par delà les frontières. Quand on évoque les guerres mondiales, et cela ne manque pas, ce n’est surtout pas pour rappeler que ces deux grandes boucheries ont eu pour raison principale la lutte contre les risques d’une montée révolutionnaire, exactement comme on se garde de dire que tous les fascismes et tous les génocides ont eu comme rôle principal, du côté des classes dirigeantes, d’éradiquer les risques de révolution prolétarienne.

Le discours dominant est encore évidemment celui des réformistes : on va pouvoir éviter le prochain effondrement, on va voir revenir une reprise économique, on va réformer le capitalisme et le système bancaire et financier, on va empêcher les guerres, les terrorismes et les dictatures, on va éviter une nouvelle guerre mondiale, on va maintenir la démocratie. Mais tout cela n’est que mensonges et poudre aux yeux. La démocratie bourgeoise est progressivement détruite et discréditée par les mêmes classes dirigeantes qui l’avaient présentée comme le seul régime politique possible pour les pays riches. La concertation sociale, présentée là aussi comme un modèle de société, est vidée de tout contenu par les attaques antisociales que la bourgeoisie et son Etat visent à faire entériner. Il devient de plus en plus clair que tous les anciens acquis sociaux de la retraite à la santé publique, des services publics aux allocations chômage, du CDI au code du travail vont être remis en cause, y compris dans les pays riches. C’est cela qui fait que le fascisme soit la seule perspective de la bourgeoisie désormais et que, du coup, la révolution prolétarienne soit la seule perspective à lui opposer. Fini le syndicalisme de collaboration de classe dans lequel les centrales syndicales prétendaient obtenir des améliorations sociales en échange d’un soutien au système d’exploitation. L’Etat et les classes dirigeantes n’acceptent plus, de la part des syndicats, qu’un soutien à des sacrifices sans cesse plus graves et plus nombreux. Fini l’espoir que l’alternance politique, gauche-droite, change quoique ce soit de positif dans la société. A ceux qui souhaitent le changement politique, on ne leur présente plus que la possibilité de soutenir des fascistes, des démagogues de toutes sortes d’extrême droite, Par exemple, en France, Le Pen pour les uns, Valls pour les autres, Soral pour les troisièmes. Que des idéologues du fascisme ! Et ce n’est qu’un exemple : partout dans le monde, les fascismes rivalisent… Tous ne rêvent que d’opposer les Musulmans aux autres, d’opposer les nations et les peuples, de cultiver un nationalisme exacerbé, que de s’attaquer aux droits des travailleurs, notamment à leur droit de grève, aux acquis sociaux, aux services publics… Finis les mythes bourgeois du progrès capitaliste, de la réussite sociale, de l’enrichissement général de la population, de l’Etat au service du public, du développement économique et social sans limites, de la démocratie, de la paix entre les peuples, de l’entente des classes sociales, etc…

Eh bien, ne pleurons pas sur ce monde disparu ! Car ce monde, c’est aussi celui où des millions d’hommes, de femmes et d’enfants souffraient de la faim, de l’exploitation, de l’oppression, de la dictature. Certes, dans les pays riches, on pouvait, si on disposait d’un emploi fixe, vivre une vie digne de ce nom. Désormais, même dans les pays riches, cela ne sera plus le cas. Les nouvelles générations ne connaîtront plus ce monde-là et déjà la jeune génération ne croit pas qu’elle aura une retraite et ne connaît quasiment plus le CDI quand ce n’est pas qu’elle n’a plus accès à la santé ou au logement… Cela signifie qu’il va falloir que les travailleurs changent leur point de vue sur le monde. La lutte des classes, loin d’être dépassée, est désormais la seule perspective pour les travailleurs, pour les milieux populaires, pour la jeunesse, que ce soit pour lutter contre l’exploitation sans frein, pour défendre des anciens droits, des services publics, pour défendre leur droit à la vie contre les guerres et les fascismes. Eh bien, vive le retour de la lutte des classes ! Et qu’elle gagne dans la réalité comme dans les consciences ! La collaboration de classe, même quand elle permettait à une toute petite fraction de la population du monde, une fraction de celle des pays impérialistes, de vivre à peu près correctement en profitant de miettes tirées de l’écrasement du reste du monde, n’était qu’une vaste duperie. La croyance que les peuples pouvaient se gouverner eux-mêmes par les élections bourgeoises n’a jamais été qu’un cache-sexe de la domination politique et sociale des classes dirigeantes sur les Etats bourgeois.

Désormais, le voile ne cache plus rien. Le dialogue patronat-syndicats-Etat a toujours été une tromperie au service des classes dirigeantes. Il n’a plus aucun avenir et ce n’est pas un mal. Les travailleurs n’ont pas cessé d’être dépossédés du droit de s’organiser dans la société bourgeoise car le droit des syndicats n’est pas équivalent au droit des salariés. Dans l’entreprise, le droit bourgeois a toujours consisté à affirmer que les travailleurs sont dans une propriété privée et n’ont ni à se réunir, ni à écrire et diffuser des tracts, ni à se concerter librement. Eh bien, désormais, s’ils veulent le faire, il faudra que ce soit en combattant le droit bourgeois de la propriété privée des capitalistes sur l’entreprise. De même, pour défendre leur emploi, leur salaire, leurs conditions de travail, leurs droits, les travailleurs vont devoir remettre en question cette propriété privée des capitalistes. Eh bien, la voilà la perspective commune à tous les travailleurs du monde ! La voilà l’alternative à un monde capitaliste qui ne sera plus que de peurs, de sueur et de sang ! Et elle a tout un avenir alors que le monde capitaliste est sur sa fin…

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