Accueil > ... > Forum 33933

Qui croirait qu’Heidegger était proche des nazis ?

11 février 2016, 15:06, par Éphraïm

En france, Heidegger fait partie des philosophes à connaître et à maîtriser par tout étudiant ou enseignant de philosophie de l’université et par conséquent de tout enseignant de l’éducation nationale.

Il s’agit, bien entendu, de connaître ses écrits philosophiques. Mais s’il faut connaître ses écrits philosophiques pour montrer à quel point l’étudiant et l’enseignant se conforment parfaitement à l’académisme, les écrits et théories qui sont retenues sont toujours présentées de façon séparée, en évitant la discussion de l’implication nazie ou en minimisant cette implication.

De même, lorsque Marx est au programme de l’agrégation, en 2015, puisque le programme précise les textes (aucun texte politique ne figurait alors au programme sorti en février 2014), la partie philosophique de son oeuvre s’étudie indépendamment des écrits politiques...

En clair, puisque Heidegger figure à la liste des programmes et du bac, et du capes comme de l’agrégation de la discipline, alors, il est à vénérer comme tous les auteurs reconnus comme ayant publié une oeuvre reconnue comme majeure : « L’étude d’œuvres des auteurs majeurs est un élément constitutif de toute culture philosophique. », annonce le programme du bac.

Ainsi, Heidegger est étudié sans aborder autre chose que ses écrits philosophiques, métaphysiques théorisant l’être et l’étant, la plupart du temps assumés et présentés comme bien loin de ses propos nazis, malgré les revendications du personnage qui prônait un lien entre sa philosophie et son engagement nazi... Ainsi, Heidegger est donc étudié contre les déclarations de Heidegger lui-même !

Au mieux on indique que, lui, il faisait le lien entre cette implication politique et sa philosophie, mais il va de soi dans l’académisme que l’on se doit d’étudier une philosophie « pour elle-même », et donc ce rappel n’est jamais approfondi par un enseignant. Car tout enseignant sait que s’il va plus loin, il sort de son rôle de défenseur et représentant de la République ! Or, la prétendue neutralité républicaine est sacrée et tout fonctionnaire a un devoir de réserve. Ainsi, dire ce qui est dit dans l’article serait, pour tout enseignant de philosophie, outrepasser ce devoir de réserve.

Cela étant, il faut bien préciser que nombre d’enseignants oublient de regarder de plus près ce qui est dit dans l’article ci-dessus. Bien souvent, le devoir de mémoire, si cher à la gauche des années 1990 n’est pas même appliqué.

Grâce à cette ignorance cultivée dans les UFR de philosophie, Heidegger fait partie de ces auteurs qu’il est bon d’étudier et concernant lesquels il est important de publier pour réussir une carrière à l’université !

C’est ainsi que parfois à leur insu, parfois de manière plus consciente, des étudiants passent des années à réaliser mémoire ou thèse sur tel ou tel écrit de l’auteur, parfois sans même rien comprendre à une volonté de Heidegger lui-même de brouiller les pistes dans les propos prétendument philosophiques de l’auteur lui-même. Mais qu’en est-il de ceux qui, depuis des années étudient, traduisent, connaissent par coeur des pages ou des ouvrages de Heidegger, de Être et temps, ou d’autres Parménide ou des Chemins qui ne mènent nulle part ? Sont-il, eux, conscients des propos cités dans l’article ci-dessus ? Voient-il la portée du problème qu’ils contribuent à effacer ? Ou bien sont-il bien conscients du travail d’obscurcissement de la pensée auxquels il participent ?

Voilà un tabou de l’université en france qu’il est interdit d’aborder, sous peine d’être rejeté de toute forme de lien social dans le monde académique de la philosophie ! Si vous approfondissez le sujet, si vous rejetez trop violemment Heidegger, on vous évite personnellement et physiquement ! Et que dire si vous écrivez à ce propos ? En tant qu’étudiant, vous risquez de ne pas avoir votre diplôme, et on ne vous donnera pas de poste. Et en tant qu’enseignant, vous serez, au mieux, mis au placard, et vous n’avancerez plus dans votre carrière !

Quand on sait à quel point ce personnage est étudié, cité, mis en avant et défendu dans ses conceptions métaphysiques, dans toutes les universités de france, voire du monde, et que son engagement est à ce point minimisé, l’article ci-dessus et les citations des propos sont d’une violence extrême à lire...

Mais une vérité qui ne dérange pas, qui ne fait pas mal est-elle une vérité ?

Oui, la vérité fait mal, mais si ça n’était pas le cas, ça serait autre chose que la vérité.

Merci pour ces rappels, ces découvertes, ces énormités. Et tant pis si ces énormités font si mal à entendre, à se rappeler, à découvrir.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.