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Qui était le physicien Louis de Broglie ?

dimanche 5 juin 2011, par Robert Paris

Comme la lumière, les particules ont une longueur d’onde

et diffractent comme des ondes (à gauche rayons X, à droite électrons) :

Einstein a découvert le corpuscule de lumière et De Broglie l’onde de matière. C’étaient des découvertes renversantes et cela l’est toujours pour de multiples raisons... On trouvait ainsi une convergence inattendue entre matière et lumière, une dualité inattendue entre ondes et corpuscules, et un lien inexpliqué entre les deux...

Einstein a déclaré sur Louis de Broglie : « Il a soulevé un coin du grand voile. »

Louis de Broglie dans "la nouvelle physique et les quanta" : "Bohr a résolu la question des fréquences des raies spectrales grâce à l’hypothèse que chaque transition entre états quantifiés s’accompagne de l’émission d’un quantum d’énergie radiante. (...) En d’autres termes, d’après la théorie quantique, l’émission des raies spectrales d’un corps simple est discontinue et procède par actes individuels isolés."

Travaux de Louis de Broglie

Abstract :

By this time many physicists were convinced that these apparent contradictions belonged to the intrinsic structure of atomic physics. Therefore, in I924 de Broglie in France tried to extend the dualism between wave description and particle description to the elementary particles of matter, primarily to the electrons. He showed that a certain matter wave could ’correspond’ to a moving electron, just as a light wave corresponds : to a moving light quantum. It was not clear at the time what the word ’correspond’ meant in this connection. But de Broglie suggested that the quantum condition in Bohr’s theory should be interpreted as a statement about the matter waves. A wave circling around a nucleus can for geometrical reasons only be a stationary wave ; and the perimeter of the orbit must be an integer multiple of the wave length. In this way de Broglie’s idea connected the quantum condition. which always had been a foreign element in the mechanics of the electrons, with the dualism between waves and particles.


« Pour le savant, croire la science achevée est toujours une illusion aussi complète que le serait pour l’historien de croire l’histoire terminée. »

Louis de Broglie dans « Physique et microphysique »

Un cours donné par Louis de Broglie

« En vérité, les notions d’espace et de temps tirées de notre expérience quotidienne ne sont valables que pour les phénomènes à grande échelle. »

De Broglie dans « La physique nouvelle et les quanta »

« On a voulu tirer de l’interprétation indéterministe et de la notion de complémentarité des conclusions bien fragiles et périlleuses, comme par exemple de mettre en relation les incertitudes de Heisenberg avec le libre arbitre humain. »

De Broglie (dans « Nouvelles perspectives en microphysique »)

« A l’heure actuelle beaucoup de chercheurs subissent encore, parfois à leur insu, l’influence de la doctrine positiviste. (...) Elle tend à atténuer sinon à supprimer la notion de réalité physique objective indépendante de nos observations. »

Louis De Broglie (dans Sur les sentiers de la science)

Le physicien Maurice Jacob dans « Au cœur de la matière » :

« L’approche philosophique et culturelle des problèmes de la mécanique quantique devait tout naturellement privilégier les discussions sur le déterminisme… Alors qu’au fil des années 1930, Bohr tend à minimiser de plus en plus le côté contradictoire, paradoxale, de la complémentarité des aspects ondulatoire et corpusculaire, Louis de Broglie, au contraire, le souligne de plus en plus. Il parle de contradiction, d’exclusion, de conflit, mais rarement de complémentarité. Le conflit se généralise peu à peu pour devenir le conflit de la cinématique et de la dynamique. De Broglie l’illustre en réactualisant le paradoxe de Zénon : « Dans le macroscopique, Zénon paraît avoir tort, poussant trop loin les exigences d’une critique trop aiguë, mais dans le microscopique, à l’échelle des atomes, sa perspicacité triomphe et la flèche, si elle est animée d’un mouvement bien défini, ne peut être en aucun point de sa trajectoire. Or, c’est le microscopique qui est la réalité profonde, car il sous-tend le macroscopique. »

Avant-propos de Georges Lochak à « Louis de Broglie, un itinéraire scientifique » :

« Louis de Broglie a toujours été pénétré d’histoire (…) et en physique également il n’a jamais perdu de point de vue historique et celui-ci a même joué un rôle très important dans l’orientation de ses conceptions scientifiques.

C’est ainsi qu’après la guerre de 1914-1918, entreprenant un réexamen des difficultés qu’offrait à l’époque la théorie des quanta, fondée sur la théorie du rayonnement du corps noir de Planck, le modèle d’atome planétaire de Bohr et la théorie des quanta de lumière d’Einstein (c’est-à-dire l’idée que l’énergie, dans les ondes lumineuses, est transportée par des corpuscules : les photons), Louis de Broglie eut l’idée que le ciment de cette théorie encore disparate devait se trouver dans la réunion de la mécanique et de l’optique en un seul corps de doctrine. Et c’est là que lui servirent ses connaissances historiques, puisque c’est grâce à sa vision d’ensemble de l’évolution des idées en physique qu’il put réunir dans un seul système le principe de Maupertuis (c’est-à-dire le principe de moindre action), emprunté à la mécanique, au principe de Fermat (c’est-à-dire le principe du plus court chemin lumineux), emprunté à l’optique. Et c’est cette vue d’ensemble, concrétisée en faisant appel à la loi des quanta de Planck et étayée par le principe de relativité d’Einstein, clé de voûte de la mécanique ondulatoire, qui conduisit de Broglie à l’idée de la coexistence des propriétés corpusculaires et ondulatoires (…) Curieusement, malgré tous les efforts entrepris en ce sens, la nature physique de l’union entre les ondes et les corpuscules n’a jamais été élucidée (…) Rien de plus irritant qu’une théorie qui « marche » sans qu’on sache pourquoi : c’est ce qui est arrivé à la théorie de la gravitation de Newton avec sa loi de l’action à distance que tout le monde détestait, à commencer par Newton lui-même. (…) De Broglie a élaboré pour cela, dès 1926, une ingénieuse théorie (dite de la « double solution »), mais il s’est heurté à des difficultés mathématiques, à des objections physiques et surtout à l’hostilité d’une bonne partie des physiciens, si bien qu’il a fini par abandonner sa théorie pour longtemps. Mais, vingt-cinq ans plus tard, il l’a reprise au grand scandale de beaucoup, faisant d’incontestables progrès mais sans vraiment résoudre le problème. (….) Or il fallait un courage intellectuel exceptionnel, à un savant sexagénaire couvert d’honneurs et occupant les plus hauts postes, pour faire pareille proclamation. Il s’est trouvé du jour au lendemain dans une position marginale, on murmurait autour de lui au sujet des « atteintes de l’âge » ; il voyait, dans les commissions, son pouvoir se vider de sa substance, perdant jusqu’à celui de défendre ses propres élèves, discrètement « encouragés » à rejoindre d’autres laboratoires. On imagine difficilement, derrière les apparences feutrées de la vie universitaire et les chaleureuses proclamations unanimistes de la communauté scientifique, la violence des combats d’idées en science et le sort qui a toujours été réservé aux idées minoritaires et aux novateurs solitaires (or comment être novateur si l’on n’est pas solitaire ? Les idées neuves ne jaillissent pas d’une commission !). Il en a toujours été ainsi : on nous dresse aujourd’hui des portraits hagiographiques de Pasteur s’avançant majestueusement sur la voie de la découverte et récompensé de ses exploits par l’édification d’un institut portant son nom, mais on oublie combien souvent il a été traité de charlatan, et toutes les avanies qu’il a subies avant que ses idées ne fussent reconnues. De même, on nous représente un Einstein artificiel, doucement rêveur et nimbé de cheveux blancs, son noble visage souligné d’un sempiternel E = mc² ; mais on oublie les attaques, les insultes qu’il a subies dans sa jeunesse de la part des détracteurs de la relativité, ainsi que l’isolement (enjolivé de fleurs certes, mais l’isolement quand même) dans lequel l’avaient plongé aussi bien son refus d’admettre l’interprétation orthodoxe de la mécanique quantique que son opiniatreté à poursuivre ses recherches sur le champ unitaire. Lui qui, à la fin de ses jours, écrivait depuis Princeton, et alors même que le grand public l’adulait : « je suis considéré ici comme une sorte de fossile que les ans ont rendu aveugle et sourd. (…) La pire des choses, sans doute, est ce mur de silence dont les idées minoritaires sont entourées. Et ce mur est surtout impressionnant lorsqu’il s’élève autour d’un personnage aussi célèbre que Louis de Broglie , auteur de dizaines de livres et de centaines d’articles de revues, mais qu’on ne cesse de lire et de citer dès lors que ce qu’il dit n’est plus dans le courant de la mode, et cela tout simplement parce que les ténors du moment font silence de sur son nom. Un peu plus tard, on voit de temps à autre resurgir certaines de ses idées, à propos desquelles, toutefois, son nom n’est même plus cité : c’est ce qui est arrivé quand un certain type d’onde, que De Broglie appelait « onde à bosse » et qu’il avait introduite dans son interprétation de la mécanique ondulatoire, est soudain devenu à la mode sous le nom de « soliton », mais sans que l’on mentionne jamais le nom du père de cette idée. Ce modèle de l’onde à bosse nous ramène au problème du dualisme des ondes et des corpuscules, puisque c’est pour tenter d’élucider ce dualisme que De Broglie avait imaginé ce modèle mathématique la « bosse », c’est-à-dire une région très intense et étroitement localisée dans l’onde, qui pourrait représenter ce que nous observons en tant que corpuscule, mais, faisant partie intégrante de l’onde, cette bosse serait guidée par la propagation de celle-ci et suivrait donc les lois de la mécanique ondulatoire. (…) Y a-t-il un sens à essayer de donner une image physique intelligible du dualisme des ondes et des corpuscules ? A cette question, la majorité des physiciens concernés répondent : « non » ; soit qu’ils renoncent ; soit que, l’expérience ne paraissant jamais saisir que l’un ou l’autre des aspects (onde ou corpuscule) et non les deux à la fois, ils ne voient pas comment leur éventuelle union serait observable, ce qui discrédite le problème à leurs yeux ; soit qu’ils nient que l’onde de Broglie soit une onde physique et qu’ils n’y voient qu’un objet mathématique ; soit, encore, qu’ils nient le problème en refusant à la fois le mot « onde » et le mot « corpuscule » (…) On peut, sans crainte, affirmer que la question du dualisme que pose De Broglie reste parfaitement ouverte. (…) Une telle question peut difficilement entrer dans un projet, faire l’objet d’un programme et, surtout, elle peut difficilement mobiliser un grand laboratoire autour de vastes crédits. (…) On sonnerait, à plus ou moins longue échéance, le glas de la science si l’on imposait, comme on y a trop tendance, à l’ensemble de la recherche de se plier à ce régime-là. Parce que la véritable idée nouvelle, celle qui donnera naissance à la théorie future et qui ouvrira un domaine de recherche entièrement nouveau, ne ressemblera en rien à ce que nous croyons être vrai aujourd’hui. Ce sera, au début, comme cela a toujours été le cas dans le passé, une idées étrange, balbutiante et fragile dont personne ne voudra, une question inattendue posée par un cerveau solitaire qui se sera demandé si d’aventure la nature ne serait pas autrement qu’on ne croit. (…) Or une telle idée neuve, contrairement à ce que l’on prétend parfois avec un bel optimisme, il y a déjà bien longtemps qu’on n’en a pas vu. Et c’est pour cela qu’il faut lire Louis de Broglie : parce que lui, jadis, il a eu une telle idée. »

« Mr Einstein a eu, en 1905, l’idée très remarquable que les lois de l’effet photoélectrique indiquent l’existence pour la lumière d’une structure discontinue où les quanta interviennent. ( …) La nature essentiellement discontinue de la quantification, exprimée par l’apparition dans les formules de nombre entiers, les nombres quantiques, présentait un étrange contraste avec la nature continue des mouvements envisagés par la dynamique ancienne, newtonienne ou einsteinienne. » écrit Louis de Broglie dans « La physique nouvelle et les quanta ».

Louis de Broglie dans « La nouvelle physique et les quanta » :

« Pour interpréter les anomalies de l’effet Zeeman (des atomes soumis à un champ magnétique uniforme), il a fallu l’introduction d’un élément nouveau : le spin de l’électron. (…) Les Effets Zeeman anormaux n’étaient pas les seuls phénomènes d’ordre magnétique qui restaient inexpliqués : il y avait aussi les anomalies gyromagnétiques. L’hypothèse que le magnétisme atomique a pour origine le mouvement orbital des électrons dans l’atome a pour conséquence que, si l’on aimante longitudinalement un barreau de fer cylindrique suspendu par un point de son axe, ce barreau doit se mettre à tourner autour de son axe et réciproquement si l’on fait tourner le barreau autour de son axe, il doit y avoir création d’un moment magnétique : de plus, le rapport du moment de quantité de mouvement dans le mouvement de rotation et du moment magnétique doit être, dans l’un et l’autre cas, égal à cette constante dépendant des caractéristiques de l’électron. Des expériences ont été faites pour vérifier quantitativement cette prévision de la théorie (Einstein et de Haas, Barnett). Les deux phénomènes inverses existent : il y a rotation du barreau magnétisé et magnétisation du barreau mis en rotation. Mais le rapport du moment magnétique au moment cinétique se trouve avoir environ le double de la valeur prévue. (…) Il devenait évident que tout le magnétisme de l’atome n’a pas son origine dans le mouvement orbital des électrons (…) MM. Uhlenbeck et Goudsmit sont parvenus à l’idée capitale de l’existence d’une rotation propre et d’un magnétisme propre pour l’électron. (…) MM. Uhlenbeck et Goudsmit ont doué l’électron d’un moment magnétique propre égal à un magnéton de Bohr et d’un moment cinétique égal à la moitié de l’unité quantique h / 2 pi. Ainsi, le rapport des deux moments se trouve bien égal au double de la valeur classique. Ils ont employé, pour désigner la rotation propre de l’électron et le moment cinétique correspondant, le mot anglais « spin » qui depuis a fait fortune et est employé par tous les physiciens. (…) Le spin de l’électron présente une certaine analogie avec la propriété du photon que nous nommons « polarisation de la lumière ». Il définit, en effet, une certaine asymétrie, un certain manque d’isotropie de l’électron. (…) M. Pauli a pensé que pour introduire le spin de l’électron dans la mécanique ondulatoire, il fallait attribuer à l’onde deux composantes. (…) M. Dirac a certainement été guidé dans son travail par les idées de M. Pauli (…) Dans la théorie de Dirac, on doit se demander quelle est la probabilité pour que le spin possède l’une ou l’autre des deux valeurs possibles dans telle ou telle direction. (…) On parvient ainsi à la formule de structure fine ayant la même forme que celle de Sommerfeld. (…) Ainsi se trouve prouvée l’idée essentielle de M. Sommerfeld, consistant à introduire la relativité dans la théorie quantique. (…) La théorie de Dirac a été tout aussi heureuse dans l’interprétation des anomalies magnétiques. En traitant le problème de l’effet Zeeman, elle trouve l’existence des effets anormaux qui avaient tant intrigué les théoriciens antérieurs. »

Louis de Broglie : « A tout élément matériel de masse m est associée une onde dont la longueur d’onde lambda est égale à h divisé par le produit de la masse m et de la vitesse v de cette masse. »

Du fait de l’"onde de Broglie de matière", on peut penser obtenir avec des particules matérielles des phénomènes de diffraction analogues à ceux que l’on obtient avec les rayons X. C’est la vérification de cette prévision pour les électrons qui a été apportée en 1927 par l’expérience de Davisson et Germer d’une part, puis par G.P Thomson et Ponte qui a donné son essor à la physique quantique et son succès à la thèse de De Broglie.

De Broglie dans « La physique nouvelle et les quanta » :

"Le quanta est la base de toute particule, de toute interaction et de tout mouvement. Le quanta ne peut exister qu’en nombre entier : un, deux, trois, etc... C’est dire que la physique quantique a mené à une conception discontinue du monde.

Mais ce n’est pas tout. Là où la physique classique envisageait la particule comme un état déterminé et fixe, la physique quantique a dû développer la notion de superposition d’états. Cette superposition s’est appelée fonction d’onde. Il ne s’agissait plus d’ondes au sens classique. L’un des problèmes que cela posait était celui appelé "réduction du paquet d’ondes" puisque la superposition d’états était brutalement supprimée en cas de mesure (ou d’interaction), ce passage de la superposition à un seul état restant mystérieux et inconcevable comme un miracle, ce qui est inacceptable. Tout d’abord, cela suppose qu’une dynamique serait une somme de stationnarité. Ensuite, cela n’explique ni le passage d’un état à un autre ni ne donne une interprétation à la superposition. Du coup, la physique a dû reconcevoir sa thèse en adoptant un point de vue dynamique qui remettait en cause l’ancien point de vue philosophique.

L’infiniment petit se comporte très différemment de l’environnement macroscopique auquel nous sommes habitués. Quelques différences fondamentales qui séparent ces deux mondes sont par exemples :

• la quantification : Un certain nombre d’observables, par exemple l’énergie émise par un atome lors d’une transition entre états excités, sont quantifiés, c’est-à-dire qu’ils ne peuvent prendre leur valeur que dans un ensemble discret de résultats. A contrario, la mécanique classique prédit le plus souvent que ces observables peuvent prendre continûment n’importe quelle valeur.

• la dualité onde-particule : La notion d’onde et de particule qui sont séparées en mécanique classique deviennent deux facettes d’un même phénomène, décrit de manière mathématique par sa fonction d’onde. En particulier, l’expérience prouve que la lumière peut se comporter comme des particules (photons, mis en évidence par l’effet photoélectrique) ou comme une onde (rayonnement produisant des interférences) selon le contexte expérimental, les électrons et autres particules pouvant également se comporter de manière ondulatoire.

• le principe d’incertitude de Heisenberg : Une incertitude fondamentale empêche la mesure exacte simultanée de deux grandeurs conjuguées. Il est notamment impossible d’obtenir une grande précision sur la mesure de la vitesse d’une particule sans obtenir une précision médiocre sur sa position, et vice versa. Cette incertitude est structurelle et ne dépend pas du soin que l’expérimentateur prend à ne pas « déranger » le système ; elle constitue une limite à la précision de tout instrument de mesure.

• le principe d’une nature qui joue aux dés : Si l’évolution d’un système est bel et bien déterministe (par exemple, la fonction d’onde régie par l’équation de Schrödinger), la mesure d’une observable d’un système dans un état donné connu peut donner aléatoirement une valeur prise dans un ensemble de résultats possibles.

• l’observation influe sur le système observé : Au cours de la mesure d’une observable, un système quantique voit son état modifié. Ce phénomène, appelé réduction du paquet d’onde, est inhérent à la mesure et ne dépend pas du soin que l’expérimentateur prend à ne pas « déranger » le système.

• la non-localité ou intrication : Des systèmes peuvent être intriqués de sorte qu’une interaction en un endroit du système a une répercussion immédiate en d’autres endroits. # Ce phénomène contredit en apparence la relativité restreinte pour laquelle il existe une vitesse limite à la propagation de toute information, la vitesse de la lumière ; toutefois, la non-localité ne permet pas de transférer de l’information.

• la contrafactualité : Des évènements qui auraient pu se produire, mais qui ne se sont pas produits, influent sur les résultats de l’expérience."

Le physicien Louis de Broglie : « Dans le macroscopique, Zénon paraît avoir tort, poussant trop loin les exigences d’une critique trop aiguë, mais dans le microscopique, à l’échelle des atomes, sa perspicacité triomphe et la flèche, si elle est animée d’un mouvement bien défini, ne peut être en aucun point de sa trajectoire. Or, c’est le microscopique qui est la réalité profonde, car il sous-tend le macroscopique. »

ZENON ET LA QUANTIQUE « L’existence du quantum d’action (…) implique une sorte d’incompatibilité entre le point de vue de la localisation dans l’espace et dans le temps et le point de vue de l’évolution dynamique (…) La localisation exacte dans l’espace et le temps est une sorte d’idéalisation statique qui exclut toute évolution et toute dynamique. »

De Broglie dans « La physique nouvelle et les quanta » :

« Mr Einstein a eu, en 1905, l’idée très remarquable que les lois de l’effet photoélectrique indiquent l’existence pour la lumière d’une structure discontinue où les quanta interviennent. ( …) La nature essentiellement discontinue de la quantification, exprimée par l’apparition dans les formules de nombre entiers, les nombres quantiques, présentait un étrange contraste avec la nature continue des mouvements envisagés par la dynamique ancienne, newtonienne ou einsteinienne. » écrit Louis de Broglie dans « La physique nouvelle et les quanta ».

« L’onde continue (…) ne comportant aucune région singulière (…) ne décrit pas vraiment la réalité physique. » explique Louis de Broglie dans « Nouvelles perspectives en Microphysique.

"Ne peut-on pas penser alors qu’il y a lieu dans la théorie de la matière d’adjoindre des ondes aux corpuscules, la correspondance entre les unes et les autres étant définie par des formules où la constante de Planck jouera le rôle essentiel ? Et si l’on parvient à établir cette correspondance entre ondes et corpuscules pour la matière, peut-être se révèlera-t-elle comme identique à celle qu’on doit admettre entre ondes et corpuscules pour la lumière. Et alors on aura atteint un très beau résultat ; on aura constitué une doctrine générale qui établira la même corrélation entre ondes et corpuscules, aussi bien dans le domaine de la lumière que dans celui de la matière."

Louis de Broglie, dans « La physique nouvelle et les quanta » :

« L’existence du quantum d’action, sur lequel nous aurons si souvent à revenir dans le cours de cet ouvrage, implique en effet une sorte d’incompatibilité entre le point de vue de la localisation dans l’espace et dans le temps et le point de vue de l’évolution dynamique ; chacun de ces points de vue est susceptible d’être utilisé pour la description du monde réel, mais il n’est pas possible de les adopter simultanément dans toute leur rigueur. La localisation exacte dans l’espace et dans le temps est une sorte d’idéalisation statique qui exclut toute évolution et tout dynamisme ; l’idée d’état de mouvement prise dans toute sa pureté est par contre une idéalisation dynamique qui est en principe contradictoire avec les concepts de position et d’instant. »

Louis de Broglie, dans « La physique nouvelle et les quanta » :

« Sans quanta, il n’y aurait ni lumière ni matière et, s’il est permis de paraphraser un texte évangélique, on peut dire que rien de ce qui a été fait n’a été fait dans eux. On conçoit donc quelle inflexion essentielle a subi le cours du développement de notre science humaine le jour où les quanta, subrepticement, s’y sont introduits. Ce jour-là, le vaste et grandiose édifice de la physique classique s’est retrouvé ébranlé jusque dans ses fondements, sans, d’ailleurs, qu’on s’en soit rendu tout d’abord bien compte. (…) Fidèle à l’idéal cartésien, la physique classique nous montrait l’univers comme analogue à un immense mécanisme susceptible d’être décrit avec une entière précision par la localisation de ses parties dans l’espace et leur modification au cours du temps, mécanisme dont l’évolution pouvait en principe être prévue avec une rigoureuse exactitude quand on possédait un certain nombre de données sur son état initial. Mais une telle conception reposait sur certaines hypothèses implicites que l’on admettait presque sans s’en apercevoir. Une de ces hypothèses était que le cadre de l’espace et du temps dans lequel nous cherchons presque instinctivement à localiser toutes nos sensations est un cadre parfaitement rigide et déterminé où chaque événement physique peut, en principe, être rigoureusement localisé indépendamment de tous les processus dynamiques qui s’y déroulent. Dès lors, toutes les évolutions du monde physique sont nécessairement représentées par des modifications des états locaux de l’espace au cours du temps, et c’est pourquoi dans la science classique les grandeurs dynamiques, telles que l’énergie et la quantité de mouvement, apparaissent comme des grandeurs dérivées construites à l’aide du concept de vitesse, la cinématique servant ainsi de base à la dynamique. Tout autre est le point de vue de la physique quantique. L’existence du quantum d’action, sur lequel nous aurons si souvent à revenir dans le cours de cet ouvrage, implique en effet une sorte d’incompatibilité entre le point de vue de la localisation dans l’espace et dans le temps et le point de vue de l’évolution dynamique ; chacun de ces points de vue est susceptible d’être utilisé pour la description du monde réel, mais il n’est pas possible de les adopter simultanément dans toute leur rigueur. La localisation exacte dans l’espace et dans le temps est une sorte d’idéalisation statique qui exclut toute évolution et tout dynamisme ; l’idée d’état de mouvement prise dans toute sa pureté est par contre une idéalisation dynamique qui est en principe contradictoire avec les concepts de position et d’instant. La description du monde physique dans les théories quantiques ne peut se faire qu’en utilisant plus ou moins l’une ou l’autre de ces deux images contradictoires. (…) Il est néanmoins parfaitement légitime de se servir de la cinématique quand on étudie des phénomènes à grande échelle ; mais pour les phénomènes à l’échelle atomique où les quanta jouent un rôle prépondérant, on peut dire que la cinématique, définie comme l’étude du mouvement faite indépendamment de toute considération dynamique, perd complètement sa signification. (…) La mécanique et la physique classiques ont été édifiées pour rendre compte des phénomènes qui se jouent à notre échelle et elles sont aussi valables pour les échelles supérieures, les échelles astronomiques. Mais, si l’on descend à l’échelle atomique, l’existence des quanta vient limiter leur validité. Pourquoi en est-il ainsi ? Parce que la valeur du quantum d’action mesurée par la fameuse constante de Planck est extraordinairement petite par rapport à nos unité usuelles, c’est-à-dire par rapport aux grandeurs qui interviennent à notre échelle. (…)

Les équations de la dynamique classique du point matériel expriment que le produit de la masse du point matériel par l’une quelconque des composantes rectangulaires de son accélération est égale à la composante correspondante de la force. (…) Ce résultat exprime que la dynamique classique du point matériel est entièrement en accord avec le postulat du déterminisme physique, postulat selon lequel l’état futur du monde matériel doit être entièrement prévisible quand on possède un certain nombre de données sur son état présent. Une autre remarque est intéressante à faire ici. Le point matériel étant supposé ponctuel, sa trajectoire est une ligne qui n’explore dans l’espace à trois dimensions qu’un continu à une dimension. (…) Il n’explore le champ de force que le long de sa trajectoire. (…) En mécanique classique, les accidents topologiques qui peuvent exister dans l’espace à des distances finies de la trajectoire d’un point matériel ne peuvent aucunement influer sur son mouvement. Plaçons, par exemple, sur la trajectoire d’un point matériel, un écran percé d’un trou. Si la trajectoire passe vers le centre du trou, elle ne sera aucunement perturbée par l’accident topologique que constitue la présence de l’écran. (…) Il est inconcevable, en mécanique classique, que le mouvement du point matériel traversant le trou en question dépende du fait qu’il y ait ou pas d’autres trous dans l’écran. L’on comprend tout de suite l’importance de ces remarques pour une interprétation corpusculaire de l’expérience des trous de Young et l’on pressent que la mécanique ondulatoire doit apporter de nouveau sur ce point. (…) Les ondulations lumineuses traversant sans difficulté les espaces vides, ce n’est pas la matière qui les transmet. Quel est donc le support de ces ondes, quel est le milieu dont la vibration constitue la vibration lumineuse ? Telle est la question qui se posait aux protagonistes de la théorie des ondulations. (…) L’éther envisagé comme un milieu élastique doit être un milieu infiniment plus rigide que l’acier car il ne peut transmettre que des vibrations transversales et cependant ce milieu si rigide n’exerce aucun frottement sur les corps qui le traversent et ne freine aucunement le mouvement des planètes. (…) Après avoir montré que le rotationnel du champ magnétique est égal à la densité du courant électrique, donnant ainsi naissance à l’électromagnétisme, (…) Maxwell, après avoir écrit les lois générales des phénomènes électriques, s’aperçut de la possibilité de considérer la lumière comme une perturbation électromagnétique. Par là, il a fait rentrer toute la science de l’optique à l’intérieur des cadres de l’électromagnétisme, réunissant ainsi deux domaines qui semblaient entièrement distincts. (…) La théorie électromagnétique de Maxwell fournissait des équations représentant exactement à notre échelle la liaison entre les champs électromagnétiques mesurables d’une part, les charges et les courants électriques d’autre part. Obtenues en réunissant en un seul système formel le résultat des expériences macroscopiques, leur valeur était incontestable dans ce domaine. Mais pour décrire le détail des phénomènes électriques au sein de la matière et à l’intérieur des atomes, pour prévoir les rayonnements émis ou absorbés par les particules matérielles ultimes, il fallait extrapoler les équations de Maxwell et leur donner une forme applicable à l’étude des phénomènes de l’échelle atomique et corpusculaire. C’est ce que fit, avec plus de hardiesse qu’il ne peut paraître au premier abord, un des grands pionniers de la physique théorique moderne, H.A. Lorentz.

Lorentz prit comme point de départ l’idée d’introduire dans les équations de l’électromagnétisme la structure discontinue de l’électricité. (…) En opérant des moyennes sur les phénomènes microscopiques élémentaires, on peut repasser des équations de Lorentz aux équations de Maxwell. (…) La théorie des électrons, édifiée sur les bases que nous venons d’esquisser, a conduit à d’importants succès pour la prévision d’un grand nombre de phénomènes. Elle a d’abord permis de retrouver l’interprétation des lois de la dispersion. Elle a ensuite, et cela a été sans doute son plus important succès, permis de prévoir d’une façon exacte l’effet Zeeman normal, c’est-à-dire la façon dont les raies spectrales émises par un atome sont affectées dans le cas le plus simple par la présence d’un champ magnétique uniforme. (…) La théorie des électrons a aussi paru apporter la solution d’un problème capital : l’origine de l’émission des rayonnements par la matière. D’après les équations de Lorentz, un électron animé d’un mouvement rectiligne et uniforme transporte avec lui globalement son champ électromagnétique et, par suite, il n’y a dans ce cas aucune émission d’énergie dans l’espace environnant. Mais si le mouvement d’un électron comporte une accélération, on peut démontrer qu’il y a émission d’une onde électromagnétique et l’énergie ainsi perdue à chaque instant par l’électron est proportionnelle au carré de son accélération. (…) Si l’on veut interpréter le rayonnement des atomes par le mouvement des électrons intra-atomiques, il faut supposer qu’à l’état normal les électrons intérieurs à l’atome sont immobiles ; sans quoi, obligés de se mouvoir à l’intérieur du très petit domaine de l’atome, ils seraient forcément animés de mouvements très accélérés et émettraient constamment de l’énergie sous forme de rayonnement, ce qui serait contraire à l’idée même de stabilité de l’atome. (…)

L’origine de la théorie des quanta est dans les recherches faites vers 1900 par M. Planck sur la théorie du rayonnement noir. (…) Si l’on considère une enceinte maintenue à température uniforme, les corps maintenus dans cette enceinte émettent et absorbent du rayonnement et il finit par s’établir un état d’équilibre (…) Kirchoff a montré que cet état d’équilibre est unique et correspond à une composition spectrale parfaitement déterminée du rayonnement enfermé dans l’enceinte. De plus, la composition de ce rayonnement dépend uniquement de la température de l’enceinte. (…) Il est souvent appelé du nom assez incorrect de « rayonnement noir » correspondant à cette température. (…) M. Planck avait commencé par reprendre l’étude de la question en imaginant que la matière est formée d’oscillateurs électroniques, c’est-à-dire d’électrons susceptibles d’osciller autour d’une position d’équilibre sous l’action d’une force proportionnelle à l’élongation. (…) M. Planck put apercevoir que l’inexactitude de la loi de Rayleigh provient du rôle trop grand que jouent, dans l’image classique des échanges d’énergie entre oscillateurs et rayonnement, les oscillateurs de haute fréquence. (…) M. Planck a eu alors l’idée géniale qu’il fallait introduire dans la théorie un élément nouveau, entièrement étranger aux conceptions classiques, qui viendrait restreindre le rôle des oscillateurs de haute fréquence, et il a posé le fameux postulat suivant : « La matière ne peut émettre l’énergie radiante que par quantités finies proportionnelles à la fréquence. » Le facteur de proportionnalité est une constante universelle, ayant les dimensions d’une action mécanique. C’est la célèbre constante h de Planck. Mettant en jeu cette hypothèse d’aspect paradoxal, Planck a repris la théorie de l’équilibre thermique et trouvé une nouvelle loi de répartition spectrale du rayonnement noir à laquelle son nom est resté attaché. (…)

Peu à peu, l’importance fondamentale de l’idée de Planck apparut. Les théoriciens s’aperçurent que la discontinuité traduite par l’hypothèse des quanta est incompatible avec les idées générales qui servaient jusqu’alors de bases à la physique et exigeait une révision complète de ces idées. (…) Pour trouver une forme générale de sa théorie, Planck a dû renoncer à l’hypothèse primitive des quanta d’énergie et lui substituer l’hypothèse des quanta d’action (produit d’une énergie par un temps ou d’une quantité de mouvement par une longueur)

(...) Mais la méthode de quantification de Planck ne s’appliquait qu’aux mouvements pour la description desquels une seule variable suffit. (...) D’autre part, si la théorie électromagnétique sous la forme de Lorentz était réellement applicable aux particules élémentaires d’électricité, elle permettrait de calculer sans aucune ambiguïté les rayonnements émis par un atome du modèle planétaire de Rutherford-Bohr. (...) l’atome perdant constamment de l’énergie sous forme de radiation, ses électrons viendraient tous très rapidement tomber sur le noyau et la fréquence des rayonnements émis varierait constamment d’une façon continue. l’atome serait instable et il ne pourrait exister des raies spectrales à fréquences bien définies, conclusions absurdes. Pour éviter cette difficulté essentielle, M. Bohr a admis que l’atome dans ses états stationnaires ne rayonne pas, ce qui revient à nier la possibilité d’appliquer la théorie électromagnétique du rayonnement au mouvement orbital des électrons sur leurs trajectoires stables. (..) Bohr a résolu la question des fréquences des raies spectrales grâce à l’hypothèse que chaque transition entre états quantifiés s’accompagne de l’émission d’un quantum d’énergie radiante. (...) En d’autres termes, d’après la théorie quantique, l’émission des raies spectrales d’un corps simple est discontinue et procède par actes individuels isolés. »

Louis de Broglie, dans « Nouvelles perspectives en Microphysique » :

« En 1927, je la considérais (l’onde pilote, dite « onde de Broglie ») comme une solution avec singularité des équations linéaires admises par la Mécanique ondulatoire pour l’onde Phi (onde dite « de probabilité de présence » par la physique quantique). Diverses considérations, et en particulier le rapprochement avec la théorie de la Relativité générale, m’ont fait penser que la véritable équation de propagation de l’onde de Broglie pourrait être non-linéaire comme celles que l’on rencontre dans la théorie de la gravitation d’Einstein, équation non-linéaire qui admettrait comme forme approximative l’équation linéaire de la Mécanique ondulatoire quand les valeurs de l’onde de Broglie seraient assez faibles. (…) Malheureusement ce changement de point de vue ne facilite pas la résolution des problèmes mathématiques qui se posent car, si l’étude des solutions à singularités des équations linéaires est souvent difficile, celle des solutions des équations non-linéaires est plus difficile encore. (…) Einstein a beaucoup insisté sur une propriété importante des équations non-linéaires. Si les équations d’un certain champ sont linéaires, on peut toujours trouver une solution à singularités de ces équations telle que la singularité ait un mouvement prescrit à l’avance. On pourra d’ailleurs ajouter à la solution à singularité une solution continue et cette adjonction n’aura aucune influence sur le mouvement de la singularité. Il n’en est plus du tout de même si les équations du champ sont non linéaires car on ne peut plus alors obtenir une solution en ajoutant plusieurs solutions : la non-linéarité crée une sorte de solidarité entre des solutions qui auraient été indépendantes si l’approximation linéaire avait été valable partout. Cette non linéarité explique que la singularité et l’onde de Broglie ne soient pas indépendantes comme elles le seraient s’il y avait linéarité et qu’elles restent en phase. (…) De plus, la non-linéarité, peu sensible dans le corps du train d’ondes, peut réapparaître sur leurs bords où les groupes de dérivées de l’onde de Broglie pourrait prendre de grandes valeurs ; il y a là aussi une circonstance qui peut s’opposer à l’étalement des trains d’ondes. Il apparaît donc qu’une théorie non linéaire des ondes de Broglie pourrait permettre d’obtenir des « groupes d’ondes sans étalement » représentant par exemple un corpuscule qui se déplacerait d’un mouvement rectiligne et uniforme sans perdre son onde (…) Nous avons vu que dans la théorie des ondes de Broglie, comme dans l’interprétation relativiste de la gravitation, la non-linéarité des équations de base doit jouer un rôle essentiel et seul pouvoir expliquer la solidarité de l’onde et du corpuscule. Nous sommes actuellement arrivés à l’image suivante. Un train d’ondes de Broglie, constituant un corpuscule au sens large du mot, serait une sorte d’unité étendue et organisée, un peu analogue à une « cellule » dans l’acception biologique du terme. Il comprendrait en effet essentiellement les trois parties suivantes : 1° une sorte de noyau, la région singulière, le corpuscule au sens étroit du mot, siège de phénomènes essentiellement non linéaires ; 2° une région environnante étendue, siège d’un phénomène sensiblement linéaire ; 3° une enveloppe constituant les bords des trains d’ondes où la non-linéarité jouerait peut-être à nouveau un rôle important. Or, ce me semble être l’intervention des phénomènes non linéaires qui donnerait à cette « cellule » son unité, sa solidarité et sa permanence. S’il est vrai que la non-linéarité soit la véritable clef de la Microphysique corpusculaire, on comprend aisément pourquoi la Physique quantique actuelle n’est pas parvenue à écrire le dualisme onde-corpuscule et a dû se contenter d’une description uniquement statistique et probabiliste des phénomènes de l’échelle atomique. Prenant a priori pour base des équations linéaires et ne sortant pas du domaine de l’analyse linéaire, la théorie actuelle fait disparaître les accidents locaux dus à la non-linéarité (tels que les régions singulières et éventuellement les bords abrupts de trains d’ondes), elle efface ainsi les structures corpusculaires et, incapable de saisir la véritable relation entre onde et corpuscule, elle ne peut plus aboutir qu’à des images continues à caractère statistique. (…) L’onde continue (…) ne comportant aucune région singulière (…) ne décrit pas vraiment la réalité physique. »

QUANTIQUE ET CLASSIQUE

« L’existence du quantum d’action (…) implique une sorte d’incompatibilité entre le point de vue de la localisation dans l’espace et dans le temps et le point de vue de l’évolution dynamique (…) La localisation exacte dans l’espace et le temps est une sorte d’idéalisation statique qui exclut toute évolution et toute dynamique. (…) Dans la mécanique classique, il était permis d’étudier pour eux-mêmes les déplacements dans l’espace et de définir ainsi les vitesses, les accélérations sans s’occuper de la façon dont sont matériellement réalisés ces déplacements : de cette étude abstraite des mouvements, on s’élevait ensuite à la dynamique en introduisant quelques principes physiques nouveaux. Dans la mécanique quantique, une semblable division de l’exposé n’est plus en principe admissible puisque la localisation spacio-temporelle qui est à la base de la cinématique est acceptable seulement dans une mesure qui dépend des conditions dynamiques du mouvement. Nous verrons plus loin pourquoi il est néanmoins parfaitement légitime de se servir de la cinématique quand on étudie des phénomènes à grande échelle ; mais pour les phénomènes de l’échelle atomique où les quanta jouent un rôle prépondérant, on peut dire que la cinématique, définie comme l’étude du mouvement faite indépendamment de toute considération dynamique, perd complètement sa signification. Une autre hypothèse implicite sous-jacente à la physique classique est la possibilité de rendre négligeable par des précautions appropriées la perturbation qu’exerce sur le cours des phénomènes naturels le savant qui, pour les étudier avec précision, les observe et les mesure. (… ) Il résulte en effet, de l’existence du quantum d’action, ainsi que l’ont montré les fines et profondes analyses de Mrs Heisenberg et Bohr, que toute tentative pour mesurer une grandeur caractéristique d’un système donné a pour effet de perturber d’une façon inconnue d’autres grandeurs attachées à ce système. D’une manière plus précise, toute mesure d’une grandeur qui permet de préciser la localisation d’un système dans l’espace et dans le temps a pour effet de perturber d’une façon inconnue une grandeur conjuguée de la première qui sert à spécifier l’état dynamique du système. En particulier, il est impossible de mesurer en même temps avec précision deux grandeurs conjuguées. On comprend alors dans quel sens on peut dire que l’existence du quantum d’action rend incompatible la localisation spatio-temporelle des parties d’un système et l’attribution à ce système d’un état dynamique bien défini puisque, pour localiser les parties du système, il faut connaître exactement une série de grandeurs dont la connaissance exclut celle des grandeurs conjuguées. Relatives à l’état dynamique, et inversement. (…) Le lien entre les résultats successifs des mesures, qui traduisent pour le physicien l’aspect quantitatif des phénomènes, n’est plus un lien causal conforme au schéma déterministe classique, mais bien un lien de probabilité, seul compatible avec les incertitudes qui dérivent, comme nous l’avons expliqué plus haut, de l’existence même du quantum d’action. Et c’est là une modification essentielle de notre conception des lois physiques, modification dont on est loin, croyons-nous, d’avoir encore nettement aperçu toutes les conséquences philosophiques. (…) Dans le nouvelle physique quantique, sous la forme que lui a imprimée le développement de la mécanique ondulatoire, les idées de corpuscules et d’ondes, de localisation dans l’espace et le temps et d’états dynamiques bien définis sont « complémentaires » ; il entend par là que la description complète des phénomènes observables exige que l’on emploie tour à tour ces conceptions, mais qu’en un sens ces conceptions sont néanmoins inconciliables, les images qu’elles fournissent n’étant jamais simultanément applicables d’une façon complète à la description de la réalité. Par exemple, un grand nombre de faits observés en physique atomique ne peuvent se traduire simplement qu’en invoquant l’idée de corpuscules de sorte que l’emploi de cette idée peut être considéré comme indispensable au physicien ; de même l’idée des ondes est également indispensable pour la description d’un grand nombre de phénomènes. Si l’une de ces deux idées était rigoureusement adaptée à la réalité, elle exclurait complètement l’autre, mais il se trouve qu’en fait, elles sont toutes les deux utiles dans une certaine mesure pour la description des phénomènes et que, malgré leur caractère contradictoire, elles doivent être alternativement employées suivant les cas. Il en est de même des idées de localisation dans l’espace et le temps et d’état dynamique bien déterminé : elles sont aussi « complémentaires » comme les idées de corpuscules et d’ondes auxquelles, elles sont d’ailleurs, nous le verrons, étroitement rattachées. On peut se demander comment ces images contradictoires n’arrivent jamais à se heurter de front parce qu’il est impossible de déterminer simultanément tous les détails qui permettraient de préciser entièrement ces deux images et cette impossibilité qui est exprimée en langage analytique par les relations d’incertitude d’Heisenberg repose en définitive sur l’existence du quantum d’action. (…) Ainsi, on peut dire que les corpuscules existent puisqu’un grand nombre de phénomènes peuvent être interprétés en invoquant leur existence. Néanmoins, dans d’autres phénomènes, l’aspect corpusculaire est plus ou moins voilé et c’est un aspect ondulatoire qui se manifeste. (…) Il est inconcevable en mécanique classique que le mouvement du point matériel traversant un trou dépende du fait qu’il y ait ou pas d’autres trous dans l’écran à distance finie du premier (expérience des fentes de Young). »

De Broglie (extrait de « La physique nouvelle et les quanta »)

Pas plus qu’Einstein, de Broglie n’était pas enthousiaste de la version diffusée et imposée par l’école de Copenhague sur la physique quantique (même s’il se ralliera provisoirement) :

« On a voulu tirer de l’interprétation indéterministe et de la notion de complémentarité des conclusions bien fragiles et périlleuses, comme par exemple de mettre en relation les incertitudes de Heisenberg avec le libre arbitre humain. »

De Broglie (dans « Nouvelles perspectives en microphysique »)

Louis de Broglie a été un exemple typique du combat mené par l’Ecole de Copenhague pour faire reculer quiconque prétendait développer une thèse adverse ou différente… Louis de Broglie avait pourtant été un des maillons essentiels de la chaîne qui a donné naissance à la physique quantique en imaginant les ondes de matière que l’expérience allait ensuite trouver et en donnant ainsi un fondement à à la dualité onde/particule de la matière après que l’on ait trouvé cette dualité pour la lumière. Cela n’a pas empêché l’école de Copenhague de mettre de Broglie à l’écart parce qu’il n’acceptait pas les présupposés philosophiques de cette "école"...

« A l’heure actuelle beaucoup de chercheurs subissent encore, parfois à leur insu, l’influence de la doctrine positiviste. (...) Elle tend à atténuer sinon à supprimer la notion de réalité physique objective indépendante de nos observations. »

Louis De Broglie (dans Sur les sentiers de la science)

« L’idée fondamentale de ma thèse de 1924 était la suivante : « Le fait que, depuis l’introduction par Einstein des photons dans l’onde lumineuse, l’on savait que la lumière contient des particules qui sont des concentrations d’énergie incorporée dans l’onde, suggère que toute particule, comme l’électron, doit être transportée par une onde dans laquelle elle est incorporée »… Mon idée essentielle était d’étendre à toutes les particules la coexistence des ondes et des corpuscules découverte par Einstein en 1905 dans le cas de la lumière et des photons. » « À toute particule matérielle de masse m et de vitesse v doit être "associée" une onde réelle » reliée à la quantité de mouvement par la relation :
longueur d’onde = h / quantité de mouvement = (h/mv) fois racine de (1 – v²/c²)

h = constante de Planck"

Durant l’été 1923, Louis de Broglie publie 3 notes dans les "Comptes rendus de l’Académie des sciences", 3 notes qui constituent le point de départ de la mécanique ondulatoire :

1. Il établit la relation entre le mouvement d’un corpuscule libre et la propagation de l’onde qu’il propose de lui associer.

1. Il précise l’application de ses conceptions au cas des photons et esquisse une théorie des phénomènes d’interférence et de diffraction de la lumière compatible avec l’existence des photons. Il conclut : "Nous concevons donc l’onde de phase comme guidant les déplacements de l’énergie, et c’est ce qui peut permettre la synthèse des ondulations et des quanta.[...] La nouvelle dynamique du point matériel libre est à l’ancienne dynamique ce que l’optique ondulatoire est à l’optique géométrique." C’est l’acte de naissance d’une nouvelle mécanique : la mécanique ondulatoire, l’un des plus grands événements scientifiques depuis Galilée.

1. Il établit la correspondance entre le principe de moindre action appliqué au mouvement d’un corpuscule et le principe de Fermat appliqué à la propagation de son onde associée. La célèbre formule de Louis de Broglie apparaît à la fin de la troisième note.

Il rédige sur ce sujet une thèse de doctorat , présentée sous le titre de "Recherche sur la théorie des quanta".(rapport disponible)

En réalité, personne ne percevait le bouleversement. Il s’agit, pour Louis de Broglie, d’affirmer que les particules sont transportées par des ondes indissociables. La matière est "ondulatoire" et devrait présenter des caractéristiques semblables à celles de la lumière. Or les conséquences d’une telle affirmation étaient inimaginables. C’était la remise en cause de toute la physique.

Louis de Broglie explique l’idée fondamentale de la mécanique ondulatoire :

Notes, théorie de la double solution (1925-1927)

Entre 1925 et 1927, Louis de Broglie rédige une série de notes sur le dualisme photon-onde lumineuse qui l’amène à une interprétation assez subtile qu’il appelle théorie de la double solution.(cours : effet Compton dans un champ d’interférence en théorie de la double solution)

Vérification (printemps 1927)

Einstein, après avoir constaté dans un premier temps qu’il s’agissait, dans la thèse de Louis de Broglie, "d’idées complètement folles", perçut la fabuleuse révolution conceptuelle que représente la théorie proposée par Louis de Broglie.

Durant le printemps 1927 sont publiées des expériences sur la diffraction des électrons par les cristaux ; expérience de Davisson et Germer (animation disponible) puis Thomson.Ainsi, toutes les conceptions de Louis de Broglie sont confirmées.

Louis de Broglie participe alors avec Einstein, Planck, Langevin et d’autres savants célèbres au congrès Solvay de 1927.

Le congrès Solvay de 1927

Au mois d’octobre 1927 s’est réuni à Bruxelles le 5° congrès Solvay, sur le thème Électrons et photons. Louis de Broglie a écrit : "Peu habitué encore à parler en public, je me suis heurté au conseil Solvay à Bruxelles en octobre 1927 à l’opposition des jeunes et brillants théoriciens de l’école de Copenhague groupés autour des célèbres savants Niels Bohr et Max Born".

Louis de Broglie, malheureusement, relégua sa victoire expérimentale (expériences de Davisson et Germer et de Thomson) en fin d’exposé, ce qui lui en fit perdre le bénéfice, et faute de défendre ses idées avec force, il donna l’impression de se perdre en chemins de traverse. Reculant devant les difficultés mathématiques et physiques que soulevait son idée des ondes singulières, il se réfugia dans une version qu’il qualifia plus tard de "bâtarde".

1928

Louis de Broglie devient titulaire d’une maîtrise de conférence créée pour lui à la faculté des sciences de Paris. Grâce aux donations du baron de Rothschild, un institut de recherches théoriques est créé : l’institut Henri-Poincaré. Louis de Broglie y enseignera pendant 34 ans, succédant en 1932 à Léon Brillouin à la chaire de physique théorique.

Prix Nobel (1929)

Louis de Broglie fut le premier de la jeune génération des fondateurs de la physique quantique à recevoir le prix Nobel, pour la prévision de "la nature ondulatoire de l’électron". Louis de Broglie investit l’argent de ce prix dans l’achat d’une belle maison à Saint-Germain en Laye.

"théorie générale des particules à spin" (1934)

Louis de Broglie édifie une théorie de la lumière, généralisant au photon, particule de spin 1, les équations de Dirac dans le cas de l’électron (spin : moment cinétique propre d’une particule). Cela suppose que le photon est constitué par une sorte de "fusion" à partir de 2 particules de spin 1/2. La théorie de la fusion pouvait alors se généraliser à toutes les particules de spin entier ou demi-entier. Cette synthèse réalisée par Louis de Broglie constitue une "théorie générale des particules à spin". Des recherches sur la propagation des ondes guidées, sur les interactions entre matière et rayonnement devaient suivre. Néanmoins, les préoccupations de Louis de Broglie restaient axées sur l’interprétation de la mécanique ondulatoire, qui, semble-t-il, ne l’avait jamais pleinement satisfait.

Notons que, du point de vue philosophique, cette théorie des ondes de matière est ce qui a le plus contribué à ruiner l’atomisme de jadis. À l’origine, de Broglie pensait qu’une onde réelle (c’est-à-dire ayant une interprétation physique directe) était associée aux particules. Il s’est avéré que l’aspect ondulatoire de la matière est formalisé par une fonction d’onde gouvernée par l’équation de Schrödinger qui est une pure entité mathématique ayant une interprétation probabiliste, sans support d’éléments physiques réels. Cette fonction d’onde donne à la matière les apparences d’un comportement ondulatoire, sans pour autant faire intervenir des ondes physiques réelles. Cependant, de Broglie est revenu vers la fin de sa vie à une interprétation physique directe et réelle des ondes de matière, à la suite des travaux de David Bohm. La théorie de de Broglie-Bohm est aujourd’hui la seule interprétation donnant un statut réel aux ondes de matière et respectant les prédictions de la théorie quantique. Mais présentant un certain nombre de problèmes de fond, et n’allant pas plus loin dans ses prédictions que l’interprétation de Copenhague, elle est peu reconnue par la communauté scientifique.

Dans la seconde partie de sa thèse de 1924, de Broglie a utilisé l’équivalence du principe mécanique de la moindre action avec le principe optique de Fermat : « Le principe de Fermat appliqué à l’onde de phase est identique au principe de Maupertuis appliqué au mobile ; les trajectoires dynamiques possibles du mobile sont identiques aux rayons possibles de l’onde ». Cette équivalence avait été remarquée par Hamilton un siècle auparavant, et publiée par celui-ci vers 1830, à une époque où aucune expérience ne justifiait de remettre en cause les principes fondamentaux de la physique pour la description des phénomènes atomiques.

Jusqu’à ses derniers travaux, il paraît être le physicien qui a le plus poursuivi cette dimension d’action dont Max Planck, au début du XX e siècle, avait montré qu’elle est finalement la seule unité universelle (avec sa dimension d’entropie).

Louis de Broglie, dans « Le dualisme des ondes et des corpuscules dans l’œuvre d’Albert Einstein » :

« Bientôt M. Bohr allait la résumer en introduisant la curieuse, mais un peu trouble, notion de « complémentarité » suivant laquelle le corpuscule et l’onde sont des « aspects complémentaires de la réalité » qui se complètent en s’excluant, chacun de ces deux aspects ne se manifestant dans l’expérience qu’au détriment de l’autre. En s’orientant vers de telles conceptions, on s’éloignait évidemment complètement de la représentation synthétique des corpuscules et des champs dans le cadre de l’espace et du temps qu’avait rêvée Einstein… A la fin d’octobre 1927, eut lieu, à Bruxelles, le 5 ème Conseil de Physique Solvay consacré à la Mécanique ondulatoire et à son interprétation. J’y fis un exposé de ma tentative, mais, pour diverses raisons, je le fis sous une forme un peu tronquée en insistant principalement sur l’image hydrodynamique. Mon rapport ne fut guère goûté : groupés autour de MM. Bohr et Born, le groupe très actif des jeunes théoriciens qui comprenait MM. Pauli, Heisenberg et Dirac étaient entièrement acquis à l’interprétation purement probabiliste dont ils étaient les auteurs. Quelques voix s’élevaient cependant pour combattre ces idées nouvelles. H. A. Lorentz affirmait sa conviction qu’il fallait conserver le déterminisme des phénomènes et leur interprétation par des images précises dans le cadre de l’espace et du temps, mais son intervention très remarquable n’apportait aucun élément constructif. M. Schrödinger préconisait l’abandon complet de la notion du corpuscule pour ne conserver que celle des ondes régulières du type classique, mais j’étais convaincu qu’une telle tentative ne pouvait aboutir . Qu’allait dire Einstein dans ce débat dont pouvait sortir la solution du redoutable problème qui l’avait tant préoccupé depuis sa géniale intuition sur les quanta de lumière ? A mon grand désappointement, il ne dit presque rien. Une seule fois, il prit la parole pendant quelques minutes : rejetant l’interprétation probabiliste, il lui fit en termes très simples une objection qui, je le crois, a conservé un grand poids. Puis il retomba dans son mutisme. (…)Je revins du Conseil Solvay très décontenancé par l’accueil qu’avaient reçu mes idées. Je ne voyais pas la manière de surmonter les obstacles qu’elles rencontraient et les objections qui m’avaient été faites. J’avais l’impression que le courant qui portait la presque unanimité des théoriciens qualifiés à adopter l’interprétation probabiliste était irrésistible. Je me ralliai donc à cette interprétation et je la pris comme base de mes enseignements et de mes recherches. »

Pourquoi refuser à tout prix une conception « purement probabiliste » ?
Pourquoi traiter de trouble cette notion nouvelle de complémentarité ?

« La nouvelle interprétation était très révolutionnaire : elle renonçait aux descriptions précises dans le cadre de l’espace et du temps, elle abandonnait la causalité et le déterminisme des phénomènes physiques. Bientôt M. Bohr allait la résumer en introduisant la curieuse, mais un peu trouble, notion de « complémentarité » suivant laquelle le corpuscule et l’onde sont des « aspects complémentaires de la réalité » qui se complètent en s’excluant, chacun de ces deux aspects ne se manifestant dans l’expérience qu’au détriment de l’autre. En s’orientant vers de telles conceptions, on s’éloignait évidemment complètement de la représentation synthétique des corpuscules et des champs dans le cadre de l’espace et du temps qu’avait rêvée Einstein. » écrit Louis de Broglie, dans « Le dualisme des ondes et des corpuscules dans l’œuvre d’Albert Einstein ».

Le dualisme des ondes et des corpuscules dans l’œuvre d’Albert Einstein

Bohr donnait à chaque fois des définitions différentes des notions qu’il inventait, comme complémentarité ou dualité, au point qu’Einstein a dit un jour qu’en dépit des efforts de toute une vie, il n’avait jamais pu comprendre ce que Bohr voulait dire par « principe de complémentarité » et parfois il en changeait au cours du même exposé ou du même écrit. Voici diverses interprétations données par Bohr :

« Des informations obtenues sur le comportement d’un seul et même objet atomique dans des conditions d’expérience chaque fois bien définies, mais s’excluant mutuellement, peuvent, néanmoins, suivant une terminologie courante en physique atomique, être dites complémentaires : bien qu’il soit impossible de les rassembler en une image unique décrite à l’aide des concepts de la vie journalière, elles représentent chacune des aspects également essentiels de tout ce que l’on peut apprendre en ce domaine sur l’objet en question. C’est justement en reconnaissant ce caractère complémentaire des analogies mécaniques par lesquelles on essaye de rendre intuitives les diverses actions du rayonnement, que l’on a obtenu une solution entièrement satisfaisante des énigmes dont nous avons parlé plus haut au sujet des propriétés de la lumière. De même, c’est seulement en tenant compte des relations de complémentarité existant entre les différents renseignements obtenus sur le comportement des particules atomiques que nous sommes arrivés à comprendre le contraste frappant entre les propriétés des modèles mécaniques ordinaires et les lois toutes particulières de stabilité qui régissent les structures atomiques et qui forment la base de toute explication précise des propriétés physiques et chimiques de la matière. »

Niels Bohr dans « Physique atomique et connaissance humaine »

« Personnellement, commente Bohr, je pense qu’il n’y a qu’une solution : admettre que dans ce domaine de l’expérience, nous avons affaire à des phénomènes individuels et que notre usage des instruments de mesure nous laisse seulement la possibilité de faire un choix entre les différents types de phénomènes complémentaires que nous voulons étudier. »

Heisenberg dans « Physique et Philosophie »

Parfois « complémentaire » indiquait seulement la dualité onde/corpuscule, parfois cela impliquait l’utilisation de l’observation et son caractère de discontinuité causale, parfois cela impliquait l’observateur en tant que sujet conscient influençant les résultats de l’expérience (!) et parfois même la complémentarité était indiquée par Bohr ou Heisenberg comme une loi générale au monde…

Georges Lochak dans sa préface à « La physique nouvelle et les quanta » écrit :

« Louis de Broglie, comme presque tous les physiciens, avait succombé à la fascination des idées de Bohr sur l’indéterminisme. Il avait même cédé à cette étrange délectation qu’éprouvent beaucoup de physiciens de notre siècle à découvrir que les choses ne sont pas claires et à se sentir plus humains parce qu’ils se sentent plus ignorants. (…) Car c’est à cette même époque que Niels Bohr, grand physicien habité par d’étranges démons philosophiques, fit de la non-réponse à cette question (pourquoi les objets quantiques nous apparaissent tour à tour sous l’aspect d’ondes ou sous celui de corpuscules) un système philosophique et verrouilla le problème dans un discours épistémologique dont le maître mot était : « complémentarité ». Idée séduisante mais nébuleuse qu’un élève de Bohr, Léon Rosenfeld, exprima un peu pompeusement en disant que « la crise a été résolue sur un plan plus élevé de la théorie de la connaissance ». C’est ce qui fait encore aujourd’hui que, pour beaucoup de physiciens, le problème du dualisme onde-corpuscule n’est pas seulement difficile, ni même insoluble : il n’est pas convenable d’en parler parce que ce n’est pas un problème. L’idéologie de l’Ecole de Copenhague, de Broglie s’y était rallié sous la pression ambiante (…) En 974, Louis de Broglie considérait à nouveau l’interprétation en vigueur, celle de Bohr, comme une entrave à l’imagination. »

Introduction de Louis de Broglie à la seconde édition de « Physique nouvelle et quanta » :


« Un doute s’est glissé dans mon esprit au sujet de l’exactitude de la nature indéterminée et acausale qu’on avait été amené à attribuer aux phénomènes micro-physiques et que je m’étais résigné à admettre contrairement à mes convictions primitives. (…) »

Avant-propos de Georges Lochak à « Louis de Broglie, un itinéraire scientifique » :


« On imagine difficilement, derrière les apparences feutrées de la vie universitaire et les chaleureuses proclamations unanimistes de la communauté scientifique, la violence des combats d’idées en science et le sort qui a toujours été réservé aux idées minoritaires et aux novateurs solitaires (or comment être novateur si l’on n’est pas solitaire ? (…) De même, on nous représente un Einstein artificiel, doucement rêveur et nimbé de cheveux blancs, son noble visage souligné d’un sempiternel E = mc² ; mais on oublie les attaques, les insultes qu’il a subies dans sa jeunesse de la part des détracteurs de la relativité, ainsi que l’isolement (enjolivé de fleurs certes, mais l’isolement quand même) dans lequel l’avaient plongé aussi bien son refus d’admettre l’interprétation orthodoxe de la mécanique quantique que son opiniâtreté à poursuivre ses recherches sur le champ unitaire. Lui qui, à la fin de ses jours, écrivait depuis Princeton, et alors même que le grand public l’adulait : « je suis considéré ici comme une sorte de fossile que les ans ont rendu aveugle et sourd. (…) La pire des choses, sans doute, est ce mur de silence dont les idées minoritaires sont entourées. Et ce mur est surtout impressionnant lorsqu’il s’élève autour d’un personnage aussi célèbre que Louis de Broglie, auteur de dizaines de livres et de centaines d’articles de revues, mais qu’on ne cesse de lire et de citer dès lors que ce qu’il dit n’est plus dans le courant de la mode, et cela tout simplement parce que les ténors du moment font silence de sur son nom. »

Dans la préface de septembre 1955 à « Nouvelles perspectives en microphysique », Louis de Broglie écrit :


« J’avais cherché pendant plusieurs années, de 1923 à 1927, à obtenir une interprétation conforme à l’idée de causalité et utilisant, suivant la tradition des physiciens, une représentation de la réalité physique (…) Les difficultés que j’avais rencontrées en développant cette tentative, l’hostilité qu’elle avait suscitée de la part des autres théoriciens de la Physique m’ont conduit en 1928 à l’abandonner et je me suis rallié pendant près de 25 ans à l’interprétation probabiliste issue des travaux de MM. Born, Bohr et Heisenberg qui était devenue la doctrine officielle de la Physique théorique. (…) J’ai été amené à reprendre ma tentative d’autrefois et à me demander si ce n’était pas elle qui indiquait la bonne voie à suivre pour parvenir à une véritable compréhension du dualisme des ondes et des corpuscules et à une interprétation vraiment intelligible de la Mécanique ondulatoire. »

Louis de Broglie, dans « La physique quantique restera-t-elle indéterministe ? », 31 octobre 1960 :

« L’histoire des Sciences montre que les progrès de la Science ont été constamment entravés par l’influence tyrannique de certaines conceptions que l’on avait fini par considérer comme des dogmes. »

LIRE ENCORE :

Quand Louis de Broglie défendait une conception de la physique quantique relativiste fondée sur la singularité, la discontinuité et la non-linéarité

Louis de Broglie et l’école de Copenhague

Albert Einstein, David Böhm et Louis de Broglie sur les variables cachées dans la mécanique quantique

Physique et microphysique

Diverses questions de mécanique et de thermodynamique classiques et relativistes

La fondation Louis de Broglie
L’Institut Louis de Broglie
Réel et déterminisme dans la physique quantique

La statistique des cas purs en mécanique ondulatoire et l’interférence des probabilités

Louis de Broglie, “The wave Nature of Electron”

La physique quantique restera-t-elle indéterministe ? de Louis de Broglie

Recherches sur la théorie des quanta

Discours de Louis de Broglie

La physique quantique restera-t-elle indéterministe :

La physique nouvelle et les quanta

Dépassée par les événements la recherche initiée par de Broglie ?

Voici quelques exemples de recherches récentes utilisant les travaux de Louis de Broglie :

Developing de Broglie wave by J X Zheng-Johansson ; P-I Johansson

Louis De Broglie’s experiment by S. L. Vesely ; A. A. Vesely

de-Broglie Wave-Front Engineering by M. Olshanii ; N. Dekker ; C. Herzog ; M. Prentiss

de Broglie oscillation, rest mass and inertia by Farhad Darabi

Einstein-De Broglie relations on the lattice by M. Lorente

Density Relaxation in de Broglie-Bohm Mechanics by A F Bennett

On Reality of Tachyonic de Broglie Waves by Rajat K. Pradhan ; Lambodar P. Singh

Order in de Broglie - Bohm quantum mechanics by G. Contopoulos ; N. Delis ; C. Efthymiopoulos

De Broglie Wavelength Reduction for a Multi-photon Wave Packet by Ole Steuernagel

Lire ici la suite

Pour conclure, rien de mieux que de donner la parole à Louis de Broglie dans « Interprétations nouvelles de la mécanique ondulatoire », conférence au Palais de la Découverte le 16 octobre 1954 :

« En résumé, la Physique atomique contemporaine ne me paraît aucunement être arrivée à comprendre la véritable nature du dualisme onde-corpuscule qui est liée à l’existence du mystérieux quantum d’Action : elle s’est bornée à cacher son ignorance sous le mot un peu vague de « complémentarité ». »

Messages

  • Einstein a découvert le corpuscule de lumière et De Broglie l’onde de matière. C’étaient des découvertes renversantes et cela l’est toujours pour de multiples raisons... On trouvait ainsi une convergence inattendue entre matière et lumière, une dualité inattendue entre ondes et corpuscules, et un lien inexpliqué entre les deux...

  • Quel rapport entre une telle conception scientifique et votre conception dialectique ?

  • C’est la proposition du couplage physique, matériel et réel, entre deux éléments contradictoires inséparables : une singularité et une onde l’entourant et se propageant ensemble avec interaction.

    Cela signifie que la réalité – et pas seulement l’équation – correspond à une dualité contradictoire au sens dialectique : la particule n’est ni onde ni corpuscule mais réellement les deux à la fois de manière complémentaire, contradictoire et d’une dynamique non-linéaire.

    Ce n’est pas le seul exemple où cette physique est celle de la contradiction dialectique.

    On peut répondre par ni oui ni non mais les deux à la fois contradictoirement et de manière complémentaire, interactive et dynamique à toutes les questions de cette physique :

     les particules sont-elles ponctuelles ou ont-elles une zone d’occupation avec un rayon ?

     la particule de matière ou de lumière est-elle onde ou corpuscule ?

     un objet matériel est-il en soi matière ou non matière (vide) ?

     est-il localisé ou délocalisé ?

     est-il déterministe ou produit du désordre (aléatoire et seulement probabiliste) ?

     a-t-il une trajectoire ou pas ?

     la matière est-elle réelle ou virtuelle ?

     l’espace préexiste ou créé par le déplacement ?

     une physique fondée sur la certitude (lois) ou l’incertitude (impossibilité de déterminer complètement un paramètre) ?

    etc, etc…

  • Eh bien, d’abord, c’est le fait qu’en s’additionnant, ils ne font pas que s’additionner, ils se transforment, j’y reviendrai.

    Ensuite, en se couplant l’addition ne donne pas zéro ou rien mais une entité supérieure (plus stable ou moins gourmande d’énergie), une structure nouvelle émergente (ses propriétés ne sont pas la somme des propriétés des deux éléments).

    Il y a également le fait que la dualité, la contradiction puisque les deux éléments s’opposent par leurs propriétés et leurs effets, change la forme mais ne supprime pas la contradiction. Par exemple, matière et antimatière s’annulent mutuellement mais en donnant deux photons de spins opposés...

    S’il y annihilation des deux éléments par interaction ces contraires, cela donne une nouvelle forme de la réalité qui est à nouveau une contradiction de deux éléments.

  • Peut-on expliciter le fait que la lumière, par exemple, soit contradictoire au sens dialectique ?

  • La lumière est contradictoire en plusieurs sens :

     à la fois onde électromagnétique et corpuscule (photon)

     à la fois localisée et délocalisée

     à la fois champ électrique et champ magnétique

     à la fois ordonnée et désordonnée

     à la fois sur une trajectoire, passant par plusieurs trajectoires et ayant une simple probabilité de présence

     composée à la fois de particules et d’antiparticules virtuelles couplées.

    Et ces couplages sont à la base des forces naturelles.

  • Quel lien y a-t-il entre le caractère interactif et dynamique des systèmes duals couplés et la dialectique ?

    • Les ensembles de deux éléments contradictoires (forces opposées ayant des effets opposés) couplés constituent des unités ayant des propriétés différentes de la somme des deux éléments.Les deux éléments interagissent sans cesse, échangent sans cesse, se modifient mutuellement sans cesse. Ce n’est donc plus deux éléments indépendants mais une structure nouvelle. Ils échangent des particules et antiparticules virtuelles (ne pas confondre avec irréelles - virtuelles veut dire de courte durée de vie et, de ce fait, imperceptibles par des expériences de matière/lumière à notre échelle).

      Par exemple, un atome d’hydrogène constitué d’un noyau (un proton) et d’un électron n’est pas seulement une somme de ces deux éléments. La structure élimine de l’énergie ce qui favorise sa stabilité. Du coup, il est possible de maintenir ensemble deux éléments aux effets contradictoires.

  • En quoi les thèse de de Broglie sont elles plus proches de la dialectique que celles d’Einstein ou celles des physiciens quantiques ?

    • Les physiciens quantiques ont, pour la plupart, renoncé à toute image intuitive et descriptive de "ce qui se passe quand" en physique et accepté que la physique se résume à des calculs.

      C’est ce que Einstein et de Broglie n’acceptaient pas ce renoncement à un monde physique réel et matériel.

      Einstein cherchait une solution dans un champ unitaire, continu et linéaire.

      De Broglie proposait sa solution dual, contradictoire, non-linéaire et discontinue, propageant une singularité : l’onde à bosse.

  • Peut-on donner des citations significatives de ces thèses de Louis de Broglie ?

  • Peut-on donner des exemples de lois qui présentent une dynamique comme issue de contradictions dialectiques ?

    • Justement l’étude des particules dites "élémentaires" (et qui ne le sont pas autrement que par rapport à une interaction donnée) regorge de tels exemples.

      Cela signifie que les structures sont issues d’une dynamique, d’une histoire, des interactions entre des contraires couplés.

      Quels sont ces contraires : matière et antimatière, durable et éphémère, particules aux charges opposées ou aux spins opposés.

      Qu’est-ce qui prouve que ce sont bien celles-ci qui ont tendance à se coupler ?

      Déjà le "principe d’exclusion" de Pauli décrète que sont exclus les couplages proches entre particules de même état, par exemple de même spin. Ne peuvent donc coexister dans un même lieu que des particules de spins opposés.

      Ensuite, on constate que les particules individuelles ou les structures associant des particules le font en changeant d’état tout en conservant la charge ce qui signifie que le changement ne peut correspondre qu’au gain ou à la perte de couples de contraires.

      Il y a sans cesse des changements au sein de la structure par émission ou réception de couples d’opposés : par exemple des mésons (couplage de quarks et antiquarks opposés) pour le proton.

    • Il n’y a que cela des exemples de lois issues de contradictions dialectiques : la physique quantique, contradiction de l’onde et du corpuscule ; l’électromagnétisme, contradiction de l’électricité et du magnétisme ; la thermodynamique, contradiction de l’entropie et de la néguentropie ; la structuration de la matière, contradiction de l’ordre et du désordre, etc…

  • Les paradoxes logiques de la science ne sont pas des jeux de pensée mais des jeux de la nature dialectique du monde. On fera référence ici aux paradoxes du temps et du mouvement (paradoxes de Zénon ou de la dichotomie, paradoxe de D’Alembert, paradoxe temporel, paradoxe du grand-père ou du voyage dans le temps, paradoxe de l’écrivain, paradoxes de la vitesse de la lumière,…), aux paradoxes de la physique quantique (paradoxe EPR ou la non-séparabilité ou intrication quantique, paradoxes de la superposition d’états dont le paradoxe du chat de Schrödinger ou de la réduction du paquet d’ondes, paradoxes de la dualité onde-corpuscule dont le paradoxe des fentes de Young, paradoxe de l’effet tunnel de Josephson, paradoxe de la supraconductivité, paradoxe de Zénon quantique, paradoxe de Marlan Scully, paradoxe de Klein, paradoxe de De Broglie, …), aux paradoxes du chaos déterministe, aux paradoxes de la relativité (paradoxe de Selleri, paradoxe d’Ehrenfest, paradoxe des jumeaux, paradoxe du train, …), aux paradoxes de la thermodynamique (démon de Maxwell, paradoxe de la réversibilité, paradoxe de Loschmidt, paradoxe de Zermelo, paradoxe d’irréversibilité, paradoxe de Gibbs, …), aux paradoxes de l’émergence, aux paradoxes du chaos déterministe et de l’auto-organisation, aux paradoxes de la relation matière-lumière, aux paradoxes de l’optique, aux paradoxes des infinis en physique, aux paradoxes de la cosmologie (paradoxe d’Olbers ou du ciel noir, paradoxe de l’information des trous noirs,…).

  • je m’étonne de lire sous la plume de Broglie :

    λ = h/mv

    au lieu de λ = h/p qui est l’expression connue classiquement

    ce n’est pas la même chose !

  • Il ne faut pas oublier que, si la formule retenue par la physique quantique sur la longueur d’onde des particules de matières est bien λ = h/p , la formule de Broglie date d’un peu avant la formulation de la physique quantique, auquel elle contribué à donner naissance.

    Dans ces formules
    λ est la longueur d’onde de la particule
    h est la constante de Planck

    p est la quantité de mouvement de la particule

    En fait, c’est la même chose si m n’est pas la masse au repos mais la masse relativiste.

    Lire ici

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