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Le prolétariat, la question nationale et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

dimanche 11 mai 2014, par Robert Paris

Le prolétariat, la question nationale et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

Des questions nationales, il en explose non seulement au Nigeria, en Irak, en Turquie, au Mali, au Maroc, en Ukraine, en Yougoslavie, en Russie, en Palestine mais même en Irlande, en Espagne, en Corse, c’est-à-dire dans les pays riches… Parfois, c’est la couleur de peau, c’est la région, c’est la religion qui sont visées. Par exemple, les Noirs de Mauritanie sont toujours opprimés en tant que Noirs.

Des peuples comme les Kurdes, les Arméniens, les Palestiniens n’ont pas vu leurs droits nationaux reconnus et se sentent opprimés sur leurs droits en tant que groupe national.

Ce ne sont pas les nationalistes qui inventent ces questions. L’oppression existe bel et bien, même si elle n’est pas soulevée par des nationalistes, comme c’est le cas dans les anciennes colonies françaises.

Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est une vieille question puisque c’est le mouvement bourgeois d’Europe de l’Ouest qui lui a donné son drapeau. Les nationalités se battaient alors contre la féodalité et contre les empires. C’est donc le mouvement révolutionnaire bourgeois qui a choisi comme drapeau ce droit des nationalités aux côtés d’autres droits démocratiques, de l’individu, de l’égalité face aux institutions, du droit à la terre, du droit d’association, du droit à la justice, du droit à la propriété, du droit à la représentation politique, etc… Ces droits peuvent être appelés bourgeois sans que le qualificatif n’ait un air péjoratif. Cela signifie seulement qu’en termes historiques, ces aspirations ont correspondu à la montée de la bourgeoisie vers le pouvoir dans sa lutte contre la noblesse, les rois, les princes et les empereurs, lutte qui a mené aux révolutions sociales et dans laquelle la bourgeoisie a su prendre la tête de tous les milieux populaires révoltés.

Par la suite, la bourgeoisie occidentale, parvenue au pouvoir, a réalisé ses propres aspirations et s’est moquée du fait que le reste de la population n’ait pas obtenu ce qu’elle souhaitait. Elle a même fini par dominer le monde en se fondant sur les Etats bourgeois qu’elle avait ainsi fondés. Mais sa domination sur le monde ne signifiait pas qu’elle ait imposé à cette échelle les droits démocratiques bourgeois. Même dans les riches pays occidentaux, ils étaient très loin de correspondre à une réalité. Même l’égalité de tous devant la justice, la santé, l’éducation, les forces de l’ordre, etc., n’ont jamais été réellement appliqués. L’égalité économique, elle, était diamétralement opposée aux buts de la bourgeoisie capitaliste. L’unification nationale prônée par la grande bourgeoisie ne correspondait même pas aux aspirations petites bourgeoises. La démocratie politique a été la grande tromperie des masses petites bourgeoises, l’Etat étant entièrement au service du grand capital et nullement de la petite bourgeoisie. Et ne parlons pas du prolétariat qui n’a nullement de mode de représentation politique et pour lequel le droit politique est réduit à néant.

On aurait pu penser que les travailleurs allaient prendre la suite en dirigeant les aspirations des masses populaires, qui restaient insatisfaites et explosives, comme ils l’ont fait dans la Commune de Paris en 1871 ou dans la révolution d’Octobre en 1917 en Russie.

C’est compter sans l’action du réformisme au sein de la classe ouvrière et des masses populaires.

L’idée même d’une intervention politique autonome du prolétariat sur le terrain politique, d’une organisation politique de masse autonome des travailleurs, d’un programme autonome des travailleurs donnant des perspectives politiques et sociales à l’ensemble de la société (en s’adressant ainsi à la petite bourgeoisie) a été éradiquée par le réformisme, qui milite pour que les travailleurs ne conçoivent leur intervention qu’au sein des institutions politiques et syndicales inféodées à la bourgeoisie.

Que ce soit sur les questions démocratiques bourgeoises insatisfaites ou sur les autres aspirations populaires ou ouvrières, les réformistes affirment que le seul moyen de changer l’état des choses est de participer aux institutions de la grande bourgeoisie. Et cette idée est maintenant si bien implantée qu’elle n’étonne plus personne, même pas la majorité des militants qui se situent à l’extrême gauche.

Ce que les gens appellent « la démocratie » n’est rien d’autre que la dictature du grand capital et elle ne tient nullement compte de l’avis de la majorité de la population. Dans aucune grande décision, face même aux catastrophes, jamais l’opinion de la majorité n’a été prise en compte dans aucun des pays dits démocratiques. Ce sont des Etats qui sont tout aussi répressifs que les autres dès qu’il s’agit des intérêts du grand capital.

Faute de prendre en charge les aspirations démocratiques des peuples, le prolétariat a été infecté par les illusions démocratiques de la masse petite bourgeoise qui exerce une pression largement supérieure à son rôle économique et social, à son poids politique réel.

La grande bourgeoisie s’est appuyée sur cette masse petite bourgeoise pour faire reculer le prolétariat. Cela a donné les partis et les syndicats réformistes tels qu’ils existent aujourd’hui. Quelques années de prospérité capitaliste ont suffi à étayer leurs discours et leurs mensonges selon lesquels le capitalisme était un horizon indépassable et qu’il fallait seulement lutter, au sein même du capitalisme, pour avoir une meilleure part du gâteau de la croissance. Les uns ont dit : votez pour moi et je donnerai une meilleure part aux milieux populaires quand je serai au gouvernement et les autres : soutenez mon syndicat et cela me donnera du poids pour négocier en votre nom et vous obtenir des aménagements plus favorables sans renverser le système qui vous donne à manger, à boire, à vous loger, à vous soigner, à éduquer vos enfants. Les réformistes politique et syndicaux avaient un point commun : considérer la société capitaliste, les institutions capitalistes, la nation capitaliste comme notre société, nos institutions, notre nation, l’Etat comme notre Etat, la police comme notre police, l’armée comme notre armée, la justice comme notre justice, l’entreprise comme notre entreprise.

Voilà les illusions petites bourgeoises que le réformisme a adoptées et fait adopter à la majorité des travailleurs, faisant reculer grandement la conscience prolétarienne…

L’idée que le prolétariat devait prendre la tête de l’ensemble des aspirations populaires afin d’aller au pouvoir en gagnant à lui (ou en neutralisant partiellement) la petite bourgeoisie, isolant l’infime minorité de grands capitalistes, a complètement disparu des idées politiques.

Du coup, l’idée que les luttes d’indépendance nationales, que la question de l’oppression nationale (c’est-à-dire l’oppression d’une fraction sur la base de son appartenance à un groupe fondé sur une origine locale, régionale, religieuse, de couleur de peau, d’ethnie ou autre), devaient être prise en charge par la nouvelle classe révolutionnaire, c’est-à-dire la classe qui offrait une perspective nouvelle à la société humaine, dépassant le capitalisme, a été politiquement éradiquée et ne fait plus partie du paysage politique. Même les extrêmes gauche qui se disent et se croient révolutionnaires n’en sont pas porteurs, pas plus qu’ils ne portent l’idée que les autres aspirations démocratiques doivent être satisfaites en sortant du cadre bourgeois. Même sur les aspirations ouvrières, ils ne portent pas cette idée mais au contraire celle, illusoire et criminelle, de résoudre les questions sociales dans le cadre bourgeois. Ils diffusent l’idée qu’il suffirait de se mettre d’accord sur une meilleure répartition des richesses ou des sacrifices pour que tout aille pour le mieux dans le meilleur des mondes capitalistes. Bien sûr, certaines extrêmes gauche continuent à parler de communisme et à s’en revendiquer mais tout leur discours répète que l’Etat devrait faire ceci, que les entreprises devraient faire cela, que la société devrait être comme ceci ou comme cela, omettant de rappeler que l’Etat, les institutions, la société, les entreprises appartiennent en totalité à l’infime minorité capitaliste, ce qu’aucune élection et même qu’aucune lutte ne peut changer, sauf à renverser l’ordre existant.

Il reste l’infime minorité dite ultra gauche qui récuse tout ce qui est bourgeois et on peut croire que les événements lui ont donné raison quand on voit comment le réformisme a entraîné les extrêmes gauches opportunistes, comme ces dernières collent au train des syndicats et des élections bourgeoises…

Seulement ces ultra gauche, qui refusent systématiquement soit le parlementarisme soit les syndicats, ou les deux, qui défendent à juste titre la nécessité d’une organisation autonome de masse des travailleurs au plan politique allant jusqu’à leur prise de pouvoir en renversant le pouvoir capitaliste, considèrent que les travailleurs doivent balayer d’un revers de main les aspirations petites bourgeoises, puisqu’elles sont infectées par la société bourgeoise, puisqu’elles sont incapables de se différencier des conceptions bourgeoises, puisqu’elles ne peuvent consciemment opter pour le communisme dont est porteur potentiellement le prolétariat.

Selon ces courant, pas de question nationale à défendre pour ces ultra gauche, pas d’aspiration démocratique bourgeoise à soutenir, pas de tentative que le prolétariat prenne la tête d’une lutte fondée sur l’oppression nationale, sur les aspirations paysannes, sur les religions, les ethnies, les régions opprimées, etc…. Contre tout cela, les ultra gauche défendent la pureté communiste et prolétarienne qui a le mérite de simplifier les problèmes : le prolétariat devant seulement affronter seul les classes dirigeantes et se contenter de garder la pureté de son idéal communiste…

Pourquoi la grande bourgeoisie est incapable de satisfaire les aspirations petites bourgeoises qui restent explosives

Ces dernières années, de nombreuses explosions sociales ont eu lieu, notamment en Afrique, en Afrique du nord, au Maghreb, en Europe de l’Est et en Asie. Partout, les masses populaires soulevées n’ont pas été des masses prolétariennes « pures » mais, quand le prolétariat a participé aux événements, c’est aux côtés d’une masse petite bourgeoise et il a été déterminant que les prolétaires ne soient pas intervenus dans ces événements avec l’outil d’un programme prolétarien socialiste s’adressant à ces couches petites bourgeoises révoltées.

La crise de la domination capitaliste, marquée par l’effondrement de 2007 et dont le système est incapable de se sortir, signifie que le capitalisme a atteint son sommet et ne peut plus que détruire toutes ses victoires précédentes. Donc non seulement, il n’est pas en état de réussir à satisfaire des aspirations populaires qu’il n’avait pas satisfaites précédemment mais il ne va plus être capable de réussir ce qu’il réussissait auparavant, y compris dans les pays riches dits démocratiques, où il va devoir détruire progressivement le caractère politique et social de la démocratie elle-même.

Il en découle que les masses petites bourgeoises vont de plus en plus tomber du haut de leurs illusions et se révolter. Il serait dramatique que le prolétariat néglige cette révolte, refuse d’en prendre la tête, de représenter une véritable perspective pour ces couches sociales car, alors, ce sont uniquement les courants démagogiquement radicaux, ceux de l’extrême droite, qui prétendront leur offrir une perspective et la révolution se changera en contre-révolution…

Bien avant la crise actuelle, la domination de la grande bourgeoisie capitaliste n’a pas signifié la résolution des problèmes posés à la petite bourgeoisie et aux masses populaires, y compris dans les pays riches. L’élan donné par les révolutions bourgeoises en Europe a été arrêté dès que la grande bourgeoisie a atteint le pouvoir politique. Elle a cessé alors de combattre les pouvoirs féodaux oppressifs, les sectes religieuses, les traditionalismes réactionnaires, les paternalismes, les royautés, les empires, les principautés, tous les restes féodaux, esclavagistes, toutes les anciennes formes d’exploitation et d’oppression qui avaient précédé le capitalisme et s’est associé à elles. La bourgeoisie capitaliste a cessé depuis belle lurette de jouer un rôle social révolutionnaire dans le monde.

Elle a créé un marché mondial unique mais pas un univers social et politique unique… Dans la plupart des pays pauvres, ex colonisés, la domination capitaliste n’a pas signifié la disparition de toutes les racines féodales, paternalistes, celles des sectes religieuses, des dominations ethniques, régionales, raciales anciennes. La démocratie qui s’y est installée est une caricature de celle des pays riches qui, elle-même, est une caricature de ce que les peuples entendaient par démocratie quand ils imposaient leur loi au travers de la mobilisation populaire de la révolution bourgeoise.

La grande bourgeoisie triomphante a, depuis belle lurette, composé avec les anciennes classes dirigeantes féodales. Cela s’est produit déjà avec la première révolution bourgeoise anglaise. A partir de 1848-1905, cela s’est révélé vrai également à l’échelle mondiale comme l’ont affirmé Marx, Engels, Lénine ou Trotsky : la bourgeoisie n’était plus une force révolutionnaire, ni localement, ni nationalement, ni mondialement. Et cela pour une raison fondamentale : une nouvelle force révolutionnaire était apparue, le prolétariat. La direction de la société n’était plus menacée par la féodalité mais elle l’était désormais par la classe salariée. La bourgeoisie, même si localement ses intérêts étaient mis en cause par une grande bourgeoisie étrangère, n’envisageait plus de s’appuyer vraiment sur la force des masses populaires pour mener ce combat.

Et cela d’autant moins que l’étape nationale était dépassée y compris pour les bourgeoisies européennes. On était en effet arrivés à l’étape impérialiste. Cela ne signifie pas que les barrières nationales aient été abattues mais quelques grandes puissances, s’appuyant sur la centralisation bancaire, financière et des trusts, étaient devenues dominantes, réduisant à néant l’indépendance nationale des plus petits pays…

Une nouvelle étape a été franchie avec la politique des blocs où la bourgeoisie occidentale, sortie de la deuxième guerre mondiale, a choisi de se protéger contre les risques de la révolution prolétarienne en s’appuyant sur la bureaucratie russe et son occupation de la moitié de l’Europe et de l’Asie.

C’était déjà un important signe de faiblesse, de manque de dynamisme du capitalisme et de manque d’assurance de la classe dirigeante.

Cependant, cela ne signifie pas que la fin de la politique des blocs, appelée aussi chute du mur de Berlin, ait signifié un renforcement et une assurance plus grande de la bourgeoisie impérialiste.

Au contraire, les années 80 sont celles d’une reprise de la lutte des classes partout dans le monde et d’une menace prolétarienne contre les piliers même de la politique des blocs, du côté Est comme du côté Ouest, en Pologne comme en Turquie, en Hongrie comme en Corée du sud.

Cependant, pour réaliser cette opération que l’on a appelé « la mondialisation », l’impérialisme a été alors contraint d’offrir une ouverture aux bourgeoisies les plus importantes du tiers monde qui étaient opprimées, bloquées dans leurs ambitions et dans leurs possibilités d’extension. Cela a signifié l’entrée parmi les puissances impérialistes de pays et de bourgeoisies comme celles de Chine, de Russie, du Brésil ou d’Inde.

Par contre, la phase de la mondialisation a signifié une dépendance nouvelle sur le plan politique, économique ou militaire, des autres pays. Elle signifie que l’impérialisme ne se gène plus pour dicter violemment sa loi aux autres nations, les contraignants à des politiques économiques catastrophiques dictées de l’étranger, à des occupations quasi coloniales, à des interventions militaires violentes sous prétexte de lutte contre les dictatures et les terrorismes.

Quelle changement cette nouvelle situation mondiale de la domination capitaliste entraîne-t-elle pour la question du « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » et quel autre changement depuis 2007-2008, c’est-à-dire depuis que le système a atteint ses limites et est bloqué ?

Il faut bien comprendre que nous ne posons pas la question du point de vue petit bourgeois, de celui des illusions nationales et démocratiques car on ne peut pas faire revenir en arrière l’Histoire du monde, vers la grande époque des nationalités, de 1789 à 1848 en Europe. Même si les réformistes bourgeois le prétendent et notamment les staliniens, le nationalisme ne peut plus correspondre à l’élan populaire de la Révolution française.

La question n’est pas de savoir si les masses petites bourgeoises et les couches sociales qu’elles influencent vont continuer à avoir des illusions démocratiques mais si le prolétariat et son aile révolutionnaire, sans avoir de telles illusions, doit donner une perspective aux questions démocratiques petites bourgeoises au sein d’un programme prolétarien communiste.

Comme nous l’avons dit précédemment, nous disposons d’une réponse simple, celle des courants dits « communistes de gauche », de type italien ou allemand, qui répondent qu’il faut rejeter tout ce qui est petit bourgeois comme tout ce qui est bourgeois.

Si les réformistes ne veulent surtout pas que le prolétariat révolutionnaire prenne la tête de toutes les couches révoltées pour prendre le pouvoir contre la grande bourgeoisie, les « gauches », eux, sont révolutionnaires et veulent que le prolétariat prenne le pouvoir mais sans pactiser du tout, sans s’adresser même aux masses petites bourgeoises, se fondant sur l’idée, juste, que ces masses ne sont pas et ne seront pas communistes.

Cette position est opposée à celle qu’ont prise Lénine et Trotsky en 1917, en Russie comme dans la révolution européenne.

C’est en pleine guerre mondiale impérialiste que Lénine, suite à la victoire d’Octobre 1917, a lancé à la gueule de l’impérialisme mondial son « droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » et sa « terre aux paysans » en même temps que sa « dictature des conseils d’ouvriers, de paysans et de soldats » qui donnaient ainsi un programme dirigé par la prolétariat mais s’adressant aussi aux masses petites bourgeoises opprimées et révoltées du monde et notamment aux nationalités opprimées qui se révoltaient contre les empires (austro-hongrois, ottoman, russe, prussien) et les empires coloniaux.

La démonstration que le pouvoir des soviets était capable de réaliser un tel programme était une arme considérable contre tous les impérialismes, arme politique et sociale qui lui a permis de vaincre les armées coalisées de l’impérialisme mondial, démontrant la validité d’une telle politique.

Le fondement théorique d’une telle politique est à chercher dans la théorie de Trotsky de « la révolution permanente » qui expose comment le prolétariat est chargé d’accomplir jusqu’au bout la révolution bourgeoise que la classe bourgeoise n’est plus capable d’accomplir jusqu’au bout. Mais, en réalisant des tâches démocratiques bourgeoises, cela ne signifie pas que le prolétariat ne fasse qu’une révolution bourgeoise car il est une classe qui va vers le communisme, vers la suppression de la propriété privée des moyens de production, vers la suppression des classes sociales, de toute exploitation de l’homme par l’homme et de l’Etat de classe.

Ce qui caractérise le point de vue commun de Lénine et de Trotsky sur cette question est d’avoir posé la question de manière dialectique et non diamétrale. Ils ont affirmé que la lutte communiste du prolétariat et les luttes petites bourgeoises, et notamment l’internationalisme prolétarien et le nationalisme bourgeois s’opposent certes mais dans une contradiction dialectique. Ils ont raisonné dialectiquement sur quatre situations successives :

 dans la révolution russe de 1905

 dans la guerre impérialiste mondiale de 1914-1918

 dans la révolution russe et européenne de 1917-1923

 dans la politique de l’Internationale communiste (troisième internationale) de l’époque de Lénine

A toutes ces époques, ils ont mené une politique visant à transformer le prolétariat de classe opprimée en classe dominante, ce qui supposait qu’elle devienne une direction de l’ensemble des masses populaires, y compris de la fraction la plus large possible des masses petites bourgeoises. Il n’y avait dans cette politique aucune forme d’opportunisme et les partis et syndicats opportunistes n’ont jamais soutenu la révolution permanente !

Pendant de longues années depuis la défaite de la vague révolutionnaire de 1917-1923, la direction du mouvement ouvrier par les réformistes, sociaux-démocrates, syndicalistes et staliniens a permis que les luttes révolutionnaires des masses populaires dans le monde entier restent sous la direction de forces bourgeoises. Ce faisant, l’Histoire a démontré combien ces forces étaient incapables de résoudre la question des aspirations démocratiques puisque ces aspirations explosent à nouveau en révolutions partout dans le monde. Certes, des Etats nationaux indépendants sont nés suite à la vague des révolutions dans les pays coloniaux mais il n’y a eu qu’une indépendance de pure forme et la domination, économique, sociale et politique, et même militaire, des anciens pays coloniaux s’est encore accrue au point souvent que leur occupation militaire a souvent été remise en place.

Les courants de type « gauche communiste » trouvent argument dans cette situation pour démontrer que le nationalisme bourgeois et petit bourgeois s’oppose diamétralement à toute politique prolétarienne communiste. Selon ces courants, le prolétariat et ses militants révolutionnaires devraient se détourner de toutes les questions démocratiques bourgeoises.

A l’inverse, on trouve des courants de l’extrême gauche (par exemple se réclamant du maoïsme mais aussi du trotskysme) qui ne voient aucun mal à soutenir sans critique les courants nationalistes petits bourgeois. Ces derniers ne défendent pas la nécessité que le prolétariat dirige politiquement les luttes liées à la question nationale ou à toute autre aspiration des masses petites bourgeoises comme la terre aux paysans ou les droits démocratiques. Non, ces courants soutiennent au contraire la direction petite bourgeoise de ces luttes !!!

On n’est pas obligés de sauter ainsi de l’autre côté du cheval : soit de nier l’existence de telles aspirations et leur potentialité révolutionnaire soit n’y voir aucune contradiction avec la perspective communiste du prolétariat.

Le courant stalinien, pour sa part, est souvent passé d’une des deux positions à l’autre, de l’opportunisme au sectarisme. Mais il n’a jamais soutenu la politique révolutionnaire proposant de faire du prolétariat, et sur ses propres bases, sur son programme, la direction de l’ensemble des luttes populaires.

Bien sûr, le nationalisme petit bourgeois s’oppose à la politique communiste prolétarienne et d’abord il est contre l’auto-organisation indépendante de classe du prolétariat. Il est complètement opposé à la dictature du prolétariat et au renversement du capitalisme.

Cependant, la petite bourgeoisie, durement frappée par la grande bourgeoisie, peut parfaitement se révolter et, dans ce cas, elle peut être entraînée partiellement par le prolétariat révolutionnaire, pour peu que ce dernier se donne consciemment cette tâche.

Prétendre que la petite bourgeoisie suivra toujours la grande bourgeoisie capitaliste comme son petit soldat, c’est accepter la défaite avant même de s’être battu.

Exiger que le prolétariat triomphe du capitalisme sans s’adresser aux couches petites bourgeoises, c’est refuser de se donner les moyens de saper l’appui de la grande bourgeoisie dans les masses petites bourgeoises.

Cela peut avoir un air très radical mais c’est un radicalisme utopique au sens où il saute par-dessus la transformation du prolétariat en classe dirigeante, étape qui nécessite que le prolétariat soit consciemment porteur de réponses pour toutes les couches sociales qui ne sont pas la classe capitaliste.

Avec l’époque impérialiste, avec la politique des blocs, avec la mondialisation et maintenant après l’effondrement du capitalisme en 2007 et son maintien en survie artificielle, il y a moins que jamais de perspective ailleurs que dans la révolution communiste prolétarienne internationale. Mais cela ne signifie pas que, politiquement et socialement, le prolétariat ait juste besoin d’une telle affirmation idéologique, d’une autoproclamation de son rôle, qu’il n’ait plus besoin de faire la preuve de sa capacité à diriger toute la société, preuve à faire aussi à ses propres yeux. Cette capacité politique révolutionnaire reste entièrement à construire. Elle ne consiste bien entendu pas à se détourner du communisme, de la révolution sociale ni du caractère de classe et internationaliste du prolétariat mais elle ne revient pas à se contenter de l’affirmer. Il faut que le prolétariat se reconstruise sur les bases d’un programme qui s’adresse à toutes les couches sociales frappées par la grand capital et ses Etats, sans bien entendu renoncer à son organisation autonome de classe, sans renoncer à ses perspectives internationalistes et communistes, mais en cherchant tous les moyens d’ôter à la grande bourgeoisie ses appuis dans la petite… Et notamment sur la question de l’oppression nationale partout où elle est durement ressentie.

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Sur quel programme s’adressant à la petite bourgeoisie, le prolétariat a fait la révolution d’Octobre

Lire sur la révolution permanente

Messages

  • Face à la situations catastrophique provoquée par la France et l’Europe en Ukraine, il est important de défendre le droit à l’autodétermination de toutes les régions d’Ukraine ou d’ailleurs.

    La France et les radios d’état mènent une propagande atroce concernant la manipulation de la Russie, mais nie ce que pourtant Schröder déplore : l’action de l’Europe pour soit disant intégrer l’Ukraine à l’UE n’a fait qu’envenimer les tensions sociales existantes dans le but de faire monter les nationalismes. Ainsi la presse nationaliste guerrière de France peut se demander ce matin : le france est-elle prête au conflit.

    Ce n’est qu’une manière de dire qu’il faut pousser l’économie nationale à une économie de guerre !!!!

    Voilà où veut en venir Hollande et l’Europe, et Merkel avec : provoquer le tournant guerrier -et le tournant vers le fascisme qui va avec- en Europe !

    Une politique fasciste en France n’est pas loin d’arriver, elle est en route !

    Vous aviez peur d’un Front national au gouvernement ? Mais les Valls à l’intérieur et les Hollande au plan international sont en train de mener le monde au fascisme et à la guerre !

    Dans une économie en plein marasme, les seuls secteurs qui embauchent un peu sont ceux de l’esclavage domestique et de l’industrie guerrière !!!

    Le seul moyen de faire face à la crise qui dure depuis maintenant 7 ans -ce n’est donc plus une crise classique du capitalisme- est de mener le monde à l’affrontement guerrier et de réitérer les précédents historiques de 1870, 1914 ou 1940 quoi qu’en disent les chroniqueurs qui soutiennent la politique impérialiste guerrière et fascisante de Hollande/Valls.

    Les seuls secteurs qui ont le vent en poupe et qui permettent de laisser un peu de notre force de travail dans l’espoir de trouver un travail et surtout de développer une plus-value nécessaire au profits des capitaux et d’assurer non pas l’évitement de l’effondrement généralisé, mais le soubresaut qui précède la mort du capital, c’est l’économie de guerre : seule une guerre mondiale permettra du point de vue du capital et des dirigeants de l’Europe, de la France et de la planète, d’assurer quelques années de plus (ou quelques dizaines d’années) au système du capital, ce tyran de la planète.

    Mais à quel prix ? quelques milliards de morts ne fait pas peur au Capital... la seule stratégie à opposer à cela est la stratégie révolutionnaire basée sur la révolution prolétaire et communiste déclinée à la situation du XXIe siècle.

    Nous avons des chaînes, nous n’avons qu’a les fondre pour en faire nos propres armes !

    Nous travaillons pour les guerriers et les marchands d’armes, nous n’avons qu’à tourner ces armes contre nos dirigeants et nos généraux pour prendre le pouvoir sur la finance mondiale... en commençant par le pays qui saigne les 4 coins du monde et qui prévoit de nouveaux bains de sang pour assurer les profits de quelques uns contre nos vies, contre la vie de milliards d’entre nous : la France !

    Seule une préparation sérieuse à la révolution en France est une réponse à la situation actuelle. Pour cela il est plus que temps que les travailleurs et les prolétaires se réunissent pour discuter de la situation mondiale et se préparer aux tâches plus qu’urgentes de l’heure. Il en va de la vie de chaque individu et de l’humanité entière.

  • Lénine - Du droit des nations à disposer d’elles-mêmes :

    Les partis socialistes qui ne prouveraient pas par toute leur activité maintenant, pendant la révolution et après sa victoire, qu’ils affranchiront les nations asservies et établiront leurs rapports avec elles sur la base d’une alliance libre - et l’alliance libre est une formule mensongère si elle n’implique pas la liberté de séparation - ces partis trahiraient le socialisme.
    Certes, la démocratie est aussi une forme d’Etat, qui devra disparaître quand celui-ci disparaîtra lui-même, mais cela n’arrivera que lors du passage du socialisme définitivement victorieux et affermi au communisme intégral.
    II. La révolution socialiste et la lutte pour la démocratie

    La révolution socialiste, ce n’est pas un acte unique, une bataille unique sur un seul front, c’est toute une époque de conflits de classes aigus, une longue succession de batailles sur tous les fronts, c’est-à-dire sur toutes les questions d’économie et de politique, batailles qui ne peuvent finir que par l’expropriation de la bourgeoisie. Ce serait une erreur capitale de croire que la lutte pour la démocratie est susceptible de détourner le prolétariat de la révolution socialiste ou d’éclipser celle-ci, de l’estomper, etc. Au contraire, de même qu’il est impossible de concevoir un socialisme victorieux qui ne réaliserait pas la démocratie intégrale, de même le prolétariat ne peut se préparer à la victoire sur la bourgeoisie s’il ne mène pas une lutte générale, systématique et révolutionnaire pour la démocratie.

    Une erreur non moins grave serait de supprimer un des paragraphes du programme démocratique, par exemple celui concernant le droit des nations à disposer d’elles-mêmes, sous prétexte que ce droit serait "irréalisable" ou "illusoire" à l’époque de l’impérialisme. L’affirmation selon laquelle le droit des nations à disposer d’elles-mêmes est irréalisable dans le cadre du capitalisme peut être prise soit dans un sens absolu, économique, soit dans un sens relatif, politique.

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