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Jenny, la femme de Karl Marx

3 mars 2018, 06:34, par R.P.

Courrier de Marx à Engels (à Manchester) :

Cher Engels,

Ta lettre est arrivée aujourd’hui dans un climat bien agité.

Ma femme est malade, ma petite Jenny est malade. Leuchen a une sorte de fièvre nerveuse. Je n’ai pas pu et ne peux pas faire venir le médecin car je n’ai pas d’argent pour les remèdes. Depuis huit à dix jours je nourris la famille de pain et de pommes de terre, et la question se pose de savoir si je pourrai encore leur en procurer aujourd’hui. Ce régime n’a bien entendu rien de fortifiant, vu le temps que nous avons. Je n’ai pas écrit d’article pour Dana, car je ne possède pas le penny nécessaire pour aller lire les journaux…

Lorsque j’étais chez toi et que tu m’avais dit que tu pourrais me procurer une somme d’argent un peu plus importante avant la fin août, je l’avais écrit à ma femme pour la tranquilliser. Ta lettre d’il y a trois ou quatre semaines indiquait qu’il n’y avait pas beaucoup d’espoir mais en laissait subsister une lueur. C’est pourquoi j’avais fait patienter jusqu’au début septembre tous mes créanciers, auxquels tu le sais je ne verse plus que de petits acomptes. Maintenant l’assaut est général.

J’ai tout essayé en vain… Ce qui pourrait m’arriver de mieux, ce que je souhaite, c’est que ma logeuse nous mette à la porte. Au moins je serais quitte de la somme de trente-deux livres. Mais je n’attends pas tant de complaisance de sa part. En plus le boulanger, le laitier, le marchand de thé, le marchand de légumes et de vieilles dettes chez le boucher. Comment vais-je me sortir de ce pétrin du diable ! Enfin, au cours des derniers huit ou dix jours, j’ai emprunté quelques shillings et quelques pence à des andouilles, ce qui est pour moi le plus affreux, mais c’était indispensable pour ne pas crever.

Mes lettres t’auront montré que, comme d’habitude, quand je suis moi-même en plein dans la merde, et que je n’en entends pas seulement parler de loin, j’y patauge avec une indifférence parfaite. Cependant que faire ? Ma maison est un hôpital et la crise entraîne de telles perturbations qu’elle me contraint à lui accorder toute mon attention. Que faire ?

(…)

Ton

K. Marx

Courrier de Marx à Engels (à Manchester) :

Londres, le 9 septembre 1852

Cher Engels,

Reçu les quatre livres Sperlinge.

J’ai écrit à ma vieille et je pense que cela servira au moins à boucher un trou.

En outre j’ai fait une nouvelle tentative, dont j’espère qu’elle finira par aboutir, pour obtenir de l’argent tiré sur Dana, car j’ai des fourmis dans les doigts et je n’ai pas à perdre de temps.

Le docteur vient de passer et a rédigé des ordonnances pour toute la famille, excepté moi. Ma femme va mieux, la plus mal est la petite Laura…

Ton

Karl Marx

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