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Le gouvernement de gauche prend l’impopularité sur lui pour mieux protéger les classes dirigeantes

mercredi 5 septembre 2012, par Robert Paris

Pour clarifier la situation sociale et politique en vue de la lutte contre les licenciements ou comment le gouvernement de gauche prend l’impopularité sur lui pour mieux protéger les classes dirigeantes et cacher les enjeux sociaux et politiques de la situation

Le gouvernement Hollande-Ayrault-Montebourg assume. S’il doit y avoir une impopularité devant la situation sociale qui s’aggrave, avec la montée du chômage, des licenciements, de la misère et de la destruction des services publics, ils la prendront sur eux pour ne pas risquer que la lutte des travailleurs trouve son ennemi véritable : les classes dirigeantes et leur système. C’est cela un Etat au service des capitalistes. C’est cela un président normal. Les Etats bourgeois ont toujours fait cela comme on vient de le voir en Grèce, en Espagne et au Portugal et Hollande ne fera pas exception.

Jusqu’au bout, il prétendra que c’est de l’Etat que devrait venir la solution et il affirmera que c’est par les élections que son gouvernement devra, un jour, être sanctionné si la population estime qu’il n’a pas donné satisfaction. Et ainsi, au discrédit de la droite succèdera le discrédit de la gauche et ainsi de suite. Et, pendant ce temps, s’il parvient à maintenir le mécontentement dans ce cadre trompeur, si le système ne risquera pas d’être menacé par la révolte sociale, la situation des travailleurs, elle, se dégradera considérablement. Et la véritable force des travailleurs ne trouvera ainsi aucune issue.

Bien sûr, au-delà du parti socialiste, existent des forces qui ont appelé à chasser Sarkozy sans cautionner Hollande et qui affirment qu’il faut une mobilisation sociale dans la rue, notamment pour défendre les emplois. Mais ils se gardent bien de nous expliquer pourquoi, durant les élections, il fallait seulement chasser Sarkozy et pas immédiatement la préparer cette contre-offensive sociale. Ils se gardent aussi de nous expliquer ce qui empêche la liaison entre les travailleurs de tous les secteurs qui suppriment des emplois. Parce que ces groupes, partis, syndicats et associations de la gauche de la gauche ne veulent nullement critiquer les centrales syndicales qui négocient avec le gouvernement de gauche, qui acceptent de négocier sur des licenciements, qui admettent de partager une partie des sacrifices sous prétexte de « sauver quelques emplois », qui ne refusent pas en bloc le chantage social exercé par les patrons. Cette gauche de la gauche s’est bien gardé, durant les élections, de souligner qu’un plan massif de suppressions d’emplois se préparait, non seulement à PSA Aulnay mais dans tout le trust, dans toute l’Automobile, dans toute l’industrie, dans tous les secteurs d’activité, de la Pharmacie comme de la Métallurgie, du Bâtiment comme de la Téléphonie. Faire croire que l’on pouvait voter pour un bon gouvernement, pour une politique vraiment à gauche au gouvernement de l’Etat capitaliste, voilà ce que cette gauche de la gauche veut faire passer comme mensonge, autant que la social-démocratie de Hollande.

Illusions, désillusions, pleurnicheries ou dénonciations du gouvernement, tout a été dit sur l’action prétendue ou l’inaction dénoncée du gouvernement de gauche face à la crise sociale et notamment aux licenciements et au chômage massif. Mais rien de tout ce qui est dit sur ce thème n’est fait pour éclairer la lanterne des travailleurs. Car chaque mot qui est dit en ce sens sous-entend qu’avec une bonne politique, un bon gouvernement pourrait résoudre les problèmes. Et c’est fondamentalement FAUX !!!

Aucun gouvernement, élu dans le cadre du système et visant à sa défense, ne pourra ni ne voudra résoudre quoique ce soit aux problèmes de plus en plus violents que vont subir travailleurs et milieux populaires. Car ce qui en jeu n’est pas « le développement industriel » ou « la défense des emplois » en France.

Ce qui est en jeu, c’est l’alternative : défense ou contestation de la loi du profit. Admettre cette dernière, c’est accepter qu’en son nom, les capitaux se retirent massivement de leurs investissements productifs que ce soient dans la Pharmacie, la Téléphonie, la Métallurgie ou l’Automobile. Et dans ce cas, la vague actuelle de suppressions d’emplois n’est qu’un premier ballon d’essai pour une vague de licenciements secs bien plus dramatique. Il n’est pas exact qu’il suffit d’une « bonne politique » pour discuter et convaincre les patrons qu’il y aurait des opportunités de s’investir et d’exploiter la main d’œuvre, opportunités que ceux-ci auraient négligés. Il n’est pas vrai qu’il y aurait des « efforts partagés » qui permettraient de sauver à la fois les profits et les emplois.

Cette thèse des intérêts communs des patrons et des travailleurs est un leurre. Plus que jamais, avec la crise, les intérêts des classes sociales sont opposés irrémédiablement. Il est vital pour les capitalistes de s’attaquer aux travailleurs comme il est vital pour les travailleurs de s’attaquer aux capitalistes.

Hollande tient le propos selon lequel il découvre maintenant l’ampleur de la crise et ne peut pas ne pas en avertir les Français. C’est absolument faux. D’une part, il ne découvre rien, d’autre part, il n’informe nullement la population de ampleur réelle de la situation. Il ne dit rien sur les causes réelles de l’effondrement du système démarrée brutalement et de manière catastrophique en 2007-2008 et qui perdure en s’aggravant lentement malgré les interventions financières massives de tous les Etats du monde.

Pour cacher l’ampleur et la signification de la crise actuelle, le gouvernement de gauche comme celui de droite qui l’a précédé, prétend que la France et l’Europe seraient désavantagés économiquement et que les emplois subiraient ce facteur défavorable à l’économie française et européenne. C’est complètement faux et cela vise d’abord à blanchir les classes dirigeantes puisqu’elles apparaissent dans ce discours, celui du gouvernement, des média, de la droite, et des syndicats, comme victimes, de même que les travailleurs, de la concurrence des autres pays.

Non, Hollande pas plus que les autres gouvernants du monde capitaliste, ne peut dire la vérité à la population : le capitalisme est un système qui ne va aller que de mal en pis car il ne peut pas aller contre sa tendance à courir vers le profit et que cette tendance le mène aujourd’hui à détruire l’industrie et le commerce qu’il avait hier développée, à refuser d’investir dans des productions et des commercialisations où il gagnait hier.

Comme tous les gouvernements du monde capitaliste, celui de Hollande-Ayrault est là pour prendre tout le discrédit sur sa tête en affirmant que le gouvernement devrait être capable de résoudre la crise, ce que la situation montrera de plus en plus comme mensonger et illusoire. Il vise ainsi à détourner la colère des travailleurs, à ralentir et décourager les luttes des salariés, en prétendant prendre les problèmes, entreprise par entreprise, alors qu’ils se posent au niveau global, au niveau de la confrontation des classes sociales : travailleurs face aux capitalistes.

Bien entendu que le gouvernement va laisser les patrons mener leurs plans de licenciements massifs, même quand ceux-ci ne seront ni des départs volontaires ni des licenciements aidés ni des propositions de reclassement avec perte mais des licenciements secs sans rien pour les atténuer… Son rôle ne va consister qu’à aider financièrement, avec de l’argent public, les capitalistes et à laisser les syndicats s’engluer dans des négociations patronat/gouvernement/syndicats qui ne pourront rien donner.

La logique du profit c’est celle qui autorise le possesseur de capitaux à en faire ce qu’il veut sans autre morale sociale que d’augmenter son capital. On l’accepte ou on la refuse, mais, si on l’accepte, rien n’empêche un capitaliste de retirer ses capitaux de son entreprise et de licencier les salariés. Il suffit qu’il estime que cela n’en vaut pas la peine, vu le profit qu’il peut tirer autrement. Si Hollande voulait nous dire la vérité, il faudrait qu’il nous explique pourquoi, à l’échelle mondiale, les capitaux se retirent des entreprises de production et de commerce, et pourquoi les aides massives de tous les Etats du monde n’ont pas permis une reprise économique depuis l’effondrement de 2007-2008 ! Il ne le fera jamais car aucun gouvernement capitaliste ne le fera jamais, aucun ne dira jamais à la population que le capitalisme est mort, que sa dynamique ne reviendra plus et qu’il faut désormais en finir avec la loi du profit !

A nous, travailleurs, de savoir si on accepte la loi du profit quand elle nous tue comme on s’y est résignés quand elle nous donnait un emploi, même si elle bouffait déjà nos vies, détruisait notre santé et nous exploitait. Prétendre que l’on va, à la fois, sauver la loi du profit et notre droit à la vie est un leurre. C’est la principale arnaque sociale et politique dans la situation actuelle. C’est le fait de gens, de partis, de syndicats qui affirment qu’ « il y a des solutions économiques » ou qu’ « il y a des solutions politiques » pour sauver nos emplois tout en restant dans le cadre de la loi du profit.

C’est faux : actuellement, il est clair que la loi du profit pousse les possesseurs de capitaux à retirer massivement leur argent des investissements productifs. Ce n’est pas des gens qui ne nous disent même pas pourquoi cela se produit, partout dans le monde, qui vont nous donner des remèdes à une telle situation. Nous reviendrons un peu plus avant sur les véritables causes de cette situation entièrement nouvelle.

Faire croire que l’Etat capitaliste va dévoiler le fonctionnement du capitalisme, c’est prétendre qu’on peut s’élever en se tirant par les cheveux. Prétendre qu’un gouvernement de gauche va attaquer les fondements même du capitalisme, c’est affirmer qu’on va faire pondre un œuf par un chien ! Or, défendre nos emplois, aujourd’hui, c’est inévitablement s’attaquer directement et fondamentalement au système, à sa loi de base, à ses intérêts de classe. Sinon, aucune lutte pour la défense des emplois n’a de chance de succès. Voilà ce qu’aucun réformiste, avoué ou honteux, de gauche, de la gauche de la gauche ou de l’extrême gauche honteuse, ne fera jamais !

Hollande, ce n’est pas lui, le maître du capitalisme en France, pas plus que ne l’était Sarkozy ! Il n’en sont que les modestes serviteurs et, comme tels, ils sont irrémédiablement fidèles au système. De l’air placide d’Hollande à l’air excité de Sarkozy, il n’y a de différence que dans la forme ou dans le ton. Ils défendent le même système avec les mêmes méthodes, en changeant seulement les mots. Mais la clef de la lutte actuelle n’est pas dans les hommes qui gouvernent. Elle est dans la manière dont les travailleurs se gouvernent eux-mêmes ou ne le font pas et se laissent gouverner par des bureaucrates syndicaux !

Car, si les luttes des travailleurs sont dirigées par des appareils qui sont liés à l’Etat et sans cesse en négociation avec les patrons, c’est que nos soi disant dirigeants ne parlent jamais qu’à nos adversaires, n’ont pas été choisis par nous, ne sont pas révocables par nous, n’ont aucun lien avec nous. Il faut que ce soit tout le contraire. Il nous faut des députés, oui mais pas au parlement bourgeois. Il faut des députés des travailleurs, élus et révocables par les travailleurs eux-mêmes, sur les lieux de travail et d’habitation. Pas des avocats des travailleurs, des représentants qui soient élus parmi nous, qui soient révocables à tout moment par nous, des délégués de comités d’action, de comités de grève, de comités de lutte, de comités de chômeurs, de comités de femmes, de comités de jeunes, de comités de défense de l’emploi, etc…. Et que ces délégués se fédèrent à l’échelon des secteurs, des localités, des régions, de tout le pays et au-delà, pour défendre des intérêts de classe, un programme de défense des intérêts vitaux de la classe des travailleurs. Sans cela, aucune lutte n’ira ailleurs que dans le mur. Il importe de le dire tout de suite. Or, les luttes à venir vont être déterminantes car la classe dirigeante est en guerre. Si le gouvernement de gauche, lié aux centrales syndicales, tient un discours d’unité, de calme, de négociation, la classe bourgeoise, elle, mène des actes de guerre de classe. Cela n’a rien à voir avec la seule famille Peugeot. Ce n’est pas la méchanceté de telle ou telle famille de la bourgeoisie qui est en cause. Pendant des années, sa rapacité l’amenait à exploiter les ouvriers d’Aulnay et d’ailleurs. Maintenant, elle les licencie comme de multiples trusts. Et, encore, il n’y a pas plus de licenciements parce que le gouvernement multiplie ses efforts pour que la première vague de suppressions d’emplois réussisse sans trop de heurts. Après, ce sera la curée…

Il importe donc que, dès cette première vague de licenciements massifs des trusts, la réaction ait un caractère de classe, n’en reste pas à tel ou tel site, telle ou telle corporation, catégorie, profession, mais les unisse toutes, les travailleurs et les chômeurs, les travailleurs des trusts et ceux des sous-traitant, les travailleurs en fixe ou en CDD, les travailleurs avec ou sans papiers, qualifiés ou non qualifiés, etc…

Nous sommes une seule classe sociale et nous sommes attaqués par une seule classe sociale. Nos ennemis ne s’appellent pas Peugeot, Renault, Sanofi ou ArcelorMittal. Ce n’est pas les patrons méchants. Ils s’appellent la bourgeoisie capitaliste.

Les centrales syndicales et le gouvernement, qui prétendent être notre bouclier social, nous mentent. Il n’y a pas de tampon entre les travailleurs et la classe capitaliste. Du moment que la classe capitaliste a décidé d’en découdre, les endormeurs ne peuvent qu’œuvrer sur les syndicats pour les engluer dans des négociations sans fin et, pendant qu’ils négocient, nos emplois disparaissent. Ils ne peuvent pas, par des négociations, changer le cours de l’économie, les buts des capitalistes, ni aller contre le cours mondial du capitalisme dans un seul pays. Faire croire le contraire, c’est envoyer les travailleurs dans une fausse piste. C’est exactement ce qui se produit actuellement : les syndicats se donnent comme objectif de faire pression sur le gouvernement en prétendant que celui-ci pourrait modifier ainsi la politique patronale. Et, bien entendu, Hollande souhaite justement faire croire la même chose : que son gouvernement va progressivement résoudre les problèmes. Il suffirait donc d’attendre…

Hollande demande cinq ans pour résoudre le problème mais nos emplois n’attendront pas cinq ans pour être détruits, notre niveau de vie, nos logements, nos services publics non plus vu la politique d’austérité inévitable du pouvoir bourgeois qui réserve son argent à sauver les banques, les financiers et les trusts ! Mais aucun gouvernement bourgeois ne ferait autre chose.

Aucune sorte d’intervention étatique ne peut redonner vie à un ressort économique cassé et il ne l’est pas seulement en France ni en Europe, mais à l’échelle mondiale, systémique.

Comment cela se fait-il qu’un système capitaliste, qui a pu tenir à tant de crises, ne le puisse plus aujourd’hui ?

Le capitalisme d’hier n’est pas dans une crise conjoncturelle, ni dans une crise systémique grave : il est mort en tant que système même si on le fait momentanément perdurer à coups de fonds publics.

Le système capitaliste est fondé sur des investissements en capital productif, menant à une accumulation des plus-values extraites, dans la production, du travail humain. Les Etats ne peuvent nullement pallier durablement aux capitaux privés si ceux-ci se désinvestissent massivement. Ce désinvestissement ne provient pas d’un manque de capitaux mais d’un trop plein considérable et durable de capitaux.

En effet, depuis les années 1990-2000, le capitalisme a atteint un stade d’engluement du système dans une trop grande masse de capitaux, situation à laquelle le système n’a pu faire face que par la financiarisation massive de l’économie. Il s’agissait d’offrir à une masse croissante de capitaux des systèmes de titrisation permettant un attrait aux capitaux en surnombre. Le résultat a été une spéculation massive, appelant encore plus de capitaux vers ce type d’investissements au point que les capitaux investis dans la production n’ont plus trouvé suffisamment de profit par rapport aux profits rapides et massifs offerts par la spéculation. Il est devenu impossible aux trusts productifs eux-mêmes de maintenir leurs capitaux dans des circuits de production et de commercialisation. Même les trusts automobiles sont devenus de véritables banques et entreprises spéculatives. En 2007-2008, c’est tout ce système de spéculation qui a explosé. L titrisation avait atteint un tel degré qu’elle se nourrissait de la nécrose du système : on a titrisé la chute des entreprises, les dettes immobilières, bancaires, étatiques… L’intervention massive des Etats a réussi à arrêter momentanément la chute catastrophique. On en est là : la nécrose gagne doucement l’ensemble de l’appareil économique et social. Elle est sans cesse combattue par les Etats mais l’intérêt des possesseurs de capitaux est de recommencer à investir dans la nécrose du système. Ce ne sont pas les travailleurs, ce ne sont pas les petits bourgeois, ce ne sont pas les acheteurs qui manqueraient, qui gangrènent le capitalisme. Ce sont les capitalistes eux-mêmes. Ils ne sont pas devenus masochistes. Ils ne sont pas devenus révolutionnaires. Simplement, le système ayant atteint ses limites de capitalisation rentable, ils ne trouvent rentable que de miser sur la chute, sur la mort, sur la faillite et, ce faisant, involontairement ils la causent de manière irrémédiable…

Trop de capital, voilà en résumé la cause fondamentale de la chute. Les Etats bourgeois n’y peuvent rien car leur seule action possible consiste à injecter de l’argent dans le système, dans les trusts, dans les banques, dans les assurances, sauvant momentanément tel ou tel établissement, et aggravant encore le problème, en augmentant la masse des capitaux en circulation, alors que le problème est déjà la trop grande masse de ceux-ci…

Les Etats, les gouvernements, les institutions nationales et internationales ne peuvent ni ne veulent faire autre chose que faire durer le plus possible la situation actuelle. Ils ne peuvent ni ne veulent que donner des milliards aux banques, aux assurances, aux trusts, aux bourses, aux financiers, ce qui les amène à progressivement détruire tous les services publics du fait de la chute des finances publiques, grevées par ces aides. Hollande vient encore de « sauver » la banque CIF comme le gouvernement français a « sauvé » Natixis ou Dexia et demain Société Générale, BNP ou le Crédit Agricole, quand ceux-ci s’effondreront une nouvelle fois. Toute aide artificielle – étatique ou institutionnelle - à l’économie ne peut faire qu’un effet très momentané tout en approfondissant la crise générale, celle des surplus de capitaux…

L’Etat capitaliste n’existe pas pour résoudre les problèmes des travailleurs et les patrons n’ont jamais rien donné aux salariés suite à des négociations, contrairement à ce que les dirigeants syndicaux feignent de croire en participant aux négociations avec le patronat et l’Etat. Ils essaient de faire croire qu’avec un peu de pression, on va pouvoir limiter la casse, faire en sorte que les salariés s’en sortent un peu moins mal dans la catastrophe qui les frappe. C’est du bluff.

Le meilleur moyen que les salariés s’en sortent moins mal, c’est de refuser de collaborer, de refuser de négocier et de s’organiser pour menacer dans toutes leurs affaires l’ensemble des patrons. Une seule entreprise ne le peut pas ? Les salariés d’Aulnay ne peuvent pas attendre que l’ensemble des salariés se mobilisent ? Ils peuvent tout à fait étendre leur lutte, étendre le mode d’organisation des comités et, tout au moins, le populariser. Ils peuvent rendre public leur manière de concevoir le but : une lutte d’ensemble sur des bases de classe. Ils peuvent proposer, par-dessus la tête des directions syndicales, aux travailleurs de constituer des comités et se fédérer avec eux. Ils peuvent ensemble bloquer les intérêts des capitalistes, à commencer par ceux de Peugeot mais s’en arrêter à ceux-là. La seule pression sur le patron de Peugeot ne pourra pas venir du gouvernement. Par contre, elle peut venir des autres patrons s’ils estiment que les salariés d’Aulnay sont en train de mettre le feu aux poudres dans toute la classe ouvrière. Dans le cas inverse, si, en suivant les syndicats, les ouvriers d’Aulnay se contentent d’une grève locale, d’actions « coup de poing », ce n’est pas les patrons mais les ouvriers qui finiront KO. Dans ce cas, contrairement au slogan vide de la CGT, Aulnay aura été le cauchemar des ouvriers et pas patrons !

Expliquer que les capitalistes pourraient très bien, dans la situation économique actuelle, agir selon la loi du profit et préserver les emplois, c’est aussi vrai que prétendre qu’on peut sauver les loups et les brebis !

Ce bluff repose sur des explications mensongères de la situation du système capitaliste. Par exemple, pour faire reculer les travailleurs de l’Automobile et les tromper, on met en avant la baisse des ventes de véhicules. Mais comment expliquer que tous les trusts pharmaceutiques désinvestissent alors que l’on n’a jamais vendu autant de médicaments ? Comment expliquer que tous les trusts de la téléphonie désinvestissent alors qu’il n’y a jamais eu autant de possesseurs de téléphones portables ?

Les prétendues explications de la crise que l’on entend sont seulement là pour justifier les aides financières de l’Etat aux capitalistes, comme le plan Automobile du gouvernement, soi disant là pour permettre à ces trusts de s’adapter aux nécessités du développement durable, aux efforts de la recherche, à l’écologie, au véhicule électrique en somme… Le capitalisme vert, décidément, est une sacrée arnaque ! Le présenter comme la solution pour sauver les emplois, c’est prétendre remplacer les transports en avion par des transports en ballon !

L’objectif de la lutte des travailleurs ne doit pas être d’offrir des solutions (ni économiques ni politiques) aux capitalistes ni à l’Etat capitaliste, mais de s’offrir à l’ensemble de la classe travailleuse de s’en prendre à la loi du profit, aux trusts, aux banques, aux financiers, aux bourses, à tout le système.

La lutte des classes, cela signifie que l’on rompt avec la déplorable habitude de laisser d’autres s’organiser mais pas la classe ouvrière, avec la déplorable habitude de se battre entreprise par entreprise, de se laisser diviser entre salariés du trust et des sous-traitants, entre niveaux hiérarchiques, entre corporations, entre CDI et CDD, entre en fixe et précaires, entre avec et sans papiers, entre salariés et chômeurs, entre privé et public, entre jeunes et vieux, entre hommes et femmes !

Cela signifie que, loin de suivre comme des moutons les centrales syndicales noyées jusqu’au cou depuis de longues années dans la collaboration de classe, on s’organise nous-mêmes pour s’en prendre aux profiteurs, qui que ce soit qui gouverne l’Etat capitaliste et nous conseille d’attendre et de nous calmer, d’être responsables au nom des intérêts de ceux qui ont encore un travail…

Refuser la loi du profit, c’est ne pas craindre de s’en prendre aux intérêts des capitalistes et de leur système. Le seul moyen de lutter contre le chômage, la misère de masse et les licenciements massifs qui nous menacent, c’est œil pour œil, dent pour dent, c’est l’action directe, c’est frapper direct au coffre-fort les intérêts des banquiers, des trusts, des bourses et des financiers… Il ne faut pas craindre de bloquer toutes les ventes, toute la production des trusts. Il ne faut pas craindre de couler les banques. Qui coule nos vies mérite de couler !

Les patrons comme Peugeot misent sur le fait que la classe ouvrière serait trop engluée dans de démocratisme politique (l’alternance droite-gauche pour exprimer le mécontentement) et le bureaucratisme syndical (la soumission à de faux avocats des ouvriers qui mènent à notre place et dans notre dos des négociations bidons) pour reprendre l’action directe des travailleurs. Tant que cela durera, les Peugeot, les Sanofi, les Bouygues pourront licencier massivement et tous les patrons, voyant que cela marche, les suivront…

Dès que nous cesserons de marcher avec le système, les patrons commenceront par craindre la menace et suspendront le coup.

Ne craignons pas de nous faire craindre ! Ne craignons pas de nous unir aux autres salariés ! Ne nous enfermons pas dans un site, dans une entreprise, débordons des carcans que l’on veut nous imposer. Organisons nous nous-mêmes ! N’accrochons pas notre avenir au Titanic du système capitaliste que nous n’avons aucune raison de pleurer ni de chercher à sauver ! Voilà quelle est l’issue d’avenir et il n’y en a pas d’autre…

Certains syndicats ou groupes politiques essaient d’avancer l’idée d’exiger de l’Etat une loi interdisant les licenciements ou, au moins, certains types de licenciements. C’est illusoire et c’est tourner une fois encore l’attention vers l’Etat en lui décernant le rôle de tampon ou de sauveur dans la lutte des classes. Aucune loi d’aucun Etat bourgeois ne peut aller contre le fondement même de la bourgeoisie dans le monde actuel, c’est-à-dire la liberté des possesseurs de capitaux d’investir ces capitaux quand et comme cela leur chante. Prétendre le contraire, même en affirmant que cela pourrait être le résultat d’une lutte ouvrière, c’est détourner par avance cette lutte. Prétendre qu’une loi d’une société restant dans le cadre du capitalisme peut aller contre des fondements du système capitaliste, c’est encore une fois nous proposer de nous soulever en nous tirant par les cheveux ! Du moment qu’on laisse aux capitalistes le droit de disposer de l’Etat, de ses appareils de coercition armés, que l’on laisse quelques individus disposer de l’essentiel des capitaux, il est inutile de prétendre que l’on va « interdire les licenciements ». Pour interdire, il faut disposer d’une force organisée, d’un appareil structuré, de moyens de décider, d’imposer et de faire respecter ses décisions. Les travailleurs n’ont aucun mode d’organisation actuellement qui leur soit propre. Interdire les licenciements ne doit jamais être un slogan séparé de celui des comités de travailleurs fédérés et structurés indépendamment de l’Etat et de la bourgeoisie, indépendamment aussi de quiconque collabore avec les précédents, notamment les centrales syndicales.

Tant que les travailleurs ne sont pas conscients que le système est leur ennemi mortel, que l’Etat n’est en rien celui des citoyens, que ceux qui collaborent avec les premiers sont des trompeurs dangereux, que les travailleurs doivent absolument s’organiser pour se faire craindre, on ne peut pas parler d’interdire les licenciements, ni de combattre aucun des coups que les classes dirigeantes nous préparent.

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