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L’Ancien Testament appuie l’esclavage des peuples non Hébreux

9 décembre 2021, 05:28, par Moïse

Il en ainsi chez les Hébreux, la prise du butin se révèle le but de la guerre (114). La naissance du démothéisme (115), c’est-à-dire la transformation des différents dieux polythéistes en un seul dieu national favorise de pareils buts. Les différents dieux : dieux des Pères, dieu d’Abraham, dieu d’Isaac, dieu de Jacob (116) s’amalgament en un seul dieu national (117), le Dieu des Hébreux (118), le Dieu d’Israël (119), et les Hébreux deviennent le peuple de Yahvé (120).

Le peuple stipule un pacte d’Alliance avec son Dieu, à la manière des pactes militaires comportant des droits et obligations réciproques des deux parties (121) : le peuple prend l’engagement de n’adorer que Yahvé, son dieu choisi, et de construire un autel pour lui présenter des holocaustes et des sacrifices (122), car Yahvé en véritable dieu nomade aime l’odeur de la viande rôtie, en « parfum d’apaisement » (123). Yahvé, de son côté s’engage à fournir à son peuple le pain et l’eau, à détourner de lui la maladie, à éviter l’avortement et la stérilité des femmes, et à lui promettre la victoire en guerre : Je sèmerai devant toi ma terreur, je chasserai devant toi les peuples, jusqu’à ce que tu hérites le pays (124). Les ennemis des Hébreux deviennent les ennemis de Yahvé (125), car Yahvé est le Dieu des Hébreux, et les Hébreux sont le peuple de Yahvé (126), à l’exclusion des autres peuples, ces autres peuples se réduisent à un simple instrument entre les mains de Yahvé pour faire triompher son peuple élu (127).

Cette notion qui persistera au cours des siècles d’être le peuple élu d’un dieu (128), a son pendant chez les peuplades tribales actuelles qui entreprennent de razzias en terre étrangère. Les Nuer du Nil, au cœur de l’Afrique, croient que leur dieu ordonne d’attaquer leurs voisins les Dinka et de piller leur bétail (129), les prophètes de Nuer reçoivent la volonté du dieu concernant la victoire de son peuple (130).

Le dieu national donne à son peuple élu un pays en possession (131), à Abram, lui et sa postérité pour toujours (132) : « A toi et à ta race après toi, je donnerai le pays où tu séjournes, tout le pays de Canaan, en possession à perpétuité, et je serai votre Dieu (133). La crasse injustice qui consiste à enlever la terre des uns et à la donner aux autres devient une institution divine.

Le nomade du désert, rencontrant une haute civilisation en Canaan, convoite cette terre qui ruisselle de lait et de miel (134), il impute à son dieu qu’il la lui a donnée en héritage, à lui et à sa race. Son dieu a juré comme font les hommes : "La terre que Yahvé a promis par serment à vos pères et à leurs descendants, terre qui ruisselle de lait et de miel" (135), la terre promise.

Mais bientôt l’avidité du nomade ne connaît point de bornes, il ne se limite plus au pays de Canaan, il convoite tout le Moyen-Orient : « A ta postérité je donne ce pays, du Fleuve d’Egypte jusqu’au Grand Fleuve, le fleuve de l’Euphrate » (136).

Le dieu de la race (137) se plie à l’ambition de cette race.

Yahvé est un dieu guerrier (138), le Dieu des armées, Yahvé Sabaot (139), Dieu des troupes d’Israël (140), qui sauve des mains de l’ennemi (141), et qui livre la ville de l’ennemi entre les mains des Israélites (142). Yahvé, pareil à ‘Anat, déesse de la guerre chez les Cananéens, et à Indra, le dieu des Aryens de l’Inde (143), combat lui-même aux côtés des Hébreux (144), car Yahvé est un guerrier (145) qui lutte en personne, un feu dévorant (146), fort et puissant (147), il lutte d’une main forte et d’un bras étendu (148), de sa main droite il taille en pièces l’ennemi, renverse les adversaires, les dévore comme du chaume (149), il souffle de son haleine, et la mer les recouvre (150), il poursuit les ennemis et lance sur eux, du haut du ciel, d’énormes grêlons, et ils meurent (151).

Moïse peut abattre les plaies sur l’Egypte, afin d’amener les Egyptiens à laisser partir les Hébreux (152) ; il fend les eaux des marécages de joncs, afin de faire passer les Hébreux à sec (153). Il suit, du haut de la colline, le cours de la bataille contre Amaleq, le bâton des Elohim à la main, tout imprégné de magie (154). Lorsque Moïse tient ses mains levées, Israël l’emporte, et quand il les laisse retomber, Amaleq l’emporte (155). Josué, lui aussi, par le moyen de la magie, accomplit des prodiges, il peut arrêter le cours du Jourdain, jusqu’à ce que le peuple passe d’une rive à l’autre, en suivant l’arche de Yahvé (156), il peut même arrêter le cours du soleil et de la lune, jusqu’à ce que les Hébreux aient fini la bataille et se soient vengés de leurs ennemis (157).

Avant la bataille, le dieu guerrier promet la victoire, mais le prêtre-roi Gédéon exige un signe, que la rosée recouvre uniquement une toison, et que tout le sol reste sec. Yahvé exauce le désir de son prêtre-roi et réalise le signe que Gédéon demande (158).

Dans les batailles, les prêtres portent l’arche de Yahvé afin d’assurer la victoire, et marchent en tête du peuple (159).

Le pillage des autres peuples devient un sport sacré. Lors de la sortie d’Egypte, Yahvé ordonne aux Hébreux de ne pas sortir les mains vides, chaque femme empruntera auprès de sa voisine des objets précieux : or, argent, manteaux, Yahvé promet d’accorder aux Hébreux la faveur des Egyptiens, les Hébreux prennent tout et s’enfuient (160).

Des bandes de Hapiru se forment autour d’un chef et pratiquent au cours des siècles le brigandage en Canaan et dans les pays voisins (161).

Les coutumes des Hébreux prescrivent, dans les batailles, de brûler les villes, de passer les mâles au fil de l’épée, d’emporter le bétail, de piller les biens et de prendre comme butin les femmes et les enfants (162), pour chaque guerrier une ou deux femmes (163).

Le butin et partagé entre les guerriers qui ont combattu à la bataille, et l’on impute à David d’avoir introduit une nouvelle règle, prévoyant le droit au butin pour ceux qui sont restés au camp afin de protéger les biens (164). L’on impute aussi à Moïse d’avoir partagé le butin en deux moitiés, une pour les combattants qui ont fait la campagne, l’autre pour l’ensemble de la communauté des Israélites (165).

Les prêtres, eux, veulent aussi leur part, et attribuent à Moïse les règles qui la concernent : tout le butin, bêtes et gens, sont amenés captifs au camp à Moïse, à Eléazar le prêtre et à toute la communauté des Israélites (166). Une part du butin est consacrée à Yahvé et donnée aux prêtres lévites (167). Les objets d’or, bracelets de bras et de poignet, bagues, boucles d’oreilles, pectoraux et tous les bijoux sont donnés à Moïse et à Eléazar le prêtre, qui l’apportent à la Tente du Rendez-vous pour faire mémoire des Israélites devant Yahvé (168). Tout l’argent et tout l’or, tous les objets de bronze et de fer sont consacrés à Yahvé et entrent dans son trésor (169). Gédéon ramasse les anneaux d’or que les gens d’Israël ont pris chez les ismaélites, il en fait un ephod, objet cultuel destiné à la divination, qu’il place dans sa ville à Ophra (170).

Plus tard, le Deutéronome confirme ces règles (171).

Bref, la meilleure part du butin est donnée aux prêtres, le reste est divisé parmi les guerriers. Mais la crème du butin reste toujours l’élément féminin, surtout les vierges ; l’on impute à Moïse, lors de la guerre contre les Madiânites, d’avoir ordonné aux chefs de milliers et chefs de centaine de massacrer tous les enfants mâles et toutes les femmes qui ont connu un homme, et de ne conserver pour eux que les fillettes vierges (172), le régal des guerriers.

Notes

115. De demos : peuple, et theos : dieu, le dieu d’un peuple, terme qui nous est propre. Les autres termes se montrent incapables de rendre l’idée qu’ils voudraient exprimer. Le terme hénothéisme, du grec héno : un et theos : dieu, n’exprime pas l’idée en question, qu’il s’agit non d’un seul dieu, mais du dieu d’un seul peuple, actif dans la défense de son peuple contre les autres peuples ; voir sur l’énothéisme, par exemple : F ; Max Müller, Collect Works, t. II : Physical Religion, new ed., London 1898, Longmans, Green & Co., p. 180-181. De même le terme monolâtrie, l’adoration d’un seul, n’exprime pas à son tour l’idée du dieu d’un seul peuple, qui préfère son peuple aux dépens des autres peuples ; voir R. de Vaux, Histoire ancienne d’Israël, Paris 1971, Gabalda, p. 433.

116. Exode, 3/16. Comp. Avec Exode, 3/6, 13, 15 ; 4/5. Et voir supra, note 833.

117 Cf. Ernest Renan, Histoire du peuple d’Israël, Paris 1927, Calmann-Lévy, t. I, p. 261 ss. Etc.

118. Exode, 3/18 ; 5/3 ; 7/16 ; 9/1, 13 ; 10/3 ; Josué, 23/5.

119. Exode, 5/1, 3 ; 24/10 ; 32/27 ; 34/23 ; Nombres, 16/9 ; 23/21 ; Josué, 7/13, 19, 20 ; 8/30 ; 9/18, 19 ; Etc.

120. Exode, 3/10 ; 8/1, 20, 21, 23 ; 9/1, 13 ; 10/3.

121. Voir aussi les traités d’allégeance qu’imposa Ashshûr-Akha-Eddîn, le roi d’Assyrie (680-669 av. notre ère), aux roitelets de son empire, in ANET, p. 534, col. 2 à la p. 541, col. 2 (ANET = Ancient Near Texts relating to the Old Testament, by James Pritchard, 3rd ed., 3rd pr., Princeton 1974, Princeton University Press). Etc.

122. Exode, 20/22-26 ; 23/24-25. Repris in Deut., 6/13-17 ; 28 /14 ; 29/13.

123. Exode, 29/38-41 ; et voir 29/18, 25.

124. Exode, 23/20-31. Repris in Deut., 9/3 ; 7/12-19 ; 11/22-25 ; 26/19 ; 28/1, 11-13.

125. Juges, 5/13 ; I Samuel, 30/26.

126. Cf. Lév., 26/12 ; Jérémie, 11/4 ; 24/7 ; 31/33 ; 32/38 ; Ezéchiel, 11/20 ; 14/11 ; 36/28 ; 37/23, 27.

127. Max Weber, Gesammelte Aufsätze zur Religionsoziologie, t. III : Das Antique Judaism, Tübingen 1923, Mohr, p. 86 ss. , 126 ss., 356 ; etc.

128. II Samuel, 1/12 ; 3/18 ; 5/2, 12 , . 6/21 ; 7/7, 8, 10, 11, 23, 24 ; Deut., 4/20, 37 ; 7/6 ; 10/15 ; 14/2 ; 26/18 ; 28/9 ; 29/13 ; 32/9 ; Jérémie, 7/12 ; 12/14, 16 ; etc.

129. Evans Pritchard, Nuer Religion, Oxford 1956, At the Clarendon Press, p. 6, p. 11.

130. Evans Pritchard, Nuer Religion (1956), p. 45.

131. Genèse, 15/7.

132. Genèse, 13/15.

133. Genèse, 17/8, trad. Bible de Jérusalem. Voir aussi Genèse, 12/7. Repris in Deut., 1/7, 8, 21, 25, 35, 39 ; etc.

134. Supra, note 122.

135. Deut., 11/9. Voir aussi : Deut., 26/15 ; 31/20 ; Josué, 5/6 ; Jérémie, 11/5 ; 32/22 ; Ezéchiel, 20/6.

136. Genèse, 15/18, trad. Bible de Jérusalem. Voir aussi : Jubilés, 14/18.

137. Genèse, 17/19.

138. Dieu de la guerre, Kriegsgott : cf. Walter Beltz, Gott und die Götter, Biblische Mythologie, Berlin und Weimar 1977, Claassen Verlag, Düsseldorf, p. 65 ss. Etc.

139. Cette notion qui apparaît vers la clôture de la période transitoire entre la société de clans et la société de classes, constituera l’un des attributs de Yahvé les plus persistants à travers les siècles. Cf. I Samuel, 1/3, 11 ; 4/4 ; 15/2 ; 17/45 ; II Samuel, 5/10 ; 6/2, 18 ; 7/8, 26, 27 ; Amos, 3/13 ; etc.

140. I Samuel, 17/45.

141. Juges, 10/10-16 ; I Samuel, 7/8 ; 10/16 ; 14/39. Voir aussi : Psaumes, 18/2 ; 68/19, 20.

142. Deut., 20/13 ; 21/10.

143. Déese ‘Anat : Tablettes de Ras Shamra-Ugarit, n° V AB, B, 2e col., li. 5-37, par Ch. Virolleaud, La déesse ‘Anat, in Syria, vol. 18 (1937) , p. 85 (87-99). Indra : infra, notes 2627-2634.

144. Deut., 3/22 ; 20/4 ; Josué, 23/3, 10. Voir de même : II Chroniques, 20/29 ; 32/8.

145. Exode, 15/3.

146. Deut., 9/3.

147. Deut., 3/24 ; 4/37 ; 9/26, 29.

148. Deut., 3/24 ; 4/34 ; 5/15 ; 6/21 ; 7/8, 19 ; 9/26, 29 ; 11/2 ; 26/9 ; voir aussi I Rois, 8/42 ; II Rois, 17/36 ; II Chroniques, 6/32 ; Psaumes, 89/13.

149. Exode, 15/6-7.

150. Exode, 15/10.

151. Josué, 10/10-11.

152. Exode, ch. 7 à ch. 11 et ch. 12/29-34. Ces prétendues plaies, telles que le Nil rouge lors de la crue ou le sirocco noir, les sauterelles et les grenouilles, constituent de simples phénomènes naturels qui ne nécessitent pas une intervention divine ; cf. Pierre Montet, L’Egypte et la Bible, Neuchâtel 1959, Delachaux & Niestlé, p. 94 ss. ; Idem, L’Egypte éternelle, Paris, Fayard 1970, Marabout 1983, p. 29 ; etc.

153. Exode, 14/21-22, bien que ces marécages, à l’est du Delta égyptien, peu profonds comme des étangs, puissent être traversés à pied sans besoin de prodige.

154. Adolphe Lods , Israël des origines au milieu du VIIe siècle avant notre ère, Paris 1969, Albin Michel, p. 210.

155. Exode, 17/8-16.

156. Josué, 3/9-17, bien que les eaux du Jourdain ne soient pas profondes et permettent à quiconque de le traverser à pied sans besoin de magie. Même lors des crues, le Jourdain cesse de couler pendant plusieurs jours en cas d’éboulement de terrain ; voir Bible de Jérusalem, 1983, p. 253, c. 2, note d.

157. Josué, 10/12-13.

158. Juges, 6/14-24 ; 36-40.

159. Josué, 3/6 ; 6/6, 12 ; 8/33.

160. Exode, 3/21-22.

161. Supra, notes 860-873.

162. Supra, note 1336.

163. Juges, 5/30.

164. I Samuel, 30/22-25.

165. Nombres, 31/27.

166. Nombres, 31/12.

167. Nombres, 31/25-47.

168. Nombres, 31/48-54.

169. Josué, 6/19.

170. Juges, 8/24-27.

171. Deut., 20/10-15 ; 21/10-14.

172. Nombres, 31/17-18 : « Tuez donc tous les enfants mâles. Tuez aussi toutes les femmes qui ont connu un homme en partageant sa couche. Ne laissez la vie qu’aux petites filles qui n’ont pas partagé la couche d’un homme, et qu’elles soient à vous », trad. Bible de Jérusalem. Voir aussi la traduction TOB.

Source : https://sciencetradition.forumactif.com/t139-origine-et-evolutions-des-livres-sacres

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