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Le marxisme affirme-t-il être la fin de la philosophie ?

25 mars 2017, 06:17, par R.P.

Suivons les intéressantes remarques de Lucien Sève qui nous propose de « Penser Marx aujourd’hui » :

« Marx écrit dans les « Thèses sur Feuerbach » dans « L’Idéologie allemande » : « Les philosophes n’ont fait qu’interpréter diversement le monde, ce qui importe, c’est de le transformer ». Explicitons, en lisant « L’Idéologie allemande » : le philosophe, qui transforme toute chose transitoire en une catégorie pérenne, lui donne par là même un sens supposé transcender l’histoire, il s’en fait l’interprète supérieur. Ainsi Feuerbach voit-il partout « l’homme » dans ses nécessaires rapports réciproques passe-partout avec l’autre « homme » et entend prouver « qu’il en a toujours été ainsi » : « Il veut que soit établie la conscience de ce fait, il ne veut donc à l’instar des autres théoriciens que susciter la conscience juste d’un fait « existant », alors que pour le communiste réel ce qui importe est de renverser cet ordre existant. Nous reconnaissons du reste pleinement que Feuerbach, dans ses efforts pour engendrer la conscience de « ce » fait précisément, va aussi loin qu’il est possible à un théoricien de le faire sans cesser d’être théoricien et philosophe. » (Karl Marx, Idéologie allemande) Or toute la question est là : veut-on simplement, comme les jeunes-hégéliens, proposer aux hommes de « troquer leur conscience actuelle » illusoire contre une bien plus juste « conscience critique » de ce qui est et demeurera ? Voyons alors quel marché de dupes on nous offre : « Exiger ainsi la transformation de la conscience revient à interpréter différemment ce qui existe, c’est-à-dire l’accepter au moyen d’une interprétation différente. En dépit de leurs phrases trompeuses, qui soi-disant « bouleversent le monde », les idéologues de l’école jeune-hégélienne sont les plus grands conservateurs » (Idéologie allemande) (…) On est extrêmement surpris de trouver sous la plume de Louis Althusser dans « Pour Marx » (p. 19) : « … la fameuse « Thèse sur Feurbach », où un langage théoriquement équivoque oppose la transformation du monde à son explication ». Rappelons que le terme de Marx dans cet énoncé n’est pas explication (erklärt) mais interprétation (interpretiert), ce qui ne prête à aucune « équivoque » pour qui lit ce qui est écrit. (…) Des malentendus sont à prévenir ou à dissiper. Celui en premier, qui consiste à croire – ou à faire croire – que la onzième thèse sur Feuerbach opposerait la transformation du monde à sa compréhension, comme si le texte en était : « Les philosophes n’ont fait que chercher à comprendre le monde, ce qui importe, c’est de le transformer. » Lecture aberrante qui attribue en toute inconscience – ou malveillance – un pragmatisme fruste à l’auteur du Capital : pas besoin de comprendre pour agir… Qu’on ait pu lire une telle sottise sous la plume de journalistes n’est qu’affligeant ; qu’on la trouve à plusieurs reprises dans a bouche de Martin Heidegger est d’une tout autre portée. (« Les séminaires du Thor », Questions, Tome IV, Gallimard). »

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