Ces images ne viennent pas d’Irak ni d’Afghanistan mais d’Haïti, sous la domination des armées étrangères, pour moitié américaines...
Haïti occupée militairement : pour lutter contre les risques d’un séisme ? Oui ! Le séisme social !
Les USA, le Canada, le Brésil, la France,... ont envahi Haïti militairement. Ce n’est ni les sauveteurs, ni les médecins, ni la nourriture qui débarquent massivement dans l’île ravagée mais des troupes entraînées à réprimer, à tuer, à terroriser des peuples. Cela signifie que ces puissances ne craignent pas en premier la faim, les épidémies, pas plus qu’ils ne craignaient en premier le séisme et ne se préoccupaient d’abord des sauvetages possibles dans les maisons effondrées. Si elles ont bloqué l’aéroport avec l’envoi de 30.000 soldats, ce n’était pas non plus pour lutter contre de petits voleurs dans les magasins ou sécuriser les envois de nourriture !
Ces grandes puissances ont été touchées par le sort de ce « malheureux peuple » ? Certainement pas ! Elles ont vu là une occasion d’en finir avec les risques révolutionnaires de l’île qui avait renversé Bébé Doc et ses macoutes, qui s’est révoltée contre les coups d’état militaires comme celui de Lafontant en 1991, qui a dû démissionner son armée, qui n’a pas accepté les troupes d’occupation de l’ONU, ainsi que les troupes américaines et françaises, qui s’est révoltée contre la faim en 2008 et qui, lors du séisme, a commencé à s’organiser elle-même et aussi à se révolter. Port-au-Prince a connu depuis des manifestations aux cris de « de la nourriture et de l’aide, pas des soldats ! » et il y a eu des émeutes, des barricades, et même une tentative insurrectionnelle d’un groupe qui avait lancé le bruit d’un tsunami. Voilà pourquoi les grandes puissances craignent tant le peuple travailleur haïtien qu’elles tiennent à l’encadrer militairement.
On peut lire dans la presse : "Nelson Jobin, ministre brésilien de la Défense, de retour au Brésil, a évoqué « le risque d’émeutes ». Ce ne sont pas les pillages des « Carrefour » de Carrefour, localité où résidait Pauline Bonaparte, qui a été, comme Jamel, très endommagée par le séisme, qui motivent les inquiétudes du chef de la protection civile italienne et l’envoi massif de renforts militaires en Haïti. C’est bien la perspective d’une insurrection générale, dans un pays désormais sans infrastructure étatique autre que celle que tentent de constituer les grandes nations et l’Onu, qui est redoutée."
La première réaction du ministre français des affaires étrangères, M. Kouchner, quelques heures à peine après la catastrophe, alors que des milliers d’Haïtiens sont ensevelis sous les ruines que les morts se comptent déjà par dizaines de milliers et les sans-abris par millions est : « il faut préserver l’ordre, arrêter les pillages, garantir les propriétés » ! Et, le ministre des affaires étrangère du Brésil Celso Amorin renchérit : « Il est clair que cette tragédie requiert une attention spéciale en ce qui concerne l’ordre et la sécurité. D’autant plus que les prisons ont été détruites » (dans "O Estado" du 14 janvier)
Interrogé sur le Today Show de la chaîne NBC, l’ambassadeur américain à Port-au-Prince, Kenneth Merten, a indiqué que “les soldats américains n’intervenaient que dans le cas où ni la police haïtienne, ni les casques bleus ne pouvaient assurer la sécurité”.
Les grandes puissances se sont réunies à Montréal pour estimer les urgences de l’aide à Haïti et que croyez-vous qu’elles estiment le plus important de construire ? Des réseaux d’eau potable, des hôpitaux et des écoles ? Non, ce sont des prisons, des casernes, des tribunaux, une police et une armée. Ils veulent réembaucher les militaires haïtiens, démissionnés depuis 1995, l’armée haïtienne ayant été dissoute. Ils vont reconstruire complètement l’armée et la police haïtienne. Et c’est, disent-ils, la plus grande urgence. Et pourquoi ? Parce que des années de révolte avaient déjà démoli partiellement l’Etat bourgeois, discrédité par ses atrocités au service des classes dominantes, à l’époque des Duvalier mais aussi après. Parce que l’armée haïtienne s’était alors révélée aussi pourrie que la dictature de Duvalier.
Les USA, le Brésil ou la Canada vont donc fournir l’armée d’occupation en attendant de reconstruire l’Etat oppressif. L’Europe, qui tient à distinguer son petit rôle, propose de devenir la force de police.... Voilà la principale "aide internationale" en attendant que les fonds collectés atterrissent comme d’habitude pour l’essentiel entre les mains des chefs de bande de la bourgeoisie haïtienne et des chefs militaires ou de la police haïtienne !!!
Et n’oublions pas que la reconstruction d’un pays doit d’abord rapporter aux sociétés des pays riches qui aident. Devant le forum économique mondial (WEF) organisé comme chaque année à Davos, en Suisse, Mr Clinton, l’envoyé spécial de l’ONU pour Haïti, a appelé les chefs d’entreprises à investir dans le pays en déclarant que l’investissement en Haïti doit être vu comme "une occasion de faire des affaires".... Voilà l’humanitaire vu par les grandes puissances et bien des travailleurs qui ont vraiment cru à cette opération du fait du matraquage médiatique auraient dû être plus méfiants quand l’opération d’Obama s’appelle "Clinton-Bush", du nom des deux présidents américains qui ont fait la guerre au peuple haïtien dans le passé quand celui-ci s’est révolté.
Nous venons d’assister, soi-disant pour faire face aux conséquences d’un séisme, au débarquement en Haïti de 30.000 soldats en armes, des USA, de France, du Brésil…, un événement dont la signification échappe malheureusement à la plupart des travailleurs, victimes d’une propagande médiatique à grande échelle. Tout a été fait pour leur faire croire que le monde intervenait contre le séisme... pour aider « un malheureux peuple victime d’une catastrophe naturelle, une fois de plus victime d’un triste sort. » ! Ils lui envoient des soldats au lieu de sauveteurs. Ils débarquent des armes et des munitions et peu de nourriture et de soins....
Comment expliquer que le petit peuple d’Haîti fasse une telle peur aux grandes puissances, au point qu’elles y envoient des armadas militaires armées jusqu’au dents, avec les bérets noirs parachutistes US et les Marines, rompues aux guerres civiles ? La plupart des travailleurs de France ignorent que le petit peuple d’Haïti n’est pas seulement une population très pauvre, mais aussi un prolétariat révolutionnaire craint des classes dirigeantes mondiales. Depuis la révolution débutée en 1984-86, la population haïtienne a appris à se battre par ses propres moyens. Elle a une longue expérience de lutte, plus que tout autre peuple du monde. Elle sait se méfier des forces de l’ordre et des classes dirigeantes qui n’ont cessé de la massacrer, sous Duvalier et après Duvalier, après l’intervention armée américaine de 1994 et après l’occupation internationale à partir de 2004 comme avant.
Les classes dirigeantes craignent par dessus tout ce discrédit de l’Etat haïtien et l’absence de forces de répression qui rendrait irrépressible un mouvement populaire. Et ce danger est encore accru par le fait que le séisme a contribué à détruire l’Etat haïtien, autant physiquement que dans sa crédibilité. Si les édifices du pouvoir ont été démolis, la confiance de la population dans cet Etat l’a également été, en voyant qu’il était complètement absent pour sauver les victimes et organiser les secours, l’organisation des soins, du logement des sinistrés, de la sécurité des habitants et de la distribution de vivres...
Et la crainte des classes dirigeantes mondiales concerne surtout l’avenir : plus le temps passe, plus la population peut apprendre à se passer d’un Etat bourgeois. Dès maintenant, pour répondre à l’urgence de la situation, en l’absence d’aide de l’Etat haïtien ou des forces armées étrangères, les gens s’organisent par eux-mêmes en comités de quartiers et se fédèrent pour organiser la distribution d’eau et d’alimentation, mettre en place des quartiers et les protéger. Et ils ne craignent rien tant que le fait que cette situation perdure car, alors, les opprimés d’Haïti deviendraient ingouvernables. Les classes dirigeantes du monde ne craignent rien tant que la situation d’un peuple qui apprendrait, comme la Commune de Paris, à se passer de l’Etat des oppresseurs.
C’est cette crainte qui les amène à vouloir démolir les liens sociaux que représentaient les villes en poussant la population travailleuse qui s’y agglomérait dans des camps de tentes à l’extérieur encadrés par les armées étrangères et haïtienne. Celle-ci doit être reconstruite par les grandes puissances. premier objectif disent-elles : une armée haïtienne de 300.000 hommes. !!! Cela va donner à manger, cela va donner un logement, cela va donner des soins aux habitants complètement démunis, bien sûr que non !!!!
En somme, l’armée haïtienne pourrait être la seule miraculée du séisme, puisqu’elle réapparaît alors que les masses populaires n’ont cessé de la subir, sous Duvalier comme après, en tant que force de répression et d’oppression.... Mais il y a une autre possibilité : celle justement que craignent les classes dirigeantes du monde.
Oui, dans cette situation catastrophique, la perspective vitale, c’est que les masses populaires d’Haïti ne cèdent pas au chantage des grandes puissances et s’organisent de manière indépendante pour bâtir une société débarrassée des exploiteurs et des galonnés !
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