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Vide quantique et chaos déterministe

lundi 16 août 2010, par Robert Paris

"L’univers, telle une Cadillac, dispose d’un frein, la gravitation, et d’un accélérateur, le vide."

Michel Cassé, "Du vide et de l’éternité"

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Vide quantique et chaos déterministe

Des physiciens ont mis en évidence l’existence de phénomènes chaotiques à l’échelle microscopique.

De la météorologie au mouvement des planètes, en passant par les cours de la Bourse et la dynamique des populations..., les comportements chaotiques sont omniprésents. Pour autant, ils ont rarement pu être observés de manière concluante à l’échelle quantique. Au point que plusieurs théoriciens ont nié leur existence. Des physiciens américains soutiennent toutefois le contraire. Et pour cause, ils viennent d’observer avec une précision inégalée que certains atomes présentaient, eux aussi, des comportements chaotiques.

Selon la définition qu’en donnent les physiciens, de tels comportements résultent de l’hypersensibilité d’un système aux conditions initiales, autrement dit des variations, même très fines, de certains paramètres définissant l’état du système. Celui-ci devient alors imprévisible à plus ou moins longue échéance.

Des phénomènes chaotiques ont été observés dans de très nombreux systèmes macroscopiques. Se manifesteraient-ils aussi à l’échelle quantique ? Plusieurs arguments ont été avancés pour prétendre que non. On sait, par exemple, que les systèmes chaotiques sont régis par un certain type d’équations, qualifiées de « non linéaires ». Or l’équation fondamentale de la mécanique quantique - l’équation de Schrödinger - ne présente pas cette caractéristique : elle est linéaire.

Ceux qui supposaient, pour leur part, l’existence d’un chaos quantique, ont mis l’accent sur un argument d’ordre « ontologique ». De toutes les théories physiques la mécanique quantique est en effet la plus fondamentale, celle qui décrit les constituants ultimes de la matière. Puisque le chaos se manifeste à l’échelle macroscopique, on devrait donc en trouver la trace, et même l’origine, au niveau quantique.

Poul Jessen et son équipe de l’université de l’Arizona, à Tucson, donnent aujourd’hui raison à cet argument. Ils ont d’abord refroidi des atomes de césium à une température proche du zéro absolu. Ces atomes sont caractérisés par une propriété quantique fondamentale, appelée « spin », qui fait qu’ils se comportent comme de petits aimants pointant dans une direction spécifique de l’espace. Un laser a été utilisé pour faire tourner les atomes autour de l’axe formé par cette direction - un peu comme une toupie. Puis une série de petits chocs a été délivrée aux atomes à l’aide de champs magnétiques.

Simulations

Ces chocs modifient la direction de l’axe de rotation des « toupies quantiques ». Des simulations numériques réalisées il y a plusieurs années prévoyaient que le mouvement de cet axe devrait entrer dans un régime chaotique. C’est exactement ce que les physiciens américains ont observé à l’aide d’une technique d’imagerie.

Ils attribuent l’apparition de ce régime chaotique à l’existence de fortes corrélations entre l’état quantique des noyaux et celui des électrons qui gravitent autour. « D’autres expériences, réalisées notamment avec d’autres atomes, seront toutefois nécessaires pour valider cette hypothèse, précise Dominique Delande, du laboratoire Kastler-Brossel de l’ENS. Avec, comme point de mire, une compréhension plus fine des limites qui séparent le monde classique du monde quantique. »

Franck Daninos - La Recherche

Encore sur le vide quantique

Messages

  • Une toupie réduite à un atome

    Une nouvelle expérience semble pourtant montrer que le chaos quantique existe. Elle résulte des travaux menés depuis quelques années par le physicien Poul Jessen et ses collaborateur du UA’s College of Optical Sciences de l’Université de l’Arizona.

    Pour obtenir ce résultat, les chercheurs ont considéré l’équivalent quantique d’une toupie perturbée par une série de chocs légers et dont le comportement est connu comme étant chaotique dans le monde classique. La toupie quantique est dans le cas présent un atome de césium dont le moment cinétique résulte d’un couplage entre celui d’un de ses électrons et celui du noyau. L’ensemble possède un moment magnétique et se comporte donc aussi comme un petit aimant.

    Après des années de travail, les physiciens sont parvenus à manipuler l’axe de rotation de cette toupie quantique aimantée. Il faut d’abord refroidir suffisamment les atomes de césium avec des faisceaux lasers et ensuite est apliquée une série d’impulsions magnétiques correspondant à des petits chocs sur l’équivalent classique de la toupie. D’autre perturbations induites par le champ électrique variable d’un faisceau laser dans le domaine optique modifient elles aussi l’état d’orientation de la toupie quantique.

    Après chaque cycle de perturbations magnétiques et électriques, une technique analogue à la tomographie médicale permet de mesurer l’orientation résultante de l’axe de la toupie et donc d’en déduire les mouvement au cours du temps. Non seulement le comportement observé est bien chaotique mais la transition entre le régime où le système classique ne se comporte pas comme un système chaotique et celle où il le devient se retrouve à la même place dans son analogue quantique.

    Cette expérience semble donc bien démontrer qu’il n’y a pas besoin de changer les lois fondamentales de la mécanique quantique et que la connexion entre le monde quantique et le monde classique s’effectue sans contradiction entre les théories les décrivant.

    Remarquablement, Jessen et ses collègues font remonter l’apparition du chaos dans ce système à l’établissement d’une intrication quantique entre le moment cinétique de l’électron de l’atome de césium et le moment cinétique de son noyau. L’intrication est importante en physique quantique car elle est à la racine de l’effet EPR et de tout ce qui tourne autour de la notion d’information et d’ordinateur quantique.

    Un article publié dans Nature expose les résultat de l’expérience mais on peut trouver sur Arxiv un article plus ancien à ce sujet, libre d’accès.

    • Bonjour et merci pour cet article.

      Je lis : "on peut trouver sur Arxiv un article plus ancien à ce sujet, libre d’accès"
      Pouvez-vous me donner les coordonnées de cet article sur ArXiv ?
      D’avance merci !

      Gilbert Reinisch
      Université de la Côte d’Azur
      Observatoire de la Côte d’Azur
      Dépt Lagrange
      06 - NICE
      mail : gilbert.reinisch@oca.eu

  • Le chaos quantique mieux compris
    La conjecture d’ergodicité quantique unique, qui prédit le comportement des systèmes chaotiques quantiques, est en partie résolue.
    Philippe Ribeau-Gésippe.
    Comment se comportent les systèmes chaotiques – très sensibles aux conditions initiales – lorsqu’ils sont transposés de la physique classique à l’univers quantique, où les particules ponctuelles cèdent la place aux fonctions d’onde ? K. Soundararajan, de l’Université de Stanford, et Roman Holowinsky, de l’Université de Toronto, ont fait un pas en avant vers la résolution d’une importante conjecture de ce domaine, dit du chaos quantique ; il s’agit de la conjecture d’ergodicité quantique unique, formulée au début des années 1990.

    Un exemple type de système de chaos quantique est le billard quantique. En mécanique classique, la trajectoire d’une bille idéale lancée sur une table de billard rectangulaire est facile à décrire et à prévoir rebond après rebond. Toutefois, lorsque les coins du billard sont arrondis, le mouvement de la bille devient vite imprévisible au fil des rebonds : ce système est chaotique. En outre, il est ergodique, c’est-à-dire que la bille parcourt toute la surface du billard et passe autant de temps dans chaque région. Il existe néanmoins des trajectoires périodiques, par exemple si la bille est lancée perpendiculairement à un bord.

    Dans la version quantique du problème, on étudie non plus le comportement d’une bille, mais celui d’ondes stationnaires, correspondant aux états propres d’énergie d’une particule quantique en mouvement à l’intérieur du billard. Dans les systèmes quantiques non ergodiques, ces ondes se concentrent dans certaines zones. En revanche, on a montré que dans les systèmes ergodiques quantiques, la plupart des états propres s’étalent de façon uniforme dans le domaine considéré.

    Mais est-ce vrai pour tous les modes et pour toutes les surfaces ? En d’autres termes, existe-t-il un analogue des trajectoires périodiques classiques dans les systèmes ergodiques quantiques ? Des simulations numériques de billard chaotique quantique vont dans ce sens : certains modes stationnaires se concentrent le long des trajectoires périodiques du système classique correspondant, un phénomène connu sous le nom de « cicatrices ».

    Cependant, en 1991, Peter Sarnak et Zeev Rudnik ont conjecturé que dans les systèmes quantiques analogues au billard, mais sur des surfaces ou d’autres espaces à courbure négative (une surface en « selle de cheval » en est un exemple), les états propres sont toujours uniformément distribués, en d’autres termes, ces systèmes sont « uniquement ergodiques ».

    C’est cette conjecture qu’ont résolue R. Holowinsky et K. Soundararajan pour une classe générale de surfaces, par deux approches différentes, mais complémentaires. La structure particulière des systèmes qu’ils ont étudiés leur a permis d’utiliser des techniques issues de la théorie des nombres, une branche des mathématiques pures qui a révélé ces dernières décennies des connexions inattendues avec la physique.

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